SeDit D Un Objet Utile Et Commode Se Dit D’un Objet Utile Et Commode Est Utile Au Peaussieril Est Utile Au Peaussieril Sert Au Peaussierpoudre De Peaussier Une Commode S Emploi Comme Commode Partie De Commode Pose Sur La Commode Une Femme Pas Commode Facile, Commode Commode Facile Ce Qui Rend La Vie A La Maison Plus Agreable Plus Commode ï»żBonjour, Comme vous avez choisi notre site Web pour trouver la rĂ©ponse Ă  cette Ă©tape du jeu, vous ne serez pas déçu. En effet, nous avons prĂ©parĂ© les solutions de CodyCross Se dit d’un objet utile et commode. Ce jeu est dĂ©veloppĂ© par Fanatee Games, contient plein de niveaux. C’est la tant attendue version Française du jeu. On doit trouver des mots et les placer sur la grille des mots croisĂ©s, les mots sont Ă  trouver Ă  partir de leurs dĂ©finitions. Le jeu contient plusieurs niveaux difficiles qui nĂ©cessitent une bonne connaissance gĂ©nĂ©rale des thĂšmes politique, littĂ©rature, mathĂ©matiques, sciences, histoire et diverses autres catĂ©gories de culture gĂ©nĂ©rale. Nous avons trouvĂ© les rĂ©ponses Ă  ce niveau et les partageons avec vous afin que vous puissiez continuer votre progression dans le jeu sans difficultĂ©. Si vous cherchez des rĂ©ponses, alors vous ĂȘtes dans le bon sujet. Le jeu est divisĂ© en plusieurs mondes, groupes de puzzles et des grilles, la solution est proposĂ©e dans l’ordre d’apparition des puzzles. Vous pouvez Ă©galement consulter les niveaux restants en visitant le sujet suivant Solution Codycross PRATIQUE Nous pouvons maintenant procĂ©der avec les solutions du sujet suivant Solution Codycross Transports Groupe 115 Grille 5. Si vous avez une remarque alors n’hĂ©sitez pas Ă  laisser un commentaire. Si vous souhaiter retrouver le groupe de grilles que vous ĂȘtes entrain de rĂ©soudre alors vous pouvez cliquer sur le sujet mentionnĂ© plus haut pour retrouver la liste complĂšte des dĂ©finitions Ă  trouver. Merci Kassidi Amateur des jeux d'escape, d'Ă©nigmes et de quizz. J'ai créé ce site pour y mettre les solutions des jeux que j'ai essayĂ©s. This div height required for enabling the sticky sidebar Sedit d'un objet utile et commode Solution est: P R A T I Q U E « PrĂ©cĂ©dent Tout Grille 5 Solution Suivant » Sur CodyCross. CodyCross est un cĂ©lĂšbre jeu nouvellement publiĂ© dĂ©veloppĂ© par Fanatee. Il a beaucoup de mots croisĂ©s divisĂ©s en diffĂ©rents mondes et groupes. Chaque monde a plus de 20 groupes avec 5 grille chacun. Certains des mondes sont: planĂšte Terre, sous la
Je ne sais pas si c’est le fait de dĂ©mĂ©nager qui m’a rendue nostalgique ou matĂ©rialiste, mais j’ai Ă©tĂ© frappĂ©e ces derniers temps, touchĂ©e mĂȘme, par tous ces objets que j’ai vus dans la rue. Vous savez tous ces objets laissĂ©s Ă  l’abandon, qui n’ont pas leur place, habituellement, en dehors d’une maison ou d’un appartement. C’est un canapĂ© qui attend le service des encombrants de la ville de Paris, une commode Ă  laquelle il manque un tiroir ou pied, des WC dont il ne reste que la cuvette, des livres Ă©cornĂ©s et tachĂ©s
 que font-ils lĂ  dans la rue ? Qui les a laissĂ©s lĂ  ? Que leur est-il arrivĂ© ? VoilĂ  ce que je me suis demandĂ© quelle est la vie de tous ces objets qui nous entourent ? La part essentielle de nos viesLes faits sont lĂ  les objets sont une part essentielle de nos vies. J’en veux pour preuve l’attachement de ma fille Ă  sa tĂ©tine, mon amour infaillible pour ce pull mauve, la passion de certains pour les voitures, les livres ou je ne sais quoi
 Personne ne pourra dire le contraire, mĂȘme ceux qui s’en tiennent au minimum et critiquent notre sociĂ©tĂ© de consommation les objets sont lĂ , nĂ©cessaires, Ă©vidents, utiles, aimĂ©s ou dĂ©testĂ©s. On en a besoin, envie, on les achĂšte, on les use, on les jette. VoilĂ  Ă  quoi ressemble la vie d’un objet. Mais est-ce suffisant de dire ça ? C’est ce que je me suis demandĂ© en croisant, Ă  plusieurs reprises, cette chaussure abandonnĂ©e en bas de chez moi. Comment avait-elle atterri lĂ  ? Seule, sur le trottoir ? Elle n’avait pas l’air spĂ©cialement abĂźmĂ©, elle n’était d’ailleurs pas dans une poubelle, mais elle Ă©tait indĂ©niablement seule sur ce trottoir. Pas de pied droit pour l’accompagner, personne pour la porter ni la jeter. Je me suis demandĂ© Ă  qui elle avait appartenu, qu’avait fait cette personne avec cette chaussure Ă  son pied gauche avait-elle fait la fĂȘte, dansĂ©, passĂ© des entretiens d’embauche, couru aprĂšs un bus ou rencontrĂ© l’amour de sa vie ? Et surtout qu’avait-elle fait pour la perdre ici ou la jeter ? Mais, en y repensant, je me suis rendue compte que ce n’était pas la vie de son propriĂ©taire qui m’intĂ©ressait, mais elle, cette chaussure
 qui est-elle ? quelle a Ă©tĂ© sa vie, Ă  elle ? Au-delĂ  de l’usage et de l’amourQue deviennent les objets une fois que l’on ne s’en sert plus ? Quand ils sont perdus ? Ou quand on n’en veut plus ? Existent-ils plus longtemps que nous ? Peuvent-ils exister malgrĂ© nous ? A quel moment peut-on dire qu’un objet est mort ? Appliquer ces questions aux objets semble absurde, parler d’existence, de devenir et de mort le semble encore plus. Et pourtant, cette chaussure en bas de chez moi, sa prĂ©sence, en tĂ©moigne les objets sont plus qu’une part de nos vies, plus que des supports, des cadres, qu’on charge d’une dimension seulement utilitaire ou carrĂ©ment affective
 ils excĂšdent largement nos vies, Ă  nous, mais alors Ă  quoi peut bien ressembler la leur ? Mais surtout, et c’est la question Ă  quoi peut bien ressembler leur vie au-delĂ  de l’utilitĂ© ou de l’amour qu’on a pour eux ? LĂ  est le paradoxe les objets nous survivent, mais cette longĂ©vitĂ© suffit-elle Ă  les faire exister en dehors de leur usage ?Le problĂšme n’a pas Ă©chappĂ© aux philosophes Heidegger nous dit qu’un objet est plus qu’une chose, mais moins qu’une Ɠuvre d’art ; Simondon, lui, s’intĂ©resse au mode d’existence des objets techniques, seulement ; et Baudrillard en a fait un systĂšme sĂ©miologique, s’intĂ©ressant Ă  leur pure matĂ©rialitĂ© que dit le cuir d’un canapĂ© ou la transparence du verre. RĂ©sister / exister On pourrait aussi parler des Choses de Georges Perec, de l’ours en peluche Otto de Tomi Ungerer, de l’urinoir de Duchamp
 les exemples ne manquent pas pour tenter de percer l’épaisseur des objets. Quelque chose d’eux rĂ©siste au temps mais aussi Ă  l’interprĂ©tation silencieux, monotones, simples spectateurs, ils restent opaques, d’un bloc. VoilĂ , c’est peut-ĂȘtre ça leur vie leur rĂ©sistent, ils prouvent qu’ils existent. C’est ça qui est fascinant avec les objets. On les utilise mais ils nous opposent leur prĂ©sence. D’une certaine maniĂšre, ce sont eux qui nous dominent, qui marquent nos vies, en tĂ©moignent. On craint beaucoup la rĂ©ification, le fait d’ĂȘtre rĂ©duit Ă  l’état de chose ou d’objet, mais on pourrait aussi voir le bon cĂŽtĂ© des choses et donner aux objets une forme de vitalitĂ©. Sons diffusĂ©s Chanson de Philippe Katerine, Les objets Reportage BFM TV sur les objets trouvĂ©s, 2012
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Forums des ZĂ©ros Une question ? Pas de panique, on va vous aider ! Accueil > Forum > Programmation > Langage Python > Qu'est-ce qu'un objet composite? Liste des forums 1 octobre 2012 Ă  152057 Bonjour, j'aimerai comprendre en dĂ©tail la notion d'objet composĂ© d'objet, son utilitĂ© merci 1 octobre 2012 Ă  154159 t'as vu ça oĂč ? "il vaut mieux vivre en France qu'en Italie, la France a de plus jolies prisons" 1 octobre 2012 Ă  154550 bah dans le tutoriel et dans le livre les objets composites objet composĂ© d'objet comme les listes ,les dictionnaires,... Anonyme 1 octobre 2012 Ă  155006 Comme dans toutes les notions de POO, ça sert Ă  la modĂ©lisation. Ça rendra votre code plus lisible et maintenable. Si vous voulez plus de prĂ©cisions, indiquez une question prĂ©cise. 1 octobre 2012 Ă  155717 ça me perturbeun objet composĂ© d'un objet au niveau des mĂ©thodes de chaque objet qui a accĂšs Ă  quoi? Anonyme 1 octobre 2012 Ă  161048 Ce que j'ai compris je suis autodidacteVous avez 3 types de relation entre objet association agrĂ©gation dĂ©lĂ©gation Vous devez parler de l'agrĂ©gation, je Une voiture est composĂ©e deroues moteur ... Le but est de dire une voiture a un moteur, a des roues, ... L'objet est composĂ© de plusieurs attributs qui sont des objets. Je sais pas si j'ai Ă©tĂ© clair, mais voilĂ  ma façon de penser par rapport Ă  ce que j'ai lu. 1 octobre 2012 Ă  163417 c'est exactement ça !dans le livre il donne comme exemple des objets composites comme les dictionnaires les listes, des objets qui sont eux-meme composĂ©s d'objets donc avec des mĂ©thodes donc ça me perturbe au niveau des mĂ©thodes! Anonyme 1 octobre 2012 Ă  171123 les mĂ©thodes sont des actions liĂ©es Ă  l'objet, rien ne change... quel est le problĂšme? avez vous un exemple de code que je puisse vous expliquer? Anonyme 1 octobre 2012 Ă  175502 Bonjour, VoilĂ  un petit exemple construit "sur les genoux" pour voir comment on accĂšde Ă  un objet inclus dans un autreclass Objet1object def afficheself print "je suis dans l'objet1 inclu dans l'objet2" class Objet2object def __init__self = Objet1 def afficheself print "je suis dans l'objet2" obj2 = Objet2 affiche je suis dans l'objet2 affiche je suis dans l'objet1 inclu dans l'objet2 1 octobre 2012 Ă  223514 par exemple une liste de "mots" objet mots=[jambon,fromage,confiture,chocolat] c'est bien un objet composite source livre,un objet composĂ© d'objets ici des chaines on me dit tout est objet en python, j'ai donc la liste avec ses attributs et ses mĂ©thodes disponibles et des chaines de caractĂšre avec ses atributs et ses mĂ©thodes disponibles j'avoue je suis perdu 2 octobre 2012 Ă  05444 c'est pas faux ... "il vaut mieux vivre en France qu'en Italie, la France a de plus jolies prisons" Anonyme 2 octobre 2012 Ă  64251 Bonjour, Mais non, c'est facile! Exemple mots=["jambon","fromage","confiture","chocolat"] mots est une liste composĂ©e de lenmots=4 Ă©lĂ©ments qui sont des chaines de caractĂšres. mots[2] est le 3e Ă©lĂ©ment de la liste puisque les indices commencent Ă  zĂ©ro, c'est Ă  dire "confiture" c'est une chaine. On peut donc appliquer Ă  mots[2] les mĂ©thodes des chaines par exemple, mots[2].upper met confiture en majuscule ===> "CONFITURE". Une liste peut comporter n'importe quoi, y compris des listes qui, elles-mĂȘmes, etc... on arrive donc Ă  reprĂ©senter des arbres mots=["jambon","fromage","confiture",["tartine", ["pain", "beurre"]], "chocolat"]. On attendra "pain" avec mots[3][1][0] qui, Ă©tant une chaine de caractĂšres, pourra bĂ©nĂ©ficier des mĂ©thodes associĂ©es mots[3][1][0].upper ===> "PAIN". 2 octobre 2012 Ă  110238 c'est bien ce qu'il a dit ...Citationc'est bien un objet composite source livre,un objet composĂ© d'objets ici des chaines "il vaut mieux vivre en France qu'en Italie, la France a de plus jolies prisons" 2 octobre 2012 Ă  123945 ok je te donne un exemple d'objet composite du livre il s'agit d'une classe rectangle avec ses atributs largeur hauteur coin et coin serait un objet point X,Y ce schĂ©ma montre clairement un exemple d'objet composite maintenant comment ça se passe avec les objets tels que la liste donnĂ©e comme exemple je te jure,j'arrive pas Ă  comprendre 2 octobre 2012 Ă  132323 Qu'est-ce que tu veux dire par "comment ça se passe", prĂ©cisĂ©ment ? J'ai l'impression que cette notion t'a Ă©tĂ© introduite trop tĂŽt et qu'elle est en train de te mettre dans le flou plus qu'autre chose. Une liste, c'est un objet dont le rĂŽle est de "contenir" d'autres objets. Ses mĂ©thodes Ă  la liste, permettent d'accĂ©der Ă  ses Ă©lĂ©ments, de la parcourir, de lui ajouter ou de lui retirer des Ă©lĂ©ments, etc. Maintenant, si tu veux utiliser l'un de ses Ă©lĂ©ments, il te suffit d'y accĂ©der en utilisant les mĂ©thodes de la liste ou la syntaxe appropriĂ©e, ce qui revient complĂštement au mĂȘme, afin de rĂ©cupĂ©rer l'Ă©lĂ©ment qui t'intĂ©resse. À partir de lĂ , il n'est pas spĂ©cialement utile de faire la distinction entre aggrĂ©gation, association et composition en ce qui te concerne d'ailleurs l'exemple donnĂ© par fred est aussi un peu incomplet Ă  mon goĂ»t. En python, ça se traduit simplement par le fait qu'un objet composite, c'est un objet qui encapsule "possĂšde" d'autres Ă©lĂ©ments. Par exemple Une "personne", Ă  la sĂ©cu, est composĂ©e d'une adresse, d'un nom, et d'un numĂ©ro de sĂ©curitĂ© sociale. Une voiture est composĂ©e d'un moteur, de roues, d'une carosserie. Ce qui caractĂ©rise un objet composite, c'est que les Ă©lĂ©ments qui le composent n'ont plus de raison d'exister lorsque tu dĂ©truis cet objet, et inversement une voiture sans roue ne sert Ă  rien, au mĂȘme titre qu'une roue sans voiture. La durĂ©e de vie d'un objet composite est intimement liĂ©e Ă  celle des Ă©lĂ©ments qui le composent. À l'inverse, dans une relation d'agrĂ©gation ou d'association, la durĂ©e de vie de l'agrĂ©gat est complĂštement indĂ©pendante de celle des objets agrĂ©gĂ©s. Mais encore une fois, tout ceci, ce n'est que de la thĂ©orie, et tu ne devrais pas te prendre la tĂȘte lĂ -dessus si ça ne te semble pas clair. Il arrivera juste un moment oĂč ça te semblera couler de source et tu t'en foutras complĂštement de savoir le nom que ça porte, Ă  force de concevoir des programmes orientĂ©s objet. Qu'est-ce qu'un objet composite? × AprĂšs avoir cliquĂ© sur "RĂ©pondre" vous serez invitĂ© Ă  vous connecter pour que votre message soit publiĂ©. × Attention, ce sujet est trĂšs ancien. Le dĂ©terrer n'est pas forcĂ©ment appropriĂ©. Nous te conseillons de crĂ©er un nouveau sujet pour poser ta question.

Compterendu de la recherche pour SE DIT D UN OBJET UTILE ET COMMODE. Lors de la rĂ©solution d'une grille de mots-flĂ©chĂ©s, la dĂ©finition SE DIT D UN OBJET UTILE ET COMMODE a Ă©tĂ© rencontrĂ©e. Qu'elles peuvent ĂȘtre les solutions possibles ? Un total de 21 rĂ©sultats a Ă©tĂ© affichĂ©. Les rĂ©ponses sont rĂ©parties de la façon suivante : 1 solutions exactes; 0 synonymes;
Accueil ‱Ajouter une dĂ©finition ‱Dictionnaire ‱CODYCROSS ‱Contact ‱Anagramme Se dit d'un objet utile et commode — Solutions pour Mots flĂ©chĂ©s et mots croisĂ©s Recherche - Solution Recherche - DĂ©finition © 2018-2019 Politique des cookies. I1est conseillĂ© aux collecteurs de se montrer extrĂȘmement patients et d'Ă©couter tout ce que le propriĂ©taire a Ă  dire sur l'objet. I1 se peut que les prĂ©cisions qu'il fournit soient sans utilitĂ© pour le musĂ©e, mais il est nĂ©cessaire et convenable de prendre connaissance de ce qui l'intĂ©resse, lui personnellement, avant que le collecteur pose ses propres questions. I1 arrive souvent WmÈÊi 'SĂȘfSi^SÎSĂȘÿë;. }~-r-0ĂŻĂ©; ;r$ls?ÂŁ 4 0- t ^' t kH frappĂ© des immenses avantages qui en rĂ©sulteront. » L’administration forestiĂšre a donnĂ© une grande impulsion pour les plantations, les repeuplemens, et les amĂ©liorations de toute espĂšce. TRAITÉ DE LA CULTURE DES FORÊTS. PREMIÈRE PARTIE. ESSAI DESCRIPTIF DES FORÊTS. MS Nous jetterons d’abord un coup d’Ɠil sur ces plages dĂ©sertes oĂč la nature se montre aujourd’hui telle qu’elle fut jadis dans le climat meme que nous habitons, sur ces lorĂ©ts immenses que n’ont pu entamer les sauvages qui les parcourent ; nous tournerons ensuite nos regards vers les lieux oĂč les hommes ont imprimĂ© les traces de leur puissance, vers ces rĂ©gions oĂč l’agriculture a Ă©tĂ© introduite par des peuples dĂ©jĂ  civilisĂ©s, dont le premier soin a Ă©tĂ© de dĂ©truire les forĂȘts natives qui devaient faire place Ă  des plantes propres Ă  la nourriture des hommes, et oĂč l’on fait chaque annĂ©e pĂ©rir plus d’arbres qu’une province entiĂšre d’Europe n’en possĂšde. Nous considĂ©rerons principalement les forĂȘts dans les contrĂ©es oĂč l’on prend soin de les conserver et de les perpĂ©tuer; mais ces forĂȘts ne forment pas la centiĂšme partie de celles qui sont abandonnĂ©es ailleurs Ă  qui peut les dĂ©grader; et encore, dans cette faible partie,une trĂšs- petite fraction seulement est bien administrĂ©e. Il s’en tif 14 $»‹ faudrait de beaucoup que, dans l’état de nature, la terre fĂ»t entiĂšrement couverte de bois. Les dĂ©serts de l’Afrique occupent, suivant M. de Humboldt, un espace presque trois fois Ă©gal Ă  celui de la mer MĂ©diterrannĂ©e ; il a calculĂ© que la surface des sables dĂ©serts, depuis la cĂŽte occidentale d’Afrique jusqu’à l’Inde, occupe prĂšs de trois cent mille lieues carrĂ©es la France n’a guĂšre que quarante mille lieues carrĂ©es de superficie . En Asie, depuis la grande muraille de la Chine, jusqu’au lac d’Oral, s’étendent, sur une longueur de plus de deux mille lieues, les steppes les plus vastes du monde ; elles sont couvertes de plantes la plupart salines et de bruyĂšres. Les steppes d’AmĂ©rique occupent un espace immense ; elles portent des graminĂ©es d’une vĂ©gĂ©tation magnifique, mais elles sont privĂ©es d’arbres et inhabitĂ©es. M. de Humboldt pense que ces steppes Ă©taient des fonds de mer. AmĂ©rique mĂ©ridionale. Dans les immenses contrĂ©es de l’AmĂ©rique mĂ©ridionale, oĂč la chaleur du soleil, l’humiditĂ© et la fertilitĂ© du sol, concourent Ă  dĂ©velopper tous les ressorts de la vĂ©gĂ©tation, les bois sont tellement embarrassĂ©s par les plantes qui croissent sous les arbres, qu’il est presque impossible d’y pĂ©nĂ©trer, et que la surface du terrain y est cachĂ©e sous des couches Ă©paisses d’arbrisseaux, de ronces et d’herbes, de mousses, de fougĂšres, de liserons ; les arbres sont souvent Ă©touffĂ©s par la circonvolution des plantes grimpantes. Les plaines sont inondĂ©es par des dĂ©bordemens, et converties en marais car la main de l’industrie n’a pas encore forcĂ© les riviĂšres Ă  couler dans le canal qui leur est le plus convenable, et n’a pas encore ouvert des Ă©coulemens aux eaux stagnantes; l’air qu’on respire dans les forĂȘts est infectĂ© des vapeurs qui s’élĂšvent du sein des marais fi! 48 §&‱ rejnplis de tous les ĂȘtres venimeux que peut faire Ă©clore un soleil brĂ»lant. Quelques peuplades prĂ©fĂšrent un sĂ©jour aĂ©rien Ă  celui d’un sol meurtrier, elles Habitent les sommets des arbres. Entre Mondosa et Buenos-Ayres, on fait plus de cent lieues sans trouver une habitation, et plus de deux cents avant que de rencontrer une goutte d’eau. Le climat y est d’une chaleur brĂ»lante, et il n’y. a pas un arbre oĂč l’on puisse se mettre Ă  l’abri des rayons du soleil. A Buenos-Ayres, le bois est si rare que pour le remplacer on emploie le cuir Ă  une foule d’usages fenĂȘtres, lits, petits canots. Des substances animales servent de combustibles. On chauffe les fours de brique avec des cadavres de moutons sĂ©chĂ©s au soleil. Les nombreuses riviĂšres qui de la Guiane se prĂ©cipitent dans l’OcĂ©an dĂ©posent sans cesse sur leurs bords et sur la cote entiĂšre une multitude prodigieuse de graines qui germent dans la vase et produisent des palĂ©tuviers dans l’espace de dix ans. Ces grands vĂ©gĂ©taux, que de profondes racines attachent Ă  leur base, occupent tout l’espace oĂč le reflux se fait sentir. Ils y forment des forĂȘts couvertes durant le flot de quatre Ă  cinq pieds d’eau, et ensuite d’une vase molle et inaccessible. Dans les endroits oĂč les courans jettent et accumulent des sables, le palĂ©tuvier pĂ©rit trĂšs-rapidement, et les forĂȘts, emportĂ©es par les ondes, disparaissent. La cĂŽte immense qui s’étend au sud de Panama est une des plus misĂ©rables rĂ©gions du globe; des marais en occupent une grande partie, le reste est inondĂ© pendant plus de six mois par des pluies continuelles. Du sein de ces eaux croupissantes s’élĂšvent des forĂȘts tellement embarrassĂ©es de lianes que l’homme le plus intrĂ©pide ne saurait y pĂ©nĂ©trer. Un Ă©pais brouillard en que souvent ils enlĂšvent toute l’écorce d’une seule piĂšce. Les maisons des AmĂ©ricains sont gĂ©nĂ©ralement construites de souches et de tiges d’arbres assez mal assemblĂ©es. Louisiane. La Louisiane, vendue par la France aux Etats-Unis en i8o3, est couverte de forets Ă©paisses coupĂ©es de riviĂšres innombrables, d’eaux stagnantes, de vastes savanes remplies de roseaux. La variĂ©tĂ©, la beautĂ© et la qualitĂ© des arbres auraient pu rendre la possession de cette colonie trĂšs-utile Ă  la France si nous avions pu tirer parti de ses richesses ; mais les AmĂ©ricains y ont fait exĂ©cuter des dĂ©frichemens qui prĂ©sentent dĂ©jĂ  un tel Ă©tat de prospĂ©ritĂ©, que bientĂŽt cette contrĂ©e dĂ©serte sera traversĂ©e de routes et de canaux qui sont Ă  la fois l’effet et la cause d’une civilisation perfectionnĂ©e. Les Etats-Unis contiennent un milliard soixante-deux millions quatre cent soixante-trois mille acres de terrain, y compris les acquisitions faites sur la France et 1 Espagne. Les forĂȘts qui y subsistent encore occupent un espace quatre fois plus Ă©tendu que la France entiĂšre, Canada. Les forĂȘts chez les peuples chasseurs sont considĂ©rĂ©es, suivant la remarque de Robertson, comme la propriĂ©tĂ© d’une tribu qui a le droit d’en exclure toutes les tribus rivales; mais il n’y a point d’individu qui puisse s’arroger quelque portion particuliĂšre de propriĂ©tĂ© exclusivement Ă  tous les autres membres de la sociĂ©tĂ©. Les sauvages, Ă  dĂ©faut de gibier, vivent de gland; et lorsque le gland manque, ils se nourrissent de l’écorce du tremble et du bouleau, dont ils rejettent l’épiderme. Le froid violent et prolongĂ© qu’on ressert! daits le 2o $ 0 * r ĂŻ t i s. ĂŻ! Canada doit ĂȘtre attribuĂ© aux bois, aux sources, aux montagnes, aux riviĂšres sans nombre, aux lacs et aux marais qui coupent ce pays ; Ă  la direction des vents, qui viennent du nord au midi par des mers toujours glacĂ©es, et qui entretiennent une atmosphĂšre rarement chargĂ©e de vapeurs. Dans le bas Canada, les maisons sont presque toutes construites avec des troncs d’arbres Ă©quarris et posĂ©s les uns sur les autres 5 mais elles sont bĂąties avec plus de soin et plus solidement que dans les Etats-Unis. Au lieu d’ëtre bruts et raboteux comme chez les AmĂ©ricains, ces arbres sont parfaitement unis et proprement assemblĂ©s, et au dedans ils sont communĂ©ment doublĂ©s de planches de sapin. L’honneur de dĂ©couvrir et de dĂ©fricher un terrain nouveau touche peu le Canadien. Le citoyen des Etats- Unis a-t-il une bonne maison, il cherche Ă  la vendre pour aller dĂ©fricher de nouvelles terres dans des contrĂ©es Ă©loignĂ©es; il va partout explorant des terrains Ă  bon marchĂ© et susceptibles de meilleure culture. Un voyageur remarque que l’Angleterre ne prend pas de bois de marine dans le Canada, parce qu’elle prĂ©fĂšre avec raison les bois plus Ă©claircis et par consĂ©quent plus denses et plus durables de l’Europe. La culture des forets marĂ©cageuses du Canada ne peut manquer Ă  la longue d’élever la froide tempĂ©rature de ce climat, qui est situĂ© Ă  peu prĂšs Ă  la mĂȘme latitude que les rĂ©gions tempĂ©rĂ©es de l’Europe. ‱i Terre-Neuve. L’ile de Terre-Neuve est remplie de bois, de rochers et de montagnes escarpĂ©es; la neige qui ,f couvre les lacs, les marais et les riviĂšres; les vents, et les face au couchant est le premier qui fleurit, et les fruits se dĂ©veloppent graduellement de maniĂšre que les uns sont Ă  peine verts quand d’autres sont en pleine maturitĂ©. Le cotĂ© qui fait face au midi suit les mĂȘmes progrĂšs. La fĂ©conditĂ© traverse directement l’arbre, et passe soudain au septentrion ; le cotĂ© de l’orient est enfin le dernier qui fleurisse, et ses fruits durent jusqu’à la saison des pluies. A la fin d’avril, de nouvelles feuilles font tomber les anciennes, en sorte que l’arbre est toujours vert. Il n’est point d’arbre ni de buisson qui ne produise des fleurs magnifiques ; le raisin sauvage est excellent ; enfin la vĂ©gĂ©tation est partout d’une beautĂ© dont on n’a nulle idĂ©e en Europe. Le pays-bas de l’Abyssinie est presque dĂ©sert ; il est environnĂ© de montagnes d’oĂč descendent de grandes riviĂšres qui se prĂ©cipitent dans la plaine avec une violence prodigieuse pendant les pluies des tropiques; elles entraĂźnent les terres et les rochers dans de vastes bassins oĂč elles demeurent stagnantes et qui sont plantĂ©s de grands arbres ; c’est le repaire des Ă©lĂ©plians et des rhinocĂ©ros, qui ne vivent pas d’herbe, mais de bois ; les nĂšgres Shangallas habitent cette horrible contrĂ©e, oĂč ils n’ont d’autre abri que les arbres sur lesquels ils se logent. A peine cessent les pluies du tropique que la terre se dessĂšche; bientĂŽt l’herbe se flĂ©trit; bientĂŽt les Shangallas allument un terrible incendie; le feu parcourt avec une violence incroyable la largeur de l’Afrique, passant sous les arbres avec tant de vĂ©locitĂ© qu’il brĂ»le l’herbe qui croit dessous sans les faire pĂ©rir ; les ravins larges et profonds quunt creusĂ©s les torrens pendant le temps des pluies sont les derniers endroits oĂč le feu prenne; mais a peine le lit est-il Ă  sec que les bergers, du haut des montagnes, allument l’herbe de ces ravins; et bientĂŽt 34 g* court dans toute l'Ă©tendue de leur lit un torrent de flam mes qui ne s’éteint qu’au bord de la mer, aprĂšs avoir parcouru un millier de lieues. Cet antique usage d’incendier les forĂȘts et les savanes, pour renouveler l’herbe, subsiste encore dans toutes les parties du globe 3 on le retrouve mĂȘme dans les PyrĂ©nĂ©es. Madagascar. La plus grande des Ăźles du monde,Madagascar, est couverte de grands bois toujours verts, et dont les arbres sont si durs que la cognĂ©e s’émousse au premier coup; ils sont propres Ă  la construction et Ă  tous les arts. Le palmier et tous les arbres des tropiques croissent en abondance dans ce vaste pays Ă  peine connu. Les maisons des insulaires sont bĂąties en bois et couvertes de feuillage ; ils Ă©vitent l’influence des lieux marĂ©cageux pour bĂątir leurs villages; ils se nourrissent de fruits et d’un peu de riz qu’ils cultivent en petite quantitĂ© et fort mal. Egypte. On trouve en Egypte des bosquets de palmiers trĂšs-Ă©pais, qui ne perdent jamais leur verdure, et au milieu desquels sont bĂątis des villages ; cependant le bois est trĂšs-rare dans cette contrĂ©e si cĂ©lĂšbre; les liabi- tans de la haute Egypte sont obligĂ©s de brĂ»ler du roseau de blĂ© d’Inde. On fait aussi des mottes mĂȘlĂ©es de paille et de fiente de chameau pour le mĂȘme usage le petit peuple habite ordinairement des chambres couvertes de briques sĂ©chĂ©es au soleil. La canne de millet sert Ă  chauffer le four. ‱ Les villages bĂątis au milieu des plantations ont l’aspect le plus pittoresque. La nature a créé des bocages de palmiers sous lesquels se marient l’oranger, le sycomore, le bananier, l’acacia et le grenadier. Les jardins de Rosette sont enchanteurs. Us ne sont point divisĂ©s par des murailles, mais par des haies odorifĂ©rantes qui renferment des bosquets encore plus odo- rans. Il ne faut pas y chercher de ces allĂ©es alignĂ©es ni de ces compartimens dessinĂ©s avec mĂ©thode. Tout y semble jetĂ© au hasard. Les plantes potagĂšres croissent sous des ombrages embaumĂ©s. Le dattier, en Ă©levant sa cime au-dessus des autres arbres, Ă©carte jusqu’aux plus lĂ©gĂšres apparences d’uniformitĂ© 5 aucun arbre, aucune plante n’a de place marquĂ©e; le soleil peut Ă  peine introduire ses rayons Ă  travers ces vergers touffus ; de petits ruisseaux y amĂšnent la fraĂźcheur ; des sentiers tortueux conduisent dans ces lieux enchanteurs;la ville est cachĂ©e par des forĂȘts de dattiers, de bananiers et de sycomores. Mais ce tableau est purement local. Non loin de lĂ  il y a des plaines sablonneuses et dĂ©couvertes, des montagnes et des dĂ©serts» Autour du Caire, le pays est si bien cultivĂ© qu’il forme une plaine continue parsemĂ©e de villages et de bois d’orangers. La plupart des arbres de la vallĂ©e d’Egypte ont beaucoup de peine Ă  s’accoutumer Ă  la quantitĂ© d’eau qui tous les ans inonde la terre cinq mois de suite. L’on ne peut jamais planter auhasardles vĂ©gĂ©taux exotiques, car ils ne peuvent croĂźtre que clans des terrains Ă©levĂ©s au-dessus du sol ordinaire, dansdes jardins oĂč onles arrose parle secours de l’art, ou bien sur le bord des canaux, pourvu qu’ils se trouvent au-dessus du niveau oĂč le fleuve a coutume de monter. Les anciens habitans de l’Egypte ont ainsi naturalisĂ© quelques-uns des vĂ©gĂ©taux indigĂšnes de ces plaines brĂ»lantes qui se prolongent entre la mer Rouge et les montagnes de l’Abyssinie. Les Egyptiens plantent et cultivent des palmiers pour en recueillir les fruits; le bois entre 56 dans la construction de l’intĂ©rieur des maisons. Tout le monde sait qu’on n’employait point de bois dans les grands Ă©difices antiques dont les restes sont si imposans. L’atlĂ©, suivant Sonnini, est un arbre qui devient presque aussi gros que le chĂȘne 3 c’est le seul bois un peu commun que l’on ait en Egypte, soit pour brĂ»ler, soit pour travailler; ces arbres environnent les villages et les cabanes des laboureurs. On brĂ»le Ă  Rosette et au Caire du charbon qui vient de Syrie; c’est un article d’importation particulier Ă  ces deux villes; des caravanes apportent ce charbon chargĂ© sur des chameaux. Les cotes de la mer Rouge n’offrent point de forĂȘts. M. Denon parle d’une fontaine qui avait fait croĂźtre sept Ă  huit palmiers qui forment le seul bocage qu’il y ait Ă  cinquante lieues Ă  la ronde sur les confins de la haute Egypte. Le commerce de SyĂšne se rĂ©duit au sĂ©nĂ© et aux dattes ; ces derniĂšres sont si abondantes qu’elles font la nourriture principale des liabitans, et qu’il en descend tous les jours des bateaux chargĂ©s pour la basse Egypte. Si ces belles contrĂ©es renaissent Ă  la civilisation, on saura y planter des arbres forestiers qui produiront tout le bois nĂ©cessaire aux liabitans. Les dĂ©serts de la Libye ont des restes de forĂȘts enfoncĂ©s dans les sables. On aperçoit, dit FrĂ©dĂ©ric Hor- mann, des troncs d’arbres de douze pieds de circonfĂ©rence et plus, dont l’intĂ©rieur est tout-Ă -fait noirci, et qui couvrent des espaces considĂ©rables de terrain. Le sable les a couverts et dĂ©couverts tour-Ă -tour. M. Denon a vu aussi des bois pĂ©trifiĂ©s dans le dĂ©sert lĂ  oĂč il n y a plus de vĂ©gĂ©tation. Asie Mineure. La cote d’Anatolie, peu habitĂ©e et en- !$§ 57 HI» core moins cultivĂ©e, voit chaque annĂ©e sa population dĂ©pĂ©rir de plus en plus 3 ses villes prĂ©sentent partout ; des maisons abandonnĂ©es. Les bois y sont trĂšs-Ă©tendus, mais le transport en est difficile ; on en exporte pour le 1 chauffage de Constantinople, et on en construit quel- ques bĂ dmens marchands. La plupart des villes de l’Asie mineure n’ont conservĂ© de leur ancienne splendeur que les murailles de leur en- i ceinte, des vergers et des bosquets qui leur donnent de ’ loin l’air d’une foret. i Dans les environs de NicomĂ©die ,il y a de grandes forĂȘts f conservĂ©es par des gardes, et dont les arbres sont em- ; ployĂ©s dans des forges et des scieries. On est surpris de trouver quelque chose des arts et de la police d’Europe dans des rĂ©gions ravagĂ©es depuis dix siĂšcles par des barbares. Les forĂȘts des montagnes de Nisibe, qui fournirent Ă  Trajan des bois de construction pour les navires par lesquels il fit descendre son armĂ©e sur le Tigre et l’Euphrate, ; ne sont aujourd’hui que des broussailles oĂč l’on trouve ; çà et lĂ  quelques petits chĂȘnes, de l’anagyris ou bois ; puant, et du laurier rose. On ne connaĂźt point en Anatolie de culture plus utile I et plus riche que celle des mĂ»riers; ils viennent de bou- 1 ture; on taille la cime de l’arbre afin de lui faire jeter . des rameaux et des feuilles tout autour du tronc, Ăź On remarque sur le mont Olympe les mĂȘmes grada- [i tions de vĂ©gĂ©tation que sur les montagnes d’Europe; les J. pentes infĂ©rieures sont couvertes de chĂątaigniers, de ; noyers, do hĂȘtres, de charmes; au-dessus rĂ©gnent les i forets de sapin» ; plus haut dominent des buissons, des Si geniĂšvres ; et des neiges perpĂ©tuelles couronnent les i sommitĂ©s. 5 58 La plupart des arbres pourrissent sur pied, quoique ces montagnes soient habitĂ©es, et que les maisons des Turcs soient construites en bois. On en fait un peu de charbon pour la consommation de la ville de Bursa. Les grands bois de mĂ»riers et de noyers qui couvrent les plaines des environs de cette ville donnent Ă  l’air une qualitĂ© nuisible. Chevalier, dans son voyage de la Troade, cite une des villes cĂ©lĂšbres de l’antiquitĂ©, dont l’enceinte, encore flanquĂ©e de tours, ne renferme qu’une forĂȘt de valonniers c’est le quercus Ɠgilops de LinnĂ©e . Les bords du SimoĂŻs dans les montagnes de l’Ida sont peuplĂ©s de saules, de peupliers, d’amandiers et de platanes ; les coteaux supĂ©rieurs sont couverts de forĂȘts de pins. Le figuier sauvage est un arbuste trĂšs-commun dans la Troade. Le bois est fort cher Ă  Smyrne, quoique le figuier, l’olivier, le grenadier, le peuplier et le cyprĂšs se trouvent en assez grande abondance dans les environs ; les orangers y sont si communs que l’on daigne Ă  peine en cueillir les fruits. Dans les environs de Bassora, les bords de l’Euphrate sont couverts de dattiers; les pĂȘches, les pommes, les poires, y sont en profusion. On n’emploie point de bois pour les charpentes; les maisons sont voĂ»tĂ©es et construites en briques. Il y a en Chypre de grandes forĂȘts de chĂȘnes, et des pins dont on tire du goudron. Les oliviers sont rabougris par le dĂ©faut de culture. Pline assure que la charpente du temple de Diane Ă  ÉphĂšse Ă©tait construite de vigne de Chypre. Syrie. Tous les arbres d’Europe croissent en Syrie ; le laurier, le buis, le myrte, y sont surtout tres-com- , Ăż 59 muns; les plus belles vallĂ©es de Syrie, arrosĂ©es par les riviĂšres qui tombent du mont Liban, sont plantĂ©es de cotonniers et de mĂ»riers; et cette double production fait la richesse du pays. Le nombre des arbres fruitiers est prodigieux dans les vergers des villes. Le Liban est garni de pins et de cĂšdres ; le cyprĂšs y croĂźt presque jusque sur le sommet au milieu des neiges ; mais ces dons de la nature servent peu aux liabitans faute de moyens de transport. On brĂ»le Ă  Damas de la rĂ©glisse ; cette plante croĂźt dans les plaines de PhĂ©nicie et de Syrie. Les pauvres ne brĂ»lent que du fumier. Dans la JudĂ©e, il y a quelques vallĂ©es remplies d’oliviers ; dans les environs d’Acre et de Nazareth, on voit f de grands bois de chĂȘnes d’OriententremĂȘlĂ©s de quelques ! hĂȘtres. La foret enchantĂ©e du Tasse est connue aujourd’hui sous le nom de foret de Saron ; on y voit partout 1 image du dĂ©sordre; des branches d’arbres qui jonchent 5 le sol, des chĂȘnes renversĂ©s, des rochers Ă©boulĂ©s tel est le spectacle qu’offre cette forĂȘt, qui a sept lieues de longueur sur deux Ă  trois de largeur; les habitans du voisinage y coupent le bois dont ils ont besoin; mais on n’en retire aucun autre produit, vu la difficultĂ© de transporter des tiges d’arbres dans un pays oĂč les voitures ne sont pas en usage, et oĂč tout se porte Ă  dos de chameau. Du reste, on fait une si petite consommation de bois a brĂ»ler dans les climats chauds, que cette forĂȘt n’a pas une grande utilitĂ© sous ce rapport. Le nord de la Syrie avait autrefois des bois cĂ©lĂšbres. DaphnĂ© Ă©tait distant de quarante stades d’Antioche; Stra- bon fait mention de ses temples d’Apollon et de Diane, qui Ă©taient entourĂ©s d’une forĂȘt sacrĂ©e de quatre-vingts stades de circuit trois lieues . SĂ©leucus fit planter le bois de DaphnĂ©, et y fit pratiquer de belles avenues de 40 » cyprĂšs. On ne voit plus de lauriers dans les lieux oĂč l’on supposait qu’était DaplmĂ©. Il a pu fort bien se faire, dit Pockoke, que les premiers chrĂ©tiens aient dĂ©truit ces arbres pour lesquels les idolĂątres avaient tant de vĂ©nĂ©ration. Volney, dans son voyage en Syrie, cite une plantation de sapins, ouvrage d’un Ă©mir, et qui subsiste encore sur les montagnes Ă  une lieue de Bairout. Des religieux qui habitent un couvent voisin assurent que, depuis que les sommets se sont couverts de sapins, les eaux des sources sont devenues plus abondantes et plus saines. Arabie. Les Arabes occupent une des contrĂ©es les plus arides du globe ; dans l’Arabie pĂ©trĂ©e, on ne dĂ©couvre que des plaines stĂ©riles et des montagnes escarpĂ©es que la verdure ne couvre jamais. Le froid et la chaleur y sont excessifs, parce qu’ils ne sont tempĂ©rĂ©s ni par des eaux, ni par des forets. Pour se garantir du froid, les Arabes errans ramassent des branches sĂšches et des racines de buissons, et font constamment du feu jour et nuit 5 les riches s’enveloppent de longues robes dont ils augmentent le nombre suivant l’intensitĂ© du froid 5 ils en mettent quelquefois jusqu’à douze l’une sur l’autre. La chaleur est Ă©galement insupportable. Rien n’arrĂȘte l’action du soleil, qui brĂ»le tous les vĂ©gĂ©taux, et rĂ©duit Ă  la longue les terres en sable. La sĂ©cheresse est si grande dans ces plaines qu’il n’y pleut pas pendant des annĂ©es entiĂšres. Mais on trouve des oasis dans les dĂ©serts. Sur les confins de l’Arabie et de la Syrie, il y a un bois d’orangers de quatre Ă  cinq milles d’étendue, dans lequel on a bĂąti des villages j de loin en loin on dĂ©couvre aussi des bosquets de palmiers qui produisent des dattes dont se nourrissent les Arabes. H 4i B*. On voit dans ces vastes contrĂ©es, d’un cĂŽtĂ© des dĂ©serts affreux, de l’autre des vallĂ©es fertiles et dĂ©licieuses oĂč la verdure est Ă  peu prĂšs continuelle; l’intervalle entre la chute et la renaissance des feuilles est si court qu’on ne s’aperçoit presque pas de ce changement. Les cabanes des Arabes sont, pour la plupart, d’une contexture lĂ©gĂšre et peu solide. Toutes les maisons de la cĂŽte d’Arabie, du cĂŽtĂ© de l’Abyssinie, sont couvertes de joncs. Dans les parties des montagnes qui ne sont pas entiĂšrement pelĂ©es, les forĂȘts contiennent des arbres diffĂ©rons de ceux d’Europe; cependant les Arabes cultivent plusieurs de nos arbres fruitiers ; ils ont des grenadiers, des amandiers, des abricotiers, des poiriers et des pommiers. Le tamarin, par son ombre, garantit les maisons. Les Arabes possĂšdent les arbres d’oĂč dĂ©coulent l’encens, le baume et d’autres aromates prĂ©cieux. Perse. La Perse est en gĂ©nĂ©ral privĂ©e d’eau; on n’y trouve pas une seule riviĂšre navigable, les ruisseaux mĂȘme sont peu nombreux, il n’y pleut jamais depuis la fin de mai jusqu’à la fin de novembre aussi n’y en a-t-il qu’une faible partie qui soit cultivĂ©e ; le reste est nu, et ne produit que des arbustes, des Ă©pices et des plantes cotonneuses; on n’y voit d’autres arbres que ceux qui sont plantĂ©s et arrosĂ©s de main d’homme. Cependant, dans quelques parties oĂč il y a de l’eau, le terroir est fertile, agrĂ©able et bien peuplĂ©. La population de la Perse n’est pas le vingtiĂšme de ce qu’elle pourrait ĂȘtre si ce vaste empire Ă©tait arrosĂ© dans toute son Ă©tendue. Les maisons d’Ispahan sont bĂąties de terre et de tor~ 8 42 jg» cliis ; on n’y fait point de charpentes ni de constructions en bois. La plupart des habitations ont un jardin rempli de grands arbres, ce qui donne Ă  la ville l’aspect d’une forĂȘt. Entre Ispahan et Chiras, on rencontre partout des vergers dĂ©licieux, des bois d’orangers et de dattiers. On profite du moindre filet d’eau pour les arroser. Le peuple a en Perse une sorte de vĂ©nĂ©ration pour les vieux arbres. Il croit que le platane a une vertu naturelle contre la peste, et qu’il purifie l’air. Cet arbre croit spontanĂ©ment dans tout l’orient ; les Persans n’en emploient point d’autre pour leurs meubles, leurs portes et leurs fenĂȘtres, tandis qu’en Europe on connaĂźt Ă  peine l’usage de cet excellent bois. Le peuple ne fait point de cuisine, surtout dans les provinces oĂč le bois est trĂšs-rare. Il y a des cuisines publiques dont les fourneaux sont entretenus d’une espĂšce de tourbe, de feuilles sĂšches, de bruyĂšres et de fumier. Les plateaux Ă©levĂ©s de la Perse sont trĂšs-froids en hiver, trĂšs-chauds en Ă©tĂ© ; il n’y a, dans cette derniĂšre saison, aucune rosĂ©e sur les plantes, aucune vapeur dans l’atmosphĂšre, aucun brouillard sur les montagnes,, aucun nuage dans les airs. Les provinces situĂ©es entre le Pont-Euxin et la mer Caspienne, qui sont presque toutes aujourd’hui sous la dĂ©pendance de la Russie, ne ressemblent point au reste de la Perse. Le voisinage des mers et des hautes montagnes rend ces contrĂ©es bien plus humides et bien plus tempĂ©rĂ©es. Ici la terre est partout couverte de vĂ©gĂ©taux. Les montagnes sont presque toutes couronnĂ©es de chĂȘnes, hĂȘtres et autres arbres d’Europe» Vers les bords de la mer Caspienne, on trouve le jujubier, l’olivier et l’oranger ; le platane couvre de son ^ 45 ^ ombre les bords de toutes les riviĂšres ; la vigne croĂźt sans culture, elle enveloppe les arbres de ses rameaux > et s’élĂšve jusqu’à leur sommet. La soie est l’une des principales marchandises de la Perse 3 le mĂ»rier est par consĂ©quent le fondement de sa richesse. La GĂ©orgie est couverte de bois 3 cependant, suivant Tournefort, on ne brĂ»le guĂšre Ă  TĂ©flis, capitale de cette province, que de la paille et du fumier, ce qui tient Ă  la difficultĂ© des moyens de transport, qui sont Ă  peu prĂšs nuis dans cette contrĂ©e encore Ă  demi barbare. On ne peut imaginer, dit ce cĂ©lĂšbre voyageur, quel affreux parfum rend celte bouse dans les maisons, qu’on ne peut comparer qu’à des penardiĂšres; tout ce qui s’y mange en est imprĂ©gnĂ©. A peu de distance de CCS horribles lieux, les arbres pourrissent sur pied. ArmĂ©nie. L’hiver dure long-temps en ArmĂ©nie, quoique cette contrĂ©e soit situĂ©e sous le 4 o. e degrĂ© de latitude 3 on n’y voit d’autres bois que les arbres plantĂ©s autour des villages. Pour voyager dans les montagnes des environs d’E- rivan, il faut porter des vivres et du bois3 cependant, au pied de ces montagnes, on trouve des sources,, des forĂȘts, des mines de fer et des forges. MingrĂ©lie, Circassie. La cĂŽte nord-est de la mer Noire prĂ©sente une immense surface de montagnes couvertes de bois. Le ministĂšre français a fait explorer cette cĂŽte peur y rechercher des arbres de marine 5 mais l’extraction en serait trop difficile dans l’état actuel de cette contrĂ©e. Le chĂȘne, l’orme, le frĂȘne, pourrissent sur le sol qui les a vus naĂźtre. Les mahomĂ©tans ne cou- 44 . ?> pent que les arbres qui sont voisins de la mer; ils n’emploient que du bois vert pour leurs constructions. Ce pays est actuellement soumis aux Russes. Les montagnes du Caucase sont couvertes de sapins. La Colchide ou MingrĂ©lie, qui du temps des Romains Ă©tait pleine de villes oĂč le commerce appelait toutes les nations du monde , est aujourd’hui une vaste forĂȘt entrecoupĂ©e de quelques terres labourĂ©es ; les arbres se multiplient et vĂ©gĂštent avec tant de force que si l’on n’extirpait les racines qui s’étendent dans les champs labourĂ©s et dans les grands chemins, le pays serait bientĂŽt rempli de bois et impĂ©nĂ©trable ; l’humiditĂ© de l’air y est extrĂȘme; il y pleut presque continuellement. Toutes les maisons sont en bois. Les MingrĂ©liens foulent le raisin dans des troncs d’arbres qu’ils creusent en forme de cuves. Tiiibet. Le Thibet est un vaste pays trĂšs-Ă©levĂ© et trĂšs-froid; la vĂ©gĂ©tation y est faible, on y voit trĂšs-peu d’arbres. Les plaines, que l’on peut appeler des dĂ©serts, car on n’y voit d’autres marques de vĂ©gĂ©tation que quelques chardons, un peu de mousse et des tiges d’une herbe rare et flĂ©trie, sont en proie Ă  un vent trĂšs-violent et trĂšs-froid qui y rĂšgne continuellement, quoiqu’elles soient situĂ©es sous la mĂȘme latitude que Gibraltar, Alger et Malte. Le froid qui y rĂšgne ne peut ĂȘtre attribue qu’a la hauteur de ces plateaux. Le picle plus Ă©levĂ© du Thibet est Ă  sept mille quatre cents mĂštres au-dessus du niveau de la mer, tandis que le Mont-Blanc n’est qu’à quatre mille sept cent soixante-quinze mĂštres dĂ© ce niveau. Ces hautes plaines d’Asie, presque entiĂšrement stĂ©riles, sont entrecoupĂ©es de vallĂ©es cultivĂ©es; leshabitans sont obligĂ©s d’aller chercher des abris derriĂšre les rochers, dans 48 45 » les retraites les plus profondes, oĂč le vent pĂ©nĂštre le moins ; ils possĂšdent de riches troupeaux et des mines inĂ©puisables. Les forĂȘts que l’on planterait dans ces plaines succomberaient sous l’effort des vents. Cependant elles Ă©taient autrefois couvertes d’arbres. On en trouve qui sont pĂ©trifiĂ©s sur les montagnes. Ce phĂ©nomĂšne semble annoncer, dit un voyageur, que la terre couvrait autrefois ces montagnes, et qu’un bouleversement terrible les en dĂ©pouilla, et ne respecta que les rochers qui s’opposaient Ă  ses efforts. Chixe. Dans le nord de la Tartarie chinoise, des forĂȘts presque impĂ©nĂ©trables couvrent la majeure partie des terres les Tartares en coupent le bois, et l’envoient Cil Chine par les riviĂšres. Il n’y a point d’expĂ©dient que le peuple n’imagine pour faire cuire ses alimens Ă  peu de frais ; et pour se chauffer pendant l’hiver, qui est trĂšs-rude,il emploie de petites branches mĂȘlĂ©es avec de la paille et des feuilles d’arbre. Les riches ont des fourneaux souterrains d oĂč la chaleur se distribue par des tuyaux dans les appartenions; on les chauffe avec du charbon de bois amenĂ© dans les villes sur des dromadaires. Sur le bord des fleuves, et dans les endroits oĂč Ion a Ă©tabli des ports, les habitans se livrent Ă  un grand commerce de bois et de charbon de terre qu’ils font venir des montagnes. 11 y a beaucoup de canaux qui Ă©tablissent une communication peu chĂšre ; les denrees s’y transportent Ă  des distances trĂšs-Ă©loignĂ©es. La houille s’exploite en abondance dans le nord de la Chine; la poussiĂšre mĂȘme du charbon nest point perdue; on la mĂȘle avec de la terre molle prise dans les. marais, et l’on en fabrique des morceaux que l’on fait sĂ©cher au soleil pour les brĂ»ler pendant l’hiver. Dans le midi de la Chine, les maisons du peuple sont construites en terre ou en bois, et couvertes de feuilles de bambous ; on voit aussi des villages bĂątis en briques ; ils sont ombragĂ©s par des bambous et autres arbres. Les routes, les riviĂšres, sont bordĂ©es de peupliers, de trembles et de saules d’une grosseur prodigieuse. Les Chinois cultivent le mĂ»rier avec le plus grand soin; on en voit des plantations trĂšs-Ă©tendues, et semblables Ă  des forĂȘts. On sĂšme du riz dans l’espace qui reste entre les arbres, pour ne pas perdre de terrain. ILn’y a presque point de maison qui n’ait dans son voisinage quelque arbre Ă  suif. Le mĂ©lĂšse et le pin croissent sur les montagnes, qui sont trop froides ou trop escarpĂ©es pour admettre un autre genre de culture; les riches font planter des bois OÙ ils ont coutume de nourrir beaucoup de sangliers et de daims. Pour faire rĂ©ussir un semis de chĂȘne, disent les cultivateurs chinois, il faut y passer le feu Ă  la fin de la premiĂšre ou de la seconde annĂ©e. Ils entendent trĂšs-bien la culture des arbres. Ils emploient le bambou Ă  un grand nombre d’usages; non-seulement ils s’en servent pour bĂątir, soit Ă  terre, soit sur l’eau, et pour faire toutes sortes de meubles; mais ils en tirent mĂȘme une substance alimentaire. Ils savent aussi rĂ©duire les grands arbres des forĂȘts aux plus petites dimensions des arbres nains, et leur donner les formes les plus bizarres pour en dĂ©corer leurs habitations. Il parait que la vigne a essuyĂ© bien des rĂ©volutions en Chine; elle n’a jamais Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©e toutes les fois a 47 &» qu’il y a eu ordre d’arracher les arbres qui embarrassaient les champs destinĂ©s aux moissons. On ne voit, dans les parties bien cultivĂ©es de cet empire, ni haies, ni friches, tant on craint de perdre la moindre portion de terrain ; les Chinois cultivent mĂȘme le fond des lacs, des Ă©tangs, des marais, des fossĂ©s ; ils y mettent les plantes aquatiques qui entrent dans la nourriture des hommes et des bestiaux. Ces arrosemens sont trĂšs-frĂ©quens ; on fait monter l’eau, Ă  l’aide de machines, sur les montagnes; la science agricole s’étend sur les arbres on ne les abandonne pas comme en Europe; - on a des plantations cultivĂ©es et parfaitement soignĂ©es; les coutumes et les prĂ©ceptes rĂšglent mĂȘme en cela les actions des Chinois. La propriĂ©tĂ© des terres est hĂ©rĂ©ditaire en Chine; les domaines sont subdivisĂ©s en petites parties par les partages successifs des possessions que le pĂšre laisse Ă©galement Ă  tous ses enfans; beaucoup de paysans sont propriĂ©taires des terres qu’ils cultivaient ; on ne voit point parmi eux de fermiers spĂ©culateurs, mais la propriĂ©tĂ© est exposĂ©e aux confiscations. Tout est subordonnĂ© Ă  la volontĂ© du souverain et de ceux qui gouvernent sous ses ordres. Les terres dont la culture est nĂ©gligĂ©e ou abandonnĂ©e sont confisquĂ©es et remises Ă  des cultivateurs soigneux. Japon et Siam. La plus grande partie des montagnes - du Japon est couverte de bois, on cultive celles qui ne sont pas trop escarpĂ©es. Les hommes conduisent la charrue dans les lieux inaccessibles aux boeufs; quelquefois la nĂ©cessitĂ© rĂ©duit le peuple Ă  se nourrir de- glands. *8 48 g» On se chauffe de charbon de bois; cet usage est rĂ©pandu dans toutes les contrĂ©es qui ne sont pas percĂ©es de chemins commodes pour les voitures, parce que le transport du charbon est cinq Ă  six fois moins dispendieux que celui du bois; on voit cependant au Japon de belles routes bordĂ©es de grands arbres. Le bambou y abonde, et y est d’un aussi grand usage qu’en Chine. Chaque maison a une petite cour avec une Ă©minence couverte d’arbres, d’arbustes et de pots de fleurs. Les temples sont situĂ©s au milieu d’agrĂ©ables bocages. Les maisons sont bĂąties en bois Ă  cause des tremblemens de terre. Il y a beaucoup de forets dans le royaume de Siam ; elles sont remplies de bĂȘtes sauvages, de tigres, de lions, d’élĂ©phans ; les montagnes sont couvertes de bois dont on pourrait construire des milliers de vaisseaux; on en conduit dans les chantiers de Batavia ; les arbres sont si gros et si droits qu’un seul suffit pour faire un bateau. Les philosophes siamois mettent le bois au nombre des Ă©lĂ©mens qu’ils reconnaissent dans la nature. Lvde. Le Bengale est une vaste rĂ©gion dont la surface, d’une pente insensible, est couverte d’une Ă©ternelle verdure , ombragĂ©e de bosquets et de beaux arbres qui produisent des fleurs et des fruits dans toutes les saisons de l’annĂ©e. Il est impossible, dit un Ă©crivain, de faire une desci’iption assez vive ou assez juste pour rendre sensible, aux yeux de l’EuropĂ©en Ă©tranger au climat de l’Inde, le luxe d’une vĂ©gĂ©tation dont rien n’offre le modĂšle en Occident. L’arbre banyan paraĂźt prĂ©senter un diamĂštre de trois Ă  quatre cents pieds; c’est une agrĂ©gation de troncs d’arbres au nombre de cinquante Ă  soixante qui pous- 4g 49 D» Sent des racines ou filets de certaines parties de leurs grosses branches, lesquels s’enfoncent dans la terre, et deviennent de nouvelles souches un seul arbre peut couvrir en peu d’annĂ©es beaucoup d’arpens de terre. Les canaux que forme la mer pour recevoir les eaux du Gange, entrecoupent un vaste territoire marĂ©cageux, couvert de bois immenses remplis de tigres et de bĂȘtes fauves. On a dĂ©frichĂ© une grande partie de ces forĂȘts depuis un demi-siĂšcle ; les avantages que l’on en retire sont prodigieux. On ne trouvait pas autrefois dans cette contrĂ©e un seul endroit qui fĂ»t propre Ă  la demeure de l’homme j quelques habitans des bords de la mer se livraient Ă  l’opĂ©ration lucrative mais pĂ©rilleuse de couper du bois pour l’approvisionnement de Calcutta. Quoiqu’on en coupĂąt continuellement une trĂšs-grandequantitĂ© , il semblait que la hache n’y fĂ»t jamais entrĂ©e. Le Bengale est l’un des pays les plus peuplĂ©s de l’Asie, cependant il y a encore des dĂ©serts au milieu de cette contrĂ©e. Autrefois un tiers en Ă©tait abandonnĂ© et couvert de bois, un autre tiers rempli de marais et de riviĂšres j le reste produisait des rĂ©coltes de riz. Les parties cultivĂ©es se sont Ă©tendues surtout dans ces derniĂšres annĂ©es. Les arbres de l’Inde produisent, sans culture, des fruits excellensj ils donnent un ombrage sous lequel les habitans peuvent passer leur vie Ă  fabriquer leurs Ă©toffes. Le bananier et le cocotier suffisent Ă  une grande partie de leurs besoins. Dans tous les pays de la zone torride, dit M. de Humboldt, on en trouve la culture Ă©tablie depuis les temps les plus anciens dont parlent la tradition et l’histoire. Les maisons des Indiens, bornĂ©es Ă  un seul Ă©tage, SO B* sont presque toutes bĂąties de terre et de briques ainsi les grandes forĂȘts sont inutiles pour la charpente des maisons, parce qu’il n’y a aucun moyen de transport dans les terres pour charier les arbres. Dans l’Indostan, il y a des contrĂ©es fort Ă©tendues oĂč, Ă  part les palmiers, on ne voit que quelques buissons ; mais, comme les cuisines indiennes exigent peu de combustibles, quelques broussailles ou de la fiente de vache sĂ©chĂ©e au soleil suffisent pour les besoins. Il y a deux sortes de forĂȘts les unes trĂšs-petites et qui ne couvrent que quelques arpens de terre ; elles sont plantĂ©es Ă  la main, et se trouvent ordinairement dans le voisinage des habitations5 les autres, plus grandes que des provinces d’Europe, seraient la demeure Ă©ternelle du silence si elles n’étaient troublĂ©es par le cri des bĂȘtes fĂ©roces et le sifflement forĂȘts redoutables, habitĂ©es par de nombreux troupeaux d’élĂ©plians , sont Ă©loignĂ©es des demeures, des hommes, ce qui les rend encore plus sauvages. La plus grande que je connaisse, dit M. Perrin, est entre Savenour et Goa elle a prĂšs de cinquante lieues d’étendue ; les exhalaisons putrides, les prĂ©cipices,les gouffres, en Ă©loignent les hommes. La plupart des arbres, par leur difformitĂ©, ajoutent des traits hideux au deuil que la nature porte dans ces lieux solitaires. DĂšs les temps les plus reculĂ©s, l’agriculture avait Ă©tĂ© florissante dans l’Inde ; il paraĂźt qu’elle y avait dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© depuis les conquĂȘtes des Mogols; mais elle a pris, depuis l’affermissement de la puissance anglaise, un essor que des EuropĂ©ens pouvaient seuls lui donner; ces grandes forĂȘts sont dĂ©jĂ  attaquĂ©es; peut ĂȘtre un jour seront-elles anĂ©anties pour faire place Ă  d’autres productions. On ne trouve nulle part des cocotiers en aussi grand si > nombre que dans le Malabar; ce pays est coupĂ© de bois, de golfes et de marais. Les montagnes sont couvertes de beaux bois de teck, excellent pour construire des vaisseaux; on fait traĂźner ces arbres par des Ă©lĂ©pbans jusqu’au bord des riviĂšres, d’oĂč ils descendent Ă  la cĂŽte. Les habitans du Malabar adorent une espĂšce de figuier. Les arbres fruitiers autres que le cocotier et le bananier sont relĂ©guĂ©s presque exclusivement sur les cĂŽtes habitĂ©es par les EuropĂ©en, et la culture en est nĂ©gligĂ©e. Les montagnes qui sĂ©parent le Boutan du Bengale sont couvertes de gros arbres et de taillis Ă©pais; mais le dĂ©faut de chemins les rend inutiles; les intervalles de ces forets sont dĂ©frichĂ©s et assez bien cultivĂ©s; il y a des villages, des vergers, des plantations. Ce pays prĂ©sente Ă  la fois l’aspect le plus sauvage et les efforts de l’art le plus laborieux. Le pays des Marates est couvert de forets, mais leur Ă©loignement de la merles rend Ă  peu'prĂšs inutiles. Il n’en est pas de meme des contrĂ©es qui se rapprochent du golfe de Cambaye la construction des vaisseaux fait un objet considĂ©rable de commerce pour les habitans de Surate. La plupart des maisons y sont construites en bambous et couvertes de feuilles de palmier. Plusieurs contrĂ©es de l’Inde sont presque entiĂšrement couvertes de bambous et de rottins qui forment des massifs impĂ©nĂ©trables. Iles et Terres de l’OcĂ©an indien. Les Ăźles de l’OcĂ©an indien offrent quelques tableaux qui ne sont pas sans intĂ©rĂȘt. , I je cocotier est naturel dans presque toutes les rĂ©gions de l’Inde. Dans les Ăźles, les maisons sont bĂąties de bois et de roseaux. n ÂŁ 2 n» Bougainville assure que la compagnie hollandaise, pour faire mourir les arbres d’épicerie des Moluques, dont les produits surabondans gĂȘnaient son commerce, achetait annuellement les feuilles des arbres encore vertes, sachant bien qu’aprĂšs trois ans de dĂ©pouillement les arbres pĂ©riraient, ce qu’ignoraient sans doute les Indiens. La destruction de ces arbres a rendu dĂ©serte une de ces Ăźles qui Ă©tait autrefois habitĂ©e. Une punition qu’on infligeait souvent aux habitans des Ăźles Marianes consistait Ă  couper leurs arbres. Les Philippines offrent beaucoup de traces de volcans j l’humiditĂ© que le voisinage de l’OcĂ©an, les hautes montagnes et les forĂȘts entretiennent habituellement dans ces rĂ©gions, est vraisemblablement la cause de la fĂ©conditĂ© presque incroyable de ces Ăźles. Les mĂȘmes causes, lorsqu’elles se trouvent rĂ©unies T produisent les mĂȘmes effets dans toutes les rĂ©gions tropicales. Williams Marsden a fait sur l’üle de Sumatra des observations intĂ©ressantes dont la plupart sont communes Ă  toutes les Ăźles voisines. Nous rapporterons celles qui sont relatives Ă  notre objet. Entre les chaĂźnes de montagnes sont de vastes plaines fort Ă©levĂ©es au-dessus des terres maritimes, oĂč l’air est trĂšs-frais, ce qui les fait regarder comme les parties les plus dĂ©licieuses de l’ile; elles sont consĂ©quemment les plus peuplĂ©es et les moins embarrassĂ©es de bois 3 on y trouve de grands lacs, des marais immenses; Ă  chaque pas [on rencontre des sources, des riviĂšres. Les villages sont entourĂ©s d’un grand nombre d’arbres fruitiers. Le feu n’est nĂ©cessaire aux habitans que pour faire cuire leurs alimens. Quand le riz, le sagou, le gibier, manquent, ils ont recours aux feuilles des arbres, que la simplicitĂ© habituelle de leur rĂ©gime ne H! 33 ; leur fait pas regarder comme un aliment extraordinaire- v ment mauvais. La rapiditĂ© de la vĂ©gĂ©tation des arbres ne permet pas d’essarter absolument un pays dont la population est encore trĂšs-faible. Les cliamps oĂč le riz a Ă©tĂ© plantĂ© offrent toujours, un seul mois a prĂšs la rĂ©colte, un abri pour les tigres, au milieu des plantes et des broussailles qui ont cru dans ce court espace de temps. Yoici comment la culture se fait dans les montagnes ‱ vers le mois d’avril, l’Indien fait clioix d’un terrain; il abat les arbres, Ă  l’aide du feu, Ă  dix ou douze pieds au- dessus du sol; il renverse toutes les branches et le dessus des tiges ; le bois ainsi abattu et dessĂ©chĂ© pendant plusieurs mois, il y met le feu, de sorte que toute la contrĂ©e est en flammes pendant environ un mois; les cendres de l’arbre fertilisent le sol. Dans la partie mĂ©ridionale de l’ile, l’agriculture a dĂ©jĂ  fait quelques progrĂšs; les anciens bois sont en partie Ă©puisĂ©s , et par lĂ  les liabitans sont privĂ©s d’une nourriture qui Ă©tait autrefois trĂšs-abondante il faut donc ou qu’ils meurent de faim, ou qu’ils changent de demeure, ou qu’ils cultivent la terre. Leur attachement pour le sol natal est si grand qu’il surmonte leur rĂ©pugnance ; naturelle pour J e travail ; leurs champs cultivĂ©s rendent trente pour un, et les essarts communĂ©ment soixante Ă  ' quatre-vingts. Cette fertilitĂ© est extraordinaire, com- ' parĂ©e au produit des champs en Europe, qui excĂšde ; rarement quinze pour un. Une telle disproportion doit ĂȘtre attribuĂ©e Ă  l’influence d’un climat plus chaud qui conserve encore beaucoup d’humiditĂ©. L’ile de Sumatra a toujours etc funeste par la chaleur de son atmosphĂšre et par ses brouillards pendant la nuit. Le poivrier est naturel dans cette Ăźle; mais abandonnĂ© 4 4g 34 > Ă  lui-mĂȘme, il produitfpeu il faudrait le tailler et le provigner. L’ile de Java est extraordinairement fertile ; les ha- bitans sont un peu plus agriculteurs que les autres Malais ; leurs montagnes sont couvertes de superbes forĂȘts qui s’élĂšvent en amphithéùtre sur des plaines couvertes de verdure et de marais. A BornĂ©o, les maisons sont construites en bois et Ă©levĂ©es sur des poutres 3 les habitans les transportent souvent, ce qui se fait aussi dans les Ăźles voisines. Dans l’ile CĂ©lĂšbes, elles sont bĂąties de bois de diffĂ©rentes couleurs. La presqu’üle de Malaca est couverte de forĂȘts impĂ©nĂ©trables et de marais 3 c’est un repaire de reptiles et de bĂȘtes fĂ©roces3 les naturels y vivent de fruits et de gibier. Les bois sont odorifĂ©rans 3 on y respire un air embaumĂ© par une multitude de fleurs qui se succĂšdent toute l’annĂ©e. L’ile de Ceylan est remplie de vastes forĂȘts encore vierges. Les arbres sont environnĂ©s de buissons qui n’ont, pour la plupart, aucune ressemblance avec ceux de nos climats. Les rois du pays avaient autrefois dĂ©fendu de pratiquer dans ces bois un sentier oĂč il pĂ»t passer plus d’une personne Ă  la fois ; mais les Hollandais y ont tracĂ© de larges chemins. Les cotes sont couvertes de cocotiers; on ne brĂ»lait autrefois dans cette Ăźle que du bois de cannelle. Iles Maiuanes. L’ile de Tinian, si connue par le voyage d’Anson, a Ă©tĂ© fort peuplĂ©e autrefois; mais les Espagnols en avaient transportĂ© les habitans dans une autre Ăźle, cinquante ans avant que ce navigateur y abordĂąt; il y trouva un gazon plus uni et plus fin qu on ne le *$ÂŁ SS fH* trouve ordinairement dans les climats chauds; les bois sont terminĂ©s aussi nettement dans les endroits oĂč ils touchent aux plaines, que si la disposition des arbres avait Ă©tĂ© l’ouvrage de l’art. Les animaux sont les seuls maĂźtres de ce paisible sĂ©jour. Les bois y sont pleins de cocotiers, de limons et d’orangers, exhalant une odeur admirable; ce tableau ne nous reprĂ©sente pas la nature vierge, mais la nature abandonnĂ©e par les hommes. Australie. La terre de Vandiemen est bien boisĂ©e. Les naturels habitent sous de misĂ©rables charpentes recouvertes d’écorce, qui mĂ©ritent Ă  peine le nom de huttes; les plus habiles d’entre eux se logent dans l’intĂ©rieur des arbres. Nous rencontrĂąmes, dit le rĂ©dacteur du journal de Cock, une multitude de gros arbres creusĂ©s, oĂč ils avaient pratiquĂ©, Ă  l’aide du feu, un , espace de six Ă  sept pieds de hauteur, et nous y vĂźmes des foyers d’argile autour desquels quatre ou cinq personnes pouvaient s’asseoir. Ces habitations sont trĂšs-durables, car les sauvages ont toujours soin de laisser entier l’un des cĂŽtĂ©s de l’arbre, ce qui suffit pour y entretenir une sĂšve aussi abondante que dans les autres. Dans le continent de la Nouvelle-Hollande, qui n’est guĂšre moins vaste que l’Europe, la plupart des savanes I sorit semĂ©es de rochers stĂ©riles; mais on y trouve une foule d’arbres inconnus dans les autres parties du monde. La Nouvelle-ZĂ©lande est couverte de forets , de grands arbres toujours verts qui croissent avec une vigueur qu’on ne peut imaginer, et qui offrent les plus majestueuses perspectives. H 36 g* Iles de la mer du Sud. Dans les Ăźles de la mer du Sud, dont le capitaine Cook a donnĂ© la description, les plantes parasites qui remplissent les intervalles des arbres, rendent les bois impĂ©nĂ©trables ; la mousse, la fougĂšre, le liseron, embarrassent les pas; les arbres, rongĂ©s par le temps, y tombent de vieillesse, et autour d’eux, de jeunes plants croissent vigoureusement dans un terreau noir qui enfonce sous les pieds; les liserons et les lianes qui s’entrelacent aux arbres les plus Ă©levĂ©s y forment des guirlandes bleues et pourpres ; les fleurs embellissent les forĂȘts et les bocages ; il y a une espĂšce de liane qui peut couvrir des arpens entiers, et dont les rameaux entrelacĂ©s soutiennent des troncs d’arbres qui tombent de vieillesse; d’autres grands arbres, couverts d’une mousse grisĂątre qui descend de la cime jusqu’à terre, bordent les savanes. On voit des pics chargĂ©s d’arbres jusqu’au sommet; on les prendrait pour des pyramides parĂ©es de guirlandes de fleurs, de feuillages et de fruits. Dans les Ăźles Malouines, l’horizon est bordĂ© par des montagnes chauves; il n’y a point de bois,mais il y croĂźt des joncs fort Ă©levĂ©s qui peuvent servir de combustible, et dont les dĂ©bris jonchent la terre. Les Ăźles Sandwich et les Ăźles voisines sont bien cultivĂ©es; les montagnes sont couvertes de forĂȘts ; des murailles sĂ©parent les champs culivĂ©s, qui n’ont en gĂ©nĂ©ral d’autre sol qu’une espĂšce d’engrais d’au moins deux pieds de profondeur, formĂ© du dĂ©tritus des mousses et des arbres. Les arbres Ă  pain abondent dans les Ăźles dĂ©couvertes par M. de Bougainville. Les habitans d’OtaĂŻti, foin d’ĂȘtre obligĂ©s de se procurer leur pain Ă  la sueur de leur front, sont forcĂ©s, dit-on, d’arrĂȘter les largesses de la nature, qui leur en ofĂŻre en abondance; ils extirpent quelquefois K$ 57 »- les arbres Ă  pain, pour planter Ă  leur place Ăčes coco- tiers, des bananiers, et mettre ainsi de la variĂ©tĂ© dans jj leur nourriture ; ils vivent sans travaux pĂ©nibles, ils l n’ont qu’à planter des arbres et Ă  rĂ©colter les fruits de ceux qui viennent naturellement. Quoique les monta- gnes de cette Ăźle soient d’une grande hauteur, le rocher n’y montre nulle part son aride nuditĂ©; elles sont couvertes de bois toujours fleuris; le pied de ces montagnes est entrecoupĂ© de prairies et de bosquets. ; Quelques-unes des Ăźles voisines, encore inhabitĂ©es, *, sont entiĂšrement couvertes de cocotiers. Les arbres de ces rĂ©gions sont peu propres aux usages ordinaires ; il y en a plusieurs espĂšces dont le bois, lorsqu’il est sciĂ©, acquiert un tel degrĂ© de frangibilitĂ© , que les planches s’éclatent et se divisent en petites esquilles, d’aprĂšs l’observation de John White. Turquie d’Europe. Les villages et les montagnes qui bordent le canal de Constantinople sont ornĂ©s d’arbres. Les cotes de la mer Noire pourraient en fournir assez pour rebĂątir tous les ans Constantinople, s’il en Ă©tait besoin, quoique cette ville soit presque entiĂšrement construite en bois. Les prairies des environs sont bordĂ©es de tilleuls, de platanes, de charmes, de frĂȘnes et de peupliers ; il n’est pas permis de couper du bois dans les forĂȘts oĂč vont chasser les sultans ; on met le feu dans les autres forĂȘts pour en cultiver quelques parties. Il y a tout autour de .PĂ©ra des mĂ©tairies et des chĂąteaux dans les bois de haute futaie. On ne brĂ»le du bois que dans les maisons des grands ; le reste de la population se chauffe ordinairement autour d’un brasier de charbon. Hf S8 Les Turcs ont beaucoup de bienveillance pour les arbres voisins de leurs habitations ; ils les arrosent et les cultivent par charitĂ© ; ce serait un crime Ă©norme de les couper, et tout le voisinage ne manquerait pas d’en murmurer; ils n’osent pas mĂȘme les Ă©monder, et sont prĂȘts Ă  faire tous les sacrifices nĂ©cessaires pour conserver leur ombre hospitaliĂšre; tous les arbres restent, de quelque maniĂšre qu’ils soient plantĂ©s, prĂšs des habitations; et on abattrait plutĂŽt une partie de la maison que d’arracher ou d’ébrancher l’arbre qui s’est trop Ă©tendu. Le respect superstitieux que les arbres inspirent aux Turcs n’empĂȘche pas que leurs forĂȘts ne soient abandonnĂ©es aux incendies, aux pĂąturages, aux dĂ©vastations de toute espĂšce; ils ignorent l’art de couper et de conserveries bois, et les laissent ou dĂ©pĂ©rir de vieillesse, ou tomber sous la hache d’un fermier avide. La MacĂ©doine abonde en grains, en bois et en bestiaux. Dans la Livadie, les forĂȘts sont formĂ©es de pins amoncelĂ©s qui prĂ©sentent un aspect antique et dĂ©sert. Les environs du golfe de l’Arta ont beaucoup de bois de chĂȘnes blancs et d’ormes. Une compagnie de nĂ©go- cians français, pour avoir la permission de les couper, payait une somme assez considĂ©rable au pacha; elle en exportait annuellement cent mille pieds cubes qui lui coĂ»taient, rendus au bĂątiment, 1 fr. 57 c. le pied cube, ou 3 0 paras. La Servie etla Moldavie, avec un sol fertile, ne forment qu’une vaste forĂȘt qui sert de pĂąturage. Le territoire de la Yalaquie est trĂšs-fĂ©cond ; mais la plus grande partie en est inculte ; les terres appartiennent, moyennant un tribut, au premier qui veut les labourer. Le revenu principal provient des pĂąturages dans lesquels on Ă©lĂšve un bĂ©tail nombreux qui s’exporte. Cette g 39 province est en quelques endroits traversĂ©e d’épaisses forĂȘts, et dans d’autres elle manque absolument de bois ; dans les campagnes, les maisons sont bĂąties en terre grasse et couvertes de roseaux. Les monts Krapacks ou Balkans sont chargĂ©s de superbes forĂȘts. Les bords du Danube sont remplis de forĂȘts marĂ©cageuses dans lesquelles il n’existe point de routes. Damiatie. Autrefois riche et cultivĂ©e, la Dalmatie est aujourd’hui pauvre et mal-saine; on y trouve des bois de geniĂšvres, de bruyĂšres chĂȘnes verts. Il y a beaucoup de lentisques dans certaines contrĂ©es, mais les ha- bitans les coupent prĂ©maturĂ©ment; les montagnes y sont garnies de sapins et de chĂȘnes. Dans les environs de Zara, le frĂȘne donne de la manne en abondance et de la meilleure qualitĂ©; mais, quelque simple que soit l’opĂ©ration nĂ©cessaire pour la tirer des branches de l’arbre, les Morlaques ne veulent pas la pra- maisons ne sont que des cabanes couvertes de paille et de bardeaux. Les montagnes qui bordent la Cettina abondent en chĂȘnes dont on pourrait transporter les tigĂąs Ă  peu de frais jusqu’à la mer; mais les plus lĂ©gers travaux effraient les habitans. Les vallons et les plaines sont noyĂ©s par des sources et par les eaux qui descendent des montagnes; le sol est dĂ©tĂ©riorĂ©, les rivages sont couverts de sable; plusieurs contrĂ©es abondent en tourbes qui ne sont point exploitĂ©es. Quelques propriĂ©taires soigneux ont de belles possessions au milieu de cette barbarie; leurs bois se distinguent des forĂȘts abandonnĂ©es ; ils mĂ©nagent les jeunes frĂȘnes en les dĂ©barrassant des ronces et des jets qui les entourent; cette attention accĂ©lĂšre leur crue et le temps oĂč ils 60 jHfr seront en Ă©tat de souffrir l'incision et de donner la manne. Les montagnes sont en gĂ©nĂ©ral dĂ©pouillĂ©es d’arbres 5 tel est l’état de celle qui est voisine de Spalatro, retraite de DioclĂ©tien ; cette campagne,jadis si belle, est horrible aujourd’hui. Cette province pourra redevenir ce qu’elle fut autrefois, quand la propriĂ©tĂ© particuliĂšre y sera Ă©tablie et protĂ©gĂ©e. MorĂ©e et Ăźles voisines. L’ile de Zante n’est plus couverte de bois comme du temps cl’HomĂšre; on en a dĂ©frichĂ© le sol', et le bois est presque la seule chose dont manquent aujourd’hui les habitans. L’ile de Corfou est riche du revenu de ses oliviers ; il y a de grandes forets d’une espĂšce de chĂȘne dont la cupule donnait un revenu autrefois affermĂ© aux VĂ©nitiens, qui en retiraient des sommes considĂ©rables. L’intĂ©rieur de la MorĂ©e a des bois de chĂȘnes, de sapins, de mĂ©lĂšses, de pins et de cyprĂšs d’une hauteur prodigieuse;mais ces arbres s’affaissent et pourrissent sur le sol. Le seul objet de commerce que l’on en tire est le gland, que l’on exporte en Italie. Le bois de construction ainsi que le bois de chauffage viennent du dehors, ce qui est occasionĂ© par la difficultĂ© des communications dans l’intĂ©rieur de cette pĂ©ninsule. Archipel. Les montagnes de l’ile de Nicaria sont couvertes de bois. Les habitans ne vivent que du commerce des planches de sapin, des chĂȘnes et des bois Ă  bĂątir qu’ils transportent Ă  Scio ou Ă  Sala-Nova. Ils sont d’ailleurs trĂšs-misĂ©rables, parce qu’ils ne cultivent pas leur Ăźle. L’ile de Samos exporte des chĂȘnes verts et des pins. L’ile de Naxie est bien boisĂ©e; mais si l’on en excepte les contrĂ©es que nous venons de citer, les Ăźles de l’Ar- 8 61 chipel sont dĂ©pourvues de bois. A Milo, on ne brĂ»le que des broussailles qui sont trĂšs-chĂšres. A Mycone, on fait venir le bois de chauffage de DĂ©los. Dans l’ile de Nancio, je ne crois pas, dit un voyageur, qu’il y ait assez de bois pour faire cuire les perdrix que l’on pourrait y tuer. Dans l’ile de Santorin, on fait venir des Ăźles voisines des broussailles de lentisques et de kermĂšs; la raretĂ© du combustible y est telle que le peuple ne fait du pain que trois ou quatre fois l’annĂ©e; la viande est exposĂ©e au soleil; on la mange toute sĂšche ou bouillie. La culture du lentisque consiste plutĂŽt Ă  nettoyer le sol tout Ă  l’entour qu’à donner des labours. Les lentisques cultivĂ©s qui produisent le mastic par incision, sont la plus prĂ©cieuse production de l’ile de Scio. L’arinĂ©c vĂ©nitienne brĂ»la tous les oliviers de Paros pendant les huit ou dix annĂ©es qu’elle y sĂ©journa. L’incurie des Turcs a encore Ă©tĂ© bien plus funeste aux arbres de toute espĂšce. Les petites Ăźles de l’Archipel ne sont habitĂ©es que par des troupeaux de chĂšvres et de brehis qui ont dĂ©truit les forĂȘts abandonnĂ©es Ă  leur voracitĂ©. Les Cyclades sont pierreuses, sĂšches, pelĂ©es; il y croĂźt du tithymale en arbrisseau, que l’on brĂ»le faute de meilleur bois. Candie. Les maisons de l’ile de Candie sont bĂąties en pierre et en marbre blanc. Les forĂȘts du mont Ida fournissaient autrefois des arbres pour la marine des CrĂ©tois. Aujourd’hui les deux tiers de l’üle ne sont que montagnes presque toutes pelĂ©es, dĂ©sagrĂ©ables, taillĂ©es Ă  pic, et dont les flancs sont garnis de cyprĂšs ; mais le pied de ces montagnes est couvert de forĂȘts d’oliviers entrecoupĂ©es de champs, de H 62 Ü>- vignes, de jardins et de ruisseaux bordĂ©s de myrtes, de chĂȘnes, d’oliviers et de lauriers roses; les campagnes prĂ©sentent des bois entiers d’abricotiers, d’orangers, de citronniers, de figuiers, d’amandiers, d’oliviers, de pommiers et de poiriers. Ces montagnes, si sĂšches aujourd’hui, Ă©taient couvertes de forĂȘts dans la haute antiquitĂ©. On raconte qu’ayant Ă©tĂ© embrasĂ©es par le feu du ciel, elles fondirent les mines de fer, et que c’est cet Ă©vĂšnement qui apprit aux liabi- lans Ă  connaĂźtre ce mĂ©tal. Russie. Toutes les villes de Russie, Ă  l’exception de Saint-PĂ©tersbourg, sont bĂąties en bois; on vend au marchĂ© des maisons toutes construites. Ce vaste empire est couvert de marais, de forĂȘts et de montagnes ; les pĂąturages y sont excellens, et la terre trĂšs-fĂ©conde. Un Ă©cureuil, dit Bernardin de Saint-Pierre, pourrait parcourir une grande partie de la Russie sans mettre le pied Ă  terre, en sautant de branche en branche ; mais de grands dĂ©frichemens se sont cpĂ©rĂ©s depuis l’époque oĂč il Ă©crivait. Tout l’espace qui s’étend entre les deux capitales de l’empire, et qui d’un autre cotĂ© confine Ă  la Pologne mĂ©ridionale, toute la Finlande, l’Ingrie, l’Estonie, ne forment qu’une vaste forĂȘt de pins et de sapins parsemĂ©e de rochers et coupĂ©e par des lacs. En Finlande, on fait quelquefois vingt lieues dans les forĂȘts sans trouver un seul village. La Russie sera dans quelques siĂšcles moins froide qu’elle ne l’est aujourd’hui, lorsque les marais seront dessĂ©chĂ©s, les forĂȘts cultivĂ©es et les eaux dirigĂ©es dans des canaux; c’est ainsi que la froide Germanie est devenue l’Allemagne tempĂ©rĂ©e et si fertile aujourd’hui. 65 ^ La mĂ©thode dont les habitans se servent pour faire pĂ©rir un gros sapin est d’enlever une bande d’écorce de la longueur d’un pied ; bientĂŽt l’arbre se desseche ; le moyen habituel de l’incendie dĂ©couvre et fume le sol. Les routes et les rues sont formĂ©es de tiges d’arbres rangĂ©es parallĂšlement et attachĂ©es ensemble dans le milieu et Ă  chaque extrĂ©mitĂ© par de grosses solives que l’on fait tenir Ă  la terre au moyen de chevilles qu on y enfonce; ces troncs sont recouverts d’un lit de branches sur lesquelles on met une couche de sable ou de terre. On lit dans un voyage de Coxe un calcul assez curieux fait par M. Hanvay sur le nombre d’arbres qui entrent dans la construction d’un chemin de cette espĂšce. On peut les Ă©valuer Ă  treize mille sept cent dix par lieue, ce qui fait quatre cent onze mille trois cents pieds cubes , en comptant chaque arbre pour trente pieds de longueur et un pied d’équarrissage. La mĂ©thode de pontonner ainsi les plaines marĂ©cageuses consomme de beaux arbres et rend les cbemins trĂšs-fatigans ; aprĂšs une dixaine d’annĂ©es, ces arbres pourrissent et s’enterrent; les routes deviennent alors impraticables; on Ă©viterait tous ces inconvĂ©niens en Ă©levant de bonnes digues avec des fascines et de la terre, en creusant des deux cĂŽtĂ©s des canaux pour l’écoulement des eaux, et en coupant les arbres qui bordent le chemin pour en Ă©loigner l’humiditĂ©; mais de tels travaux appartiennent Ă  un Ă©tat de civilisation et d’industrie plus avancĂ© que celui de la Russie, oĂč les arts et l’agriculture font cependant des progrĂšs continuels. Les forĂȘts de la Russie orientale sont gĂ©nĂ©ralement peuplĂ©es de pins, de sapins, de mĂ©lĂšses, de bouleaux, de chĂȘnes, peupliers, trembles, geniĂšvres, noisetiers, et pommiers sauvages. Elles sont toutes en hautes futaies, S 64 gfc- Ă  l’exception de celles qui environnent les villages et les usines; mais l’entretien des unes et des autres est nĂ©gligĂ©. On ne peut pas dire que les forĂȘts soient soumises, en Russie, Ă  un amĂ©nagement quelconque; toutefois les progrĂšs que l’on a faits dans la science forestiĂšre ont amenĂ© dans quelques contrĂ©es Ă  exploiter par bandes, de maniĂšre que les rĂ©ensemencemens s’effectuent parles coupes voisines de la coupe exploitĂ©e. La culture des arbres fruitiers est encore dans l’enfance; cependant les cerisiers prospĂšrent bien Ă  la latitude de Moscou et de Volodimer; les habitans de cette derniĂšre ville vivent en grande partie du produit des fruits qu’ils envoient Ă  Moscou. Les forĂȘts occupent la plus grande partie des contrĂ©es oĂč coule l’Oka, de sorte qu’il y a fort peu de terres en culture. Lorsqu’on veut dĂ©fricher un bois, on y met le feu malgrĂ© les ordonnances, et sans s’embarrasser s’il s’étendra au loin. Ces arbres brĂ»lĂ©s Ă  moitiĂ© laissent dans les champs des souches qui ont plus de sept Ă  huit pieds de haut, et qu’on ne songe jamais Ă  dĂ©raciner. On coupe encore beaucoup de bois tant pour le chauffage et la bĂątisse que pour faire le goudron, et pour d’autres usages. On ne voit guĂšre de vieux mĂ©lĂšses, parce que cet arbre, trĂšs-susceptible de s’enflammer, est ordinairement brĂ»lĂ© lorsque les habitans incendient les pĂąturages au printemps pour renouveler l’herbe. TantĂŽt on traverse des forĂȘts humides et sauvages oĂč il n’y a point de routes frayĂ©es; tantĂŽt on ne voit que des bois Ă©parpillĂ©s de pins et de bouleaux; plus loin, ce sont des landes, des bourbiers remplis de joncs; les forĂȘts sont humides, mĂȘme dans les montagnes formĂ©es d’un roc recouvert d’une trĂšs-mince couche de terre. En creusant un peu la terre sur les rivages des fleuves, Èg 65 > f » \ \ ĂŻ ĂŻ * i on trouve un mĂ©lange de branches pourries et de grands arbres. C’est sur ce sol que l’on bĂątit des villes et des villages. Lorsqu’il tombe une grande quantitĂ© de neige Ă  la fois sur les arbres qui n’ont pas encore perdu leurs feuilles, les branches se courbent, et il est rare qu’elles se redressent ; ces neiges prĂ©maturĂ©es causent le plus grand dommage aux forets. Nous rapporterons quelques traits intĂ©ressans d’une description des forĂȘts de la Finlande. La tempĂ©rature est infiniment plus douce dans l’intĂ©rieur des forĂȘts qu’à l’extĂ©rieur; un silence formidable y rĂšgne; le seul bruit que l’on entende pendant lliiver est produit par les arbres que la gelĂ©e fait Ă©clater; ce bruit est sourd, et semblable Ă  des coups de canon Ă©loignĂ©s. Les chemins sont obstruĂ©s par des buissons, des branches de pin et de sapin, et par une espece de mousse trĂšs-raide et trĂšs-Ă©paisse qui croĂźt jusqu’à la hauteur de deux pieds. Les fondriĂšres, les arbres pourris, opposent des obstacles presque invincibles au passage. C’est pendant l’hiver que les habitans coupent et transportent le bois, les fagots, taillent du merrain et du bois de charpente ; ils traĂźnent sur les champs de glace et de neige des arbres Ă©normes qu’il leur serait impossible de dĂ©placer pendant l’étĂ©. De vastes incendies, des ouragans terribles, font de grands ravages dans le cƓur des forĂȘts; ces incendies, dont la mousse sĂšche est le conducteur le plus dangereux, consument les meules de blĂ©, les ruchers et les cabanes. Les forĂȘts de la couronne sont plus exposĂ©es que les autres aux ravages du feu; dans plusieurs districts, les paysans tirent leurs bois des forĂȘts royales, et paient I 66 §> â–ș pour cela une certaine taxe; mais ils ont encore le droit d’abatti'e et d’emporter les arbres atteints par les incendies ; dĂšs-lors, si la quantitĂ© de bois qui leur est assignĂ©e ne suffit pas Ă  leur besoin, leur intĂ©rĂȘt les porte Ă  mettre le feu dans le voisinage. Mais les graines de pin ne tardent pas Ă  donner des semis abondans dans les endroits incendiĂ©s. L’Ukraine a de belles forĂȘts dont les arbres pourrissent sur pied. Le pays de Kasan est parsemĂ© de cliĂȘnes qui tantĂŽt forment des massifs, tantĂŽt sont clair-semĂ©s; ils offrent de grandes ressources pour la marine russe, et suffiraient aux marines de tout l’univers. SibĂ©rie. Le sol de la SibĂ©rie serait extrĂȘmement fertile s’il Ă©tait cultivĂ©; il n’y a point de pays oĂč l’on trouve de plus hautes forĂȘts; cette triste contrĂ©e est arrosĂ©e par les plus belles riviĂšres du monde, dont les rives sont tellement garnies d’arbres qu’on n’y saurait voir le soleil en plein midi. Le paysan de SibĂ©rie a une rĂ©pugnance invincible Ă  dĂ©fricher la terre; il se ferait un scrupule d’abattre des bois pour y former des prairies ou des terres labourables; il ne s’établit que dans des lieux Ă©loignĂ©s des forĂȘts; il dit que les bois ne sont faits que pour la chasse. Le docteur Pallas remarque que les arbres rĂ©sineux qui ont Ă©tĂ© brĂ»lĂ©s sont ordinairement remplacĂ©s par de jeunes bouleaux, et qu’on ne trouve point de chĂȘnes en SibĂ©rie. U y a beaucoup de fonds salins qui coupent les forĂȘts et oĂč l’on ne trouve que les plantes propres aux terrains de cette espĂšce. La province de Tobolsk n’a point de forĂȘts dans ses plaines, qui sont trĂšs-bien cultivĂ©es ; on ne voit dans cette province que quelques bois de bou- ' nature de la terre et les rockers n’admettent guĂšre de culture. Les maisons des villes et des villages sont construites en bois. Les scieries et les usines sont trĂšs-multipliĂ©cs en Nor- wĂ©ge; les riviĂšres, qui sont en grand nombre, flottent beaucoup de bois; les vaisseaux du port de Cliristiana chargent des planches et de la charpente pour l’Angleterre et la Hollande. On trouve que ce commerce a l’inconvĂ©nient de dĂ©garnir le pays de bois; mais dans l’intĂ©rieur, les forĂȘts sont encore intactes; il y a beaucoup de NorwĂ©giens Ă  qui la ressource de dĂ©truire leurs bois est devenue nĂ©cessaire. Il ne s’agirait que d’en soigner un peu la reproduction pour que la richesse que produit ce commerce restĂąt constamment dans le pays. Tout abonde Ă  Cliristiana et Ă  Friderich-Hall ; tout y .estpayĂ© avec des planches et du fer; une production sert Ă  solder toutes les autres. Laponie. La Laponie a de vastes Ă©tendues de landes couvertes de mousses, des montagnes couvertes de neiges, et des marais qui occupent la plus grande partie des plaines. La multitude des lacs et des riviĂšres rend la terre trĂšs-mouvante, ce qui empĂȘche delĂ  cultiver; mais il y a beaucoup de prairies. On ne voit en Laponie ni arbres fruitiers, ni chĂȘnes, ni hĂȘtres, ni tilleuls; mais des sapins, des bouleaux, des peupliers, des geniĂšvres et des saules. Tous les arbres sont couverts de mousses Ă©paisses qui s’enflamment a la moindre Ă©tincelle. La terre elle-mĂȘme en est tapissĂ©e, surtout dans les bois, Ă  la hauteur d’un ou deux pieds; les forĂȘts sont souvent brĂ»lĂ©es; mais cela ne fait de tort Ă  personne, et les incendiaires ne sont pas punis; il vient Ă  la place des plantes incendiĂ©es une mousse fraĂźche, qui 7o sert Ă  la nourriture des rennes. Les bois de ce pays offrent presque un aussi grand nombre d’arbres Ă  terre que sur pied; la plupart tombent au moindre vent. La foret que les acadĂ©miciens eurent Ă  traverser pour arriver Ă  la montagne de Nierai ne leur parut qu’un affreux amas de ruines et de dĂ©bris; ils Ă©taient obligĂ©s de se faire jour avec la hache. Les Lapons n’ont aucune demeure fixe; leurs cabanes sont faites de branches d’arbres, de gazon et de mousses. On a remarquĂ© que les racines des saules, en s’étendant au loin et se divisant en ramifications nombreuses, donnent de la soliditĂ© aux bords des ruisseaux et des riviĂšres, qui, sans cela, s’ébouleraient Ă  chaque fonte de neiges et Ă  chaque crue d’eau. Daxemarck. On trouve sur la cĂŽte orientale du Jut- land beaucoup de forĂȘts de hĂȘtres et de chĂȘnes, entremĂȘlĂ©es dans les champs, les prairies et les lacs; la partie opposĂ©e est moins riche en bois ; on y brĂ»le de la tourbe et des bruyĂšres. Ce qui annonce qu’une partie du Danemarck n’est pas abondamment pourvue de bois, c’est que dans les campagnes les maisons sont bĂąties en terre, et que la plus grande partie des chĂȘnes qui entrent dans la construction des vaisseaux viennent des Ă©tats du roi de Prusse et du Holstein. On regrette la richesse que la chasse fournissait avant la destruction des forĂȘts; cependant c’est un bien triste produit en comparaison des riches revenus de l’agriculture. Les tableaux statistiques qui ne portent l’étendue des forets du Danemarck qu’au vingtiĂšme de la surface totale du royaume, sont nĂ©cessairement inexacts, si l’on fiĂŻ 74 ffr comprend sous le nom de forĂȘts tous les espaces cou-> verts de bois dissĂ©minĂ©s dans les pĂąturages. Pologne. Le sol de la Pologne est une grande forĂȘt entremĂȘlĂ©e de cultures 5 les arbres les plus communs sont les pins, les sapins, les hĂȘtres, les bouleaux et de petits chĂȘnes; quelques pĂąturages se trouvent çà et lĂ  dissĂ©minĂ©s dans ces bois, qui nourrissent d’excellens chevaux, et oĂč l’on recueille du miel en abondance. On trouve au milieu des forĂȘts des vestiges d’anciennes clĂŽtures et mĂȘme des rues pavĂ©es. On ne voit dans les campagnes que des chaumiĂšres. Les villes sont bĂąties en bois, Ă  l’exception des maisons des grands. L’air est mal-sain en Pologne; c’est l’effet de l’immense Ă©tendue des forĂȘts toutes marĂ©cageuses. Le sol de la Lithuanie est presque entiĂšrement couvert de bois; il y avait partout des forĂȘts sacrĂ©es que Ladislas Jagellon fit abattre. Les chemins sont absolument nĂ©gligĂ©s dans ces contrĂ©es. Ce ne sont presque que des sentiers tortueux tracĂ©s au hasard Ă  travers les forĂȘts. Ils sont souvent si Ă©troits et tellement embarrassĂ©s d’arbres et de ronces, qu’à peine une voiture peut y passer. Quelques voyageurs ont remarquĂ© que les forĂȘts y sont sujettes Ă  s'enflammer. Les paysans mettent le feu aux pins pendant qu’ils sont sur pied, et recueillent la tĂ©rĂ©benthine lorsqu’elle dĂ©coule de la tige de l’arbre. On ne voit guĂšre d’arbres de cette espĂšce qui ne portent les traces du feu; quelques-uns sont tout noirs et presque rĂ©duits en cendre; d’autres Ă  demi-brĂ»lĂ©s, et d’autres , quoique entamĂ©s par le feu, ne laissent pas de continuer Ă  vĂ©gĂ©ter. 8 7S »- Les Lithuaniens ont une maniĂšre de labourer qui leur est commune avec les habitans de la Russie-Blanche. Ils coupent dans l’étĂ© des rameaux d’arbres et des buissons; ils Ă©tendent ces bois Ă  terre; l’étĂ© suivant, ils y mettent le feu; ils sĂšment sur la cendre, e t recommencent tous les sept ou huit ans ; un usage semblable se retrouve dans les Ardennes. Nous en parlerons plus loin. La province de Vilna est beaucoup mieux cultivĂ©e qu’autrefois; des marais y ont Ă©tĂ© dĂ©frichĂ©s et des forets extirpĂ©es. IIoxgrie. La Hongrie, quoique situĂ©e Ă  une latitude plus favorable que celle de la Pologne, lui ressemble par la grande quantitĂ© de ses forets. Il y a beaucoup de pĂąturages cĂč se nourrissent une grande quantitĂ© de chevaux. On en exporte aussi beaucoup de bƓufs. Les forĂȘts qui couvrent toutes les montagnes de ce royaume pourraient, dit Beudant, ĂȘtre de quelque utilitĂ© si l’on Ă©tablissait des usines pour en consommer les produits, si l’on ouvrait des chemins et des canaux dans les parties qui en sont dĂ©pourvues ; les arbres pourrissent sur les montagnes,tandis que dans les plaines le combustible est trĂšs-cher. On pourrait mĂȘme, avec un peu de soin, parvenir Ă  livrer quelques bois Ă  la marine; mais on n’a pas encore trouvĂ© de meilleur moyen d’utiliser le bois que de le brĂ»ler pour retirer ensuite de la potasse de ses cendres ; aussi les forĂȘts des montagnes sont perdues pour l’état ; celles des parties basses qui se trouvent Ă  la proximitĂ© des villes, des routes et des Ă©tablissemens, sont souvent dilapidĂ©es d’une maniĂšre horrible par la mauvaise organisation des coupes; plusieurs Ă©tablissemens sont menacĂ©s d’une ruine totale par la destruction des bois qui les avoisinent; les forĂȘts W 7G ». de chĂȘnes qui s'Ă©tendent des montagnes aux plaines fournissent des glands Ă  des milliers de porcs presque sauvages que l’on rencontre par bandes nombreuses, surtout dans la partie occidentale du pays. On en retire aussi une grande quantitĂ© de galles qui sont principalement employĂ©es dans la teinture. Espagne. En Espagne, les forĂȘts sont gĂ©nĂ©ralement livrĂ©es au pĂąturage et mal entretenues. Nous puiserons dans l’itinĂ©raire de M. Belaborde pour donner le tableau des bois de cette contrĂ©e aujourd’hui si dĂ©garnie d’arbres dans toutes ses provinces du centre. Le pĂšre Cil, Espagnol, a publiĂ© un plan d’administration des forĂȘts 5 son ouvrage atteste qu’elles Ă©taient dĂ©labrĂ©es il y a plus de trois cents ans, puisque Charles- Quint, dans une cĂ©dule de l’an i5i8, gĂ©mit de voir l’Espagne manquer de bois Ă  brĂ»ler et Ă  bĂątir. Philippe II fit, en i582, quelques rĂ©glemens en consĂ©quence 5 mais ces ordonnances allaient directement contre leur but; le premier soin que l’on devait prendre, et celui auquel on songeait le moins, Ă©tait de rendre les forĂȘts productives, en procurant le dĂ©bit de leurs produits. Le dĂ©faut de communication des provinces entre elles, la difficultĂ© extrĂȘme de transporter des arbres dans un pays oĂč il n’y a point de chemins pour les voitures, rend la valeur des forĂȘts Ă  peu prĂšs nulle, si l’on en excepte les produits qui se transportent aisĂ©ment, comme la rĂ©sine, l’écorce et le liĂšge. La plus grande partie des terres du royaume sont subdivisĂ©es, ou appartiennent Ă  des communautĂ©s religieuses et Ă  des communes. Une telle distribution empĂȘche bien que l’on ne fasse des coupes extraordinaires, mais elle favorise l’abandon et l’incurie qui entraĂźnent la ruine des bois. Les forĂȘts des Asturies et de la Galice renferment encore des bois de construction suffisans pour plusieurs flottes considĂ©rables. On voit dans les montagnes de ces provinces quelques sommets nus, mais les pentes sont couvertes de beaux chĂȘnes, de chĂątaigniers, de frĂȘnes, de noyers et de noisetiers, dont on exporte tous les ans les fruits en Angleterre. Il y a en Espagne beaucoup d’arbres et d’arbustes odorans ; les routes sont embaumĂ©es dans la saison des fleurs. Les montagnes de la Biscaye et de la Navarre sont couvertes d’arbres, de bois taillis et de pĂąturages excellons. Beaucoup d’arbres et d’arbustes y viennent sans culture, tels que les chĂȘnes, les arbousiers, les groseil- lers; d’autres sont le produit des soins industrieux des Biscayens, ce sont les rouvres blancs et les chĂątaigniers entĂ©s. Les montagnes de l’Alava et du Guipuzcoa, autrefois garnies de bois Ă©pais , en sont presque entiĂšrement dĂ©pourvues; ils ont Ă©tĂ© exploitĂ©s pour les forges. On compte dans les trois cantons de la Biscaye douze martinets et cent soixante-onze forges le tout peut fournir jusqu’à cent vingt-quatre mille quintaux de fer, ce qui fait Ă  peu prĂšs la mĂȘme production qu’une forge de France Ă  trois feux. L’abandon dans lequel on laisse les forĂȘts aprĂšs leur exploitation, tient Ă  ce que l’on n’espĂšre pas les exploiter encore une fois, et Ă  la difficultĂ© de faire de longs baux avec sĂ©curitĂ©. La Biscaye exporte du fer et des chĂątaignes. Les arbres les plus communs sont les chĂȘnes et les hĂȘtres. ; Il y a aussi des chĂȘnes Ă  glands doux, des frĂȘnes et \ quelques noyers. 78 HĂź* La Catalogne est trĂšs-bien cultivĂ©e; une des princi- pales attentions des Catalans se porte sur les plantations ; ils multiplient les arbres et veillent Ă  leur conservation avec beaucoup d’intelligence. Cette province a des forĂȘts de pins, de chĂȘnes verts et de liĂšges; elle fournit de liĂšge presque toute l’Europe. On en Ă©value l'exportation Ă  six millions de francs environ. Comme il ne faut que vingt ans pour qu’une plantation de chĂȘnes -liĂšges soit en pleine production, on ne doit pas craindre d’en manquer. La plaine de Valence est couverte d’arbres qui l’embellissent et l’enrichissent; il y a beaucoup d’avenues plantĂ©es d’aunes; les peupliers, les mĂ»riers, les caroubiers, les orangers, les grenadiers, les limoniers, y forment des forĂȘts. Les babitans d’une contrĂ©e de cette province s’appliquent Ă  planter et Ă  cultiver des palmiers qu’ils arrosent deux fois par semaine. La culture des oliviers produit, dans le royaume de Yalence, plus de quatre millions de francs par an; les mĂ»riers sont si nombreux, que la soie qui est produite chaque annĂ©e rapporte prĂšs de dix-huit millions de francs. L’amandier produit aussi beaucoup. Les montagnes portent beaucoup de chĂȘnes, de tĂ©- rĂ©binthes, de lentisques, de geniĂšvres et de pins Ă  basse tige. Dans les villages, on voit beaucoup de baraques construites avec des cannes et de la terre, et couvertes en paille. Les montagnes de la Vieille-Castille, d’Aragon et de LĂ©on sont couvertes de bois de chĂȘnes et de pins; mais les plaines sont gĂ©nĂ©ralement nues; les babitans s’imaginent que les arbres attirent les oiseaux destructeurs des rĂ©coltes c’est la contrĂ©e oĂč l’on nĂ©glige le plus g 79 les plantations et le soin des arbres; les environs des villages en sont mĂȘme dĂ©pourvus; la disette du bois y est si grande qu’on ne fait du feu qu’avec des herbes dessĂ©chĂ©es, de la paille et quelques arbustes. H y a beaucoup de troupeaux et de pĂąturages. Cette province, balayĂ©e par des vents impĂ©tueux qui ne trouvent point d’obstacles, est exposĂ©e Ă  des sĂ©cheresses qui rendent son sol trĂšs-aride. La Nouvelle-Castille et la Manche forment un plateau entrecoupĂ© de quelques montagnes boisĂ©es, dans lesquelles on trouve beaucoup de chĂȘnes verts et de romarins. On parcourt des plaines immenses sans rencontrer un seul arbre. Le terrain serait bon et fertile s’il n’était consumĂ© par la sĂ©cheresse que produit un soleil brĂ»lant dont rien ne tempĂšre la chaleur. Quelques parties de cette province, oĂč il y a des arbres, prĂ©sentent la culture la plus brillante. Les environs de Madrid, si l’on en excepte un bois de chĂȘnes qui se trouve Ă  deux lieues au nord de cette ville, sont peut-ĂȘtre la partie de l’Europe la plus aride et la plus dĂ©pourvue d’arbres. On croit que les bois en ont Ă©tĂ© dĂ©truits par les Maures. Le genĂȘt, la fougĂšre et le geniĂšvre sont les seules plantes qui servent pour le chauffage. L’Estramadure est la province d’Espagne la moins peuplĂ©e et la moins bien cultivĂ©e; le terrain, souvent en friche, y est presque entiĂšrement dĂ©garni de bois. En parcourant de vastes pĂąturages oĂč croissent quelques chĂȘnes, on trouve de distance en distance des puits et des mares qui servent Ă  abreuver les troupeaux; on voit ailleurs des campagnes dĂ©sertes couvertes de bruyĂšres ; de loin en loin se montrent des bois de chĂȘnes verts. 4i 80 Si» On attribue assez gĂ©nĂ©ralement la dĂ©population de cette province Ă  l’usage qu’on a de recevoir en hiver les troupeaux de moutons voyageurs de quelques provinces de l’Espagne, et d’envoyer les troupeaux de l’Estrama- dure voyager ailleurs en Ă©tĂ©. On Ă©value le nombre des bĂȘtes Ă  laines Ă  quatre ou cinq millions, et celui des hommes qui sont employĂ©s Ă  les soigner Ă  quarante mille. On voit ces troupeaux, en Ă©tĂ©, dans les vallĂ©es de LĂ©on, de la Vieille-Castille et d’Aragon; et, en hiver, dans l’Estramadure, la Manche et l’Andalousie. Il est permis aux bergers de couper des branches pour construire des huttes et pour faire du feu, ce qui dĂ©grade tous les arbres qui avoisinent les routes oĂč passent les troupeaux. Ces chemins ont quarante toises de largeur. Les propriĂ©taires de l’Estramadure trouvent plus commode d'affermer leurs pĂąturages que de bĂątir des fermes et de faire dĂ©fricher des terres; cette province est presque entiĂšrement privĂ©e de culture. Les bois sont soumis au parcours comme les pĂątures. Les chĂątaigniers, qui sont assez nombreux, fournissent une partie de la subsistance des habitans des campagnes. Autour de quelques monastĂšres, les montagnes et les vallĂ©es sont couvertes d’arbres, mais ce sont des oasis dans le dĂ©sert. La VĂ©ga de Grenade est la plaine la plus belle et la plus riche de l’Andalousie; les chĂȘnes y sont de la plus grande beautĂ©, et y forment, avec les orangers et les citronniers, des massifs souvent impĂ©nĂ©trables aux rayons du soleil. Mais beaucoup d’autres plaines n’ont que des champs et des pĂąturages sans arbres. Le chemin de Cordouc Ă  SĂ©ville parcourt un dĂ©sert entrecoupĂ© de 81 bosquets de cystes et de lentisques. Les montagnes sont revĂȘtues de forĂȘts de robles chĂȘnes Ă  liĂšge immenses et impĂ©nĂ©trables. Dans le royaume de Murcie, on fait quelquefois plusieurs lieues sans apercevoir d’arbres. On rencontre ailleurs des cliĂȘnes, de petits bois de caroubiers et d’oliviers, et surtout des mĂ»riers. Le produit de la soie s’élĂšve par an Ă  plusieurs millions de francs. La ville d’Elclia est bĂątie au milieu d’une forĂȘt de palmiers. Quoique les froids soient souvent trĂšs-vifs et les nuits trĂšs-fraĂźches en Espagne, on se chauffe trĂšs-peu et trĂšs- mal. On supplĂ©e aux cheminĂ©es par des brasiers portatifs dans lesquels on met du charbon avec quelques graines odorifĂ©rantes^ il serait en effet impossible de transporter du bois Ă  de grandes distances dans un pays oĂč il n’y a point de chemins pour les voitures} le charbon peut seul supporter les frais du voyage. On ne connaĂźt point les Ă©chalas en Espagne} les ceps de vigne forment des souches basses, trĂšs-grosses et trĂšs-fortes. On est dispensĂ© de conserver des bois taillis pour fournir des appuis Ă  la vigne. Le triste Ă©tat des forĂȘts a Ă©tĂ© l’objet de la sollicitude d’une sociĂ©tĂ© Ă©conomique Ă©tablie Ă  Madrid, qui, dans un excellent mĂ©moire traduit par M. Delaborde, indiquait les moyens de perfectionner l’agriculture et de restaurer les forĂȘts. Le premier de ces moyens consiste Ă  affranchir les propriĂ©taires de ce pĂąturage exploitĂ© sur le sol du royaume au profit de l’association Ă  laquelle appartiennent les troupeaux transhurnans. Il est vrai , dit la sociĂ©tĂ©, qu’il ne faudrait pas se borner Ă  rendre Ă  la propriĂ©tĂ© le droit de faire des enclos} mais qu’il est indispensable d’abroger les ordonnances des forĂȘts et les Ă©dits municipaux de plusieurs com- 4g 82 f» munes, et d’îter tonte entrave au libre exercice de la propriĂ©tĂ©. Ces ordonnances ont arrĂȘtĂ© l’essor que des propriĂ©taires intelligens auraient pu prendre pour amĂ©liorer les bois. cĂ©der la taxe, Ă  souffrir les reconnaissances et les » visites officielles, Ă  donner des renseignemens sur » l’état et le nombre de leurs plants, comment veut-on » que ces propriĂ©taires leur consacrent leurs soins? » Par quel bouleversement d’idĂ©es a-t-on pu substituer » Ă  l’intĂ©rĂȘt personnel la crainte des chĂątimens? Faites » au contraire que les propriĂ©taires tirent de leurs forĂȘts » des avantages exclusifs. » Les rĂ©sultats d’un rĂ©gime aussi absurde sont que le bois Ă  brĂ»ler et Ă  bĂątir est devenu trĂšs-rare exceptĂ© dans les montagnes depuis les PyrĂ©nĂ©es jusqu’au cap FinistĂšre d’un cĂŽtĂ©, et au cap CrĂ©us d’un autre cĂŽtĂ©. La sociĂ©tĂ© avait observĂ© que les arrosemens sont nĂ©cessaires pour la prospĂ©ritĂ© des plantes, parce que la plupart des terres ne produisent, sans ce secours, qu’un maigre pĂąturage. Si l’on excepte les provinces septentrionales, situĂ©es aux pieds des PyrĂ©nĂ©es, et lesvallees qui dĂ©rivent de ces montagnes,, et qui s’étendent dans l’intĂ©rieur de l’Espagne, Ă  peine trouverait-on une contrĂ©e oĂč, Ă  l’aide d’irrigations bien entendues, on ne pĂ»t tripler les fruits de la terre, et faire croĂźtre de beaux arbres, 85 ; Portugal. L’auteur de la statistique du Portugal, Ă  qui nous allons emprunter quelques descriptions, pense que l’état de misĂšre de ce royaume, dont les deux tiers sont en friche, tient Ă  ce qu’il achĂšte les produits de l’industrie des Ă©trangers, et qu’il nĂ©glige son agriculture et ses manufactures. S’il avait des forges et des verreries dont les travaux fussent encouragĂ©s par d’assez grands bĂ©nĂ©fices, les forĂȘts mĂ©riteraient la peine d’ĂȘtre bien conservĂ©es et bien exploitĂ©es; mais loin de lĂ , le Danemarck et Dantzick envoient au Portugal des bois de construction, et le sol de ce dernier pays est couvert de forĂȘts rĂ©duites en broussailles. La forĂȘt de Leiria fut plantĂ©e, dit-on, Ă  la fin du i3. e siĂšcle; elle consiste surtout en pins maritimes. De- puis qu’elle existe, on n’a rien fait pour sa conservation, ; et elle sera bientĂŽt Ă©puisĂ©e, Ă  moins que l’on ne s’occupe j. de la rĂ©gĂ©nĂ©rer. Le bolet vivace y cause de grands ra- Ăź; vages ; il s’attache surtout aux insertions des branches et des bourgeons, et il occasione, lorsque ses racines I pĂ©nĂštrent Ă  travers l’écorce, un Ă©coulement de sĂšve qui dĂ©truit l’arbre. Il y a beaucoup de chĂȘnes-liĂšges dissĂ©minĂ©s dans des bruyĂšres sans bornes. Des chemins difficiles traversent d’épaisses forĂȘts oĂč la vigne sauvage rampe le long des arbres. On exporte du liĂšge, mais on n’extrait point de goudron dans les forĂȘts de pins. On ne voit en Portugal ni sapins ni hĂȘtres; sur les sommitĂ©s les plus Ă©levĂ©es, croissent, dans les endroits arrosĂ©s , des forĂȘts de bouleaux et des cormiers sur les rochers ; en descendant vers le nord, on trouve des forĂȘts de chĂȘnes, oĂč les arbres sont assez clair-semĂ©s. Ensuite paraĂźt la rĂ©gion des chĂątaigniers , les vĂ©ritables forĂȘts ce rapprochement des progrĂšs de la fabrication du fer en France car ce mĂ©tal est beaucoup moins cher qu’il ne l’était il y a quatre siĂšcles, en comparaison du prix des denrĂ©es. Vers l’an 1690, le bois se vendait Ă  Paris 11 francs la voie; et la mesure de blĂ©, Ă  peu prĂšs Ă©quivalente au double dĂ©calitre d’aujourd’hui, valait i 5 sous Ă  la mĂȘme Ă©poque. Au XIX. e siĂšcle, le double dĂ©calitre de blĂ© vaut 4 fr., et la voie de bois se vend 44 francs ainsi, en supposant que les droits actuels soient Ă  peu prĂšs dans la mĂȘme proportion que les anciennes taxes, le prix du blĂ© a quintuplĂ©, et le prix du bois a seule ment quadruplĂ© Ă  Paris depuis 140 ans. Il est superflu d’observer que le prix du blĂ© est trĂšs- variable lorsqu’il n’est pas calculĂ© sur un grand nombre d’annĂ©es. Une ordonnance de 1567 fixe le prix du gros bois pour Paris Ă  son ancien taux, savoir 60 sols tournois la charrette de quatre-vingt-dix bĂ»ches de la jauge et mesure requises. Une autre espĂšce de bois Ă©tait taxĂ©e Ă  un Ă©cu un tiers, ce qui est Ă  peu prĂšs le douziĂšme du prix d’aujourd’hui. La mĂȘme ordonnance rĂšgle la taxe du blĂ© Ă  24 livres 10 sous le tonneau de 2000 pesant la livre de seize onces, Ă©quivalant Ă  neuf septiers, mesure de Paris. D’aprĂšs cette taxe, une mesure Ă©gale Ă  notre double dĂ©calitre valait 36 centimes 7 sous environ, ce qui fait le douziĂšme du prix d’aujourd’hui, comme pour le bois. Le prix des denrĂ©es avait triplĂ© de i 567 Ă  1690. Nous allons connaĂźtre l’accroissement que le revenu g 123 des forĂȘts a pris depuis cette derniĂši’e Ă©poque jusqu’à nos jours. On lit dans le testament politique du cardinal de Richelieu ce qui suit Etat des revenus de l’épargne Vente des bois ordinaires, 5 5 0,000 livres. Produit des domaines, 55 o,ooo livres. Le produit des bois et domaines Ă©tait de 11 Ă  12 millions en 1784. Depuis le rĂšgne de Louis XIII, le domaine s’était agrandi par les conquĂȘtes , mais les engagemens en avaient distrait une grande partie. On peut donc calculer sans exagĂ©ration que le revenu du domaine,y compris les bois, Ă©tait en 1 7 S4 au moins douze fois plus considĂ©rable qu’il ne l’était avant l’annĂ©e 1640. Le tableau des consommations de la ville de Paris en ] 824 nous donne l’occasion de faire quelques remarques relatives Ă  notre objet. La consommation du pain dans la ville de Paris est Ă©valuĂ©e Ă  38 millions de francs. Celle du bois Ă  brĂ»ler est portĂ©e Ă  i 5 millions. On peut penser au premier aspect que celle-ci est disproportionnĂ©e avec la premiĂšre ; mais en continuant de lire le tableau, on voit que la consommation du sucre s’élĂšve Ă  27 millions de francs, et celle du cafĂ© Ă  10 millions c’est une dĂ©pense totale de 37 millions, qui dĂ©passe de beaucoup le prix du bois de chauffage joint Ă  celui du charbon et des bois de charpente que l’on emploie annuellement dans cette ville. Si l’on additionne les dĂ©penses de toute espĂšce en meubles, habillemens, parures, etc., on verra que la dĂ©pense du chauffage n’entre guĂšre que pour un douziĂšme dans la dĂ©pense totale de l’entretien de chaque 124 ÂŁ!* ‱ mĂ©nage. En effet, la dĂ©pense moyenne et annuelle est Ă©valuĂ©e 200 francs par habitant, ce qui fait, pour 900,000 habitans, 180 millions, c’est-Ă -dire douze fois la valeur totale du chauffage. Personne n’ignore qu’en se servant d’appareils mieux disposĂ©s que les cheminĂ©es ordinaires,on obtiendrait une grande Ă©pargne de combustible. M. le professeur Ber- nouilli a calculĂ© que dans ces cheminĂ©es, les sept huitiĂšmes de la chaleur produite par le bois sont en pure perte. On pourrait facilement Ă©pargner la moitiĂ© du combustible que l’on use ordinairement, et obtenir en mĂȘme temps une chaleur plus forte ou plus durable, ce qui serait, sous ce dernier point de vue surtout, une grande amĂ©lioration. Il importe de dĂ©truire une erreur trop gĂ©nĂ©ralement rĂ©pandue. Le bas prix du combustible ne donne pas toujours aux habitans des contrĂ©es boisĂ©es le moyen de se procurer un chauffage abondant. Le bois n’est guĂšre Ă  bon marchĂ© que dans les pays dĂ©pourvus d’industrie, oĂč le peuple est misĂ©rable ; et il est plus difficile Ă  tel habitant voisin d’une forĂȘt de payer 3 francs pour acheter une voiture de bois, qu’à l’artisan d’une ville de s’en procurer une pour i 5 francs. J’ai remarquĂ©, dans une contrĂ©e oĂč le bois de hĂȘtre ne coĂ»te que 2 francs le stĂšre, que les manouvriers sont trop pauvres pour en acheter, et qu’ils ne brĂ»lent que du genĂȘt-balai, dont souvent ils sont mĂȘme dĂ©pourvus. Si l’industrie pĂ©nĂštre un jour dans ce pays, le prix du bois doublera, mais les habitans auront quatre fois plus de moyens de s’eti procurer. Il y a trĂšs-peu d’usines Ă  feu en Espagne, et le prix du chauffage y est excessif. Le charbon valait 4 livres tournois le quintal Ă  l’époque du voyage de M. de la Borde. Le bois rond de chĂȘne ou d’olivier valait 2 5 sous tour- 125 » nois le quintal, ce qui fait environ 3o francs le stĂšre. Ce prix, composĂ© Ă  peu prĂšs exclusivement des frais de main-d’Ɠuvre et de transport 1 , est liors de la portĂ©e des gens du peuple. En France, rien de plus misĂ©rable et de plus mal chauffĂ© que les mĂ©nages qui vont gaspiller le bois sec et les menues branches ; cependant ils obtiennent ce combustible pour rien 5 mais un travail mieux dirigĂ© procurerait facilement une valeur trois ou quatre fois plus forte que celle de ce bois qui est si pĂ©niblement amassĂ©, et plus pĂ©niblement encore apportĂ© dans les chaumiĂšres. M. Moreau de JonnĂšs a donnĂ©, dans ses recherches sur le commerce, le tableau de la dĂ©pense annuelle d’un ouvrier et de sa famille, composĂ©e en tout de cinq individus; le chauffage entre dans cette dĂ©pense pour moins du vingtiĂšme. Il Ă©value Ă  3oo francs la consommation de blĂ© que fait cette famille ; le chauffage devant coĂ»ter au plus 3o francs, la proportion est la mĂȘme que dans le XIV. e siĂšcle. Ce rĂ©sultat peut paraĂźtre extraordinaire Ă  qui sait qu’une grande partie de nos terres cultivĂ©es Ă©taient encore couvertes de forĂȘts dans le XIY. e siĂšcle, et que depuis cette Ă©poque la population s’est considĂ©rablement accrue; mais les faits s’expliquent par deux circonstances x.° l’emploi des bois de charpente est bien diminuĂ© depuis que l’on construit en pierre les bĂątimens des villes et une grande partie de ceux des campagnes ; 2. 0 les arbres qui ne franchissaient jamais les limites des forĂȘtsoĂč ils Ă©taient nĂ©s se transportent aujourd’hui Ă  une 1 Les transport.? se font Ă  dos de mulet, et coĂ»tent trois fois plus que te transport par charrette. L’enlĂšvemen t des grands arbres est presque impossible, ce qui les rend inutiles et sans valeur. 126 grande distance, ce qui accroĂźt dans une forte proportion les approvisionnemens des consommateurs. Ce qui occasione la chertĂ© du chauffage, c’est la difficultĂ© des transports ; ce qui en faitr la privation, c’est la pauvretĂ© des habitans. La chertĂ© du bois pris dans les forets ne peut jamais ĂȘtre excessive, car ce serait une prime pour la production. CHAPITRE III. DES FORÊTS CONSIDÉRÉES RELATIVEMENT A L’AGRICULTURE. En AmĂ©rique, dans les contrĂ©es abandonnĂ©es Ă  leur fĂ©conditĂ© naturelle, et garnies de forĂȘts, il faut Ă  la subsistance d’un sauvage quatre-vingts ou cent arpens ; tandis que, dans les parties bien cultivĂ©es de l’Europe, comme i En i 4 l 8 , le moule de bĂ»ches valait Ă  Paris 20 sous. C’était un prix extraordinaire et liors de la portĂ©e du peuple. Par lettres patentes du 26 novembre de la mĂȘme annĂ©e, il fut ordonnĂ© aux maĂźtres des eaux et forĂȘts de faire couper et vendre dans la foret de Bondy prĂšs Paris, chaque arpent pour 8 livres tournois et au-dessous jusqu’à 6 livres. On ordonna aux marchands de vendre le bois Ă  un prix raisonnable, et de dĂ©livrer dĂ©sormais le moule de bĂ»ches pour 6 sous parisis 8 sous tournois et au-dessous. En 1419, la chertĂ© s’étant renouvelĂ©e, on fit couper le bois de Yincennes, et le moule coĂ»tait 16 ou 18 sous parisis, ce qui Ă©tait excessif. En i 48 i, l’hiver fut des plus rudes, et le bois se vendait Ă  Paris 7 Ă  8 sous le moule. Le moule formait le quart de la voie. Ainsi, dans un siĂšcle oĂč les environs de Paris Ă©taient encore couverts de forĂȘts de haute futaie, les habitans de cette ville ne pouvaient avoir de quoi se chaulfer; ils 11c possĂ©daient pus meme les moyens de solder les frais indispensables d’abattage, de façon et de transport des bois. 127 St en Flandre, deux arpens un hectare suffisent Ă  la nourriture de chaque individu. La culture des contrĂ©es du nord de l’Europe est encore bien arriĂ©rĂ©e. L’Allemagne a conservĂ© en bois et marais plus du tiers de son Ă©tendue superficielle. Les forĂȘts de la Pologne occupent encore la moitiĂ© de la superficie totale ; les eaux et les terres incultes en couvrent le quart ; les terres labourables et les prairies forment le surplus. Si l’on considĂšre la latitude de ce pays, on peut s’étonner que ses productions ne soient pas plus nombreuses et plus variĂ©es; mais le dĂ©faut d’industrie en est la cause non seulement le sol des forĂȘts ne rapporte rien, mais les arbres eux-mĂȘmes forment un capital stĂ©rile, tandis qu’un terrain cultivĂ© en chanvre rapporte plus de 200 fr. l’hectare. Il n’en est pas de mĂȘme dans les pays industrieux. L’étendue totale du sol de l’Angleterre est de trente- huit millions d’acres onze millions deux cent mille hectares, non compris l’Ecosse. On y compte Ă  peu prĂšs deux millions d’acres en hois taillis et en plantations; la partie boisĂ©e est d’environ un vingtiĂšme de la surface du royaume. L’acre de bois quarante ares rapporte environ 3 ofr. de notre monnaie, ce qui fait environ 75 fr. par hectare. Les meilleures forĂȘts de France, situĂ©es prĂšs de Paris, ne donnent pas ce revenu. Le revenu des bois en France est de 1 Sfr. par hectare; la mente Ă©tendue, cultivĂ©e en blĂ©, produit 36 fr.; cultivĂ©e en vigne, elle rend 5ofr. Un hectare de bois rapporte quatre fois plus en Angleterre qu’en France, ce qui nous explique pourquoi les bois proprement dits sont beaucoup mieux soignĂ©s dans 1 un de ces royaumes que dans l’autre. Tel est l’effet de 128 D* la culture sur les arbres, que les terres arables en Angleterre ne rapportent pas autant de revenu que les bois cultivĂ©s. Cependant on n’y manque ni de chauffage, ni d’arbres pour les constructions. Dans d’autres contrĂ©es, les forĂȘts incultes, quoique couvertes d’arbres sĂ©culaires, rapportent beaucoup moins que de simples taillis bien cultivĂ©s; cette diffĂ©rence Ă©tait dĂ©jĂ  apprĂ©ciĂ©e en Italie du temps des Romains, qui rangeaient les biens de campagne en neuf classes, d’aprĂšs la gradation de leurs revenus ; ils mettaient au premier rang les vignes, au second les jardins, au troisiĂšme les plants de saule, au quatriĂšme les plants d’olivier, au cinquiĂšme les prĂ©s, au sixiĂšme les terres Ă  froment, au septiĂšme les bois taillis, au huitiĂšme les plants d’arbres mĂ©langĂ©s de vignes, au neuviĂšme les forĂȘts de chĂȘnes pour nourrir les cochons. Les bois taillis Ă©taient prĂ©fĂ©rĂ©s aux forĂȘts, parce qu’ils Ă©taient situĂ©s dans le voisinage des habitations. La valeur des bois, comme celle de toute autre denrĂ©e ou marchandise, est nulle si elle est hors de la portĂ©e des consommateurs. Aujourd’hui mĂȘme, dans l’Italie septentrionale, on prĂ©fĂšre les bois taillis aux vieilles forĂȘts. On nomme bosco-misto un terrain dans lequel croĂźt la bruyĂšre sous la futaie ; on en estime le fonds et la superficie moitiĂ© du prix d’une terre labourable de mĂȘme Ă©tendue, le tiers d’une surface Ă©gale qui serait couverte de vignes, et le cinquiĂšme de la mĂȘme superficie qui serait en nature de prĂ© susceptible d’arrosement. L’abondance des produits de la terre croĂźt en proportion de l'Ă©tendue des travaux qui ont dĂ©veloppĂ© sa fĂ©conditĂ© primitive; et Ă  la longue, la culture doit s appliquer Ă  toutes les plantes, soit dans les prairies, soit dans les forĂȘts. Hi 129 f> C’est au discernement du cultivateur Ă  choisir les terres les moins propres Ă  l’agriculture pour les planter en bois. Un sol granitique qui ne conviendra pas aux cĂ©rĂ©ales, produira de trĂšs-beaux bois ; la culture forestiĂšre sera avantageuse dans les mauvaises terres, dans les fonds Ă©puisĂ©s et sur les coteaux. Les arbres fruitiers, les chĂątaigniers surtout, procurent Ă  la fois des alirnens, du combustible et des bois Ă  bĂątir. Cependant les pays douĂ©s de ces ressources si prĂ©cieuses sont pauvres lorsque les habitans se bornent Ă  la seule culture des arbres; le chĂątaignier, disent les Italiens, est le froment de la montagne;un arpent plantĂ© de chĂątaigniers produit, lorsque la rĂ©colte est bonne, beaucoup plus de matiĂšre nutritive que n’en donne un arpent de seigle; mais le blĂ© manque rarement, il est facile de le conserver, tandis que le grand dĂ©savantage des chĂątaigniers est dans l’inĂ©galitĂ© disproportionnĂ©e des rĂ©coltes, qui souvent manquent presque entiĂšrement, et dans la difficultĂ© de conserver leurs fruits. I EnCorse,on voulait dĂ©truire les forĂȘts de chĂątaigniers, dans la vue d’exciter les habitans Ă  cultiver davantage les cĂ©rĂ©ales; mais, pour vaincre leur rĂ©pugnance au travail, qui s’étend jusqu’à nĂ©gliger la culture des oliviers, il eĂ»t Ă©tĂ© prĂ©fĂ©rable de dessĂ©cher les marais, et de les cĂ©der Ă  des familles de cultivateurs que l’on aurait appelĂ©es du continent. En Orient, en Afrique, les peuples qui vivent des fruits du cocotier sont misĂ©rables, et croupissent dans un Ă©tat voisin de la barbarie ; mais ceux qui n’ont que des arbres plantĂ©s de leurs mains, et qui les cultivent bien, s approchent de la civilisation. Il est certain que la culture fait de nos jours des conquĂȘtes dans les pays nouvellement habitĂ©s, et s’arnĂ©- 1g 130 » liore dans les lieux anciennement cultivĂ©s. Les dĂ©parte- mens du midi, l’ArdĂšche, la CorrĂšze, la Haute-Vienne, l’Aveyron et la Dordogne, prĂ©sentent Ă  la fois des forĂȘts de chĂątaigniers et de belles cultures de plantes cĂ©rĂ©ales. Cette combinaison de la plantation des arbres et de la culture des plantes alimentaires ou fourragĂšres, Ă©tant bien faite, sera le point le plus Ă©levĂ© du perfectionnement de l’agriculture et de la science forestiĂšre. En 1709, la France, affligĂ©e d’une famine, fit usage d’une immense quantitĂ© de glands; une pareille ressource serait bien faible aujourd’hui que les neuf dixiĂšmes des massifs de futaies sont dĂ©truits, mais on en est dĂ©dommagĂ© au centuple par les produits agricoles, qui sont devenus infiniment plus variĂ©s et plus considĂ©rables. Nous ajouterons Ă  ce chapitre quelques considĂ©rations relatives aux dĂ©frichemens. Les Italiens ont dĂ©frichĂ© les bois, et converti en terres labourables les cĂŽtĂ©s et les sommets des montagnes ; la terre, ne se trouvant plus soutenue par les racines des arbres, tombe dans les riviĂšres avec de vastes fragmens de rochers, et couvre les vallĂ©es. L’Adige et le PĂŽ ont dĂ©truit des milliers d’arpens de terres qui Ă©taient bien cultivĂ©es; des provinces entiĂšres sont dĂ©solĂ©es par des inondations; les digues, que l’on Ă©lĂšve Ă  grands frais, se rompent souvent par la violence des ouragans; les dĂ©- bordemens charient quelquefois un limon qui engraisse les terres; mais il n’y a point de dĂ©dommagement possible pour les montagnes car si une pente qui n’a qu’un pied de terre vĂ©gĂ©tale perd seulement chaque annĂ©e le demi-quart d’une ligne sur sa superficie, il ne faut que onze cent cinquante-deux ans pour mettre le me a nu. Les dĂ©sordres qu’entraĂźne le dĂ©frichement des mon- t§ 151 tagnes se font peu sentir lorsque des travaux faits avec art, comme des terrasses ou des tranchĂ©es, retiennent les terres. Les montagnes du pays de Lucques sont presque toutes plantĂ©es de vignes, d’oliviers, de chĂątaigniers, de mĂ»riers, de blĂ©s; on a dĂ©frichĂ© une partie de la plaine, et, par le moyen des digues et des portes qui empĂȘchent la communication de l’eau de la mer, on maintient les terres en Ă©tat de culture ; le nombre des habitans a quintuplĂ© dans quelques endroits depuis ces travaux. Le dĂ©frichement des bois qui ne sont pas situĂ©s sur la pente des coteaux se rĂ©pare facilement; il ne faudrait pas que la France restĂąt entiĂšrement inculte pendant un siĂšcle pour qu’elle se couvrĂźt de nouvelles forĂȘts. DĂšs qu’un pays se dĂ©peuple, les buissons et les arbres croissent de proche en proche; le dĂ©bordement des x’iviĂšres convertit les vallĂ©es en marais. L’ancienne Italie, qui Ă©tait cultivĂ©e avec un soin extrĂȘme, s’était couverte, dans le moyen Ăąge, de forĂȘts et de marais dont une partie a Ă©tĂ© depuis dessĂ©chĂ©e et dĂ©frichĂ©e. Mais il reste des provinces entiĂšres oĂč l’agriculture n a pu recouvrer ce quelle avait perdu. Les villages de la Maremme, autrefois trĂšs-peuplĂ©s, n’ont plus d’habi- tans; de grandes villes ont disparu; les lacs et les marais, n’étant plus retenus par l’industrie humaine, ont inondĂ© les plaines. On retrouve au milieu des bois des ceps de vigne et des oliviers sauvages, tristes vestiges de l’ancienne culture ; les territoires du Val-d’Esa, du Sien- nois, et des contrĂ©es voisines, ne sont plus que des forĂȘts peuplĂ©es de liĂšges, de chĂȘnes et de frĂȘnes, oĂč vivent d immenses troupeaux de cochons. La croissance des arbres y est si rapide que dĂšs l’ñge de quarante ans ils sont propres au service de la marine; on en tire du merrain fg 132 $» pour l’Espagne, et du cliarbon pour GĂšnes; mais ce sont de pauvres produits en comparaison de ceux que donnait une culture florissante. Ces observations prouvent que le dĂ©frichement des montagnes est souvent nuisible, mais que celui des plaines ne peut jamais l’ĂȘtre sous le rapport essentiel de l’agriculture et de la tempĂ©rature. CHAPITRE IY. DES MINES ET DES USINES. Les souverains delĂ  Russie, en Ă©tablissant des forges sur lesbords de l'Oural,ont rendu un peu agricoles les peuples nomades du voisinage. Ces forges, dont la fondation est contemporaine des derniers travaux de Pierre-le-Grand, possĂšdent des forĂȘts considĂ©rables, oĂč les bouleaux et les peupliers dominent. Ces arbres sont mĂ©langĂ©s de mĂ©ioses, que l’on ne daigne pas abattre, parce que leur charbon pĂ©tille dans les fourneaux oĂč se fond le minĂ©rai. On les laisse sur pied, et bientĂŽt ils sont renversĂ©s par les vents. Les chemins qui conduisent dans ces usines ont Ă©tĂ© pratiquĂ©s Ă  travers des forets marĂ©cageuses ; on a eu soin d’ouvrir des canaux des deux cotĂ©s, de relever les endroits bas et enfoncĂ©s, d’établir des ponts et des fossĂ©s d’écoulement, et de niveler partout le terrain. Lorsque les forĂȘts voisines sont Ă©puisĂ©es, on reconstruit d’autres fourneaux dans les forĂȘts vierges. Le transport des bois, l’abattage et la main d’Ɠuvre, coĂ»tent fort cher en SibĂ©rie la main-d’Ɠuvre, parce que le pays manque de population; les frais de transport, parce que la confection et l’entretien des chemins sont difficiles ; les marais, les arbres abattus, les blocs de roc dĂ©tachĂ©s, forment Ă  chaque pas des obstacles, mais le gĂ©nie a su les vaincre 1. ’ Dans une partie de la Russie, les mineurs Ă©taient, il y a quelque temps, levĂ©s en recrues, comme les militaires -, les charrois et les autres travaux se faisaient par corvĂ©es, Ă  vingt lieues Ă  la ronde. Les bois et les charbons ne se payaient pas, Ă  moins qu’une lĂ©gĂšre redevance ne soit regardĂ©e comme un prix d’achat. Un tel Ă©tat de choses est favorable Ă  l’industrie dans les premiers temps de l’établissement d’une usine ; mais s’il se prolongeait, il en rĂ©sulterait seulement que les directeurs gagneraient davantage, et se relĂącheraient dans leurs travaux. Les mineg de Danmora, en SuĂšde, sont renommĂ©es comme produisant le meilleur fer de l’Europe5 c’est l’une des principales richesses du royaume, et l’un des plus solides appuis de la prospĂ©ritĂ© publique. La province d’Upland, couverte de rochers pelĂ©s, de marais et de bois, serait entiĂšrement dĂ©serte s’il n’y avait pas des forges qui lui donnent l’apparence d’un pays civilisĂ©. Une partie du minĂ©rai de SuĂšde se pĂȘche dans les lacs, et la navigation favorise les transports des matiĂšres premiĂšres et des mĂ©taux fabriquĂ©s. Tandis que les forges prospĂšrent dans le nord, les usines des rĂ©gions mĂ©ridionales sont successivement abandonnĂ©es. Les mines de fer de Chypre, de Minorque, de Majorque, de l’üle d’Elbe, et un grand nombre d’au- i Une singularitĂ© remarquable, c’est que le minĂ©rai de la forge de J’uhenskoĂŻ n’est autre chose que du bois pĂ©trifiĂ© qui renferme des grains de fer. On y distingue encore les couches concentriques et l’écorce des arbres. 9 tg 134 18* trĂšs, sont dĂ©laissĂ©es. Cela lient principalement Ă  l’état rĂ©trograde de l’industrie dans l’orient et dans le midi. Il se fait un peu de fer dans le royaume de Naples, mais la plus grande partie de celui que l’on emploie se tire du nord, tandis que l’on pourrait en fabriquer assez pour les besoins du pays. Les usines du Portugal ne sont pas dans une meilleure position. Les vices du rĂ©gime rĂ©glementaire de ce pays sont tels, qu’une verrerie qui prenait gratuitement le bois dont elle avait besoin, pouvait Ă  peine se soutenir. C’est l’effet commun des privilĂšges long-temps prolongĂ©s. Nos usines Ă  fer des PyrĂ©nĂ©es orientales ne prospĂšrent pas, malgrĂ© l’abondance des mines, et le trĂšs-bas prix du charbon dans les forĂȘts, qui se dĂ©gradent et se rĂ©duisent en buissons, uniquement parce qu’elles ne rapportent rien, et que les charbons rendus dans les forges ne valent guĂšre que les frais de fabrication et de transport i . Les Ă©tats du nord ont beaucoup mieux su tirer parti de leurs richesses minĂ©rales que ceux du midi. La partie de la population qui s’occupe Ă  extraire les minĂ©rais, Ă  les traiter, Ă  couper le bois, Ă  transporter les charbons, Ă  fabriquer les mĂ©taux, et Ă  les rĂ©duire en ouvrages de toute espĂšce, est d’un huitiĂšme Ă  trois huitiĂšmes de la population totale dans une partie de l’Allemagne. La chertĂ© croissante du combustible fait recourir Ă  la houille. C’est une grande Ă©poque dans l’bistoire industrielle d’un peuple que celle oĂč il commence a employer ce combustible et les machines qu’il peut faire i Des routes construites Ă  grands frais pour des exploitations bornĂ©es, ont peu d’utilitĂ©. ST 133 » mouvoir. C’est par lĂ  que l’industrie de l’Angleterre surpasse celle du reste du monde. La France peut prĂ©tendre Ă  la mĂȘme prospĂ©ritĂ©. Elle,ne conservera que les forĂȘts qui lui sont nĂ©cessaires ; toutes les autres seront livrĂ©es successivement Ă  l’agriculture,pour subvenir aux besoins d’une population toujours croissante. Les bois des montagnes, et des terrains peu propres aux productions agricoles, seront employĂ©s au chauffage, Ă  la charpente, Ă  la marine. Les dĂ©bouchĂ©s seront ouverts par des routes qui, en donnant une grande valeur aux forĂȘts, en assureront la conservation et la reproduction. CHAPITRE V. DE L’INFLUENCE DU TAUX DE L’INTÉRÊT DE LARGENT SUR LA CONSERVATION DES FORÊTS. En France, un propriĂ©taire se voit-il dans la nĂ©cessitĂ©, ou d’emprunter un capital Ă  6 pour cent, ou d’exploiter Une coupe de bois par anticipation, il prend sans hĂ©siter le dernier parti. Ses forĂȘts sont bien soignĂ©es, parce qu’elles lui prĂ©sentent une ressource assurĂ©e dans ses besoins prĂ©vus ou imprĂ©vus. En Pologne, un grand seigneur emprunte Ă  20 pour cent, parce qu’il juge inutile d’abattre des futaies, dont la vente ne lui produirait presque rien, et qui lui rendent un certain revenu en glandĂ©e et en pĂąturage 5 mais si les capitaux Ă©taient Ă  bon marchĂ©, il pourrait construire des forges et des verreries, qui donneraient de la valeur Ă  ses bois. L’intĂ©rĂȘt Ă©tait trĂšs-haut en France, comme dans le reste de l’Europe, avant le i 6 . e siĂšcle. Philippe 1Y le g 15G fixa Ă  20 pour cent; mais plusieurs Ă©vĂšnemens ont amenĂ© une diminution ; l’accumulation des capitaux est devenue plus facile aprĂšs la dĂ©couverte de l’AmĂ©rique; la renaissance de l’agriculture et des arts a donnĂ© aux terres une valeur qu’elles n’avaient pas auparavant ; la destruction des bois, suite des progrĂšs de l’agriculture, a Ă©tĂ© trĂšs-grande, surtout dans le i5. e siĂšcle; les rois concĂ©daient leurs forets Ă  titre d’engagement; ces aliĂ©nations augmentaient singuliĂšrement la richesse des particuliers , et par consĂ©quent celle de l’état. On faisait disparaĂźtre des arbres inutiles, mais l’aisance gĂ©nĂ©rale rĂ©sultait des dĂ©frichemens. Ce n’est qu’à dater de cette mĂ©morable Ă©poque que le bois eut gĂ©nĂ©ralement une valeur vĂ©nale dans les forĂȘts, et que les propriĂ©taires et l’état ont mis en compte l’intĂ©rĂȘt qu’ils pouvaient retirer de la vente de leurs coupes. Tout le monde a pu remarquer qu’un capital trĂšs- faible, qui serait placĂ© pendant deux ou trois siĂšcles, produirait une somme immense; par exemple, 100 fr. placĂ©s pendant deux cents ans Ă  5 pour cent avec intĂ©rĂȘts composĂ©s, donneraient 1,730,000 fr. Comment se fait-il que, ni un gouvernement, ni un particulier, ne puissent faire une semblable accumulation, qui n’embrasse que six gĂ©nĂ©rations? Cependant nous voyons partout des chĂȘnes de deux cents ans, qui ne sont autre chose qu’un capital accumulĂ©. Cette disposition, qui nous porte Ă  conserver des arbres, est donc moins rare que l’on ne pense. La culture, en favorisant l’accroissement des bois, aura une grande influence sur leur conservation. En effet, cet accroissement, que l’on pouvait Ă©valuer Ă  3 pour cent de la valeur capitale, sera dĂ©sormais de 5 pour cent, par l’effet de l’application de l’art et du travail Ă  l’éco- 157 §$ â–ș nomie forestiĂšre. Il sera aussi avantageux de laisser croĂźtre un taillis que d’en placer le produit dans un prĂȘt ou une acquisition. Il n’y aura donc plus de motif d’abattre prĂ©maturĂ©ment les taillis. CHAPITRE YI. DES FORÊTS CONSIDÉRÉES RELATIVEMENT A LA TEMPÉRATURE. La destruction des forĂȘts sauvages , et surtout la culture qui en a dessĂ©chĂ© le sol, ont Ă©chauffĂ© la tempĂ©rature. La France n’est plus cette Gaule couverte de forĂȘts , dont les fleuves Ă©taient gelĂ©s durant des mois entiers. Les mĂ»riers et les oliviers croissent Ă  l’occident des Alpes. Les plantes d’Asie s’acclimatent au nord de l’Europe. Mais souvent le dĂ©boisement des montagnes est pernicieux il dessĂšche les sources ; il livre Ă  une transpiration immodĂ©rĂ©e des plantes dont les racines cherchent en vain l’humiditĂ© et l’ombrage nĂ©cessaires Ă  leur croissance 1. M. Rauch a signalĂ© dans ses Annales tous les inconvĂ©niens de la destruction des forĂȘts elle trouble la corrĂ©lation qui existe entre les vĂ©gĂ©taux et les mĂ©tĂ©ores ; elle cause des irrĂ©gularitĂ©s dans la tempĂ©rature j elle occasione des avalanches imprĂ©vues et multipliĂ©es, des inondations dĂ©sastreuses, l’intermittence des cours d’eau, des variations funestes dans le cours des vents. x Des expĂ©riences souvent rĂ©pĂ©tĂ©es ont prouvĂ© que les vĂ©gĂ©taux absorbent une quantitĂ© d’eau considĂ©rable. Un grand arbre soutire par la force de succion de ses racines et de ses feuilles jusqu’à i5o livres d’eau par jour. 158 f» Ou attribue d’autres influences au dĂ©boisement les mĂ»riers, la vigne, les oliviers, sont, dit-on, plus exposĂ©s aux gelĂ©es qu’ils ne l’étaient autrefois ; nous croyons que c’est une erreur car, en gĂ©nĂ©ral, les hivers sont devenus moins froids qu’ils ne l’étaient jadis; et les gelĂ©es printaniĂšres sont bien plus Ă  craindre dans le voisinage des bois que dans les terrains dĂ©couverts. Ce sont les dĂ©fri- chemens exĂ©cutĂ©s depuis le moyen Ăąge jusqu’à nos jours, qui ont rendu les rĂ©coltes des cĂ©rĂ©ales plus abondantes et plus assurĂ©es 1. Le nombre des oliviers et des mĂ»riers s’est considĂ©rablement accru en France depuis un siĂšcle, meme depuis un demi-siĂšcle, mĂȘme depuis vingt- cinq ans. Les sĂ©cheresses perdent rarement les rĂ©coltes. Les disettes ne sont guĂšre occasionĂ©es que par les vents du sud-ouest, lorsqu’ils soufflent constamment en Ă©tĂ©, ou par les vents du nord, qui dominent durant un hiver trĂšs- rigoureux. Dans les lieux trop boisĂ©s , les forĂȘts attirent des pluies qui durent plusieurs mois, et ne permettent pas aux plantes cĂ©rĂ©ales de parvenir Ă  leur maturitĂ©; et, lorsque les pays cultivĂ©s redeviennent marĂ©cageux, les hivers sont beaucoup plus longs et plus rudes qu’auparavant. La fertilitĂ© des terres exige une tempĂ©rature qui ne soit ni trop ni trop peu chargĂ©e d’humiditĂ© ; la culture prolongĂ©e pendant plusieurs siĂšcles tend Ă  dessĂ©cher les terrains calcaires. Ainsi, Ă  diffĂ©rentes Ă©poques, la i La France Ă©tait boisĂ©e en i3i8; cependant il y eut une sĂ©cheresse que les temps modernes n’ont pas vue se renouveler. Il y avait onze mois qu’il n’était tombĂ© de pluie, dont avmt grande chertĂ© l’espace de deux ans. Essai sur les monnaies. S 139 mĂȘme contrĂ©e est surchargĂ©e, suffisamment fournie, absolument dĂ©pourvue des eaux dont elle a besoin. Les anciens avaient dĂ©jĂ  reconnu que des cantons jadis marĂ©cageux, devenus ensuite fertiles par leur dĂ©frichement, Ă©taient redevenus stĂ©riles par la perte totale de leur humiditĂ©. Le dĂ©frichement des marais et des forĂȘts qui sont situĂ©s dans des plaines humides, est donc un bienfait j mais, dans un sol trop dessĂ©chĂ©, sur des coteaux, sur des montagnes peu propres Ă  la culture, le dĂ©frichement ne produit que des effets pernicieux. Si l’on considĂšre l’état gĂ©nĂ©ral du sol de l’Europe, on peut dire qu’il y a encore plus des trois quarts des forĂȘts qu’il convient de dĂ©bĂącher, pour les remplacer par des cultures qui Ă©lĂšveront la tempĂ©rature dans les pays froids, et assainiront les climats trop chauds. On peut conjecturer que, dans quatre ou cinq siĂšcles, lorsque les plaines de la Pologne et de la Russie seront dĂ©pouillĂ©es d’une bonne partie de leurs forĂȘts et que les terres seront dessĂ©chĂ©es et cultivĂ©es, la tempĂ©rature de la France sera Ă©levĂ©e de quatre Ă  cinq degrĂ©s. En France mĂȘme, les forĂȘts ne sont pas rĂ©parties convenablement pour amĂ©liorer la tempĂ©rature. Ici on voit de grands massifs qui entretiennent une humiditĂ© malfaisante ; lĂ , des plaines sans arbres ni buissons. Les dĂ©- frichemens devront s’opĂ©rer en mĂȘme temps que les plantations. Des massifs ou des rideaux de bois, bien disposĂ©s, mettront Ă  l’abri des vents les lieux oĂč leur influence est redoutĂ©e. Des bosquets plantĂ©s Ă  l’entour des habitations, en rendront le sĂ©jour plus sain car il se dĂ©gage beaucoup d’oxigĂšne du feuillage des arbres. Il suffirait que les montagnes et les coteaux fussent "harmonie et clans une proportion convenable deux et quelquefois trois espĂšces de bois sĂ©parĂ©es; aucune ne doit prĂ©dominer; il faut qu’elles puissent supporter toutes la mĂȘme position, et Ă  peu prĂšs la mĂȘme influence du climat; il faut Ă©viter de rĂ©unir les arbres qui ne donnent leurs graines que dans un Ăąge avancĂ© avec ceux qui en portent de bonne heure. Il convient rarement de faire des mĂ©langes dans un mauvais terrain, qui ne doit porter que l’espĂšce qui lui convient le mieux. Les rĂšgles qui tendent, soit Ă  former et Ă  conserver des forĂȘts pures, soit Ă  les mĂ©langer avantageusement, n’ont reçu jusqu’à prĂ©sent aucune application dans les forĂȘts de nos contrĂ©es, oĂč l’on conserve toutes les espĂšces d’arbres, et souvent celles qui conviennent le moins au sol oĂč elles vĂ©gĂštent; mais lorsqu’on aura pris l’habitude de cultiver les bonnes, et de dĂ©truire les mauvaises, on approfondira la thĂ©orie,dont nous ne donnons qu’une esquisse. Un auteur allemand, qui ne partage pas l’opinion que l’on doive prolonger la pĂ©riode de l’amĂ©nagement de maniĂšre que les arbres puissent atteindre Ă  une telle grosseur qu’ils soient propres Ă  l’exportation, pense au contraire que les bois qui manquent de dĂ©bit doivent ĂȘtre convertis en champs et en prĂ©s qui serviraient Ă  faire subsister des hommes, et que cela serait d’autant mieux que les habitans pauvres des contrĂ©es forestiĂšres sont forcĂ©s de quitter un sol qui ne peut pas les nourrir, pour aller dĂ©fricher les plaines des bords de l’Ohio. CHAPITRE III. DES FORÊTS d’aRBRES RÉSINEUX. Tes arbres rĂ©sineux, ne se reproduisant pas de souches , ne forment jamais de taillis proprement dits. Ces forĂȘts ont Ă©tĂ© soumises gĂ©nĂ©ralement, mĂȘme en France, Ă  l’antique procĂ©dĂ© du jardinage, qui, dans l’origine, consistait simplement Ă  prendre les bois dont les liabi- tans du voisinage avaient besoin pour leur consommation particuliĂšre, ou pour les exportations que leur permettaient les riviĂšres navigables et la mer ; mais Ă  mesure que les abattis sont devenus plus considĂ©rables, les gouvernemens et les propriĂ©taires se sont occupĂ©s de les surveiller, de les charger de taxes et de les rĂ©gulariser. Le dernier terme du bon ordre fut de n’enlever que les arbres surabondans, ou viciĂ©s, ou gĂątĂ©s. Le sol, presque toujours marĂ©cageux dans les forĂȘts natives, fut dessĂ©chĂ©, la qualitĂ© des bois s’en amĂ©liora, et la traite devint plus facile. Dans l’état actuel de nos forĂȘts, on coupe tous les ans un certain nombre d’arbres, en choisissant çà et lĂ  sur toute l’étendue de la forĂȘt; cet usage a lieu dans les sapiniĂšres des Vosges, des PyrĂ©nĂ©es, du Jura, et dans les parties accessibles des Alpes. Les forĂȘts du Jura sont peuplĂ©es de sapins blancs; le nombre des arbres, dont la grosseur excĂšde un mĂštre de tour, varie de trois' cent cinquante Ă  quatre cent cinquante par hectare. On y coupe annuellement trois sapins au moins et quatre au plus par hectare, de la grosseur moyenne de H5 163 D» lieux mĂštres, de l’ñge de soixante Ă  cent trente ans , et d’une valeur moyenne de 20 fr. Une des conditions essentielles de ce genre d’exploitation est de ne pas enlever un trop grand nombre d’arbres Ă  la fois, et, en les mĂ©nageant ainsi, d’assurer le repeuplement par les semis naturels. Les forĂȘts d’épicias s’exploitent en Suisse, en Allemagne , et dans quelques parties de la France, par bandes longues et Ă©troites. Le jardinage et la mĂ©thode d’ensemencement naturel ne pourraient y ĂȘtre pratiquĂ©s qu’avec les plus grands mĂ©nagemens, attendu que ces arbres, Ă  racines latĂ©rales, seraient trĂšs-exposĂ©s Ă  ĂȘtre renversĂ©s par les vents qui s’introduisent dans une coupe Ă©claircie; quelquefois mĂȘme les bandes rĂ©cemment exploitĂ©es servent de passage aux ouragans qui ravagent les forĂȘts. On est SOUYent obligĂ© de recourir aux semis artificiels pour complĂ©ter le repeuplement. La mĂ©thode d’ensemencement naturel s’applique parfaitement aux forĂȘts de sapins, de mĂ©lĂšses et de pins. Ces derniĂšres sont mĂȘme plus faciles Ă  traiter que les autres, Ă  raison de la facilitĂ© avec laquelle les semis naturels se forment. Enfin il reste la mĂ©thode proposĂ©e par Duhamel, qui n’a pas Ă©tĂ© adoptĂ©e pour les sapiniĂšres de France, mais qui a Ă©tĂ© suivie de point en point dans la belle forĂȘt de Yallombreuse, situĂ©e en mĂ©thode consiste dans l’arrachement gĂ©nĂ©ral et presque simultanĂ© des sapins lorsque la coupe est parvenue Ă  sa maturitĂ©, et dans un repeuplement fait Ă  l’aide du plant, qu’on lĂšve dans la forĂȘt, ou qu’on a prĂ©parĂ© dans une pĂ©piniĂšre. L’examen et la comparaison de ces divers systĂšmes d’amĂ©nagement nous apprendront quel est celui qui mĂ©rite la prĂ©fĂ©rence. » 164 § l. er Du jardinage. La nature pourvoit assez abondamment au repeuplement , qui est toujours assurĂ© Ă  la longue, si la forĂȘt soumise au jardinage n’est pas exposĂ©e Ă  un pĂąturage dĂ©mesurĂ©, ni attaquĂ©e par les dĂ©fricliemens. Mais lorsque les arbres qu’on exploite de cette maniĂšre cessent de suffire aux besoins d’une population croissante, on n’a plus seulement en vue la conservation perpĂ©tuelle de la forĂȘt, mais on veut encore en retirer une plus grande quantitĂ© de bois ; c’est par un motif analogue Ă  celui-ci que l’on a substituĂ© Ă  de maigres pĂąturages de bonnes prairies qui rendent deux ou trois rĂ©coltes par an. Les inconvĂ©niens attachĂ©s au jardinage sont nombreux. i.° La chute des arbres que l’on abat sur les arbres sains, qui en sont endommagĂ©s, et sur les jeunes plants, qui en sont brisĂ©s ; 2. 0 La difficultĂ© d’extraire tous les arbres viciĂ©s, Ă  moins que l’on ne pratique chaque annĂ©e de nouveaux chemins ; 3 .° Le dĂ©peuplement occasionĂ© par les vides que forme l’abattage, les ravages causĂ©s par les ouragansj 4. 0 La difficultĂ© de la surveillance dans les forĂȘts ainsi exploitĂ©es ; 5.° L’infĂ©rioritĂ© des produits donnĂ©s par le jardinage car on coupe beaucoup d’arbres dĂ©pĂ©rissans, usĂ©s de vĂ©tustĂ©, et endommagĂ©s, que la nĂ©cessitĂ© de tenir la forĂȘt dans un Ă©tat serrĂ© a fait conserver; tandis que le but de l’art doit ĂȘtre de les couper prĂ©cisĂ©ment au moment oĂč 16S ils ont acquis la force nĂ©cessaire Ă  l’usage que l’on veut en faire, et avant qu’ils n’aient perdu une partie de leur valeur. On allĂšgue cependant en faveur de cette mĂ©thode , i.° Que la forĂȘt s’entretient parfaitement si le jardinage est bien exĂ©cutĂ©, si le nombre des arbres extraits n’est pas trop considĂ©rable, enfin si l’on a soin de conserver une lisiĂšre d’une certaine largeur sur le pourtour de la forĂȘt, pour la tenir Ă  l’abri des ouragans ; 2. 0 Que la premiĂšre des coupes successives du systĂšme allemand coupe sombre endommage les arbres restans, et le jeune plant, comme le ferait le jardinage ; que d’ailleurs en jardinant on fait dĂ©poser les bois trĂšs- promptement dans les chemins ou les clairiĂšres, et qu’on en transporte mĂȘme une partie Ă  dos d’homme; 3.° Que l’on n’a pas besoin de parcourir chaque annĂ©e toute la forĂȘt, mais qu’il suffit de revenir dans le mĂȘme lieu tous les cinq Ă  six ans, pour enlever les arbres dĂ©pĂ©rissans. Si l’on ne s’occupait pas de la quotitĂ© du produit matĂ©riel des forĂȘts, la mĂ©thode du jardinage aurait pour elle l’expĂ©rience des siĂšcles; mais, comme les jeunes plants venus Ă  l’ombre des grands arbres ne croissent qu’avec une extrĂȘme lenteur; qu’un petit sapin nĂ© dans un massif Ă©pais languit pendant prĂšs de cinquante annĂ©es, c’est-Ă -dire jusqu’à l’époque oĂč il peut trouver de la lumiĂšre et de l’air on perd ainsi beaucoup de temps, au lieu que les jeunes plants qui sont dĂ©barrassĂ©s des arbres dont l’ombrage leur Ă©tait nĂ©cessaire Ă  leur naissance, viennent trois Ă  quatre fois plus rapidement, ce qui est un motif de prĂ©fĂ©rence dĂ©cisif pour faire substituer les coupes pleines au jardinage. 1G6 *$»‹ § 2 . Des coupes pleines. Les coupes pleines se classent principalement entre elles par la maniĂšre dont le repeuplement s’effectue. On les met en dĂ©fense quelques annĂ©es avant l’exploitation , et on enlĂšve, soit Ă  la herse, soit Ă  la pioche, les herbes et les mousses. On peut ensuite exploiter en plein, et simultanĂ©ment, tous les arbres du massif, si le semis est bien levĂ©, comme cela se voit communĂ©ment dans les hautes futaies qui sont un peu claires ; mais si le semis est insuffisant, on mĂ©nage l’abattage de maniĂšre Ă  complĂ©ter le repeuplement. La mĂ©thode allemande d’ensemencement naturel, qui divise l’exploitation en trois opĂ©rations successives, pourvoit au repeuplement de la maniĂšre la plus efficace. Le seul reproche un peu fondĂ© dont elle puisse ĂȘtre l’objet, est qu’il est impossible de dĂ©terminer Ă  l’avance les Ă©poques fixes de la coupe secondaire et de la coupe dĂ©finitive, et que par consĂ©quent on ne peut faire un amĂ©nagement rĂ©gulier ; mais quand on sera bien convaincu de cette importante vĂ©ritĂ©, que les rĂšgles d’ordre et d’administration doivent ĂȘtre soumises aux principes Ă©conomiques , et que, quelque difficile que puisse ĂȘtre la surveillance , ce n’est pas un motif de se dĂ©partir de prĂ©ceptes fondĂ©s sur des calculs positifs, qui sont d’accord avec les notions physiologiques les plus incontestables , on adoptera les meilleures mĂ©thodes pour y subordonner les rĂšgles de surveillance et d’administration. Il serait dangereux de faire des coupes blanches dans les froides rĂ©gions des hautes montagnes, oĂč il est rare 48 167 que les graines rĂ©ussissent et mĂ»rissent convenablement, et oĂč les semis gĂšlent au printemps. Le repeuplement, si l’on ne veut pas jardiner, ne peut s’obtenir qu’en coupant les arbres successivement, avec beaucoup de mĂ©nagement, et Ă  mesure que le sol se garnit de jeunes plants. Les coupes par bandes ou zones Ă©troites doivent ĂȘtre accompagnĂ©es de certaines .prĂ©cautions on choisit de prĂ©fĂ©rence une annĂ©e oĂč les arbres sont chargĂ©s de cĂŽnes; on arrache les souches; on rĂ©pand de la graine Ă  la main sur la surface du sol; on n’abat les arbres restant Ă  cĂŽtĂ© de la bande exploitĂ©e que lorsque celle-ci se trouve suffisamment garnie de plants. M. Kasthoffer conseille d’exploiter par bandes Ă©troites toutes les parties des forets qui sont situĂ©es sur des rampes escarpĂ©es; de semer, dans les parties dĂ©pouillĂ©es, des graines d’aune, de bouleau et de mĂ©lĂšse; de conserver une certaine quantitĂ© de baliveaux, non pas dans le but de parvenir par ce moyen Ă  l’ensemencement, mais afin de prĂ©server en partie les jeunes plants de la chaleur du soleil, de la gelĂ©e, et des vents, dont l’action frappe le sol de stĂ©rilitĂ©. Avec la coupe pleine se combinent les Ă©claircies ou expurgades, qui consistent dans l’enlĂšvement des bois blancs vers la trentiĂšme annĂ©e, et des arbres mal-venans, vers les soixantiĂšme et quatre-vingt-dixiĂšme annĂ©es. Il nous reste Ă  parler du mode d’exploitation inventĂ© par Duhamel, et qui n’a Ă©tĂ© pratiquĂ© en France qu’à grands frais, et quelquefois avec un succĂšs douteux ; mais des Ă©trangers qui ont pris Ă  la lettre les prĂ©ceptes de ce grand agriculteur, et qui ont cherchĂ© les moyens les plus Ă©conomiques de les employer, ont rĂ©ussi Ă  renouveler et Ă  entretenir l’une des plus belles forĂȘts 168 de sapins qui soient au monde, celle de Vallombreuse, en Toscane nous allons exposer la marche qui a Ă©tĂ© suivie pour y parvenir, et dont L. FornaĂŻni a donnĂ© l’historique dans un Ă©crit intĂ©ressant, accompagnĂ© de descriptions curieuses Ăšt de sages rĂ©flexions. En Toscane, le hĂȘtre habite les cimes des montagnes, au-dessus mĂȘme des sapins. Ces derniers arbres aiment, comme les autres plantes, une terre profonde, humide et grasse; ils vĂ©gĂštent dans une longue suite de siĂšcles avec la mĂȘme force dans le mĂȘme lieu ; et sur les dĂ©bris d’un arbre mort,s’élĂšventdes milliers d’arbres semblables. Les bois blancs n’ont qu’une courte existence au milieu des sapins, si l’on a soin de ne pas exploiter ceux-ci trop jeunes. On repeuple les coupes exploitĂ©es dans la forĂȘt de Vallombreuse avec les plants qu’on lĂšve dans une pĂ©piniĂšre qui y est annexĂ©e. Le semis naturel est si nombreux qu’il suffit Ă  fournir cette pĂ©piniĂšre de sujets de deux ou trois ans que l’on y plante Ă  deux pieds de distance. Dans ces climats chauds, il faut planter les arbres en automne, parce qu’ils redoutent plus les chaleurs excessives de l’étĂ© que les rigueurs de l’hiver. Le contraire arrive dans les pays froids. On a observĂ© que tout meurt Ă  l’ombre des grands sapins, qu’il n’y croĂźt pas un brin d’herbe, et que la plupart des jeunes sapins eux-mĂȘmes languissent et pĂ©rissent. C’est pour cela que la croissance des plants du mĂȘme Ăąge, qui ne sont pas ombragĂ©s par un rideau Ă©pais de grands arbres, est infiniment plus rapide que celle des plants qui restent perpĂ©tuellement Ă  l’ombre. Une jeune sapiniĂšre se couvre de mille arbustes qui dĂ©robent les jeunes sapins Ă  la vue; mais ces amas de buissons disparaissent au bout de dix Ă  douze ans, et s" 169~> les sapins ont tout Ă©touffĂ© autour d’eux. Cette espĂšce de manteau paraĂźt nĂ©cessaire dans un terrain aride, et dan s un climat chaud, pour garantir le jeune plant des ardeurs du soleil, et pour empĂȘcher l’évaporation de l’humiditĂ© que renferme le sol, et qui nourrit les plantes. Les sapins sont disposĂ©s avec symĂ©trie ; ils occupent chacun un cercle de sept Ă  huit pieds de rayon ; cette rĂ©gularitĂ© donne Ă  la forĂȘt un aspect de la plus surprenante magnificence 1. Dans le long intervalle qui s’écoule entre la plantation et l’exploitation dĂ©finitive, on a soin d’abattre les arbres morts ou malades. On commence la coupe du cotĂ© du midi, afin d’éviter les tempĂȘtes du nord, qui renverseraient tous les arbres. Cette forĂȘt est tenue avec un ordre admirable; tous les ans on forme de nouvelles pĂ©piniĂšres, de nouvelles clĂŽtures, de nouvelles plantations. Une partie du produit des coupes est rĂ©guliĂšrement employĂ©e Ă  ces dif- fĂ©rens travaux; mais c’est une dĂ©pense trĂšs-productive. Un usage pernicieux, qui s’était introduit autrefois dans cette forĂȘt, consistait Ă  semer du seigle dans les coupes aprĂšs l’exploitation. Cette culture, qui ne devait cependant durer qu’un an, avait le grave inconvĂ©nient de faire entraĂźner une partie des terres par les eaux, et de dessĂ©cher le sol partout. Cette funeste habitude a Ă©tĂ© heureusement dĂ©racinĂ©e. Une forĂȘt de sapins exploitĂ©e Ă  blanc, sans rĂ©serves et sans prĂ©cautions, peut encore se reproduire. La terre se garnit d’herbes et de buissons sous lesquels on voit i Disertation sur la culture des sapins par D. Louis FornaĂŻni, traduite par M. des Acres-Fleur anges. Pari6, ĂŻ8i3. ’Üj 170 ib> paraĂźtre de jeunes sapins au bout de trois ou quatre ans ; mais ce moyen, destructif dans un mauvais terrain, n’a pas mĂȘme un succĂšs certain dans un bon sol. Il reste souvent des places vagues, surtout si le pĂąturage n’a pas Ă©tĂ© sĂ©vĂšrement interdit aprĂšs l’exploitation. L’exploitation pleine, le repeuplement, soit par voie des semis naturels, soit par des pĂ©piniĂšres, deviendront, sans aucun doute, d’un usage gĂ©nĂ©ral pour traiter les forĂȘts rĂ©sineuses, dont les arbres peuvent se vendre facilement. Nous remarquerons que le semis artificiel coĂ»te bien peu de cliose. Supposons que l’on possĂšde cent hectares de sapins en coupes rĂ©glĂ©es de cent ans ; on coupera un hectare par an nous le supposons valoir 8000 fr.; il suffira de prĂ©lever sur cette somme 80 francs pour les frais de repeuplement, ce qui ne fera que le centiĂšme du revenu. § 3 . Des Ă©claircies dans les forĂȘts d’arbres rĂ©sineux, et de la pĂ©riode des coupes . On ne fait point d’éclaircies dans les grandes forĂȘts qui s’exploitent par le jardinage; c’est une opinion vulgaire que plus les sapins sont Ă©pais, plus ils croissent avec force; mais la vĂ©ritable raison qui fait nĂ©gliger les Ă©claircies est que, les coupes ordinaires fournissant plus de bois qu’il n’en faut pour le chauffage, les Ă©claircies ne rapporteraient rien. Cependant elles seraient trĂšs- utiles pour favoriser l’accroissement des arbres. Il est bien reconnu que si on laissait croĂźtre ensemble tous les sapins qui naissent spontanĂ©ment, cette multitude nuirait Ă  la vĂ©gĂ©tation, et qu’il est indispensable d’en g 171 g» arracher une certaine quantitĂ©, en observant de tenir constamment les arbres serrĂ©s et contigus, de maniĂšre Ă  Ă©touffer les bois blancs et les herbes. Quel immense volume de bois de chauffage produiraient ces extractions dans les grandes forets ! Qu^el le force d’accroissement acquerraient les arbres destines Ă  former le massif de futaie ! Les bois rĂ©sineux s’exploitent rarement en taillis, parce que, dans les montagnes oĂč ils croissent, les taillis sont sans valeur. Cependant, en Provence, quelques bois de pins s’exploitent Ă  l’ñge de vingt Ă  vingt-cinq ans; le moyen unique de repeuplement consiste Ă  ne couper que les gros brins, et Ă  laisser subsister tous les jeunes plants jusqu’à l’exploitation suivante, pour faire un semblable chois. Mais cette maniĂšre de rĂ©gler les coupes de bois rĂ©sineux Ă  vingt-cinq ans prĂ©sente un grand danger. Les essences infĂ©rieures, telles que les bois blancs, le charme et les Ă©pines, prennent la place du sapin ou du pin, et les Ă©touffent. Il faut donc extirper les mauvais bois pour conserver les plants rĂ©sineux. On peut parmi ceux-ci conserver quelques porte-graines. La coupe ne nuira pas au repeuplement car on pourrait, dans un recru de sapins ĂągĂ© de vingt-cinq ans et bien garni, enlever les cinq sixiĂšmes du volume total, tout en laissant assez de jeunes brins pour former un nouveau recru avec le semis qui lĂšve dans les intervalles. Ces coupes, faites Ă un Ăąge peu avancĂ©, ne sont encore qu’une exception, mais elles pourront devenir plus communes Ă  l’avenir. La pĂ©riode de l’amĂ©nagement ne se rĂšgle en dĂ©finitive que par des calculs de pertes ou de profits. On ne coupe pas de petits sapins lorsqu’ils sont sans valeur. Se prĂ©sente-t-il des marchands de bois qui offrent un B§ 172 g!» prix fort Ă©levĂ© d’un massif de sapins ĂągĂ©s de cent ans, on n’attendra pas qu’ils aient cent vingt ans pour les vendre. On les vendrait mĂȘme Ă  cinquante ans si l’on trouvait des acheteurs Ă  de bonnes conditions. Les plantations symĂ©triques ou les nettoiemens, en accĂ©lĂ©rant la croissance, offriront, dans un arbre de cent ans, le mĂȘme volume que donne un arbre de cent quarante ans qui vient dans un massif jardinĂ©. On peut juger de l’accroissement moyen des sapins, dans un massif jardinĂ©, par la table ci-dessous AGE. CIRCONFERENCE moyenne. nAUTEUR. SOLIDITÉ. ans. pouces mĂ©triques. pieds mĂ©triques. pieds cubes. centiĂšmes. 10 4 3 00 2 20 9 12 00 18 30 14 22 00 93 40 20 33 3 66 50 28 44 9 18 60 37 56 19 02 70 47 68 30 28 80 56 79 66 OO 90 64 90 97 50 100 72 100 136 08 110 81 109 193 80 120 90 118 265 50 130 99 128 337 68 140 108 135 433 11 La rapiditĂ© de la croissance dans les annĂ©es qui suivent la cinquantiĂšme explique pourquoi on attend ordinairement que les sapins soient trĂšs-gros avant de les 173 f'd* couper j d’ailleurs la valeur du pied cube d’un arbre qui n’a pas cinquante ans est peu de chose en comparaison de la valeur du pied cube d’un gros arbre. CHAPITRE IY. DES TAILLIS ET DES FUTAIES SURTAILLIS. CONSIDÉRATIONS gĂ©nĂ©rales. En France, les taillis forment les cinq sixiĂšmes des forets du royaume. Les massifs de futaie ont Ă©tĂ© successivement convertis en taillis depuis quatre Ă  cinq siĂšcles, et surtout depuis l’établissement des forges et des verreries. Si la masse ligneuse qui demeurait sur le sol a Ă©tĂ© diminuĂ©e, le sol forestier est restĂ© intact dans les parties qui ont Ă©tĂ© rĂ©duites en taillis, tandis que la plupart des massifs de haute futaie que l’on s’est obstinĂ© Ă  conserver se sont successivement dĂ©garnis, et sont devenus en dĂ©finitive des pĂątures ou des friches. La destruction des futaies en massif a amenĂ© l’habitude de rĂ©server des baliveaux dans les taillis. Nous jetterons d’abord un coup d’oeil sur les systĂšmes d’amĂ©nagement qui peuvent nous servir de modĂšles. Les bois du Milanais destinĂ©s au chauffage sont divisĂ©s en coupes rĂ©glĂ©es qui s’exploitent lorsque les taillis ont dix ans. Le terrain des bois nouvellement plantĂ©s se laboure deux fois par an la premiĂšre, en avril; la seconde, en septembre, pour extirper les mauvaises herbes, et faire disposer les taillis Ă  croĂźtre promptement; on y sĂšme meme du grain, en prenant des prĂ©cautions pour 8 174 > ne pas offenser les souches 1. Dans la deuxiĂšme annĂ©e et dans la sixiĂšme, on Ă©monde les rejets des souches, on enlĂšve tous les rameaux superflus, qui retiennent en pure perte le suc nourricier, et qui font obstacle Ă  l’accroissement des brins que l’on veut conserver. AprĂšs cette opĂ©ration, le taillis croĂźt en libertĂ©, et, au bout de cbx ans, il rend une coupe abondante, aprĂšs laquelle on laboure de nouveau. Mais si l’on veut Ă©lever un grand taillis, on pratique, au bout de douze Ă  treize ans, une nouvelle Ă©claircie; cinq ans plus tard on Ă©lague les arbres, dans la crainte qu’ils ne deviennent trop faut excepter quelques brins tendres, et le hĂȘtre, qui ne sont pas propres Ă  supporter une telle opĂ©ration. Si l’on a Ă©levĂ© une futaie, on la coupe lorsqu’il en est temps, on enlĂšve les souches, on brĂ»le les ronces, les Ă©pines, les herbes; ensuite on laboure,et on sĂšme des graines d’arbres. Des labours, des Ă©lagages, des nettoiemens bien combinĂ©s, tel est le mode qui donne les produits les plus abondans. En Angleterre, dans quelques comtĂ©s, on coupe les taillis de frĂȘnes tous les dix-huit ans ; le produit en est Ă©norme; on a soin de maintenir, par une culture Ă  la houe, les plantations nouvelles et les jeunes taillis, jusqu’à ce que la pousse soit assez forte pour Ă©touffer de son ombre tout ce qui nuirait Ă  la vĂ©gĂ©tation. L’arbre qui rĂ©ussit le mieux dans les haies ou bosquets d’une ferme est l’orme. On remarque que les plantations qui ne sont pas Ă©claircies Ă  temps souffrent beaucoup; et l’on regarde la pĂ©riode de vingt ans .comme la i Ronconi, clizionario d’agricoltura. *75 » moyenne de l’exploitation des taillis, pour que la coupe en soit la plus avantageuse. Il y a aussi des taillis que l’on coupe Ă  quatorze ans, et qui rapportent 12 liv. st. 3 00 fr. l’acre, ce qui revient Ă  732 fr. l’hectare. Les perfectionnemens que l’on remarque en Angleterre dans la tenue des bois consistent surtout dans la culture et les nettoiemens. On n’abandonne point au fermier le choix des arbres Ă  Ă©monder, Ă  Ă©tĂȘter ou Ă  abattre j la direction de ces travaux importans appartient au propriĂ©taire, qui y emploie des hommes experts dans la conservation des bois. La mĂ©thode de furetage, qui est usitĂ©e dans le Morvan, se retrouve, en Angleterre, dans les forĂȘts de hĂȘtres du comtĂ© de Buckingham. On n’y coupe que les brins ĂągĂ©s do trente Ă  quarante ans, pour les envoyer Ă  Londres, par la Tamise, comme bois de chauffage. On emploie un certain art pour tenir le bois restant convenablement serrĂ©, de maniĂšre que les plantes Ă©trangĂšres ne puissent croĂźtre dans les intervalles, et que la chaleur du soleil ne dessĂšche pas les souches. Les grands propriĂ©taires de bois, en Ecosse, exploitent leurs taillis de chĂȘne au bout de vingt Ă  trente ans. L’écorce est une partie importante du revenu. Les brins Ă©tant coupĂ©s trĂšs-prĂšs de terre, les rejets partent du collet, et, se faisant leurs propres racines, deviennent chacun une souche nouvelle. On croit qu’il ne faut pas couper les bois en hiver, parce que les rigueurs de cette saison occasionent beaucoup de dommage aux souches et aux baliveaux, et qu’il est prĂ©fĂ©rable d’attendre le commencement du printemps. On rĂ©serve gĂ©nĂ©ralement un trĂšs-grand nombre de baliveaux j mais lorsque l’amirautĂ© avait un privilĂšge sur les chĂȘnes propres Ă  la marine, on les coupait avant fil 176 g* qu’ils fussent gros, parce qu’il y avait plus de profit qu’à attendre qu’ils fussent soumis au monopole. En France, un privilĂšge semblable n’a pas empĂȘchĂ© les propriĂ©taires de rĂ©server de gros arbres dans leurs bois. Les taillis se vendent de 25 Ă  40 livres sterl. ipar acre, sur les bord de la Clyde, et de 46 Ă  5 O livres sterl., dans les montagnes d’Ecosse, oĂč il existe des hauts fourneaux, ce qui fait jusqu’à 3o5ofr. l’hectare. Dans l’ouest de l’Angleterre, un acre de bois taillis rapporte, l’un dans l’autre, 60 liv. sterl. net 3658fr. l’hectare. L’importance de ce chapitre exige que nous le divisions en plusieurs sections. SECTION 1. de l’agb auquel il contient de couper les taillis. Dans la plus grande partie de la France, les taillis sont exploitĂ©s entre leur vingtiĂšme et leur trentiĂšme annĂ©e. En Provence, on coupe les taillis de chĂȘnes blancs Ă  dix ans, et ceux de chĂȘnes verts Ă  quatorze ans. Les agronomes de ce pays sont d’avis de reculer cet Ăąge jusqu’à seize et vingt ans. Ils pensent que des coupes rĂ©pĂ©tĂ©es Ă  des intervalles plus courts sont bonnes pour les bois nouveaux, jeunes, et clair-semĂ©s, parce que la taille fortifie leurs racines, et que leurs rejets sont plus forts et plus nombreux ; mais que ce qui rend les jeunes taillis plus Ă©pais que les autres, c’est que les plants les plus forts n’ont pas le temps d’étouffer les plus faibles. Il est impossible de dĂ©terminer la pĂ©riode la plus profitable pour l’amĂ©nagement d’un taillis, avant d’en avoir Ă©tabli la valeur progressive. 1 Annales europe'ennes, t. 6. Hf 177 ^ On suppose, dans les calculs qui vont ĂȘtre rapportĂ©s, que la valeur des taillis croĂźt d’aprĂšs la loi des carrĂ©s des nombres naturels, progression qui est un terme moyen qu’un grand nombre d’observations m’ont fait reconnaĂźtre comme assez exact. Ainsi un taillis que l’on exploite Ă  vingt ans vaut quatre fois plus que si on le coupait Ă  dix ans. Yoici la table qui indique les valeurs successives des taillis. AGE Ăźles taillis. ans. 1 2 3 fi 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 VALEUR des taillis. fr. 1 4 9 16 25 36 49 64 81 100 121 144 169 196 225 256 289 324 361 400 AGE des taillis. ans. 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 VALEUR des taillis. fr. 441 484 529 576 625 676 729 784 841 900 961 1024 1089 1156 1225 1296 1569 1444 1521 1600 ! 178 ft. Nous devons calculer sur l’intĂ©rĂȘt composĂ©, et non sur l’intĂ©rĂȘt simple car autrement il serait impossible de comparer la valeur des bois, qui ne produisent qu’à de longs intervalles, avec la valeur des terres, qui rapportent tous les ans. On prĂ©fĂšre un fonds de terre qui rapporte 100 fr. par an Ă  un bois qui ne rend que 2000 fr. tous les vingt ans; et la mesure de cette prĂ©fĂ©rence n’est autre chose que le cumul des intĂ©rĂȘts. Quelques exemples suffiront pour l’objet que nous nous proposons. Nous calculerons sur l’intĂ©rĂȘt Ă  4 pour cent par an. l.° Est-il plus avantageux d’exploiter un taillis Ă  vingt- quatre ans qu’à vingt-cinq ans ? Si je l’exploite Ă  vingt-quatre ans, j’aurai, un an aprĂšs, i.° le produit de la coupe, que nous supposons de 576 fr. ; ci. . . ... 576fr. 2. 0 L’intĂ©rĂȘt de cette somme. 23 04 c. 3.° Plus un taillis d’un an ; mais, Ă  la rĂ©volution suivante, ce taillis n’aura que vingt-quatre ans au lieu de vingt-cinq ans, la diffĂ©rence sera de 24 fr. Cependant, comme cette perte ne se fera sentir que dans vingt-quatre ans, elle doit ĂȘtre rĂ©duite, pour le moment prĂ©sent, d’aprĂšs le calcul des intĂ©rĂȘts, Ă . 9 ^ 6 Total . 6o3 40 En coupant ce bois Ă  vingt-cinq ans, j’aurais 625fr., ce qui est plus avantageux. 2 .° L’amĂ©nagement Ă  vingt ansjj est-il prĂ©fĂ©rable Ă  celui de vingt-cinq ans ? 48 179 » â–ș Si j’exploite mon taillis Ă  vingt ans, j’aurai, cinq ans aprĂšs, le produit de la coupe, supposĂ© de 400 fr., avec intĂ©rĂȘts composĂ©s pendant cinq ans, s’élevant Ă . 486 f. 68 c. Mais, Ă  la rĂ©volutionsuivante, mon taillis n’aura que vingt ans,au lieu de vingt-cinq ans; il ne vaudra que 4 00 au heu de 625 fr. Cependant, comme la perte ne se fera sentir que dans vingt-cinq ans, elle doit ĂȘtre rĂ©duite, pour le moment prĂ©sent, Ă . . 84 4 ° 08 En exploitant mon taillis Ă  vingt-cinq ans, j’aurais eu G25 fr. L’amĂ©nagement Ă  vingt-cinq ans est donc prĂ©fĂ©rable Ă  celui de vingt ans. 5.° La supĂ©rioritĂ© de l’amĂ©nagement de vingt ans sur celui de dix ans, est frappante. En effet, si je coupe mon taillis Ă  dix ans , j’aurai, dix ans plus tard, Ă  l’époque oĂč je l’aurais exploitĂ©, si j’avais attendu sa vingtiĂšme annĂ©e, 1.° Le prix de la coupe. Ăźoofr. 2. 0 L’intĂ©rĂȘt composĂ© de cette somme pendant dix ans. 48 02 c. 3.° Enfin un nouveau taillis de dix ans, qui vaut... 100 Je n’ai en tout que. 248 02 Mon taillis de vingt ans m’aurait rendu 400 fr., je perds donc 38 pour cent. De semblables calculs dĂ©montreraient qu’il faut couper les taillis de chĂȘnes et de hĂȘtres en gĂ©nĂ©ral un peu avant leur quarantiĂšme annĂ©e; mais on ne doit pas at- r iĂŽo > tendre cet Ăąge sans faire des Ă©claircies dans un bois, car on perdrait une infinitĂ© de brins. L’essentiel, pour dĂ©terminer la pĂ©riode de l'amĂ©nagement, est d’établir rĂ©chelle des valeurs progressives; mais ce n’est pas tout de mesurer l’accroissement des brins , il faut encore avoir Ă©gard Ă  la valeur du stĂšre ou du pied cube, suivant l’emploi que l’on peut faire des bois. Il est inutile de mesurer annuellement l’accroissement des taillis; l’expĂ©rience serait trop longue. Il est bien plus commode de faire abattre des arbres qui aient passĂ© par les phases successives que l’on veut Ă©tudier, et d’en observer simultanĂ©ment la croissance, en comptant les couches ligneuses, et en mesurant leur Ă©paisseur. Si l’on veut opĂ©rer sur des Ă©valuations donnĂ©es par nos forestiers les plus cĂ©lĂšbres, on trouvera des rĂ©sultats Ă  peu prĂšs semblables Ă  ceux que l’on obtient en se servant de la table des carrĂ©s. Si, au lieu de calculer sur l’intĂ©rĂȘt de 4 pour cent, nous eussions pris le taux de cinq pour cent, le rĂ©sultat eĂ»t Ă©tĂ© moins favorable Ă  la prolongation de la pĂ©riode d’amĂ©nagement. On pourrait induire des calculs prĂ©cĂ©dens qu’il y a de la perte Ă  conserver de la futaie cependant il est tout aussi profitable d’élever de grands arbres que d’exploiter des bois taillis. Mais deux conditions sont indispensables pour que l’éducation de la futaie soit avantageuse. La premiĂšre est que les massifs soient pĂ©riodiquement Ă©claircis, de maniĂšre que les brins les plus faibles ne pĂ©rissent pas sans utilitĂ©. La seconde est que le nombre des arbres n’excĂšde pas les besoins de la consommation. S il en Ă©tait autrement, le prix des futaies diminuerait au point d’en dĂ©courager la culture. g 181 gt Ainsi le prix du volume dĂ©terminĂ© d’un arbre augmente Ă  mesure que cet arbre vieillit. Le pied cube d’un cliĂšne de 40 ans ne vaut qu’un franc, tandis que celui d’un cliĂšne de 100 ans vaut deux francs leur valeur respective est proportionnĂ©e Ă  ce qu'il en a coĂ»tĂ© pour les produire. La loi de l’offre et de la demande dirigera la production en influant sur les prix. C’est ce que nous voyons dĂ©jĂ , mais d’une maniĂšre peu rĂ©guliĂšre, parce que les idĂ©es ne sont pas encore arrĂȘtĂ©es sur plusieurs points essentiels de l’économie forestiĂšre. La futaie est-elle chĂšre, on rĂ©serve alors un plus grand nombre de baliveaux. Les grands taillis sont-ils plus recherchĂ©s que les jeunes, on les laisse vieillir. La consommation habituelle n’exige-t-elle au contraire que de jeunes taillis, on les abat pour ne pas les conserver sans profit. Ainsi les amĂ©nagemens doivent ĂȘtre subordonnĂ©s aux variations de prix qu’éprouve chaque espĂšce de bois. IndĂ©pendamment des calculs, il y a des raisons dĂ©terminantes pour fixer l’ñge des coupes. Cela dĂ©pend presque toujours de l’usage que l’on peut faire des bois. Est-ce un taillis de chĂątaigniers propre Ă  faire des cercles ou cerceaux, on le coupe Ă  six ou huit ans ; plus tard, les brins ne conviendraient plus pour cet usage, et perdraient de leur valeur. Est-ce un taillis de coudre destinĂ© au mĂȘme usage, on attend qu’il ait douze ans pour l’abattre. Veut-on faire uniquement du charbon, un taillis de bois dur, ĂągĂ© de vingt Ă  vingt-cinq ans, convient trĂšs-bien. S agit-il d’un taillis qui doive ĂȘtre employĂ© Ă  faire du 12 fĂȘ 182 bois de chauffage pour les villes, il faut attendre qu’il ait vingt-cinq ou trente ans pour l’abattre. Un taillis de trente ans prĂ©sentera de grands avantages. Les graines lĂšveront facilement dans un bois Ă©clairci ; les baliveaux seront d’une haute stature5 ils nuiront beaucoup moins au recru que ces arbres rabougris et branchus que l’on trouve dans un taillis qui s’exploite Ă  douze ou quinze ans; l’exploitation en jeunes taillis chargĂ©s de futaies propage Ă  l’inlini les mauvaises espĂšces; mais l’exploitation en grands taillis les dĂ©truit car le chĂȘne, le sapin et le hĂȘtre survivent Ă  tous les arbrisseaux et Ă  tous les arbres du second ordre. Un taillis ne doit pas rester vingt ou trente ans sans rendre des produits par les Ă©claircies. Un principe gĂ©nĂ©ral, professĂ© par un des plus habiles forestiers de l’Europe,M. Lorentz, est. que l'on doit faire de frĂ©quentes exploitations dans les bois , en enlevant i.° ce cpii ne peut plus croĂźtre, 2. 0 ce qui nuit Ă  la croissance du massif, jusqu’au moment de l’exploitation dĂ©linitive. Je connais un bois soignĂ© minutieusement par le propriĂ©taire, qui sait tirer parti des plus petits produits des Ă©pines, pour faire des clĂŽtures vives et sĂšches ; de la bourdaine, pour la fabrication de la poudre; des viornes, pour faire des ruches et des liens de fagots; des brins traĂźnans, pour faire des liens de gerbes; des cornouillers, troĂšnes et Ă©pines , pour faire des Ă©chalas; des coudres, pour des cercles de futailles; des perches, pour les ins- trumens aratoires. Tout cela s’enlĂšve dans les taillis, qui nettoyĂ©s par des Ă©claircies successives, deviennent magnifiques; mais une semblable Ă©conomie exige la prĂ©sence continuelle du propriĂ©taire. On doit remplacer ces pratiques de dĂ©tail par des Ă©claircies pĂ©riodiques bien entendues. *83 ^ SECTION 2. DES FUTAIES SURTAI1 LIS. Autrefois on rĂ©servait un trĂšs-grand nombre de baliveaux; les taillis ne formaient qu’un produit accessoire dans les forĂȘts qui Ă©taient bien gouvernĂ©es selon les idĂ©es du temps. On remarqua plus tard que les bois de futaie dĂ©passaient les besoins de la charpente et de l’industrie, puisque l’on Ă©tait obligĂ© de convertir de grands arbres en bois de chauffage ou en charbon. On cherche actuellement Ă  proportionner le nombre des arbres de chaque espĂšce Ă  l’emploi qui s’en fait habituellement; on les choisit avec soin, en abattant tous les baliveaux, anciens ou modernes, dont la croissance ne promet aucun profit pour l’avenir. Les arbres des futaies surtaillis sont ordinairement plus sains que ceux des massifs. Cela provient de ce que l’on abat, Ă  chaque exploitation des taillis,les baliveaux gĂątĂ©s ou dĂ©pĂ©rissans, et que les anciens et les modernes sont des arbres d’élite pris dans un grand nombre. On n’imaginerait pas dans quelle faible proportion les chĂȘnes de bonne qualitĂ© se trouvent dans les futaies incultes. M. Fanon a remarquĂ© qu’au milieu du vaste massif de la forĂȘt de CoinpiĂšgne, les chĂȘnes sains et vigoureux sont en trĂšs-petit nombre. Les massifs ordinaires ne fournissent communĂ©ment qu’un dixiĂšme d’arbres assez sains pour le service de la marine. C’est toujours Ă  l’absence des soins et de la culture qu’il faut attribuer la mauvaise qualitĂ© des bois. Une belle forĂȘt, dans laquelle on favorise les semis , dans laquelle on abat tous les brins qui sont mal conformĂ©s, ou qui prĂ©sentent des signes de dĂ©pĂ©rissement, S 184 g» ou qui ne sont propres qu’au chauffage, peut donner de beaux et bons arbres en trĂšs-grande quantitĂ©, surtout si l’on a soin d’assainir le sol. Ce sera une espĂšce de liaute futaie dont les arbres, bien choisis, seront assez Ă©loignĂ©s l’un de l’autre pour qu’ils croissent en libertĂ©, et pour qu’il vienne un peu de taillis dans les intervalles, qui sans cela ne produiraient rien. Un massif trĂšs-Ă©pais convient dans les terrains sujets aux gelĂ©es car l'herbe, les plantes annuelles et les jeunes plants forestiers, ne sont point gelĂ©s sous les grands arbres, et le sont dans les clairiĂšres. On peut, dans les cantons sujets aux gelĂ©es, couper le taillis par le furetage; mais le mieux est de planter des espĂšces de bois qui ne craignent point la tempĂ©rature du lieu oĂč on les place. Nous allons donner un petit tableau qui servira Ă  faire connaĂźtre l’espace moyen que les futaies occupent dans les taillis amĂ©nagĂ©s Ă  vingt ans. TOUR des arbres. SURFACE perdue Ă  l’entour des arbres. ‱ OBSERVATION. pieds. mĂštres carre's. 2 3 2 1/2 Les ormes et les 4 frĂȘnes, ayant un feuil- 5 5 lage peu Ă©pais, cou- 3 1/2 7 vrent moins d’espace a 10 que le chĂȘne et le hĂȘtre. U 1/2 15 5 20 6 28 7 44 8 75 9 95 10 130 185 ffr Les grands arbres vivent aux dĂ©pens des petits, et surtout des taillis. Ce mĂ©lange de plantes fortes et faibles est trĂšs-nuisible aux derniĂšres. C’est par cette raison que, dans une foret bien administrĂ©e, la futaie dominante doit ĂȘtre composĂ©e de chĂȘnes, et non de ces arbres de mince valeur, dont la vente ne dĂ©dommagerait pas de la perte du taillis. Nous allons calculer les ressources que prĂ©sentent les taillis et les futaies surtaillis. Dans des bois amĂ©nagĂ©s Ă  vingt ans, j’ai trouvĂ©, par hectare, environ deux mille huit cents souches, savoir neuf cents souches de chĂȘne, onze cents souches de charme, six cents de hĂȘtre, et deux cents d’alizier, frĂȘne, Ă©rable, etc. Je ne comprends pas dans ce dĂ©nombrement les coudres, les cornouillers, les Ă©pines, et autres arbrisseaux, ni les brins de semence, qui s’élĂšvent au nombre d’environ deux mille par hectare. Le nombre des souches n’est guĂšre que de deux mille dans un taillis amĂ©nagĂ© Ă  trente ans; mais dans un bois rĂ©glĂ© Ă  dix-huit ans, on en trouve jusqu'Ă  trois mille quatre cents, non compris les arbrisseaux et brins de semence. Il y a environ trois cents souches mortes par hectare Ă  chaque exploitation, en y comprenant celles de la futaie surtaillis qui ont pĂ©ri aprĂšs l’abattage des arbres. Les brins de semis, qui sont de l’ñge d’un taillis Ă  la veille d’ĂȘtre exploitĂ©, sont trĂšs-petits, en comparaison des brins venus sur de bonnes souches. Le volume de chacun des premiers est tout au plus le douziĂšme de chacun des derniers. C’est sur cette diffĂ©rence, qui disparaĂźt Ă  la longue lorsque les arbres vieillissent, qu’est fondĂ©e la supĂ©rioritĂ© des taillis considĂ©rĂ©s comme bois de chauffage. $ÂŁ 186 $ * Un taillis sans futaie amĂ©nagĂ© Ă  vingt-cincj ans, dans un sol passable, rend deux cent quarante stĂšres de bois par hectare; il faut dĂ©duire moitiĂ© de ce volume pour les interstices des bĂ»ches ; il reste cent vingt stĂšres ou trois mille deux cent quarante pieds, non compris les vides, par hectare; et, comme on fait huit coupes dans une pĂ©riode de deux cents ans, le produit total de ces deux siĂšcles sera de vingt-cinq mille neuf cent vingt pieds cubes. Ce volume est bien supĂ©rieur Ă  celui que produit une haute futaie qui n’est point Ă©claircie car elle ne donne guĂšre que dix-huit mille pieds cubes par hectare au bout de deux cents ans. Pour calculer le produit d’une futaie surtaillis, il faut d’abord connaĂźtre le volume des baliveaux anciens et modernes dont elle est formĂ©e. Nous allons en prĂ©senter un tableau qui rĂ©sulte d’un grand nombre de comparaisons. AGE * des baliveaux. cubage. OBSERVATION. ans. pieds cubes, dixiĂšmes de pied cube. 40 3 3 50 6 3 Ce cubage ne 60 10 5 comprend que la tige e'quarrie. 70 15 80 18 8 90 23 100 30 120 56 Voici actuellement le produit total, Ă  chaque exploi tation des taillis. 187 §& ‱ On peut couper dans un taillis de vingt ans bien garni de futaies, trente-trois arbres par hectare, qui donnent, 1. ° En futaie Ă©quarrie ou propre Ă  l’ĂȘtre. 53o pieds cubes. 2 . ° Cinq cent trente pieds cubes de bois de dĂ©coupe, dont il faut ĂŽter un tiers Ă  cause des interstices dans l’empilage 5 reste. 353 3. ° Branchages, trente-six stĂšres par hectare, dont il faut ĂŽter la moitiĂ© pour les vides ; reste dix-huit stĂšres ou. 486 Total. 1369 Comme on coupera tous les vingt ans une quantitĂ© Ă©gale de futaies, il y aura, pendant un espace de cent soixante ans, huit rĂ©coltes, qui donneront dix mille neuf cent cinquante-deux pieds cubes. Un semblable taillis, Ă©tant chargĂ© d’une assez grande quantitĂ© de futaies, ne rendrait que deux mille quatre cents pieds cubes par hectare, dĂ©duction faite des interstices, ce qui ferait, pour huit coupes, dix-neuf mille deux cents pieds cubes de taillis. Les deux sommes rĂ©unies s’élĂšvent Ă  trente mille cent cinquante-deux pieds cubes. Nous avons comptĂ© cinq cent trente pieds cubes de bois de service par hectare. C’est une quantitĂ© dĂ©jĂ  considĂ©rable. On peut en obtenir cependant jusqu’à neuf cents pieds si la rĂ©serve d’arbres a Ă©tĂ© trĂšs-nombreuse> mais le taillis en est d’autant plus faible. Le mode d’amĂ©nagement que l’on doit adopter dĂ©pend de la position de chaque forĂȘt. Veut-on avoir beau- isa fa» coup de futaie, parce qu’elle a, dans la localitĂ©, beaucoup plus de valeur relative que le taillis, on fera abattre tous les arbres dĂ©fectueux ; on favorisera les semis des meilleures essences, et onrĂ©servera jusqu’à deux ou trois cents baliveaux par hectare. Se propose-t-on au contraire d’avoir presque uniquement des taillis, on rĂ©servera des baliveaux pour donner des graines et un peu d’ombrage, et on les coupera Ă  la rĂ©volution suivante de l’amĂ©nagement, lorsqu’on en rĂ©servera de nouveaux. On conçoit que la qualitĂ© du sol doit ĂȘtre consultĂ©e. On n’aura que des taillis dans les terrains mĂ©diocres ; mais, dans une forĂȘt d’une certaine Ă©tendue, on trouvera toujours des terrains propres Ă  Ă©lever quelques petits massifs de futaies. S’agi t-il d’une forĂȘt peuplĂ©e de taillis et d’arbres mĂ©diocres , on fera abattre ceux-ci, on les extraira, en oc- casionant le moins de dommage possible, et bientĂŽt le taillis prendra un dĂ©veloppement inespĂ©rĂ©. On pourra piocher le sol dans les clairiĂšres pour faire croĂźtre les semis, et arracher les mauvaises espĂšces de bois, de maniĂšre Ă  n’avoir plus qu’un taillis homogĂšne, qui sera soumis Ă  des nettoiemens. Ainsi disparaĂźtront ces arhres Ă  lige courte et Ă  large tĂȘte, qui Ă©puisent le sol et qui dĂ©parent les forĂȘts. Ainsi, aux taillis buissonneux succĂ©deront d’autres taillis droits, Ă©levĂ©s, d’espĂšces choisies, et d’une croissance .rapide. Les taillis venus sur souches, n’étant, pour ainsi dire que des rejetons d’arhres plus ou moins ĂągĂ©s, portent assez de graines pour se ressemer d’eux-mĂȘmes; mais dans les taillis couverts d’herbes et d’arbrisseaux, les glands ne tombent pas jusqu’à terre aussi arrive-t-il frĂ©quemment que , dans une forĂȘt chargĂ©e de vieux s 189 ÂŁ> chĂȘnes surtaillis, on ne trouve pas meme assez de brins de chĂȘne pour y rĂ©server vingt baliveaux de cette espĂšce par hectare. Les bois qui tombent dans cet Ă©tat de dĂ©gradation ne peuvent ĂȘtre restaurĂ©s que par l’arrachement de l’herbe et le nettoiement des taillis. Les graines de hĂȘtre lĂšvent plus facilement que celles de chĂȘne ; mais ce dernier arbre se propage beaucoup mieux par les souches 1. On le coupe prĂšs de terre. Il sort du tronc plusieurs brins qui grandissent, et forment chacun une nouvelle souche. Lorsque le taillis est nettoyĂ©, on voit paraĂźtre des semis d’arbres dont l’espĂšce avait disparu depuis long-temps de la forĂȘt. M. Dureau de la Malle pense que la facultĂ© germinative des graines se conserve vingt ans sous l’eau, et cent ans dans la terre. Les taillis situĂ©s sur des coteaux exposĂ©s Ă  des vents impĂ©tueux ne peuvent porter des baliveaux, parce que ceux qui ne sont pas dĂ©truits par les frimas, languissent et pĂ©rissent Ă  la longue. On Ă©prouve encore beaucoup de difficultĂ© Ă  Ă©lever des baliveaux dans une forĂȘt qui Ă©tait peu de temps auparavant en haute futaie; les brins nĂ©s dans des massifs Ă©pais pĂ©rissent lorsque leur tĂȘte ne trouve plus d’appui, lorsque leur pied est dessĂ©chĂ© par l’évaporation de l’humiditĂ© qui le couvrait; mais les brins du nouveau taillis, mieux garnis de racines, deviennent propres Ă  faire de bons baliveaux. Il ne s’agit que d’attendre. Toutes nos forĂȘts amĂ©nagĂ©es en taillis ont passĂ© par cette Ă©preuve. La conversion d’un taillis en haute futaie exige une i Les souches des arbres coupe's au mois de mai ou au commencement de juin, pendant l’ascension de la sĂšve, repoussent presque toujours. *> "k !» condition essentielle, c’est de trouver par hectare trois ou quatre cents baliveaux de l'espĂšce que l’on veut rĂ©server, bien venans, et non sur de vieilles souches. Or il est trĂšs-difficile qu’il y ait un pareil nombre de brins de chĂȘnes de semence dans les taillis sous futaie. La plupart n’en offrent pas la cinquantiĂšme partie. Il faut donc s’en procurer d’avance un nombre suffisant par les semis naturels,^ SECTION 3. BU CHOIX DES ESSENCES F O HE S T I i R E S. Avant de fixer l’amĂ©nagement d’une forĂȘt, il est essentiel de choisir l’espĂšce d’arbres qui doit dominer sur le sol. Parmi les arbres feuillus, le premier rang appartient au chĂȘne par l’excellence de son bois propre Ă  une infinitĂ© d’usages, et par cela mĂȘme d’un dĂ©bit toujours assurĂ©. L’orme, le frĂȘne, le sycomore, viennent ensuite, mais en moindre nombre. Les arbres rĂ©sineux qui, dans un espace donnĂ©, produisent un volume double de celui des arbres feuillus , mĂ©riteront la prĂ©fĂ©rence dans la plupart des localitĂ©s. Lorsque les espĂšces sont choisies, on assigne Ă  chacune sa place. Au lieu de les mĂ©langer, on met les bois blancs dans les parties humides de la forĂȘt, le chĂȘne dans un bon sol, les bois rĂ©sineux sur les coteaux. Si, par exemple, la forĂȘt est divisĂ©e en vingt parties, il y en aura dix en chĂȘnes, deux en hĂȘtres, deux en ormes et frĂȘnes, deux en trembles, trois en pins silvestres, et une en mĂ©lĂšses. Les moyens de changer les espĂšces qui couvrent une forĂȘt varient avec les circonstances. S’agil-il d’un bois de pins mĂ©langĂ©s de hĂȘtres, pour dĂ©truire ceux-ci, il suffit Rf 191 de les couper sous l’ombrage du pin ; il est mieux encore de les arracher, parce que le labour que cette opĂ©ration donne Ă  la terre prĂ©pare un semis abondant dans lequel les pins s’assurent la possession exclusive du sol. Rien de plus facile, quand on a su mĂ©nager le semis, que de faire prĂ©dominer l’espĂšce que l’on a choisie, et d’expulser celle que l’on a rĂ©prouvĂ©e5 il suffit, dans les neltoicmens, de couper ou d’arracher tous les plants de cette derniĂšre; ses rejets seront bientĂŽt Ă©touffĂ©s par les plants de prĂ©dilection, pour peu que l’on ait cherchĂ© Ă  favoriser les semis naturels. La tendance de chaque espĂšce de vĂ©gĂ©tal Ă  se multiplier est si grande qu’il suffit de prĂ©parer la place Ă  celle que l’on prĂ©fĂšre. C’est ainsi que le cultivateur, par ses efforts, dĂ©truit les mauvaises herbes dans les champs oĂč il ne veut voir que du froment. Le produit des grandes espĂšces d’arbres est tellement supĂ©rieur, meme en taillis , Ă  celui des espĂšces infĂ©rieures , qu’il y a un avantage considĂ©rable Ă  n’avoir que des premiĂšres. Le changement des essences forestiĂšres est une chose nouvelle en France ; mais il se pratique journellement en Allemagne dans les plus grandes forĂȘts. SECTION U. DES FUTAIES ÉLEVÉES EN MASSIFS AVEC DES ÉCLAIRCIES SUCCESSIVES. Les nettoiemens et les Ă©claircies successives sont aux yeux des Ă©crivains forestiers les moyens d’obtenir les plus grands et les meilleurs produits d’un massif de futaie; mais il faut indispensablement opĂ©rer sur des, g 192 fi* bois provenant de semis, et non sur des taillis Ă  grosses souches. Le nettoiement s’exĂ©cute vers la huitiĂšme annĂ©e, si le plant n’a pas Ă©tĂ© cultivĂ© dĂšs son origine. Nous ne possĂ©dons pas encore en France de ces massifs de futaie mĂ©thodiquement Ă©claircis. A dĂ©faut d’expĂ©rience directe, nous raisonnerons par analogie d’aprĂšs des faits connus, en nous appuyant aussi sur l’autoritĂ© de M. de Monville, qui a traitĂ© ce sujet avec une grande supĂ©rioritĂ© de vues. L’amĂ©nagement par Ă©claircies est celui qui donne le plus de bois de service. Lorsqu’on laisse les brins se » disputer le terrain, ils s’éclaircissent d’eux-mĂȘmes; les » plus forts Ă©touffent les plus faibles; mais aprĂšs une » trop longue lutte, les arbres sont effilĂ©s, et portent » trop peu de grosseur pour la hauteur 1. » Dans le systĂšme des Ă©claircies, les distances moyennes des arbres sont calculĂ©es dans la proportion la plus favorable Ă  leur accroissement. Lorsque le taillis a vingt ans, on l’éclaircit de maniĂšre Ă  y laisser par hectare deux mille brins des mieux venans. A quarante ans, on fait une coupe en laissant six cents arbres. A soixante ans, on en fait une autre en laissant trois cents arbres, et ainsi de suite de vingt ans en vingt ans, de maniĂšre Ă  couper, dans leur cent soixantiĂšme annĂ©e, cent vingt arbres qui resteront les derniers. Le produit total des tiges abattues dans les coupes successives, y compris la coupe dĂ©finitive, s’élĂšvera Ă  seize mille huit cents pieds cubes par hectare. On aura i Annales maritimes et coloniales, i8a4. taillis de vingt-cinq ans, produirait, en supposant qu’il n’y ait point de futaies surtaillis, 625 francs par coupe. Ainsi on aurait au bout de cent ans Le produit de la premiĂšre coupe, avec intĂ©rĂȘts cumulĂ©s pendant soixante-quinze ans..... fr. Le produit de la seconde, avec intĂ©rĂȘts cumulĂ©s pendant cinquante ans. 4 , 44 ° Le produit de la troisiĂšme, avec intĂ©rĂȘts cumulĂ©s pendant vingt-cinq ans. i,66o Le produit de la quatriĂšme coupe. .... 625 Total. 18,559 fr. Les Ă©claircies successives offrent de grands avantages car des arbres du mĂȘme Ăąge et de la mĂȘme force croĂźtront avec toute la vigueur possible ; et ceuxqui formeront les derniĂšres coupes atteindront les plus belles dimensions. La culture, les nettoiemens, les Ă©lagages, l’assainissement du sol, contribueront Ă  leur donner un tissu serrĂ©, qui les rendra propres Ă  la construction des vaisseaux et Ă  toute autre espĂšce d’usage. Ces exploitations une fois rĂ©gularisĂ©es, on ne craindra plus de manquer de futaies. On conservera des arbres, comme tout autre bien que l’on mĂ©nage pour le laisser dans un Ă©tat prospĂšre. Ce penchant qui porte les hommes Ă  Ă©pargner, Ă  accumuler pour leurs successeurs en s’imposant des privations, garantit que l’on ne manquera pas de futaies tant que la propriĂ©tĂ© sera assurĂ©e. Cet amĂ©nagement en futaies successivement Ă©claircies n’est autre chose au fond que ce qui se fait en Flandre, en Normandie, dans le Maine et dans d’autres contrĂ©es, oĂč l’on a soin de nettoyer successivement les plantations qui environnent les fermes, et de conduire les arbres g 195 jusqu’au point oĂč ils deviennent propres soiL Ă  la charpente, soit au charronnage, soit Ă  un autre emploi industriel. Le systĂšme des Ă©claircies successives n’en est que la pratique agrandie et soumise Ă  des rĂšgles. La coupe dĂ©finitive n’aura lieu qu’avec un ensemencement naturel prĂ©parĂ© Ă  l’avance. Les semis naturels qui ne sont pas cultivĂ©s font perdre un temps considĂ©rable pour la reproduction car, pendant les vingt ou trente premiĂšres annĂ©es, on ne voit que des genĂȘts, Ă©pines et bois blancs ; c’est ce que l’on remarque dans la forĂȘt de Villers-Cotterets, oĂč l’amĂ©nagement est fixĂ© Ă  cent cinquante ans, et oĂč la plupart des bois n’ont que de cent vingt .Ă  cent trente ans. CHAPITRE Y. DES ESSARTS ET DU FURETAGE. t.' e SECTION. DES ESSARTS. La culture des bois dans les Ardennes se pratique encore aujourd’hui comme du temps de Bernard de Palissy, qui l’a dĂ©crite il y a trois siĂšcles. On peut Ă  cette occasion remarquer combien les habitudes et les coutumes sont durables, et combien il est difficile de les faire sortir de leur enceinte. En elfet, si la mĂ©thode de cultiver les bois en essarts est bonne, on devait l’adopter dans toutes les localitĂ©s oĂč son utilitĂ© Ă©tait Ă©vidente; et si elle est mauvaise, on devait la proscrire; mais elle existe encore, et seulement dans les mĂȘmes lieux. 4g 196 > On fait des essarts depuis un temps immĂ©morial sur les bords de la Sarre, de la Moselle, du Rhin, et dans quelques autres contrĂ©es. Les bois d’essarts sont des taillis qui s’exploitent en plein, sans rĂ©serve de baliveaux, tous les quinze ou dix-huit ans, et dont on cultive le sol aprĂšs l’exploitation, pour y semer du seigle ou d’autres grains, pendant deux ou trois ans au plus. L’écobuage est l’un des modes essentiels de cette culture} on brĂ»le le gazon, les Ă©pines, les feuilles, les menues branches, les genĂȘts, les bruyĂšres. Les labours se font Ă  la pioche ou Ă  la houe. Le produit des blĂ©s est assez considĂ©rable, puisque la portion du propriĂ©taire, qui n’est tenu d’aucuns frais de culture, s’élĂšve ordinairement Ă  trente ou trente-six francs par hectare. Si l’on a soin de mĂ©nager les souches, ce qui est facile, cette culture est trĂšs-favorable Ă  l’accroissement des bois et Ă  la germination des plantes. On ne peut s’empĂȘcher d’ĂȘtre frappĂ© de la beautĂ© des taillis venus sur ces essarts. Ils produisent ordinairement du gland lorsque les taillis des coupes incultes n’en donnent point. Nous consignerons ici quelques dĂ©tails sur la pratique de cette culture dans les communes de Faucogney, Servances, et quelques autres dont les territoires contigus forment le prolongement mĂ©ridional de la chaĂźne des Vosges. Lorsque le taillis est coupĂ©, les habitans cultivent le sol Ă  la pioche; ils mettent la pelouse en petits fourneaux sur lesquels ils placent les genĂȘts et les herbes qu’ils ont pu ramasser dans le voisinage; les cendres qui proviennent de la combustion de ces fourneaux sont 197 Ăż> rĂ©pandues sur le soi, et l’on y sĂšme du seigle. Le propriĂ©taire a ordinairement le tiers de la rĂ©colte pour sa portion. Dans l’exploitation du taillis, qui est presque uniquement composĂ© de chĂȘne, on a soin d’écorcer les souches, afin que les rejets sortent le plus prĂšs de terre possible. Six ans aprĂšs l’exploitation, on nettoie les taillis, qui sont alors aussi beaux que le seraient des taillis de douze ans traitĂ©s par la mĂ©thode ordinaire. Le sous-bois forme une partie du chauffage des habitans laborieux et Ă©conomes de ces montagnes. Cette culture, si utile dans les plaines, est dĂ©sastreuse dans les coteaux rapides car, les pluies entraĂźnant la terre et les engrais, il n’y a plus de vĂ©gĂ©tation possible. La plupart des montagnes de la Toscane sont, au dire de FornaĂŻni, une preuve frappante clĂ©s suites dĂ©plorables de ce systĂšme, qui a encore pour rĂ©sultat d’augmenter les torrens et les dĂ©borclernens des riviĂšres. On a essayĂ© de pratiquer cette culture dans des plaines, et elle a donnĂ© de magnifiques rĂ©coltes d’avoine. On nomme essarts, dans le Morvan, des bois que l’on exploite de la maniĂšre suivante Ces bois sont peuplĂ©s uniquement de chĂȘnes, qui s’y maintiennent seuls par le soili que l’on prend de dĂ©truire toutes les autres espĂšces Ă  mesure qu’elles paraissent. Tous les six ans on coupe dans chaque partie les gros brins qui sont ĂągĂ©s de dix-huit ans, et on laisse subsister tous ceux qui sont ĂągĂ©s de douze ans et de six ans. Le produit principal est l’écorce, qui est broyĂ©e dans les moulins Ă  eau Ă©tablis partout Ă  la proximitĂ© des bois. Il y a plusieurs choses Ă  remarquer dans cette exploitation. On Ă©corce les souches jusqu’au sol, en sorte que 13 198 les rejets sortent nĂ©cessairement de terre. On ne rĂ©serve point de baliveaux, parce que l’on a reconnu qu’ils seraient nuisibles. On voit seulement quelques gros chĂątaigniers Ă©pars dans les coupes. Les rejets poussent trĂšs-bien. L’ombrage des brins que l’on a laissĂ©s subsister ne nuit point au recru, car un essart de cinq ans paraĂźt aussi- Ă©pais qu’un taillis ordinaire. On appelle curer la coupe le travail de couper les houx, les genĂȘts, les Ă©pines, et les brins traĂźnans, qui nuiraient au taillis; ces broussailles servent Ă  garnir les clĂŽtures des champs, des prĂ©s et des bois. Ce travail s’exĂ©cute en hiver. Il est ordinairement incomplet, car on n’arrache pas la bruyĂšre, quâ€™ĂŒ faudrait dĂ©truire. Quoique l’on ne puisse Ă©corcer les brins qu’au mois de mai ou au mois de juin, on les abat dĂšs le mois de mars en prenant la prĂ©caution de ne pas les sĂ©parer entiĂšrement du tronc, mais de laisser de l’écorce et un peu de fibre pour conserver la communication entre la tige abattue et la souche qui la portait; ce canal suffit pour livrer passage Ă  la sĂšve, qui s’introduit tout le long de cette tige Ă©tendue sur la terre, en sorte qu’on peut l’écorcer au printemps., et que tout est fini avant le mois de juillet. On calcule de la maniĂšre suivante le produit des es- sarts qui sont en bon Ă©tat. En supposant que le bois contienne soixante hectares, on coupe dix hectares par an; il y a des brins de trois Ăąges diffĂ©rens dans un taillis que l’on va exploiter; ceux de dix-huit ans, les seuls que l’on doive couper, produisent 180 fr. par hectare, ce qui fait pour une coupe de dix hectares 1800 fr. de revenu ou 3 o fr. par hectare. L’entretien de ces bois exige, comme on le voit, S5 199 Suremploi d’une certaine industrie ; les vices d’exploitation, notamment le dĂ©faut d’écorcement des souches sont examinĂ©s avec sĂ©vĂ©ritĂ©, et soumis Ă  des Ă©valuations de dommages qui sont Ă  la charge des exploitans. J’ai reconnu que les bois qui avoisinent ces essarts sont gĂ©nĂ©ralement peuplĂ©s de hĂȘtres. Une simple ligne en marque la sĂ©paration. Les brins de hĂȘtre qui croissent dans les essarts sont impitoyablement dĂ©truits. C’est par ce moyen de l’expulsion des essences Ă©trangĂšres que le massif de chĂȘnes se maintient dans toute sa puretĂ©; il y a peu de semis, mais la longue durĂ©e des souches fait que la forĂȘt n’en demande pas davantage pour rester suffisamment peuplĂ©e. SECTION DC TÜRETiGE. Le furetage est le mode d’exploitation que nous allons dĂ©crire. Les bois oĂč il s’exerce sont peuplĂ©s principalement de hĂȘtres ; on n’y laisse point de futaies, parce qu’elles sont regardĂ©es comme nuisibles. U y a cependant une exception en faveur du chĂątaignier , on rĂ©serve actuellement des baliveaux dans ces taillis ; mais en petit -nombre. L’exploitation revient tous les dix ans dans la mĂȘme partie de la forĂȘt. Sur une mĂȘme souche il y a des brins- de trois Ăąges diffĂ©rens. On coupe tous ceux qui ont plus d’un pied de circonfĂ©rence, et on laisse subsister les autres. On rĂ©serve tous les brins de semence. Les coupes nouvellement furetĂ©es sont couvertes d’herbes, de genĂȘts, de brins cassĂ©s ou pliĂ©s; mais quelques annĂ©es aprĂšs, on n’aperçoit aucune trace des dĂ©gĂąts qu’avait occasionĂ©s l’exploitation. ts 200 ß» La valeur des brius coupĂ©s dans l’exploitation au furetage est Ă  celle des brins restans comme quatre est Ă  un, tandis que le nombre des brins que l’on coupe est Ă  celui des brins restans comme un est Ă  quatre en sorte que le brin moyen que l’on coupe vaut seize fois le brin moyen qui reste. Celui qui n’aurait eu aucune valeur si on l’eĂ»t coupĂ©, croit avec force aprĂšs l’exploitation. Les bĂ»cherons chargĂ©s de l’exploitation coupent ^les brins branchus, difformes ou train ans; mais cette espĂšce de nettoiement est incomplĂšte, parce que l’on ne coupe ni les houx, ni les genĂȘts, ni les fougĂšres, ni les bruyĂšres, ce qui fait qu’il y a plus de vides dans les furetages que dans les essarts; on perfectionnerait l’exploitation en faisant donner des labours Ă  la pioche pour dĂ©truire les plantes nuisibles; mais toutes n’étouffent pas Ă©galement le semis car on voit beaucoup de plants de chĂątaigniers lever au milieu des houx. Le hĂȘtre s’accommode parfaitement de ce genre d’exploitation. On a essayĂ© d’exploiter en coupe pleine des bois de cette espĂšce qui depuis trois siĂšcles Ă©taient traitĂ©s par la mĂ©thode du furetage, mais les souches n’ont point repoussĂ©; Ă  peine quelques-unes ont-elles donnĂ© des jets frĂȘles et languissans, que les genĂȘts ont Ă©touffĂ©s presque aussitĂŽt qu’ils ont paru; le bois s’est entiĂšrement dĂ©peuplĂ©; ce n’est plus qu’un vaste champ de genĂȘts et de bruyĂšres. Soit que ces plantes aient Ă©puisĂ© les sucs qui auparavant se portaient aux racines des arbres, soit que l’ardeur du soleil ait dessĂ©chĂ© la terre Ă  l’entour des souches qui y Ă©taient exposĂ©es pour la premiĂšre fois, elles sont mortes peu d’annĂ©es aprĂšs la coupe pleine. Un taillis prĂȘt Ă  ĂȘtre exploitĂ©, et dont les brins les plus ĂągĂ©s ont trente ans, paraĂźt presque aussi beau 4 $ ÂŁ01 qu’un taillis ordinaire de cet Ăąge, dans lequel on n’a jamais rien coupĂ©. Le produit annuel des bois exploitĂ©s par le furetage est bien supĂ©rieur Ă  celui des taillis qui sont soumis Ă  la mĂ©thode ordinaire ; et quoique la difficultĂ© d’enlever le bois, de faire du charbon dans les coupes, d’exercer une surveillance exacte sur l’exploitation , soient des obstacles Ă  l’adoption gĂ©nĂ©rale de cette mĂ©thode, elle est excellente pour les terrains arides. Le taillis qui garnit continuellement le sol procure aux rejets un abri contre les vents dessĂ©cbans, contre les gelĂ©es printaniĂšres, contre l’excĂšs des chaleurs. Il empĂȘche la multiplication du genĂȘt, plante naturelle au Morvan, laquelle couvre en trois ou quatre ans tous les terrains abandonnĂ©s. Nous allons calculer, d’aprĂšs l’expĂ©rience, les produits respectifs. Supposons un bois de trente hectares on couperait un hectare de taillis par an s’il Ă©tait amĂ©nagĂ© Ă  trente ans, en coupes pleines ; cet hectare vaudrait 900 fr. Mais si l’on exploite ce bois par le furetage, on aura trois hectares de coupes par an qui vaudront q’ño fr. l’hectare, ce qui fera en tout i35o fr. Le procĂ©dĂ© du furetage, tel qu’il se pratique actuellement, ne paraĂźt pas remonter plus haut que l’invention du flottage des bois de chauffage sur les ruisseaux ; auparavant, les forĂȘts du Morvan ne servaient qu’au pĂąturage , Ă  fabriquer de l’écorce, Ă  nourrir des porcs et des bestiaux. Il n’y a mĂȘme guĂšre plus d’un demi-siĂšcle que l’on ne trouvait d’autre moyen de tirer parti du bois dans les forĂȘts Ă©loignĂ©es des riviĂšres, que de les abattre, de les brĂ»ler, et d’en conduise les cendres Ă  Nevers ou Ă  Paris pour les vendre. Test au dĂ©veloppement 4g 202 g* des moyens de transport que l’on doit la bonne conservation actuelle de ces forĂȘts. CHAPITRE VI. »[J NETTOIEMENT DES TAILLIS ET DES ÉCLAIRCIES. Un taillis de cinq ans est composĂ© d’un nombre infini de brins dont le dixiĂšme tout au plus parviendront Ă  l’ñge de vingt-cinq ans. L’art du forestier doit avoir pour objet de faire tourner exclusivement au profit de ceux-ci toutes les forces de la vĂ©gĂ©tation. Pour y parvenir, il faut les dĂ©barrasser de tout ce qui peut nuire Ă  leur croissance. Ainsi l’on coupera i.° les Ă©pines, les ronces, les viornes, les genĂȘts et les bruyĂšres; 2. 0 les brins traĂźnans, bran- clius, viciĂ©s, qui croissent sur les mĂȘmes souches que les brins bien-venans; 3.° le coudrier, le nerprun, la bourdaine et autres arbrisseaux semblables, qui n’ont qu’une courte existence. On aura l’attention de laisser d’autant plus de brins sur chaque souche qu’elle sera plus grosse et plus vigoureuse ; les brins qui tiennent Ă  la terre par leurs racines doivent ĂȘtre mĂ©nagĂ©s plus- que les autres. Quant au jeune plant de semis, on peut rĂ©cĂ©per prĂšs du sol celui qui est languissant ou rabougri; on Ă©claircira Ă  l’entour les brins de souche, pour donner de l’espace au plant; l’un des avantages du nettoiement est de favoriser la croissance du semis naturel. Le cliĂȘne a besoin surtout de'l’air et de la lumiĂšre. Cette opĂ©ration exigĂ© beaucoup de prudence; il faut avoir l’attention de ne pas trop- enlever de bois car si 203 Skies brins restans Ă©taient trop Ă©loignĂ©s l’un de l’autre, ils Ă©largiraient leur tĂȘte au lieu de s’élever; il vaut mieux laisser subsister des arbustes ou des brins dĂ©fectueux que d’avoir de grands intervalles vides, Ă  moins qu’on ne les cultive, en y semant de bonnes essences. Les nettoiemens sont depuis un temps immĂ©morial en usage dans quelques localitĂ©s pour les bois des particuliers; et s’ils ne sont pas pratiquĂ©s par tout, c’est que dans beaucoup de contrĂ©es on coupe les taillis trop jeunes, et que par consĂ©quent les Ă©claircies profiteraient peu; c’est que l’on n’a pas su Ă©viter les inconvĂ©niens que les nettoiemens peuvent prĂ©senter et que nous allons examiner. Le plus grave de tous est que le- pied des brins que l’on a coupĂ©s pousse des rejets si l'opĂ©ration n’est pas bien exĂ©cutĂ©e. On prĂ©tend que ces rejets Ă©puisent les brins restans,autant qu’auraient pu le faire ceux que l’on a enlevĂ©s dans le nettoiement; mais ce dernier effet fĂ»t-il rĂ©el, la destruction des Ă©pines et des buissons n’en serait pas moins accomplie, et par consĂ©quent le taillis en profiterait mieux. Il y a plusieurs moyens de dĂ©truire les productions qui affaiblissent les brins restans. Le premier est de mĂ©nager assez d’ombrage pour Ă©touffer ces rejets parasites, et de conserver, dans cette vue, des brins que l’on pourra couper Ă  l’époque d’un second nettoiement, ou qui seront exploitĂ©s avec le taillis. Le second est de faire pĂąturer le bĂ©tail dans les parties qui viennent d’ĂȘtre Ă©claircies; mais pour mĂ©nager le semis, ce pĂąturage doit cesser quelque temps avant l’exploitation dĂ©finitive du taillis. L’expĂ©rience apprend que dans les bois qui ont Ă©tĂ© Ă©claircis avec adresse et prĂ©voyance, le dĂ©faut dont nous venons de parler n’existe pas. S 204 ĂŻ* On reproche encore Ă  cette mĂ©thode que lorsqu’on exploite dĂ©finitivement le taillis, les acheteurs ne trouvent pas autant de fagots et de menues branches que la coupe leur en aurait fourni si elle n’avait pas Ă©tĂ© Ă©claircie. Celte objection ne mĂ©rite pas qu’on s’y arrĂȘte. Il suffit de remarquer que dans la coupe dĂ©finitive d’un taillis qui a Ă©tĂ© nettoyĂ©, on trouve un stĂšre de gros bois dĂ©plus pour trois fagots que l’on a de moins; que le stĂšre vaut 8 fr., et que les fagots auraient valu xo sous. Le nettoiement n’est dĂ©savantageux que lorsqu’il est trĂšs-mal exĂ©cutĂ© et Ă  grands frais; c’est ce qui arrive lorsque l’opĂ©ration n’est pas bien surveillĂ©e. Nous allons donner ici quelques rĂšgles fondĂ©es sur l’expĂ©rience pour en assurer la bonne exĂ©cution i.° le garde ou le chef des Ă©lagueurs fera tous les jours deux ou trois visites Ă  des heures diffĂ©rentes prĂšs des ouvriers , pour juger de leur travail. 2. 0 Il empĂȘchera qu’ils n’emportent aucun bois, sec ou vert, sous quelque prĂ©texte et en si petite quantitĂ© que ce soit. 3.° Les ouvriers devront ĂȘtre pourvus de bons instrumens, et ils couperont proprement sur le tronc les rejets traĂźnans. 4 -° Le garde fera compter les fagots, pour que l’on puisse reconnaĂźtre si des maraudeurs n’en dĂ©robent pas quelques-uns. 5.° Il tiendra note exacte du travail de chaque ouvrier. 6 .° Il veillera particuliĂšrement sur l’extirpation des Ă©pines. 7. 0 Les brins restans, destinĂ©s Ă  former le massif de taillis, ne seront Ă©laguĂ©s que dans la partie infĂ©rieure de leur tige. L’usage est de payer les ouvriers Ă  raison de la quantitĂ© de bois qu’ils ont coupĂ©e; on leur donne ordinairement 20 fr. par mille de fagots. On pourrait aussi fixer leur salaire par arpenf de bois qu’ils auraient nettoyĂ©. Le produit net des Ă©claircies pratiquĂ©es dans un taillis de six Ă  sept ans varie de 20 Ă  60 fr. par hectare, suivant que Ton en retire des Ă©chalas, des fagots, ou que l’on se sert des menues brandies pour fabriquer de la chaux ou de la tuile, ou pour des usages analogues, ou enfin pour le chauffage 1. J’ai reconnu que dans les annĂ©es qui suivent le nettoiement, l’épaisseur des couches ligneuses, qui marquent la croissance annuelle des brins restans, augmente dans une forte proportion, et qu’un taillis de 2 4 ans > qui avait Ă©tĂ© nettoyĂ© quinze ans avant l’exploitation dĂ©finitive, a produit cent quatre-vingt-dix stĂšres par hectare, tandis qu’un taillis semblable qui n’avait pas Ă©tĂ© Ă©clairci, n’en a produit que cent quarante-huit. Les opinions des auteurs forestiers sont unanimes sur l’utilitĂ© des Ă©clairdes. M. de Perlhuis assure que la diffĂ©rence du produit en argent d’une futaie Ă©claircie Ă  celui d’une futaie non Ă©claircie est d’environ six septiĂšmes en faveur du premier. Duhamel a fondĂ© sa mĂ©thode de culture forestiĂšre sur le principe de l’utilitĂ© des Ă©claircies. En Allemagne, des forĂȘts dont les arbres avaient Ă©tĂ© rabougris par les gelĂ©es ont Ă©tĂ© restaurĂ©es par les Ă©la- gages des gardes. Autrefois en Angleterre, la seule prĂ©caution q\i>0> prit pour les jeunes plants Ă©tait de les dĂ©fendre des bestiaux 3 mais depuis quelque temps, on Ă©claircit 1 Le principal obstacle Ă  l’adoption gĂ©nĂ©rale du mode de nettoiement des taillis consiste dans la difficultĂ© d’employer utilement les menus bois qui en proviennent ; mais dans tous les lieux oĂč l’on pourra fabriquer de la chaux, le bois qui est propre a cette fabrication acquerra de la valeur lorsque les cultivateurs français sauront retirer de cette substance les mĂȘmes avantages qu’on en retire en Angleterre, oĂč elle forme l’engrais principal des terres. de bois qu’à une autre, ils font d’abord prospĂ©rer le semis , et presque en mĂȘme temps ils travaillent Ă  la destruction des essences qu’ils ont condamnĂ©es; bientĂŽt celles qu’ils ont admises rĂ©gnent seules dans la forĂȘt; une simple ligne les sĂ©pare; nulle confusion n’est dĂ©sormais Ă  craindre. La culture fait pour les arbres ce qu’elle fait pour les cĂ©rĂ©ales ; les plantes de prĂ©dilection profitent seules des sucs nourriciers, et les autres, repoussĂ©es par les efforts de l’industrie, disparaissent ; le produit des premiĂšres est incomparablement plus considĂ©rable que celui des secondes. Soit un taillis composĂ© de chĂȘne, de charme, de tilleul et de tremble, qui s’exploite pĂ©riodiquement Ă  vingt-cinq ans, et qui vaut 900 fr. l’hectare. Supposons que le tilleul et le charme soient remplacĂ©s par le chĂȘne et le tremble, en sorte que ces deux derniĂšres espĂšces subsistent seules dans la forĂȘt; supposons encore qu’il y ait trois brins sur chaque souche de chĂȘne, terme moyen; les brins de tremble croissent un Ă  un, mais ils ont peu de branches, et viennent trĂšs-serrĂ©s ; le nombre total des brins des deux espĂšces sera d’environ neuf mille par hectare ; comme ils seront droits et bien venans, ils vaudront environ 5 o centimes chacun; la valeur totale de l’hectare serait donc de 4 5oofrancs, si tout ce bois pouvait se dĂ©biter pour la charpente ou pour des usages semblables. On objectera avec raison que l’on n’a pas besoin d’une si grande quantitĂ© de bois de service ; cela est vrai mais il faut considĂ©rer qu’un stĂšre de gros bois de chauffage vaut moitiĂ© plus qu’un stĂšre composĂ© de petits brins, quoique le volume total soit le mĂȘme sau f l a diffĂ©rence des vides . L’avantage d’avoir de beaux bois de service ou de chauffage est donc bien important pour les propriĂ©taires et pour les consommateurs. 2 9 G Si l’on avais Ă  traiter une foret composĂ©e de frĂȘnes et d’ormes, de coudres i et d’épines, on favoriserait les semis naturels des deux premiĂšres espĂšces, et l’on dĂ©truirait les derniĂšres. C’est ainsi que l’on se prĂ©pare de riches produits. Tout le monde sait que les ormes et les frĂȘnes se vendent ordinairement fort cher, et que leur bois, prĂ©cieux pour le charronage, n’est pas encore employĂ© gĂ©nĂ©ralement pour la confection des voitures rurales, par l’unique motif que les plantations de ces arbres ne sont pas assez multipliĂ©es pour les besoins de l’agriculture. Yoici quelques dĂ©tails sur les frais de la culture des forĂȘts un labour Ă  la pioche, dans une coupe qui vient d’ĂȘtre exploitĂ©e, coĂ»tera, y compris l’écobuage, 5 ofrancs par hectare; or une forĂȘt de cinq cents hectares, amĂ©nagĂ©e Ă  vingt-cinq ans, donne une coupe annuelle de vingt hectares,que l’on peut Ă©valuer 20,000 francs, en y comprenant les anciens baliveaux que l’on coupe avec le taillis. La dĂ©pense annuelle est de 1000 francs, ou du vingtiĂšme du revenu, mais elle est dĂ©jĂ  compensĂ©e en partie par les mauvaises souches que l’on fait arracher; le reste des frais est couvert avec un assez grand profit, si l’on sĂšme des grains ou des plantes olĂ©agineuses dans la coupe; enfin, comme la culture a pour objet d’accĂ©lĂ©rer de beaucoup la croissance du recru, elle prĂ©pare pour l’avenir une augmentation considĂ©rable de revenu; et dussent les frais ĂȘtre plus Ă©levĂ©s que nous 1 On doit conserver le coudrier dans les contrĂ©es oĂč son bois sert Ă  faire des cercles de tonneau. On le cultive en grand dans le comtĂ© de Kent, et ses fruits se vendent dans toute l’Angleterre ; le sol oĂč il croĂźt est labourĂ©; on dĂ©truit les bourgeons qui sortent du collet, de maniĂšre que cet arbrisseau n’ait qu’une seule tige et qu’il acquiĂšre de belles dimensions. 217 ne le pensons, cette dĂ©pense serait toujours trĂšs-faible en comparaison du bĂ©nĂ©fice dont elle est la cause immĂ©diate. Un bon cultivateur ne laisse ni ronces, ni Ă©pines, ni herbes sauvages dans ses champs. Pourrjuoi de pareils soins ne s’étendent-ils pas sur les bois? La diffĂ©rence n’est-elle pas bien grande entre un arpent de chĂȘnes et un arpent d’épines? Il est vrai que l’on trouve rarement des espaces de terrains considĂ©rables qui soient entiĂšrement couverts d’arbrisseaux nuisibles , mais la perte est toujours proportionnĂ©e Ă  la portion d’espace qu’ils occupent. C’est un motif suffisant pour engager un propriĂ©taire Ă  ne pas Ă©pargner les frais d’un travail dont le succĂšs est assurĂ©, et qui doit doubler les revenus. L’importance du sujet exige quelques dĂ©veloppemens. Tout observateur pourra reconnaĂźtre que dans les forĂȘts bien tenues, suivant l’ancien usage qui tolĂ©rait le pĂąturage et l’enlĂšvement des Ă©pines et du bois mort, les essences infĂ©rieures disparaissaient; le bĂ©tail dĂ©truisait les broussailles et les ronces ; le bois blanc ne tardait pas Ă  ĂȘtre dominĂ© par le chĂȘne, ou par d’autres espĂšces de grands arbres qui, dĂ©gagĂ©s des buissons, croissaient avec force ; le semis n’était pas Ă©touffĂ© ; mais depuis la suppression presque gĂ©nĂ©rale du pĂąturage dans les taillis > depuis la prohibition plus gĂ©nĂ©rale encore de l’enlĂšvement du bois mort et des brins traĂźnans , les taillis forment des massifs impĂ©nĂ©trables, dans lesquels les espĂšces infĂ©rieures, comme le charme et les arbrisseaux qui poussent latĂ©ralement, oppriment les plants de chĂȘne et usurpent leur place. L’effet de ce changement est tel, qu’un taillis ou le pĂąturage et l’enlĂšvemeut du bois mort sont absolument dĂ©fendus, ne vaut guĂšre que moitiĂ© d un autre taillis oĂč ces usages s’exercent dans de Si 218 » justes bornes. Mais la culture et les nettoiemens donnent des rĂ©sultats incomparablement plus avantageux. Les propriĂ©taires soigneux arrĂȘteront cette dĂ©gĂ©nĂ©ra-* tion,endĂ©truisant les mauvais plants et en faisant pulluler les bons. Il est facile de juger des espĂšces qu’il faut conserver 3 ce sont celles qui, dans un temps donnĂ©, acquiĂšrent le plus de volume, ou dont le bois a la plus grande valeur intrinsĂšque, celles qui sont le mieux appropriĂ©es au sol et aux besoins locaux. Le chĂȘne et le mĂ©lĂšse seront mis au premier rang si le sol le permet pour ce dernier arbre . En mĂ©nageant les bonnes essences d’aprĂšs les principes de l’art, en favorisant les semis , on ne doit pas craindre d’arracher les mauvaises essences leur place sera remplie immĂ©diatement, et l’on trouvera mĂȘme Ă  cĂŽtĂ© de leurs souches plusieurs plants qui se disputeront la possession du sol. Livrez donc aux grands arbres tout le terrain qu’ils peuvent occuper 3 chaque espĂšce a une telle tendance Ă  se multiplier, qu’il suffit, pour propager celle que l’on prĂ©fĂšre, de dĂ©truire celles qui occupent le sol 3 ce ne sont pas les semences qui manquent au terrain, c’est le terrain qui manque aux plantes. Pour dĂ©truire des arbustes nuisibles, il faut mettre Ă  leur place des plantes utiles. Par exemple, pour faire disparaĂźtre la bruyĂšre, il faut planter des arbres verts. Un propriĂ©taire qui emploierait Ă  cultiver ses bois la vingtiĂšme partie du revenu qu’il en retire, placerait ainsi son argent Ă  douze ou quinze pour cent par an. Il ferait d’abord instruire des ouvriers sur les nettoiemens, les labours et les semis. En peu de temps ils auront acquis les connaissances indispensables, et ils sauront mĂȘme perfectionner les procĂ©dĂ©s qu’on leur aura enseignĂ©s. Ce sont des familles que le propriĂ©taire s’attachera 4K 219 JR» en leur donnant des moyens d’existence. Le mĂ©tier de forestier planteur, cultivateur, Ă©lagueur, ressemblera Ă  celui de jardinier, de vigneron, ou Ă  celui de bĂ»cheron, suivant le degrĂ© d’instruction des individus qui l’exerceront ; on pourra les employer aux soins des champs, des vignes et des jardins, lorsque les forĂȘts n’exigeront pas leur prĂ©sence. Le propriĂ©taire de la forĂȘt, ou ses agens, dresseraient une instruction fondĂ©e sur les principes d’une bonne culture et appropriĂ©e aux localitĂ©s pour guider les planteurs dans l’ouvrage qui leur serait confiĂ©. Le mode que nous proposons ne dĂ©truit pas, il ne fait qu’amĂ©liorer;on peut l’introduire dans toutes les forĂȘts, en observant que, dans les parties de bois qui sont situĂ©es sur des coteaux rapides, il ne faut pas labourer , mais seulement gratter quelques parties du sol pour avoir du semis naturel. Les arbres et les arbrisseaux agrĂ©ables par leur forme rĂ©clament une exception au principe qui exige la destruction de tous les plants peu productifs. Il faut aussi laisser subsister intactes les lisiĂšres placĂ©es aux limites des bois, pour les dĂ©fendre contre les vents. CHAPITRE IX. DES DÉBOUCHÉS ET DES ROUTES FORESTIÈRES. Les plus beaux arbres vivent et meurent inutilement, s’ils ne servent Ă  aucun de nos besoins ; et les neuf dixiĂšmes de ceux qui couvrent le globe sont absolument perdus, faute de dĂ©bouchĂ©s. Smith dit que, dans l’intĂ©- ÈÜ 220 Ăż> rieur de l’Ecosse, il est des contrĂ©es oĂč l’écorce est la seule partie des bois qui, vu le manque de grands chemins et de riviĂšres, puisse entrer dans le commerce; que le bois de charpente se dĂ©tĂ©riore et pourrit sur la terre. Depuis que l’auteur du TraitĂ© de la richesse des nations a Ă©crit, les choses ont bien changĂ© de face, l’Ecosse est percĂ©e de routes dans tous les sens ; les arbres ont pris de k valeur, et on en a plantĂ© des millions. Des amĂ©liorations plus rapprochĂ©es de nous ont eu le meilleur succĂšs. Suivant les auteurs des Annales forestiĂšres j les percĂ©es Ă©tablies depuis quelques annĂ©es dans les environs de Saint-Gobin ont fait diminuer de plus de moitiĂ© les frais de transport, tant aux ports de la riviĂšre d’Aisne qu’aux usines et villes environnantes. Si nous examinons des forĂȘts bien amĂ©nagĂ©es suivant les idĂ©es ordinaires, et coupĂ©es de routes qui les traversent dans tous les sens, nous verrons que pendant l’étĂ© et l’automne les voitures peuvent y circuler assez facilement, mais que durant les six autres mois , il faut quatre chevaux pour traĂźner pĂ©niblement une voiture que dans un chemin commode un seul cheval conduirait aisĂ©ment. Ce ne sont que fondriĂšres et orniĂšres profondes ; partout on reconnaĂźt l’absence de l’industrie. On croit avoir beaucoup fait lorsqu’on a ouvert une route de sept Ă  huit mĂštres de largeur, bordĂ©e de fossĂ©s; mais les arbres et les taillis adjacens la tiennent Ă  l’ombre, et le sol, une fois pĂ©nĂ©trĂ© d’eau, ne peut jamais se dessĂ©cher complĂštement. Le meilleur parti Ă  prendre est d’arracher le bois sur une largeur Ă  peu prĂšs quadruple de celle de la route. Cet espace de chaque cĂŽtĂ© du chemin sera livrĂ© Ă  la culture des prairies artificielles, des blĂ©s, des pommes de terre, ou d’autres plantes utiles, et il y aura du profit, IR 221 Si» si ce terrain cultivĂ© en cĂ©rĂ©ales donne plus d’argent qu’il n’en produirait s’il Ă©tait en bois; mais en produisit-il beaucoup moins, le seul avantage d’assainir la route serait immense. Objectera-t-on que le gibier dĂ©truirait les rĂ©coltes? Mais pourquoi ne pas rĂ©duire le gibier Ă  une quantitĂ© si petite qu’il ne puisse occasioner de dĂ©gĂąt ? Le terrain n’est-il pas propre Ă  la culture des cĂ©rĂ©ales, on peut y laisser croĂźtre un taillis que l’on coupe tous les cinq Ă  six ans pour faire des Ă©cbalas ou des fagots. On peut se rappeler d’avoir lu dans quelques ouvrages des hommes les plus Ă©clairĂ©s du dernier siĂšcle, que ces grandes routes qui font l’ornement de la France, qui ont servi de modĂšles pour toutes les routes de l’Europe, employaient mal Ă  propos un terrain prĂ©cieux perdu pour l’agriculture. Ainsi l’établissement de ces grandes voies publiques, qui ont portĂ© partout l’abondance et la vie, qui ont doublĂ© les produits agricoles et industriels, a trouvĂ© des dĂ©tracteurs ! Qu’on imagine cependant ce que serait la France, ce que serait l’Europe, si ces routes n’existaient pas ! Il en sera de mĂȘme des routes forestiĂšres. Mille obstacles empĂȘcheront de les Ă©tablir; mais partout oĂč une volontĂ© ferme parviendra Ă  surmonter les difficultĂ©s, on admirera des travaux dont on n’avait pas plus soupçonnĂ© l’utilitĂ© que l’on ne pressentait, il y a cent ans, les avantages que devaient procurer les grandes routes qui se construisaient alors. On peut, en dĂ©frichant la trentiĂšme partie de la superficie des forĂȘts, se procurer des dĂ©bouchĂ©s commodes. De larges espaces qui ouvriront un libre cours aux vents contribueront Ă  l’assainissement de la contrĂ©e environnante. Ces routes serviront non-seulement au transport * 222 jH» des bois, mais Ă  la circulation de toutes les denrĂ©es du paysj on pourra interdire une foule de chemins tortueux que le besoin ou des combinaisons momentanĂ©es avaient tracĂ©s dans tous les sens pour l’exploitation des forĂȘts ou pour le trajet d’un village Ă  l’autre. Les forĂȘts ne seront plus ce quelles sont aujourd’hui. Ces masses confuses, informes, monotones, peu productives, prĂ©senteront un accĂšs facile, des passages commodes, des distributions bien entendues, une agrĂ©able variĂ©tĂ© et une riche production. Quel homme instruit pourrait objecter que l’on perdrait ainsi jusqu’à la trentiĂšme partie du sol forestier sans compensation suffisante? Il serait bientĂŽt convaincu, en y rĂ©flĂ©chissant, que la production s’accroĂźtra bien au delĂ  du dixiĂšme par l’effet des amĂ©liorations, et qu’elles peuvent, dans un grand nombre de localitĂ©s, doubler le revenu, en diminuant d’autant les frais de transport, en mettant Ă  la portĂ©e des consommateurs ce qui n’y Ă©tait pas auparavant. On doit bien se persuader qu’un pays industrieux ne manque jamais de ce qui lui est nĂ©cessaire, et qu’arracher un bois dans une plaine fertile est le meilleur moyen de faire planter un coteau stĂ©rile. L’état gagne doublement Ă  cette opĂ©ration. Il y a trois espĂšces de routes dans les bois routes d’exploitation et de communication entre les villes et villages ou entre la forĂȘt et les lieux de consommation des bois; routes d’amĂ©nagement, qui marquent la sĂ©paration des coupes ; routes de dĂ©coration et de promenade. Les chemins seront droits dans les plaines , parce qu’ils conduisent plus promptement au but et qu’ils occupent moins de terrain que les routes sinueuses; mais dans les montagnes, les routes de communication et fĂ© 225 gl» d’exploitation suivront nĂ©cessairement les pentes et les sinuositĂ©s des vallons; elles devront ĂȘtre gĂ©nĂ©ralement bordĂ©es de fossĂ©s, soit pour les assainir, soit pour en fixer invariablement la direction. Les sĂ©parations des coupes seront marquĂ©es par de petits sentiers tracĂ©s en ligne droite et bordĂ©s d’une lisiĂšre continue de brins de taillis ou d’arbres rĂ©servĂ©s. On objecte contre ce plan que les percĂ©es, les Ă©claircies dans les forĂȘts, favorisent les dĂ©linquans en leur procurant le moyen de se dĂ©rober aux regards du garde; mais ces mĂȘmes percĂ©es lui donnent de grandes facilitĂ©s pour apercevoir et surprendre les maraudeurs ; il lui suffit de les reconnaĂźtre pour verbaliser contre eux. Le propriĂ©taire qui peut parcourir sa forĂȘt dans tons les sens reconnaĂźt aisĂ©ment les dĂ©lits que le garde n’aurait pas constatĂ©s. L’Ɠil du maĂźtre peut pĂ©nĂ©trer dans toutes les directions presque aussi bien que dans un champ dĂ©couvert. On a rarement pensĂ© Ă  disposer les routes des bois de maniĂšre Ă  en faire des promenades commodes et agrĂ©ables. On a nĂ©gligĂ© l’art d’embellir les sites et de profiter des perspectives. Pour mieux expliquer les idĂ©es qui vont ĂȘtre exposĂ©es, il faut prĂ©senter d’abord quelques observations sur l’impression que l’on Ă©prouve en traversant une belle campagne et en parcourant des lieux moins agrĂ©ables. Si nous arrivons dans une plaine fangeuse, coupĂ©e de chemins mal entretenus, nous n’y marchons qu’avec rĂ©pugnance; nous aimons en tout ce qui est propre et commode. Si nous voyons des eaux stagnantes et sales > nous sommes repoussĂ©s autant par leur aspect que par 1 odeur qu’elles exhalent; mais si elles sont claires et vives, leur transparence, leur mouvement, nous plai- 48 224 gt sent. Si nous entrons dans une haute futaie de chĂȘnes ou de hĂȘtres, nous Ă©prouvons du plaisir Ă  contempler ces arbres ; et si nous trouvons de distance Ă  autre des sapins, des mĂ©lĂšses,des bouleaux, des chĂątaigniers,cette diversitĂ© a des charmes pour nous. Si des fleurs tapissent le sol, si les bois sont peuplĂ©s d’oiseaux, le paysage est encore embelli. Nous aimons Ă  gravir les rochers Ă©levĂ©s, les montagnes du sommet desquelles on dĂ©couvre des villes , des habitations champĂȘtres, des riviĂšres et des lacs. On serait bien mal-adroit si l’on nĂ©gligeait de tracer des routes ou des sentiers pour arriver aux plus beaux points de vue Ă  travers la forĂȘt. Les bois qui offriront des communications faciles et bien entretenues, de beaux ombrages, une verdure variĂ©e, plairont Ă  tout le monde. Le reste n’est pas essentiel. Que les allĂ©es soient droites ou courbes, que les ruisseaux serpentent ou se rapprochent delĂ  ligne droite, n’importe, pourvu qu’il y ait eu un motif suffisant de les tracer comme on l’a fait. Toutes les beautĂ©s factices qui sont du domaine de la mode ou du caprice doivent ĂȘtre bannies delĂ  grande distribution d’une forĂȘt, qui ne doit rien prĂ©senter de mesquin. Il y a un genre de jardin ou de parc diffĂ©rent pour chaque pĂ©riode de la civilisation. Les beautĂ©s de la nature n’ont que des attraits passagers et presque insensibles pour les hommes qui ne songent qu’à pourvoir a leur subsistance, et qui sont dĂ©pourvus d’instruction ; le plus petit effort de l’art les frappe bien davantage. Ainsi le peuple admire les jardins oĂč tout est compassĂ©, alignĂ©, symĂ©trisĂ©5 il s’extasie devant des arbres taillĂ©s en diverses formes grotesques il mĂ©dite sur la puissance du gĂ©nie de l’artiste qui a créé ces statues, ces jets d eau > Hf 225 ces vertes palissades; il ne voit pas .rpie ce sont des efforts de l’art mal employĂ©s. Il a prĂ©cisĂ©ment les mĂȘmes idĂ©es qu’avaient lĂ -dessus, un siĂšcle et demi avant lui, les beaux gĂ©nies dont nous admirons aujourd’hui les ouvrages littĂ©raires ou scientifiques. C’est ce que tout le monde Ă©prouve encore dans ces contrĂ©es de l’Inde qui offrent des paysages si variĂ©s, des bois si majestueux. AprĂšs avoir marchĂ© dans ces forĂȘts sauvages et sans bornes, on n’entre jamais dans un jardin sans ĂȘtre vivement et agrĂ©ablement affectĂ©. L’industrie humaine, dit un voyageur , est si rare dans cette rĂ©gion, que ses plus faibles efforts font un plaisir inexprimable. Les beaux parcs français attestent sans doute une trĂšs - haute civilisation Ă  l’époque oĂč on les planta, et l’on ne peut que regretter ceux qui sont dĂ©truits, comme on regrette un monument que l’on voit abattre. La distribution des forĂȘts doit ĂȘtre trĂšs-peu dispendieuse; il suffit qu’elle soit simple et gracieuse. On plantera quelques bosquets d’arbres Ă©trangers; on profitera de tout ce que le site peut offrir d’agrĂ©able; on ornera Ă  peu de frais les bĂątimens des gardes et des bĂ»cherons; les clairiĂšres seront cultivĂ©es en cĂ©rĂ©ales ou en herbages, ce qui rompra l’uniformitĂ© des massifs forestiers. Les fontaines, les grottes, seront ornĂ©es de quelques groupes de grands arbres ; des arbustes sur le bord des ruisseaux, des cabanes pour se mettre Ă  l’abri de la pluie, de petits jardins Ă  l’entour des maisons des bĂ»cherons, tels sont les embellissemens secondaires dont les bois sont susceptibles; mais ce qui constitue la vĂ©ritable beautĂ© d’une forĂȘt, c’est la vigueur des arbres, c’est un sol nettoyĂ© de ronces, d’épines, de branches rampantes et de plantes inutiles; c’est le choix des espĂšces; c’est le soin avec lequel les grands arbres sont Ă©laguĂ©s, dirigĂ©s; ce 226 gt sont des exploitations qui opĂšrent une rĂ©gĂ©nĂ©ration perpĂ©tuelle; ce sont des routes constamment entretenues. CHAPITRE X. DES CANAUX, DES RUISSEAUX ET DES COURS d’eAU DANS UES FORÊTS. Nous distinguerons plusieurs espĂšces de canaux ceux de dessĂšchement, ceux d’irrigation, et ceux de transport. i.° C AK AUX DE DESSÈCHEMENT. Les canaux de cette classe sont creusĂ©s dans la vue de rendre Ă  la production des marais stĂ©riles, ou de prĂ©server de la gelĂ©e des terrains refroidis par le sĂ©jour des eaux stagnantes. Plus un taillis est jeune, plus il est exposĂ© aux funestes effets des gelĂ©es printaniĂšres; il semble que le contraire devrait arriver, puisque le froid a plus d’intensitĂ© Ă  dix pieds qu’à un pied au- dessus du sol ; mais il faut considĂ©rer l’exposition et la dĂ©licatesse des bourgeons. Il est certain que la gelĂ©e leur fait plus de tort Ă  un pied qu’à deux pieds de hauteur, en sorte qu’il faut une gelĂ©e bien violente pour gĂąter les bourgeons qui sont Ă©loignĂ©s de terre de plus de quatre pieds. C’est une erreur de croire que les baliveaux occasio- nent toujours la gelĂ©e dans les taillis. Voici ce que l’expĂ©rience apprend lĂ  dessus. Si vous laissez un trĂšs-grand 4g 227 g* nombre de baliveaux qui se touchent, ou qui soient peu Ă©loignĂ©s l’un de l’autre, de maniĂšre Ă  former une espĂšce de massif, le recru est Ă  l’abri de la gelĂ©e et de ces vents dessĂ©chans qui arrĂȘtent la vĂ©gĂ©tation, et dont l’haleine est souvent mortelle pour les jeunes plants. Si les baliveaux sont elair-semĂ©s, ils abriteront mal les rejetons qui les environnent. Les jeunes pousses sont fort exposĂ©es si elles se trouvent au grand air ou dans ces courans d’air resserrĂ©s par ces vallons Ă©troits que l’on nomme combes en Bourgogne. On peut encore remarquer qu’il ne gĂšle point dans un taillis lorsque le thermomĂštre n’est qu’à deux ou trois degrĂ©s au-dessous de zĂ©ro dans la plaine environnante; il ne gĂšle point sous des groupes de grands arbres toutes les fois que le thermomĂštre ne descend qu’à un degrĂ© ou deux au dessous de la glace. L’herbe qui croĂźt sous ces arbres conserve toute sa verdure aprĂšs une gelĂ©e blanche, tandis que celle qui n’a pas un semblable abri en est fortement atteinte. Les belles expĂ©riences que M. Arago a consignĂ©es dans l’annuaire des longitudes expliquent ces phĂ©nomĂšnes. Elles font voir que les plantes au-dessus desquelles il existe un corps qui les garantit du rayonnement, Ă©chappent ordinairement Ă  la gelĂ©e. C’est ainsi que la tĂȘte des baliveaux met Ă  l’abri les jeunes plantes qu’elle couvre. Lorsqu’il se trouve dans une forĂȘt quelques parties de terrain exposĂ©es aux gelĂ©es, on doit les exploiter par la mĂ©thode du furetage , ou les planter en arbres rĂ©sineux. Nous allons indiquer un moyen facile de dessĂ©cher une forĂȘt, lorsque des fossĂ©s ordinaires suffisent. Il est inutile de se livrer Ă  des opĂ©rations de nivellement tou- 228 > jours difficiles Ă  pratiquer dans des taillis; mais aprĂšs une grande pluie, on peut envoyer un garde ou un ouvrier intelligent pour observer le cours des ruisseaux qui traversent les endroits marĂ©cageux; il plante des jalons tout le long de ces petits courans, qui conduisent aux courans principaux; et lorsque la sĂ©cheresse est arrivĂ©e, on fait creuser des fossĂ©s plus ou moins larges dans les directions qui sont marquĂ©es par ces jalons, et en dressant les lignes autant que possible; c’est le meilleur systĂšme de dessĂšchement qu’il soit possible de tracer, et l’on peut se dispenser de donner beaucoup de largeur aux fossĂ©s. Nous devons observer qu’un dessĂšchement subit nuit aux forĂȘts, surtout lorsqu’elles sont pĂšuplĂ©es d’aunes, de marseaux ou d’autres arbres semblables; on voit souvent pĂ©rir ces arbres dans les forĂȘts que l’on a dessĂ©chĂ©es. 2 .° canaux d'irrigation. Les arbres, et les plantes en gĂ©nĂ©ral,redoutentleseaux stagnantes. Presque toutes aiment les eaux courantes. Les chĂȘnes, comme les frĂȘnes et les ormes, croissent rapidement sur le bord des ruisseaux. Ainsi, lorsqu’on peut, par le moyen de quelques Ă©cluses, arroser un bois, comme on arrose une prairie, [cette irrigation produit le plus grand bien ; elle permet de multiplier les prĂ©cieuses espĂšces que nous venons de nommer, et beaucoup d’autres qui ne sont guĂšre moins utiles. On Ă©lĂšve un barrage Ă  travers les courans, et l’on conduit les eaux par des aqueducs et des rigoles dans tous les endroits trop secs. 4K 229 3.° CANAUX DE TRANSPORT. En Allemagne j on emploie des moyens fort ingĂ©nieux pour transporter les bois. Dans le pays deSalzbourg, on amasse les produits d’une forĂȘt entiĂšre dans des bassins situĂ©s au-dessus des Ă©cluses que l’on a Ă©levĂ©es pour arrĂȘter le cours des ruisseaux et des torrens, qui forment des cascades de deux ou trois cents pieds de hauteur. Lorsqu’on ouvre les Ă©cluses ces amas de bois se prĂ©cipitent avec les torrens, et se retrouvent Ă  de grandes distances. En BaviĂšre, on pratique dans les montagnes des canaux composĂ©s d’une piĂšce ou de plusieurs piĂšces de bois, dans lesquels on conduit les eaux pour charier les taillis. Le bois abonde dans quelques districts de la Saxe ; dans d’autres il est trĂšs-rare j on obtiendrait un double avantage si des canaux bien disposĂ©s conduisaient le superflu lĂ  oĂč manque le nĂ©cessaire. La basse Lusace est couverte en grande partie d’une forĂȘt Ă  fonds marĂ©cageux, dont le dessĂšchement par un canal qui servirait Ă  la circulation serait de la plus grande utilitĂ©. Les canaux de flottage doivent, suivant M. de Burgsdorff, avoir une largeur qui excĂšde de deux pieds la longueur de la bĂ»che 5 mais il sera toujours difficile d’établir un ruisseau artificiel dont la largeur excĂšde celle du ruisseau qu’il remplace. C’est la largeur normale de ce dernier qui doit servir de base pour le tracer. On devrait bien se garder de construire de longs canaux bien droits dans des vallons profonds et sinueux 15 quantitĂ© dans un temps donnĂ© que les arbres d’une croissance lente, qui ne sont propres qu’au chauffage. Les mĂȘmes principes qui dirigent le choix des espĂšces d’arbres pour une forĂȘt que l’on plante, doivent ĂȘtre suivis pour la culture d’une forĂȘt existante, dans laquelle on ne doit laisser subsister en dĂ©finitive que des essences du premier ordre, appropriĂ©es au sol, et dont le nombre soit en rapport avec la facilitĂ© du dĂ©bit. Nous allons parler succinctement de ces arbres principaux. Aune. A. FornaĂŻni, qui a Ă©crit sur les forĂȘts de la Toscane, parle de l’aune en ces termes Un ancien usage semble avoir destinĂ© le bois d’aune Ă  alimenter les cheminĂ©es des riches ; il est trĂšs-recherchĂ© pour ce seul objet; on le vend trĂšs-cher, parce qu’il est prĂ©fĂ©rĂ© Ă  tout autre bois, et qu’on en fait une consommation excessive. Lorsqu’il est parfaitement sec, il brĂ»le facilement et mĂȘme sans le secours d’aucun autre bois, et donne un feu doux, lĂ©ger et bienfaisant. » Cet arbre, prĂ©cieux pour faire des ouvrages qui doivent rester dans la terre ou dans l’eau, sert aussi Ă  fabriquer des sabots, Bouleau. Le bouleau est l’un des arbres qui ont le plus de mĂ©rite propre Ă  la charpente, au chauffage, il est peu d’usages auxquels il ne convienne. On peut en former des bois taillis en peu de temps, et presque sans frais. II convient Ă  merveille pour faire les plantations dans les fonds sujets Ă  la gelĂ©e, puisque cet arbre se voit au nord de TornĂ©o, oĂč il n’y a plus de sapins ni de pins. ChĂątaignier. Tout ce que l’on dit du chĂątaignier employĂ© comme bois de construction dans les anciens Ă©di- 4g 235 0» ĂŒces est erronĂ© ; ces belles charpentes que l’on admire aujourd’hui sont en chĂȘne blanc. Les gros chĂątaigniers sont rarement sains. La plupart deviennent creux comme de gros pieds de saule. On fabrique du merrain de chĂątaignier qui se vend un tiers de moins que celui de chĂȘne; cependant les tonneaux de chĂątaignier sont excellens pour la conservation du vin. On ente les rejetons du chĂątaignier sur les chĂȘnes indigĂšnes. C’est une remarque que M. Kasthofer a faite dans les Alpes helvĂ©tiennes. L’art avec lequel on cultive les chĂątaigniers est proportionnĂ© Ă  l’utilitĂ© que l’on en retire. Dans le Siennois, on les arrose en Ă©tĂ© par le moyen de sources que l’on dirigĂ© convenablement. Chaque famille a sa chĂątaigneraie. Les habitans des montagnes de Pistoie, du Casentin, de la Romagne et de la Maremme, qui n’ont pas d’autre nourriture que des chĂątaignes et de l’eau pure, sont, au dire de FornaĂŻni, la race d’hommes la plus saine et la plus robuste du monde; mais ils sont exposĂ©s Ă  la famine lorsque les rĂ©coltes de leurs arbres manquent. Ils ont Ă©prouvĂ© ce dĂ©sastre en 1800, 1816 et 1817. Il serait bien Ă  dĂ©sirer que dans ces contrĂ©es Ăąpres, [froides et pierreuses, on pĂ»t introduire quelque culture qui remplaçùt en partie les chĂątaignes, ou mieux encore quelque industrie qui, en procurant du travail aux habitans, leur donnĂąt le moyen d’acheter du blĂ©, qui ne manque jamais Ă  ceux qui peuvent le payer. Le chĂątaignier ne vient pas bien dans les terres oĂč le calcaire domine. Un chĂątaignier de trente ans, qui croĂźt dans un sol granitique, au milieu d’un bois, a ordinairement deux 234 fit pieds et demi de tour. IsolĂ©. il atteint cette grosseur dĂšs l’ñge de dix-huit ans. CiiĂȘxe. Il reste encore dans les forĂȘts de France quelques chĂȘnes d’une grosseur considĂ©rable. L’un des plus remarquables des forĂȘtsdelalIaute-Marne se trouve dans la forĂȘt du Der , dans le canton de bois dit de Bran- cour. Son volume, y compris l’écorce, est d’environ six cents pieds-cubes. La soliditĂ© de la partie propre Ă  ĂȘtre Ă©quarrie est de trois cents pieds cubes. On a coupĂ© dans la mĂȘme forĂȘt, il y a environ cinquante ans, un chĂȘne qui a Ă©tĂ© employĂ© dans la machine de Marly; il avait soixante-douze pieds de longueur sur une grosseur moyenne de trois pieds d’équarrissage Ă  chaque face; son volume Ă©tait par consĂ©quent de six cent quarante-huit pieds cubes, non compris la dĂ©coupe et les branches. cite, d'aprĂšs la collection de Bath, un chĂȘne qui contenait mille quarante-cinq pieds cubes, indĂ©pendamment de sa tĂȘte. II cite aussi le chĂȘne de Boddington, qui avait cinquante-quatre pieds de tour mesurĂ©s au pied de l’arbre. Le calcul des pieds cubes prĂ©senterait un nombre presque incroyable. Les besoins pour la charpente et l’industrie ne rĂ©clament pas un grand nombre de ces arbres Ă  dimensions colossales; mais on ferait bien d’en rĂ©server quelques- uns jusqu’à ce qu’ils tombassent en dissolution, pour reconnaĂźtre jusqu’à quel Ăąge et Ă  quelle grosseur ils peuvent atteindre. Ce serait un ornement, une curiositĂ© de plus dans une belle forĂȘt. Le chĂȘne se trouve toujours fort bien d’une sorte de culture. Le passage que nous allons extraire d’un voyage de M. Simonds fera comprendre notre idĂ©e. 4g 253 PrĂšs de San-Germano dans les environs de Ca- » poue, de belles forĂȘts couvrent la partie des monta- » gnes, et l’on y remarque des chĂȘnes tels que l’on n’en » rencontre guĂšre que dans les parcs anglais. Ceux des » forĂȘts d’AmĂ©rique, croissant trop prĂšs les uns des au- » trĂšs pour se dĂ©ployer prĂšs de terre, cherchent un peu » d’espace dans les airs, et perdent ainsi les belles formes » de la nature. » Cependant ces chĂȘnes des montagnes du royaume de Naples ne doivent l’espace qu’ils occupent qu’aux Ă©claircies occasionĂ©es par le pĂąturage et par l’enlĂšvement irrĂ©gulier des bois dont les liabitans ont besoin. La culture du chĂȘne-liĂ©ge pourrait s’étendre dans nos dĂ©partemens mĂ©ridionaux de maniĂšre Ă  fournir de son Ă©corce la France entiĂšre. Erable, Plane, Sycomore. L’érable, qui donne l’un des plus beaux bois indigĂšnes pourfaire des meubles Ă©lĂ©gans, le plane, susceptible d’un beau poli, pourraient ĂȘtre avantageusement plantĂ©s en massifs de dix Ă  douze hectares, dans les environs des villes, oĂč, par la facilitĂ© des transports, on peut cultiver ces arbres avec profit. Walter les classe dans les bois de charpente du premier ordre. Le sycomore s’élĂšve jusqu’à cent quarante pieds de hauteur dans les forĂȘts des bords de l’Ohio. En France, dans une position libre, il grossit de six lignes par an sur son diamĂštre. L’érable-nĂ©gundo est un arbre du plus grand mĂ©rite, qui vient trĂšs-bien dans les terrains frais. FrĂȘne. On plante beaucoup de frĂȘnes en Bourgogne, dans les haies, sur les ruisseaux, presque uniquement pour la feuille, qui sert Ă  la nourriture des moutons. f 236 ft» Son bois, si prĂ©cieux pour le charronage, l’est encore davantage pour fabriquer des meubles dont la beautĂ© surpasse peut-ĂȘtre celle des meubles d’acajou. Rien de plus aisĂ© que de multiplier le frĂȘne par des semis en pĂ©piniĂšres et des plantations. La tonte d’un frĂȘne ĂągĂ© de quarante ans rapporte 4 fr. tous les trois ans. HĂȘtre. LebĂ©tre, cet arbre dont le port est majestueux, l’écorce lisse, le feuillage d’un vert charmant, cet arbre admirable dans les forĂȘts, n’est pas de la premiĂšre utilitĂ© comme bois de service. Il ne peut servir Ă  la charpente qu’aprĂšs avoir subi une prĂ©paration, il s’altĂšre promptement il a bien moins de valeur comparative que le chĂȘne. On conserve les plateaux de hĂȘtre en les faisant sĂ©journer dans l’eau, ou en garnissant leurs extrĂ©mitĂ©s soit de rĂ©sine, soit d’une petite planche qui empĂȘche l’influence d’un air imprĂ©gnĂ© d’humiditĂ©. On peut aussi les passer Ă  la fumĂ©e pour obtenir le mĂȘme rĂ©sultat. En Normandie, on voit de magnifiques massifs de hĂȘtres plantĂ©s symĂ©triquement autour des habitations. On a soin de choisir des plants assez forts pour ne pas perdre le pĂąturage du sol pendant la jeunesse de ces arbres. Ils ont communĂ©ment six pieds de tour Ă  l’ñge de soixante-douze ans, ce qui fait le quadruple du volume d’un hĂȘtre du mĂȘme Ăąge venu dans un massif. Une erreur qui a eu des suites dĂ©plorables dans les forĂȘts est de couper ces arbres trĂšs-prĂšs de terre, comme le prescrivait l’ordonnance de 1669. On a exploitĂ© de mĂȘme les taillis ; presque toutes les souches qui ont subi ce tail- lement ont pĂ©ri, et l’espace qu’occupaient les hĂȘtres est souvent livrĂ© Ă  des espĂšces d’arbres infĂ©rieures, comme le charme ou le cornouiller. 4g 237 g* MÉlĂšse larixM. Kasthofer, qui a fait des plantations d’arbres rĂ©sineux, a reconnu que le mĂ©lĂšse de montagne, considĂ©rĂ© comme bois de construction, dure quatre fois plus que le pin qui aurait cru dans un mĂȘme degrĂ© d’ cet avantage devrait, suivant lui', engager les montagnards des petits cantons et des Alpes rhĂ©tiennes Ă  substituer peu Ă  peu aux forĂȘts de pins des plantations de mĂ©lĂšses. MĂ»rier. Les richesses que procure le mĂ»rier aux dĂ©- partemens du sud-est sont dĂ©jĂ  considĂ©rables; elles pourraient s’accroĂźtre encore pendant plusieurs siĂšcles ;. il sera toujours profitable de le multiplier tant que nous ferons venir des soies Ă©crues d’Italie. La culture de cet arbre s’associe parfaitement Ă  celle des cĂ©rĂ©ales. Noyer. La lenteur de la croissance du noyer ne serait plus un obstacle Ă  sa propagation si l’on Ă©levait beaucoup de jeunes plants; on ne tarderait pas Ă  en avoir de tous les Ăąges, et l’on finirait par possĂ©der assez de gros arbres pour les mettre en coupes rĂ©glĂ©es. On ne doit pas oublier qu’un pied cube de noyer se vend trois ou quatre fois plus cher qu’un pied cube de chĂȘne. J’ai lu dans un ouvrage forestier que le noyer ne se plaĂźt pas dans les bois, c’est une erreur il y vient comparativement aussi vite que quelque autre arbre que ce soit; mais qu’est-ce que l’accroissement d’un arbre au milieu d’un Ă©pais taillis, comparĂ© Ă  celui qu’aurait pris ce mĂȘme arbre dans un sol cultivĂ©? Il y a en AmĂ©rique des forĂȘts de noyers. Orme. Les plantations d’ormes se multiplient en proportion des besoins. Des ormes de trente ans, plantĂ©s en avenue on en massif, Ă  une distance de vingt Ă  vingt- cinq pieds l’un de l’autre, ont quatre pieds et demi de fĂ© 238 tour, tandis que, dans un massif de taillis, ils n’ont que vingt-quatre pouces; le rapport du volume des deux arbres est un Ă  cinq, en supposant une hauteur Ă©gale ; mais la valeur du gros arbre est dĂ©cuple de celle du petit. Peuplier. Un peuplier du Canada ĂągĂ© de vingt-liuit ans a produit des planches qui valaient 72 fr. non compris le bois de frĂąche fractura , qui formait une petite voiture. Cet arbre vient bien dans les forĂȘts, et ne se laisse pas Ă©puiser par les taillis environnans. Je ne sais si l’on a observĂ© que les boutures d’un an ou de deux ans sont le meilleur moyen de propager ces arbres. Les plants de dix Ă  douze pieds, que l’on plante sans racines, ne donnent jamais de beaux arbres. Des peupliers qui ne sont autre chose que des branches plantĂ©es il y a douze ans, 11’ont que six Ă  sept pouces de tour, tandis que des arbres de mĂȘme espĂšce, de boutures, et plantĂ©s Ă  cotĂ© de ceux-ci, il y a dix ans, ont prĂšs de quinze Ă  dix-huit pouces de tour. Il y a presque autant de diffĂ©rence sur la hauteur, en sorte que le volume de ces derniers arbres est huit fois plus considĂ©rable que le volume des premiers. Pour durcir le bois de peuplier, il faut le mettre dans un lieu sombre oĂč la circulation de l’air soit bien Ă©tablie; il arrive promptement Ă  un degrĂ© suffisant de dessĂšchement; il possĂšde l’avanLage de ne pas avoir de retrait. Le peuplier dltalie a moins de bois mou que celui de Virginie. Le blanc de Hollande et l’yprĂ©au tiennent le premier ou le second rang parmi les peupliers, suivant la nature des terrains oĂč il est plantĂ©. Dans le dĂ©partement du Pas-de-Calais, on voit d'anciennes charpentes et des planchers en peuplier parfaitement conservĂ©s. 4g 230 fi* Pms, Sapins, Epicias. Le pin maritime vient bien dans les terrains secs, et le pin silvesfre dans les sols humides aussi bien que dans les terrains secs. Les sapins du nord de l’Europe sont excellens, ceux du Canada ne valent rien. En gĂ©nĂ©ral, les arbres des terres un peu dessĂ©chĂ©es sont de meilleure qualitĂ© que ceux des forĂȘts sauvages qui sont presque toujours marĂ©cageuses. On a dĂ©truit dans les montagnes une grande quantitĂ© de forĂȘts de sapins, qui sont remplacĂ©es par des bois de charmes, de hĂȘtres, de trembles, ou par des broussailles, des genĂȘts et des bruyĂšres. Les propriĂ©taires qui veulent Ă©viter de semblables dĂ©sastres font extirper dans leurs sapiniĂšres les charmes et les autres bois semblables. Lc§ foret§ d’cpicias empiĂštent facilement sur les terrains qui les avoisinent, parce que le bĂ©tail, Ă  moins d’ĂȘtre affamĂ©, ne mangeant pas les plants d’épicias, les graines prospĂšrent, et le bois s’étend de proche en proche. Ces accrues s’emparent du sol assez rapidement dans les prĂ©s-bois des montagnes du Doubs. Le hĂȘtre et le sapin croissent Ă  l’abri des Ă©picias. Si ces terrains cessaient pendant quelques annĂ©es d’ĂȘtre frĂ©quentĂ©s par les bestiaux, et que l’on n’cn fauchĂąt pas l'herbe, ils seraient bientĂŽt couverts de bois. Le cĂšdre du Liban est encore si rare, que l’on ne peut guĂšre espĂ©rer d’en voir bientĂŽt former des forĂȘts; mais en attendant, il faut le cultiver dans les jardins et dans les parcs. Platane. Le cĂ©lĂšbre platane de Cos a trente-cinq pieds de circonfĂ©rence. Son Ăąge remonte- Ă  plus de vingt siĂšcles, s’il est vrai que ce soit le mĂȘme arbre dont parle Pline comme d’un monument vĂ©gĂ©tal admirable. M. Rauch dit que les naturalistes les plus 41 340 f» sceptiques accordent Ă  cet arbre l'age de neuf cents ans au moins. Le platane acquiert promptement des dimensions colossales; son bois, remarquable par sa force et sa duretĂ© , est excellent pour la charpente. 11 croĂźt d’un pouce et demi par an sur sa circonfĂ©rence, terme moyen. Des platanes plantĂ©s dans les promenades de Beaune, ont Ă©tĂ© abattus Ă  l’ñge de cinquante-quatre ans ; quelques-uns avaient vingt pouces d’équarrissage. C’est trois fois autant de volume qu’en auraient eu des chĂȘnes du- mĂȘme Ăąge, dans le mĂȘme terrain. * Robinier ou faux acacia. Un taillis de robiniers ĂągĂ© de quatre ans et venu sur souche a communĂ©ment quinze pieds de hauteur. On en fait d’excellens Ă©chalas. On peut voir dans le dĂ©partement du Bas-Rhin, Ă  Burckheim, un trĂšs-beau bois d’acacias qui a Ă©tĂ© plantĂ© il y a environ vingt-deux ans, et dans lequel on a dĂ©jĂ  fait une exploitation. Un taillis de huit ans a de vingt-cinq Ă  trente pieds de hauteur, et vaut prĂšs de 1200 fr. l’hectare. Il est vrai que ce bois est situĂ© dans l’excellent sol de la plaine d’Alsace, et que les brins s’emploient dans les lioublonniĂšres. Saule , Marsaulx. Le saule et le marsaulx ne doivent pas ĂȘtre nĂ©gligĂ©s dans les plantations. Us croissent rapidement, et disparaissent lorsque les bonnes espĂšces d’arbres sont devenues assez fortes et assez Ă©paisses. Leur bois sert Ă  faire des sabots et des planches. Sorbier. Le sorbier et le cormier mĂ©ritent d’ĂȘtre cultivĂ©s en grand nombre. On ne doit pas oublier de placer quelques alisiers et merisiers dans une plantation forestiĂšre. Ces arbres croissent lentement, mais l’excellente qualitĂ© de leur bois, 241 » la beautĂ© de leur feuillage et l’utilitĂ© de leurs fruits compensent en partie ce dĂ©savantage. Tilleul. Le tilleul parvient Ă  une grosseur Ă©tonnante. Son bois, propre Ă  faire des boiseries, des sabots, etc., est toujours d’un dĂ©bit assurĂ©. On n’en plantera sans doute pas de grandes forĂȘts $ mais quelques massifs au milieu des pĂąturages d’une ferme sont parfaitement placĂ©s. On a tirĂ© d’un seul tilleul qui se trouvait sur la place publique d’un village du Jura, pour 600 fr. de marchandises. tremble, mĂ©prisĂ© Ă  tort,est excellent pour la charpente lĂ©gĂšre. A Ă©galitĂ© d’ñge, dans sa jeunesse, il se vend plus cher que le chĂȘne. M. Rauch a vu dans la commune de Werth, sur les bords du Rhin, trois trembles, le premier de vingt-huit pieds, le second de trente- quatre pieds, et le troisiĂšme de quarante-deux pieds de contour. Tulipier, Aylante, Hippocastane, Micocoulier. Le tulipier pourra un jour figurer dans les espĂšces forestiĂšres acclimatĂ©es en France ; il en sera de mĂȘme de Faylante ou vernis du Japon. Us sont encore trop rares pour les planter ailleurs que dans les parcs. Le bois du marronnier d’Inde hippocastane est excellent pour les boiseries. Quelques massifs d’arbres de cette espĂšce ne seraient point dĂ©placĂ©s dans une forĂȘt. Il faut aussi planter quelques bosquets de micocouliers. m 242 MK CHAPITRE IL DE LA PRATIQUE DES SEMIS ET DES PLANTATIONS. L’art de planter et de traiter les arbres fruitiers avait fait peu de progrĂšs avant le quatorziĂšme siĂšcle. Au- jourd'hui, ceux que la France possĂšde ne rapportent guĂšre moins de soixante millions par an en comptant les oliviei’s cependant la totalitĂ© de ces arbres n’occupe pas une Ă©tendue Ă©gale Ă  la cinquantiĂšme partie du sol forestier, qui ne produit que cent vingt millions. L’art des plantations forestiĂšres est beaucoup plus moderne encore. Dans le siĂšcle dernier, on a dĂ©cuplĂ© revenu de plusieurs terres en plantant des bouleaux et d’autres arbres;ces exemples n’étaient suivis que de loin en loin; mais depuis quelques annĂ©es, l’on a fait des progrĂšs rapides, parce que l’on est parvenu Ă  les planter presque sans frais. L’encouragement le plus efficace, et mĂȘme le seul que les plantations puissent recevoir du gouvernement, consiste Ă  assurer l’exĂ©cution des lois contre les dĂ©vastations auxquelles elles sont exposĂ©es. Une garde sĂ©vĂšre et la punition des malfaiteurs Ă©pargneront les frais de clĂŽture. S’il y a pour le planteur un effrayant intervalle entre le brin qu’il vient de planter et l’arbre de haute futaie, il n’en existe pas moins un motif suffisant pour engager un propriĂ©taire Ă  se livrer Ă  ces travaux car, immĂ©diatement aprĂšs la plantation , il possĂšde dans son terrain toute la valeur qu’il y a dĂ©pensĂ©e, valeur qui s accroĂźt sans cesse, et qui se confond dans son patrimoine. On ? 245 Sfr vend une jeune plantation comme un autre bien rural. On a employĂ© divers modes pour crĂ©er des bois. i.° Sans faire labourer le sol, sans arracher les buissons et les geniĂšvres qui s’y trouvent, on plante Ă  l’aide d’une pioche des brins enracinĂ©s, on jette des semences çàetlĂ , et on abandonne la plantation Ă  elle-mĂȘme, en y interdisant sĂ©vĂšrement le pĂąturage. Cette mĂ©thode est Ă  peu prĂšs aussi lente que la formation des accrues dans les terres abandonnĂ©es sur le bord des bois ; il faut un deini-siĂšcle pour obtenir un taillis Ă©gal Ă  celui qu’une plantation de dix-huit ans faite avec soin aurait donnĂ©. 2. 0 On sĂšme des bois de chĂȘne avec une simple culture Ă  la charrue, sans aucun autre travail ultĂ©rieur; la croi§§ance G§t lente, les plants sont difformes; ce n’est qu’aprĂšs un rĂ©cĂ©page qu’ils deviennent droits et vigoureux; une plantation aurait donnĂ© deux ou trois fois plus de produits dans le mĂȘme temps. 3.° Si vous voulez obtenir aux moindres frais possible les plus grands rĂ©sultats, faites cultiver le terrain, et plantez-y des brins de semis que vous vous serez procurĂ©s dans les forĂȘts, et mieux encore dans des pĂ©piniĂšres. Il n’y a point de mĂ©nagement Ă  garder avec la bruyĂšre, dont les racines entrelacĂ©es forment avec la terre une espĂšce de croĂ»te presque impermĂ©able. Il est indispensable de l’arracher et d’écobuer le sol. Cette derniĂšre opĂ©ration est de la plus grande utilitĂ© dans toutes les terres compactes. Le terrain Ă©tant pelĂ© k quatre pouces dĂ©paisseur, on en forme de petits fourneaux que Ion brĂ»le par lĂ  on dĂ©truit les herbes, les ga- 244 > zons, les mousses et les insectes, ce qui permet de cultiver les cĂ©rĂ©ales avec les bois. Nous allons actuellement parler des pratiques relatives aux principales espĂšces de plantations; elles peuvent servir de modĂšles pour toutes les autres. SECTION t. DD CHATAIGNIER. Il est facile de se procurer du plant de chĂątaignier en faisant remuer le sol dans les forĂȘts de cette espĂšce par un lĂ©ger labour. Mais la culture que nous allons dĂ©crire produit les plus beaux arbres; c’est celle qui se pratique en Toscane et en Portugal, oĂč elle a atteint le plus haut degrĂ© de perfection. Les pĂ©piniĂšres sont Ă©tablies dans un terrain gras et meuble, amĂ©liorĂ© par des engrais. On choisit les plus belles chĂątaignes sauvages, et on les sĂšme dans les mois de dĂ©cembre, fĂ©vrier ou mars, en les plaçant Ă  une distance respective de deux pieds; on les couvre d’un pouce de terreau. Elles lĂšvent dĂšs le printemps suivant, s’il ne survient pas de gelĂ©e. On les sĂšme quelquefois avec du blĂ©. La terre est cultivĂ©e autour des jeunes plants. AprĂšs la troisiĂšme annĂ©e, on Ă©lague les rameaux infĂ©rieurs autour de la tige. Cette opĂ©ration est rĂ©pĂ©tĂ©e deux fois par an, jusqu’à ce que le jeune arbre, parvenu Ă  la hauteur d’environ huit pieds, soit propre Ă  la transplantation, ce qui arrive ordinairement entre la cinquiĂšme et la sixiĂšme annĂ©e. Quelques mois avant d’exĂ©cuter la plantation, on ouvre des trous de trois pieds en carrĂ© sur deux pieds de 4g 245 Ăż* profondeur. ExposĂ©e Ă  l’action des mĂ©tĂ©ores, la terre devient meilleure; on a soin de l’ameublir et de la mĂ©langer avec du terreau. En plantant les arbres, on Ă©tend les racines avec prĂ©caution. Deux ou trois ans aprĂšs, les chĂątaigniers sont ordinairement en Ă©tat d’ĂȘtre greffĂ©s. Cette opĂ©ration se fait au mois de mai, et l’on a ensuite le plus grand soin d’élaguer les sujets pendant plusieurs annĂ©es. Ils donnent du fruit au bout de trois ou quatre ans; et lorsqu’ils sont devenus gros, on Ă©monde les branches superflues. Ces arbres s’élĂšvent Ă  une hauteur prodigieuse, due aux effets combinĂ©s des labours et de l’élagage. Dans une plantation symĂ©trique Ăšt bien espacĂ©e, la distance moyenne des gros chĂątaigniers est de vingt- quatre pieds; ceux qui ne sont destinĂ©s qu’à donner du bois de charpente sont placĂ©s Ă  une moindre distance. Dans le Haut-Rhin, pour se procurer des bois de chĂątaigniers qui ne se greffent pas et qui s’exploitent en taillis, on sĂšme les chĂątaignes au printemps; on lĂšve les brins de semis au bout de trois ans' pour les replanter en les espaçant d’un mĂštre et demi, et on les rĂ©cĂšpe au bout de quatre ans. La coupe vaut communĂ©ment 1200 fr. l’hectare, lorsque le recru a atteint l’ñge de quinze ans. SECTION 2. » ĂŒ P I K. Le pin est l’un des arbres les plus dociles Ă  la culture et les plus productifs. J’ai fait semer du pin silves- tre dans un sol granitique et d’une ariditĂ© telle qu’il n’y venait pas mĂȘme de l’herbe. Un labour grossier, la graine jetĂ©e sans mĂ©lange, une herse d’épines passĂ©e sur 16 * 240 B* le semis, tel est le travail qui a suffi, qui n’a Ă©tĂ© suivi d’aucun autre, et qui a rĂ©ussi plants, ĂągĂ©s de six ans, sont magnifiques, et couvrent entiĂšremen t le sol, qui est exposĂ© au midi, et qui n’est abritĂ© d’aucune maniĂšre. Mais cette mĂ©thode si simple, excellente pour les mauvais terrains granitiques, n’est pas applicable dans ceux oĂč il vient beaucoup d’herbe; il faut absolument la couper, si l’on ne veut pas l’extirper par des labours. On peut semer de la graine do pin dans un champ couvert de genĂȘts, en remuant lĂ©gĂšrement le sol entre ces plantes ; les jeunes plants de pins Ă©touffent en peu d’annĂ©es et les genĂȘts et les autres arbustes. En Allemagne, les plantations de pins embrassent de vastes Ă©tendues; elles sont traitĂ©es par des mĂ©thodes qui ont subi l’épreuve du temps. II faut labourer lĂ©gĂšrement le sol, et enlever les herbes, les mousses, les aiguilles et les feuilles. C’est la premiĂšre rĂšgle et la plus essentielle. On sĂšme la graine de pin dans des raies tracĂ©es en ligne droite autant que possible ; cette disposition permet de cultiver le semis, et d’enlever facilement les plants surabondans pour les replacer Ă  demeure dans un autre terrain, lorsqu’ils ont quatre ou cinq ans. On a soin, pour les coteaux rapides, de laisser entre les raies des intervalles incultes, afin de retenir la terre. Cette disposition convient aussi lorsqu’on veut Ă©viter des frais; on rejette dans ces intervalles le gazon qui provient des parties semĂ©es, et on le retourne. Dans la suite, lorsque l’herbe y croĂźt, on peut la rĂ©colter sans endommager les jeunes plants* On peut semer la graine de pins avec de l’avoine ou de l’orge. En gĂ©nĂ©ral, il vaut mieux semer Ă©pais que iI 247 de semer clair lorsqu’on n’est pas parfadtement sĂ»r de la graine, et que l’on craint les dĂ©gĂąts du bĂ©tail. Dans la transplantation, on laisse ordinairement cinq pieds de Saxe un mĂštre et demi d’intervalle entre les de Sponeck recommande de les placer Ă  un pied les uns des autres, dans la vue de les garantir contre la scclieresse, contre les vents froids, et contre la gelĂ©e, qui attaque quelquefois les semis de pins dans les montagnes; mais ce mode, s’il Ă©tait adoptĂ©, serait excessivement dispendieux; il faudrait vingt-cinq fois plus de plants qu’il n’en faut en suivant l’usage ordinaire, et cette considĂ©ration est d’un grand poids en Allemagne, oĂč l’on fait tant de plantations. D’ailleurs ce serait Ă©puiser le terrain en pure perte; il faut, autant que possible , espacer les arbres, en les plantant, comme ils doivent ĂȘtre espacĂ©s au moment oĂč on les coupera. On ne peut trop blĂąmer l’usage d’arracber les plants Ă  la main car les racines sont toujours endommagĂ©es, et quelquefois cassĂ©es. Cet inconvĂ©nient, rĂ©sultat nĂ©cessaire d’une routine invĂ©tĂ©rĂ©e, est la vĂ©ritable cause de la prĂ©fĂ©rence que l’on donne en gĂ©nĂ©ral aux semis faits Ă  demeure, et de l’opinion erronĂ©e, mais trĂšs-accrĂ©ditĂ©e,que les pins replantĂ©s ne viennent jamais droits. On peut planter le pin en tout temps, exceptĂ© pendant les gelĂ©es et les grandes chaleurs ; quelques agriculteurs pensent que les plantations d’automne, Ă©tant favorisĂ©es par l’humiditĂ© de l’hiver, rĂ©ussissent mieux que celles du printemps ; mais si ces derniĂšres reçoivent de la pluie ou de l’humiditĂ©, ce sont les meilleures ainsi dans les climats oĂč les printemps sont secs, c’est en automne qu’il faut planter. Si l’on veut mettre le plant Ă  l’abri des grandes chaleurs et du froid dans un terrain sec, on le plante au 248 fond de rigoles ou fossĂ©s d’un pied de largeur et d’une profondeur proportionnĂ©e; mais si le sol est humide on place le plant sur la berge de ces petits fossĂ©s, laquelle est disposĂ©e en talus double, de maniĂšre que les eaux s’écoulent de chaque cĂŽtĂ©. Ce procĂ©dĂ©, que j’ai vu pratiquer avec succĂšs, est applicable aux plantations de toute espĂšce d’arbres. Nous ne pouvons nous dispenser, en traitant ce sujet, de parler des nombreux semis de pins que M. de la Marre a fait exĂ©cuter dans le dĂ©partement de l’Eure, et des procĂ©dĂ©s qu’il a employĂ©s. Les motifs de sa prĂ©dilection pour les pins sont qu’ils n’exigent qu’une mĂ©diocre prĂ©paration du sol, et que, suivant son opinion, il est toujours inutile et qu’il pourrait mĂȘme ĂȘtre nuisible de donner aux semis des sarclages, binages, ou autres soins semblables; il Ă©tait sĂ©duit par la facilitĂ© avec laquelle on peut crĂ©er des bois de cette espĂšce, par la modicitĂ© des dĂ©penses et la grandeur des profits, par la facilitĂ© que les arbres Ă  aiguilles ont de se dĂ©fendre contre le bĂ©tail; il avait remarquĂ© que les pins croissent dans les plus mauvais terrains; qu’ils fournissent dans un temps Ă©gal un volume presque double de celui que produiraient des bois durs Ă  feuilles caduques; que les pins subsistent dans un Ă©tat tellementserrĂ©, qu’un certain espace de terrain, unhectare par exemple, nourrirait deux ou trois fois plus de pins qu’il ne nourrirait de chĂȘnes ou de hĂȘtres ; que les bois rĂ©sineux sont excellens pour toute espĂšce de constructions, et qu’ils supportent long-temps les intempĂ©ries. Il a semĂ© avec succĂšs des forĂȘts de pins, qu’il a lĂ©guĂ©es Ă  la sociĂ©tĂ© centrale d’agriculture. Il considĂ©rait les semis Ă  demeure comme la seule voie Ă  prendre pour de grandes plantations forestiĂšres, et il tg 249 regardait la transplantation comme un moyen tout-Ă - fait exceptionnel. Son systĂšme ne serait rĂ©ellement avantageux que dans le cas oĂč l’on pourrait arracher les plants surabondans pour les replanter; mais si on ne les arrache que pour faire du feu, c’est un triste emploi que la combustion pour un pin de cinq Ă  six ans. Nous pensons cependant que sa mĂ©thode de semis Ă  demeure est convenable dans les rĂ©gions du sud et de l’ouest de la France, oĂč l’on trouve tant de terrains incultes qui sont livrĂ©s au pĂąturage; il suffit, aprĂšs avoir donnĂ© un labour grossier, sans arracher les buissons, s’il y en a, de rĂ©pandre la graine, de herser, et d’interdire le parcours du bĂ©tail. Mats dans tous lĂšs terrains compactes, qui se chargent d’herbes, il convient de faire des plantations, aprĂšs avoir Ă©levĂ© du semis dans une pĂ©piniĂšre, d’espacer le plant comme il restera en dĂ©finitive, et de le cultiver par de lĂ©gers labours, dont les frais seront remboursĂ©s par les rĂ©coltes de quelques plantes alimentaires placĂ©es dans les intervalles des plants. La culture des sapins et des mĂ©lĂšses se fait par des moyens analogues Ă  ceux que l’on emploie pour les pins ce sont les arbres des terrains secs et arides, comme le peuplier, l’orme et le frĂȘne, sont les arbres des terrains frais; et sous ce rapport, l’utilitĂ© de ces derniers est moins grande que celle des arbres rĂ©sineux, qui se contentent d’un sol inutile Ă  l’agriculture. Les plantations de pins qui existent dans les plaines arides du dĂ©partement de la Marne ont Ă©tĂ© faites en gĂ©nĂ©ral depuis le commencement de ce siĂšcle; on a pris des plants dans des pĂ©piniĂšres, et on les a placĂ©s symĂ©triquement dans les champs; ils fourniront du bois aux *8 230 habitans, qui sont obligĂ©s d’en aller chercher jusqu’à une distance de sept ou huit lieues pour leur chauffage et leurs constructions. Ces bosquets donnent de l’ombrage, brisent le cours des vents, diminuent l’étendue des terres incultes, et augmenteront les moyens de cultiver celles qui restent. DĂ©jĂ  la culture du marsaulx dans ces plaines a produit une partie de ces effets salutaires. En exploitant les bois de pins, on pourrait arracher les souches et les racines; le terrain, engraissĂ© par le dĂ©pĂŽt des feuilles ou aiguilles, et par d’autres dĂ©bris vĂ©gĂ©taux, serait labourĂ© et semĂ© de blĂ©; on y ferait de bonnes rĂ©coltes de cĂ©rĂ©ales ou de prairies artificielles. Mais en arrachant un arpent de bois, il faudrait en planter une Ă©tendue Ă©gale dans une friche. Si l’on a la prĂ©caution d’établir des pĂ©piniĂšres locales, les frais de plantation, y compris l’achat du plant, ne dĂ©passeront pas 5o fr. par hectare, dĂ©pense bien faible comparativement au produit de la coupe des bois joint Ă  celui de la rĂ©colte des parties qui auront Ă©tĂ© arrachĂ©es et mises en culture ainsi, par l’effet de cette espĂšce d’assolement, on aurait chaque annĂ©e du bois Ă  couper , un nouveau terrain livrĂ© Ă  l’agriculture, et une plantation Ă  renouveler. Les frais d’entretien du plant sont trĂšs-peu considĂ©rables dans une terre qui ne pousse point d’herbe. SECTION 3. PLANTATIONS DE BOULEAUX, CnÊNES, ORMES, FRÊNES, etc. Nous allons exposer le procĂ©dĂ© qui est employĂ© habituellement dans des contrĂ©es oĂč les plantations sont 23i B* aussi considĂ©rables parleur Ă©tendue qu’intĂ©ressantes par leurs produits, et oĂč la pratique en est devenue populaire. Ce n’est que lorsqu’un art est parvenu Ă  ce point que l’on peut en attendre de grands et utiles dĂ©velop- pemens. Un simple ouvrier achĂšte dans le territoire de son village un fonds de peu de valeur; il le cultive et le plante en bois pendant la saison oĂč les autres travaux de la campagne sont suspendus ; et deux ou trois ans aprĂšs, lorsque le succĂšs de la plantation n’est plus dou. teux, il vend le fonds et la superficie avec un profit qui l’engage Ă  renouveler de semblables entreprises. Un grand nombre de planteurs travaillent pour le compte des propriĂ©taires moyennant un salaire. En rapportant les faits que j’ai Ă©tudiĂ©s et comparĂ©s avec soin dans diffĂ©rentes localitĂ©s, je ne dois pas encourir le reproche d’enseigner une mĂ©thode dispendieuse et impraticable. Il ne faut pas se dissimuler toutefois que cette pratique ne s’étendra que de proche en proche, comme la culture des prairies artificielles. Les cultivateurs et les ouvriers n’agissent en gĂ©nĂ©ral que par imitation, et ne se dĂ©cident que lorsqu’ils ont vu et vĂ©rifiĂ© le succĂšs ; mais les propriĂ©taires qui Veulent faire des plantations trouveront dans ce que je vais indiquer les moyens les plus Ă©conomiques, et par consĂ©quent les seuls qui soient praticables pour opĂ©rer sur une grande Ă©chelle ce sera lever l’obstacle le plus puissant, celui qui provient de la comparaison des frais avec le produit rĂ©sultant de la plantation. La contrĂ©e oĂč cette mĂ©thode est rĂ©pandue comprend les dĂ©partemens de l’Aisne et de la Marne, et une partie des dĂ©partemens de l’Yonne, de l’Aube et de la Haute- Marne. Voici les dĂ©tails relatifs Ă  ces plantations 3 252 g* Sol. A l’exception de la plaine qui environne la ville de ChĂąlons-sur-Marne, Ă  une grande distance, on trouve une argile plus ou moins mĂ©langĂ©e de calcaire, et quelques localitĂ©s oĂč le terrain est pierreux. Choix du terrain. En gĂ©nĂ©ral on ne plante que dans les terres de qualitĂ© infĂ©rieure, dans celles qui sont Ă©loignĂ©es des villages ou qui s’étendent sur la rampe des coteaux. Choix des espĂšces d’arbres. On plante du bouleau, du marsaulx, de l’aune, mĂ©langĂ©s d’un peu de frĂȘne, d’orme et de chĂȘne. Les plants de cette derniĂšre espĂšce rĂ©ussissent difficilement s’ils ne sont pas arrachĂ©s avec soin. On sĂšme du gland dans les intervalles des plants. Le marsaulx, par la promptitude de sa croissance , procure l’avantage d’utiliser la terre en attendant que le bois dur soit assez fort pour dominer. Il est certain que si les bois durs croissaient aussi rapidement que les bois tendres, le choix serait bientĂŽt fait ; mais il faut considĂ©rer que la valeur respective des bois de chauffage est proportionnĂ©e Ă  leur pesanteur spĂ©cifique lorsqu’ils sont secs. La plupart des bois durs , et mĂȘme le chĂȘne, viennent trĂšs-bien dans les terrains humides, pourvu que les eaux n’y soient pas stagnantes. Tous croissent rapidement lorsqu’ils sont arrosĂ©s par des eaux vives. L’apprĂ©ciation de la valeur respective des bois de chaque espĂšce combinĂ©e avec la durĂ©e de leur accrois- 253 g* sement est de la plus grande importance pour dĂ©terminer le choix des arbres Ă  planter dans chaque localitĂ©. Choix du plant. On se sert de plant ĂągĂ© de deux, trois ou quatre ans, provenant en totalitĂ© des forĂȘts oĂč il croĂźt naturellement. En gĂ©nĂ©ral il est mal arrachĂ©. Du plant de pĂ©piniĂšre serait bien prĂ©fĂ©rable. Prix du plant. Une foule de gens vont arracher le plant Ă  la main dans les forĂȘts, et le vendent jusque sur les marchĂ©s publics au prix de a, 3 et 4 francs le mille, suivant la qualitĂ© et l’espĂšce des arbres. Les espĂšces les plus rares et les plus recherchĂ©es dans chaque localitĂ© coĂ»tent 5 francs le mille. PrĂ©paration du plant. Suivant l’ancien usage, on coupe le pivot, on retranche les racines brisĂ©es et l’extrĂ©mitĂ© de la tige. PrĂ©paration du sol. On cultive le terrain pour y semer du blĂ©, et l’on exĂ©cute la plantation forestiĂšre lorsque le blĂ© est semĂ©. Les fossĂ©s de clĂŽture sont devenus inutiles depuis qu’il y a beaucoup de plantations. Saison des plantations. On plante principalement en automne, cependant on plante aussi au printemps en semant de l’orge. ManiĂšre de planter. On lĂšve la terre Ă  la bĂȘche, en formant un triangle par le moyen de trois coups de bĂȘche, sans briser la a 234 jj» motte de terre ; on place un plant de chaque cotĂ© ; il faut pour cet ouvrage deux personnes dont l’une ouvre la terre et l’autre place le plant dans l’ouverture. Travaux accessoires et entretien. Si la plantation a besoin de clĂŽture ou d’assainissement, on creuse des fossĂ©s sur le pourtour, et l’on remarque toujours que les plants qui croissent dans la terre de la berge sont beaucoup plus beaux que ceux de l’intĂ©rieur. On ne fait ni sarclage ni labour dans les endroits oĂč la terre ne pousse pas assez d’herbe pour Ă©touffer les plants, et l’on moissonne cette herbe Ă  la faucille quand elle en mĂ©rite la peine. Les arbres Ă  racine pivotante viennent assez bien sans culture. Il n’en est pas de mĂȘme des arbres Ă  racines traçantes, comme les ormes, les platanes, les robiniers, etc. Il faut les cultiver pour faire prospĂ©rer la plantation. On Ă©vite de donner des labours pendant les gelĂ©es et les sĂ©cheresses. En moissonnant les blĂ©s, on a soin de ne pas endommager les jeunes plants. Frais de plantation par hectare. i.° Achat du plant Ă  2 fr. 5o c. le mille,terme moyen, ce qui fait pour dix raille plants par hectare, la somme de. 2 5 f. 2. 0 Frais de plantation, Ă  raison de 2 fr. 5oc. le mille. 25 3.° Les frais d’ouverture de fossĂ©s, s’il en est besoin, et les frais accessoires, sont de 10 fr. environ par hectare. 10 Go Total, 2S5 La rĂ©colte du blĂ© suffit pour rembourser la plus grande partie de ces frais, indĂ©pendamment du prix des labours et des semences. Les habitans des campagnes sont devenus si industrieux, que si l’on possĂ©dait des pĂ©piniĂšres oĂč ils trouveraient du plant en abondance et Ă  bon marchĂ©, ils se chargeraient volontiers de le planter et de l’entretenir pendant deux ou trois ans sans rĂ©tribution, avec la seule facultĂ© qui leur serait accordĂ©e'de semer des pommes de terre et du blĂ© dans le terrain. Dans quelques cantons, le propriĂ©taire qui veut faire une plantation paie 60 fr. par hectare Ă  des ouvriers qui fournissent le plant,qui le plantent, et en rĂ©pondent pendant trois ans. Ils doivent mettre vingt mille plants par hectare, et les placer sur des raies alignĂ©es et sĂ©parĂ©es par un intervalle de trois pieds. En Ă©loignant les plants de cinq pieds, il n’en faut que trois mille six cents par hectare, ce qui rĂ©duit de beaucoup les frais de plantation, surtout si l’on sĂšme du gland ou quelques autres graines dans les intervalles cela suffit puisqu’un taillis trĂšs-bien peuplĂ© n’offre pas plus de trois mille souches par hectare. La culture qui se fait entre des allĂ©es de cinq pieds de largeur est commode et pr oduc- tive, en mĂȘme temps qu’elle accĂ©lĂšre prodigieusement la croissance du plant. Les plantations dans lesquelles on sĂšme annuellement des pommes de terre, des haricots, du colza, etc., et qui sont binĂ©es tous les ans, deviennent trĂšs-belles. J ai reconnu qu’aprĂšs avoir Ă©tĂ© cultivĂ©es pendant sept Ă  huit ans, les plants dont elles sont formĂ©es prĂ©sentent douze Ă  quinze fois plus de volume que ceux des plantations qui sont restĂ©es incultes. Mais dans les localitĂ©s oĂč il y a assez de terres en cul- tĂ« 256 ture pour la population, le marsaulx que l’on plante dans la vue de remplir le terrain et d’étouffer l’herbe, est un produit prĂ©coce que l’on se prĂ©pare, et qui ne manque jamais. Comme il n y a point de succĂšs durable sans profit dans les entreprises de ce genre, il faut Ă©viter de faire travailler les ouvriers Ă  la journĂ©e, Ă  moins que ce ne soit pour les instruire. On les paie par milliers de plants repris et entretenus pendant trois ans, ce qui doit coĂ»ter trĂšs-peu lorsqu’on leur accorde la culture du terrain. Exploitation. Dix ans aprĂšs la plantation, on exploite le bois, qui rend environ cinquante stĂšres par hectare; on trouve beaucoup de cercles de tonneaux, cl’échalas, etc. Il est inutile et il serait nuisible de rĂ©server des baliveaux. Cette premiĂšre exploitation remplace le rĂ©cĂ©page que les anciens forestiers avaient tant recommandĂ©. SECTION u. DES MOYENS DE SE PROCURER DU PLANT FORESTIER, SOIT PAR LES SEMIS NATURELS, SOIT DANS UNE PEPINIERE. Les taillis ĂągĂ©s de trente ou quarante ans, n’étant pas trĂšs-Ă©pais, permettent aux semis de lever sous leurs branches; mais lorsqu’on coupe les taillis trop jeunes,ils sont encore embarrassĂ©s de ronces, d’épines et d’arbrisseaux qui Ă©touffent les semis des seules espĂšces d’arbres qu’il conviendrait de conserver. Pour favoriser l’ensemencement naturel, on peut pratiquer le moyen suivant, dont le succĂšs est infaillible. Deux ou trois ans avant l’exploitation d’une coupe, g 237 0» ou meme pendant cette exploitation, on cultive le sol Ă  la pioche sous les arbres porte-graines, et on enlĂšve les herbes ; peu d’annĂ©es aprĂšs, ces espaces qui ont Ă©tĂ© mis en bon Ă©tat de culture sont garnis d’une prodigieuse quantitĂ© de jeunes plants dont on peut lever une grande partie pour les replanter ailleurs. Le parcours du bĂ©tail doit ĂȘtre sĂ©vĂšrement interdit dans les terrains ainsi disposĂ©s. Une seule annĂ©e oĂč les graines forestiĂšres sont abondantes fournit pour long-temps au repeuplement d’une forĂȘt. Un garde peut facilement, par de lĂ©gers travaux, mĂ©nager des semis naturels ; il peut faire des marcottes en jetant de la terre sur les souches, en couchant Ă  terre des brins traĂźnans pour repeupler des places vagues; ces soins suffisent pour fournir tout le plant nĂ©cessaire Ă  rcntretien do la forĂȘt. Mais pour se procurer du plant des espĂšces exotiques ou de celles qui ne se trouvent que dans d’autres forĂȘts, il faut Ă©tablir, une pĂ©piniĂšre 1. Par lĂ  on Ă©vite les frais de transport du plant, le dessĂšchement des racines, tous les inconvĂ©niens et toute la dĂ©pense qu’entraĂźnent les achats que l’on ferait dans des lieux Ă©loignĂ©s de celui oĂč l’on veut planter. Ajoutons que le plant d’une pĂ©piniĂšre est prĂ©fĂ©rable Ă  celui qui vient dans des bois Ă  l’ombre des arbres. Une pĂ©piniĂšre est donc l’accessoire indispensable d’une forĂȘt. Il suffit qu’elle ait le milliĂšme de l’étendue superficielle des bois qu’elle est destinĂ©e Ă  entretenir ou Ă  rĂ©gĂ©nĂ©rer. Ainsi un propriĂ©taire de cent hectares de bois n’a i En plaçant la rĂ©sidence d’un, garde dans la forĂȘt ou dans une position qui en soit peu Ă©loignĂ©e, on lui Ă©pargne chaque jour une marche de deux Ă  trois heures; ce temps suffirait Ă  l’entretien d’une pĂ©piniĂšre. 25» g» besoin que d’une pĂ©piniĂšre de dix ares un cinquiĂšme d’arpent pour y trouver tous les plants nĂ©cessaires au repeuplement de sa foret et Ă  la naturalisation des espĂšces qu’il voudra y introduire. Tout le monde connaĂźt les prĂ©cautions qui assurent le succĂšs des semis. L’une des principales est la conservation des graines lorsqu’on ne les sĂšme pas aussitĂŽt qu’elles sont recueillies. On les cache profondĂ©ment dans la terre,ou bien on les dĂ©pose dans un lieu sec, ou enfin, ce qui est le plus ordinaire, on les Ă©tend dans le sable pour les prĂ©server du contact de l’air et de leur propre contact; on Ă©vite de les mettre dans un lieu oĂč l’air ne peut circuler. Le choix de l’emplacement d’une pĂ©piniĂšre exige toute l’attention du propriĂ©taire. Si le sol Ă©tait trop sec, les semis rĂ©ussiraient mal; trop humide, ils seraient Ă©touffĂ©s par les herbes malgrĂ© les binages. Mais comme il ne s’agit que d’un petit espace, on peut, sans beaucoup de frais, dĂ©foncer les terres et les mĂ©langer. On les ameublit avec des marnes, des sables, des cendres lessivĂ©es et de la chaux. On leur donne de la consistance en y apportant de l’argile. Les graines doivent ĂȘtre semĂ©es dans des rayons tracĂ©s au cordeau. Une rĂšgle dont l’observation est indispensable, c’est de tenir toujours la pĂ©piniĂšre bien nettoyĂ©e et bien cultivĂ©e. Les soins secondaires consistent Ă  arroser les semis, Ă  les garnir de mousse ou de branches d’arbres pour les prĂ©server des chaleurs, Ă  les couvrir quand on craint de fortes gelĂ©es, Ă  leur procurer de l’ombrage, enfin, a ne nĂ©gliger aucune des petites prĂ©cautions que l’expĂ©rience a enseignĂ©es aux jardiniers. 4 $ 259 i> Le semis de trois ans est replantĂ© Ă  demeure dans les forĂȘts; mais si l’on veut des sujets de fortes dimensions pour en former des massifs ou des avenues, onclioisit des plants que l’on transplante dans un autre endroit de la pĂ©piniĂšre, en observant de les espacer Ă  dix-huit pouces ou Ă  deux pieds, de les cultiver et de les Ă©laguer chaque annĂ©e avant de les replanter dĂ©finitivement. L’un des objets importans d’une pĂ©piniĂšre consiste Ă  se procurer l’espĂšce qui convient le mieux au sol de la forĂȘt ; on Ă©levera aussi des arbres exotiques, surtout des arbres verts, pour en former des bosquets qui rompront la fatigante uniformitĂ© des grands bois. On achĂštera les graines des espĂšces Ă©trangĂšres, mais il sera facile de se procurer Ă  peu de frais de la semence de frĂȘnes, d’ormes, de bouleaux et de6 autres arbres forestiers, en chargeant des femmes, des enfans, de la rĂ©colter moyennant un lĂ©ger salaire. Les graines lĂ©gĂšres se recueillent sur les branches, dont on coupe les extrĂ©mitĂ©s, que l’on secoue ensuite pour en tirer la graine. On peut ramasser des cĂšnes de pins, et attendre le printemps pour les exposer au soleil afin de les faire ouvrir. L’automne est la saison de la maturitĂ© des graines pour les espĂšces suivantes chĂȘne, hĂȘtre, bouleau,aune, Ă©rable, plane, tilleul, mĂ©lĂšse, sapin et pin; mais pour cette derniĂšre espĂšce, elles ne sont mĂ»res que dans le mois d’octobre de la seconde annĂ©e. Les graines d’orme, tremble, peuplier saule et mar- saulx, sont mĂ»res dans les mois de mai et juin. SECTION 5. de l’amĂ©nagement des plantations. Si la conversion des taillis sous futaies en massifs 4g 260 gt successivement Ă©claircis ne peut s’opĂ©rer qu’à la longue puisque la plupart de nos taillis sont dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©s, et n’offrent pas la dixiĂšme partie des sujets nĂ©cessaires pour former une futaie pleine ; si les futaies surtaillis sont encore une nĂ©cessitĂ© pour soixante ou quatre-vingts ans, rien n’empĂšclie d’amĂ©nager les plantations de la maniĂšre la plus convenable ainsi on n’y rĂ©servera point de baliveaux surtaillis ; ainsi on y maintiendra les espĂšces d’arbres du premier ordre, en les dĂ©fendant contre les envahisse- mens des espĂšces infĂ©rieures. On aura un massif de bouleaux que l’on nettoiera Ă  six ans, Ă  douze ans, et ainsi de suite jusqu’au terme oĂč le taillis sera propre aux usages auxquels on l’emploie ordinairement dans le pays ; on aura un massif de la mĂȘme espĂšce qui sera successivement Ă©clairci jusqu’au moment de l’exploitation dĂ©finitive, qui se fera sans rĂ©serve de baliveaux. On aura des massifs de chĂȘnes , de frĂȘnes , d’ormes, d’aunes, de platanes, qui seront traitĂ©s de la mĂȘme maniĂšre. On aura des massifs de pins, de sapins et de mĂ©lĂšses qui seront exploitĂ©s dĂ©finitivement Ă  soixante ans. On aura un massif de hĂȘtres qui sera traitĂ© par la mĂ©thode Ă u furetage si on veut le conserver en taillis 5 une coupe pleine ferait pĂ©rir les souches. Chaque massif sera composĂ© d’une espĂšce unique ou de deux au plus. SECTION 6. DU PROFIT OĂŒ »B REVENU BBS P BAN T AT IONS. Suivant l’estimation de Thomas Vaux, rapportĂ©e par ÂŁ 26 i g* M. Moreau de JonnĂšs, le revenu des biens-fonds s’estimait en Angleterre, en 1823, ainsi qu’il suit Un hectare de froment rend. 5 8 f. Un hectare d’herbages rend.... 86 Un hectare de jardins rend. 233 Un hectare de bois en plantations rend..... 466 Nous nĂ©gligeons les fractions, parce qu’elles sont sans importance. En France, le produit d’une plantation ne peut s’évaluer que d’aprĂšs des faits isolĂ©s et des observations partielles , puisque nous ne possĂ©dons point de grandes plantations qui soient cultivĂ©es et successivement Ă©claircies. Ce que nous allons rapporter rĂ©sulte de recherches partielles; mais chacun est Ă  portĂ©e de reconnaĂźtre, soit sur des arbres d’avenue et de bosquet, soit dans des massifs, la justesse de nos remarques en ce qui concerne la grosseur et la valeur des arbres. I. Des platanes, des sycomores, des ormes, espacĂ©s de quatre mĂštres, ont trente-six pouces de tour Ă  l’ñge de trente-six ans, et valent Ăźofr. chacun; et comme on peut mettre six cent vingt-cinq arbres par hectare, la valeur totale d’un hectare est de 62 50 fr. Les frais de plantation, avec les intĂ©rĂȘts cumulĂ©s jusqu’à l’époque de la coupe, ne dĂ©passeront pas 200 fr. Les frais de labour et d’entretien sont remboursĂ©s par les rĂ©coltes et par le pĂąturage. Un hectare de bon taillis inculte, ĂągĂ© de trente-six ans, ne vaut pas plus de 1 5 00 fr. II. Dans un terrain convenable aux frĂȘnes, on peut en S 262 g* Ă©lever deux mille par hectare non compris les brins dĂ©fectueux et rabougris . Ces deux mille jeunes frĂȘnes vaudront Ă  l’ñge de vingt-cinq ans 3 f. chacun ; la valeur moyenne de la coupe sera donc de 6000 fr., ce qui fera un revenu anuel de 240 fr. par hectare. III. Un hectare de taillis de chĂȘnes de trente-six ans, qui a Ă©tĂ© Ă©clairci, peut renfermer quinze cents beaux brins qui ont de vingt-quatre Ă  trente pouces de tour, et qui valent 3 fr. chacun, ce qui fait 45oo fr. l’hectare. IY. Un bois de sapins ĂągĂ© de quarante ans, situĂ© sur une montagne ou sur un coteau peu fertile, renferme deux milletrois centsbrins par hectare,de la grosseur moyenne de vingt-sept pouces, qui valent 1 fr. 5O cent, chacun, ce qui fait 3450 fr. l’hectare. Un hectare de taillis de bois feuillus, dans une semblable position et du mĂȘme Ăąge, ne vaudrait pas plus de 1200 fr. l’hectare Ă  l’ñge de quarante ans. U y a donc une raison puissante pour engager Ă  planter en arbres rĂ©sineux les coteaux et les montagnes arides. Y. Une plantation de frĂȘnes, ormes et peupliers 1, situĂ©e dans un terrain humide et de mĂ©diocre qualitĂ©, contenant sept hectares, est divisĂ©e en douze coupes; on en exploite chaque annĂ©e une coupe, clans laquelle on abat environ deux cent douze arbres outre le taillis. Le produit annuel et moyen de cette coupe, qui contient cinquante-huit ares, est de 1100 fr., ce qui fait un revenu 1 Cette plantation existe sur le territoire de la commune dePossesse, departement de la Marne. § 263 jR» de i5j fr. par hectare sur toute l’étendue de la plantation , revenu bien supĂ©rieur Ă  celui des meilleurs bois incultes. CHAPITRE III. DE LA CULTURE DES FORÊTS COMBINEE AVEC l’agriculture. .L’attention des agriculteurs, des forestiers et des Ă©conomistes allemands, s’est portĂ©e sur un nouveau systĂšme d’économie forestiĂšre et champĂȘtre qui est Ă©tabli jusqu’à un certain point dans la Flandre française, et sur lequel M. Cotta a fait un excellent traitĂ©. Les principes sur lesquels il s’appuie sont incontestables, les moyens reposent sur l’expĂ©rience ; les rĂ©sultats sont aussi certains qu’avantageux. Il n’y a guĂšre d’autres obstacles Ă  l’exĂ©cution complĂšte de ce plan que la force d’inertie et que l’absence cl’un besoin assez impĂ©rieux et assez urgent pour la vaincre. Il s’agit de rĂ©partir les forĂȘts selon les besoins du pays, selon la nature du sol, de cĂ©der Ă  l’agriculture les parties des forĂȘts qui lui conviennent, de placer les arbres oĂč ils viendraient le mieux, de rendre la fertilitĂ© Ă  un sol Ă©puisĂ©, de cultiver celui qui est engraissĂ© par un long repos et par l’accumulation de dĂ©bris vĂ©gĂ©taux, et de remplir dans ces diffĂ©rentes transformations la condition essentielle que la terre ne cesse jamais de produire des vĂ©gĂ©taux utiles. Tel est, quant Ă  son objet, le plan de M. Cotta 1 . i J’ai fait traduire par mon fils l’ouvrage de M. Cotta, qui est accompagne' de beaucoup d’observations, de rĂ©flexions,et d’ob- 2G4 Il embrasse Ă  la fois et l’agriculture et la culture forestiĂšre. C’est l’enseignement d’une meilleure direction donnĂ©e au travail. Il se rapporte donc Ă  tout ce qui compose la richesse d’un Ă©tat. C’est en vain qu’en France les sociĂ©tĂ©s d’agriculture, les Ă©conomistes, les Ă©crivains forestiers, engagent Ă  planter d’arbres les bords des ruisseaux et des chemins. On ne fera jamais de vastes plantations tant que la culture ne s’étendra pas Ă  son tour sur le domaine forestier pour le mĂ©langer de plantes de toutes espĂšces. Nous allons prĂ©senter ce systĂšme que M. Cotta appelle du mot allemand baumfeldwirthschajt, que nous traduirons alliance de la culture des bois Ă  celle des champs, faute d’une autre expression qui nous paraisse plus convenable. Nous diviserons le sujet en plusieurs articles. § l. er ExposĂ© de la mĂ©thode. Le but de nos efforts est d’augmenter la quantitĂ© des rĂ©coltes de blĂ© et la quantitĂ© des bois nous remplirons ce double objet en combinant la culture des champs avec la culture des forĂȘts. Nous allons exposer 'notre mĂ©thode i.° On choisit une forĂȘt propre Ă  l’objet que l’on se propose, on la divise en un certain nombre de coupes dĂ©terminĂ© d’aprĂšs les rapports du terrain, du climat, et de l’espĂšce d’arbres que l’on veut Ă©lever. 2. 0 Chaque annĂ©e on abat le bois de l’une de ces cou- jections faites par des hommes de mĂ©rite. C’est de l’ensemble de ces diffĂ©rens travaux qu’est extrait l’exposĂ© qu’on va lire. sent le long d’un sentier de trois pieds de largeur dont le cours est tracĂ© de maniĂšre Ă  mĂ©nager dĂ©s pentes Ă  peu prĂšs uniformes. Les forĂȘts de pins silvestres se traitent de la mĂȘme maniĂšre que les forĂȘts de sapins. Le bois de ces derniĂšres est beaucoup plus estimĂ© que le bois de pin dans ces contrĂ©es. Les forĂȘts d’épicias demandent Ă  ĂȘtre exploitĂ©es par bandes Ă©troites ou par coupes sombres excessivement serrĂ©es ; autrement Je vent renverserait ces arbres Ă  racines traçantes. On a mĂȘme vu la coupe par bandes entraĂźner la ruine de quelques forĂȘts situĂ©es sur les pitons des montagnes. LĂ  on ne doit pas mĂȘme songer Ă  faire des coupes sombres. Un furetage trĂšs-modĂ©rĂ© y est seul praticable. Dans les plaines fertiles, les coupes sombres ne se repeuplent pas si bien que dans les montagnes, parce que le sol des plaines Ă©tant plus fertile, le bois blanc pousse avec une exubĂ©rance telle que les semis naturels de cbĂȘnes ou dehĂȘires sont Ă©touffĂ©s. On est obligĂ© de recourir Ă  des semis artificiels. Les forĂȘts des plaines resserrĂ©es entre les Vosges et le Rhin sont amĂ©nagĂ©es en taillis rĂ©glĂ©s sur l’ñge de trente Ă  quarante ans, et qui s’exploitent sous l’unique rĂ©serve de cent Ă  deux cent cinquante baliveaux par hectare, que l’on abat Ă  la rĂ©volution suivante, en renouvelant un semblable balivage sur le taillis. L’extraction du bois blanc s’opĂšre dans les taillis de quinze ans. Outre les baliveaux, on rĂ©serve les arbres rĂ©sineux quand il y en a. D’autres taillis s’exploitent sans aucune espĂšce de rĂ©serve d’arbres ou de baliveaux. Les forĂȘts les plus remarquables sous le rapport de 19 294 ÂŁ > la science sont celles des montagnes. Nous en dirons encore quelques mots. La forĂȘt d’Obernai, qui appartient Ă  la ville de ce nom, et qui contient prĂšs de cinq mille hectares, oĂč le sapin domine avec un mĂ©lange de hĂȘtres et de chĂȘnes, a Ă©tĂ© soumise au furetage jusqu’en 1790. Depuis cette Ă©poque on y a fait quelques coupes Ă  blanc, en rĂ©servant cinquante baliveaux par hectare. Beaucoup de parties du sol ont Ă©tĂ© mises Ă  nu par l’effet de cette exploitation; une montagne entre autres qui Ă©tait couverte de hĂȘtres, n’offre plus que des friches entremĂȘlĂ©es de quelques taillis de bois blanc. Depuis 1811 on a suivi une meilleure mĂ©thode. On exploite les coupes lorsqu’elles ont atteint quatre-vingts ans, en laissant des rĂ©serves nombreuses. D’abord tous les brins qui ont moins d’un pied et demi de tour sont rĂ©servĂ©s de droit; on laisse en outre deux cents baliveaux par hectare. Le tout forme un massif assez serrĂ© pour se soutenir contre les vents, assez Ă©pais pour Ă©touffer le bois blanc. L’exploitation sur les hauteurs exige que l’on y conserve presque tous les arbres. Lorsque la traite est terminĂ©e, on arrache les souches des sapins. La terre est nivelĂ©e, et cette espĂšce de culture favorise les semis naturels car bn remarque que toutes les places des souches sont couvertes de plants aprĂšs peu d’annĂ©es. Les baliveaux ne sont pas destinĂ©s Ă  rester dans les coupes jusqu’à la fin de la pĂ©riode de quatre-vingts ans, mais ils sont abattus et enlevĂ©s avec le bois blanc, lorsque le recru est ĂągĂ© de vingt-cinq ans. Ces extractions de bois blanc ne sont pas pĂ©riodiques; on les renouvelle seulement toutes les fois quelles peuvent donner un produit de quelque valeur. Dans d’autres bois qui sont rĂ©glĂ©s Ă  cent ans, on rĂ©- Eu considĂ©rant la forĂȘt de Fontainebleau dans son ensemble, on y reconnaĂźt quatre grandes divisions i.° Les vieux massifs de futaies que l’on arrache en les exploitant, et dans lesquels il y a beaucoup d’arbres de deux cents Ă  quatre cents ans. Il n’en reste guĂšre que pour dix ans 5 2 ° Des massifs de chĂȘnes et de bouleaux qui tous ont Ă©tĂ© plantĂ©s ; les plus ĂągĂ©s ont quatre-vingt-dix ans environ. Il s’y trouve beaucoup de vides occasionĂ©s par la non-rĂ©ussite du plant, et par les gelĂ©es. Ces massifs de plantations se subdivisent en deux classes, ceux qui ont Ă©tĂ© Ă©claircis, et ceux qui ont Ă©tĂ© exploitĂ©s avec une rĂ©serve de baliveaux; 3.° Des plantations de pins; 4 ° Des rochers, des plaines ou platiĂšres basses, stĂ©riles, abandonnĂ©es et exposĂ©es Ă  la gelĂ©e, qui forment plus du quart de l’étendue totale de la forĂȘt. On ne peut s’empĂȘcher de dĂ©plorer les effets des coupes niai faites, lorsqu’on voit des plages trĂšs-Ă©tendues, couvertes de plants de chĂȘnes, qui, bientĂŽt battus par les vents, exposĂ©s Ă  une chaleur excessive ou Ă  la gelĂ©e, languissent couverts de lichens, tandis que s’ils Ă©taient venus dans des massifs convenablement Ă©claircis, ils auraient cette Ă©corce lisse qui annonce une vĂ©gĂ©tation vigoureuse, et qui est un prĂ©sage assurĂ© de la beautĂ© future des arbres et de leur longĂ©vitĂ© ; quelques beaux chĂȘnes dispersĂ©s au milieu des rochers dĂ©posent encore de 1 ancien Ă©tat de cette forĂȘt. Que fera-t-on, lorsque les produits des coupes dĂ©passeront Ă  peine les frais du repeuplement et de l’entretien de cette grande forĂȘt? La nĂ©cessitĂ© amĂšnera heureusement une rĂ©forme. Il sufGra d’étendre un moyen qu’on a dĂ©jĂ  employĂ© 305 > dans cette mĂȘme forĂȘt avec tant de succĂšs. On sĂšmera des pins silvestres sur les coteaux et dans les plaines sujettes aux gelĂ©es. Les labours se feront Ă  la charrue dans tous les endroits praticables, et Ă  la pioche dans les terrains coupĂ©s par des rochers. Si l’on veut prendre la peine de calculer le revenu d’une belle forĂȘt de pins comparĂ© Ă  celui des mauvaises parties de la forĂȘt de Fontainebleau, on se convaincra qu’il y a les neuf dixiĂšmes Ă  gagner dans cette opĂ©ration. Je n’ai plus qu’une observation peu importante Ă  faire sur cette forĂȘt si renommĂ©e. Elle est percĂ©e d’une multitude de routes, dont une partie, ne servant pas Ă  la traite des bois, occupent sans utilitĂ© plus de cent cinquante hectares ; l’extraction des pavĂ©s perd aussi beau- cou p de terrain; mais on ne doit pas s’arrĂȘter Ă  ces minuties , lorsqu’il y a quatre Ă  cinq mille hectares de places vides ou mal peuplĂ©es qui attendent des semis pour se couvrir de beaux arbres. Cette description nous fait voir que l’on a tort de croire gĂ©nĂ©ralement qu’il faut laisser sur le sol les espĂšces qui y croissent d’elles-mĂȘmes, et d’imaginer qu’en substituant une espĂšce d’arbres Ă  une autre, on contrarie la nature,qui, suivant les observateurs superficiels, a placĂ© dans chaque climat les arbres qui lui conviennent. L’introduction des pins dans la forĂȘt de Fontainebleau, le plein succĂšs de leur culture, les avantages qu’elle prĂ©sente sur l’amĂ©nagement ordinaire, prouvent au contraire que dans les forĂȘts, comme ailleurs, c’est par la culture que nous pouvons augmenter nos richesses, et qu’il faut transporter les graines d’une contrĂ©e dans une autre, pour acclimater les vĂ©gĂ©taux les plus utiles et les plus productifs. Nous voyons que dans cette forĂȘt on s’est livrĂ©, pour 306 g» planter des massifs de chĂȘnes depuis quatre-vingt-dix ans, Ă des travaux dispendieux, qui sont bien loin d’avoir rĂ©ussi complĂštement. Si l’on calcule que la dĂ©pense de 700 fr. par hectare, pour une Ă©tendue de dix-sept mille hectares, coĂ»terait 11,900,000 francs, on dĂ©plorera la force de l’habitude , qui a fait persister si long-temps dans un usage si dispendieux, tandis que chez les Allemands, et en France mĂȘme, on exĂ©cute des semis naturels de chĂȘnes qui ne coĂ»tent rien, et qui rĂ©ussissent presque toujours. La bonne culture des forĂȘts, si riche en rĂ©sultats, n’est pas chĂšre dans sa pratique, c’est l’un de ses grands avantages; mais il est difficile d’obtenir des travaux Ă  bon marchĂ© dans les forĂȘts des environs de Paris 1. 1 La forĂȘt de Saint-Germain-en-Laye, et le Lois de Boulogne , ne sont pas dĂ©nuĂ©s d’intĂ©rĂȘt pour les forestiers. Le principal mĂ©rite de la forĂȘt de Saint-Germain est de prĂ©senter un accĂšs facile aux voitures par ses belles routes pavĂ©es et ses chemins de traite. Le Lois de Boulogne formait il y a 20 ans une mauvaise futaie de chĂȘnes. Les taillis qui remplacent les massifs exploitĂ©s ne sont que des broussailles. Le chĂȘne nĂ© convient pas au sol sur lequel il est pourtant venu naturellement. Des plantations de bouleaux ont bien rĂ©ussi, grĂące Ă  la culture du sol et aux labours Ă  la houe frĂ©quemment rĂ©pĂ©tĂ©s. Les plantations de pins sont trĂšs-belles, parce que l’espĂšce convient au terrain ; elles ne peuvent ĂȘtre trop multipliĂ©es sous le double point de vue de crĂ©er de magnifiques massifs de vĂ©gĂ©taux toujours verts, et d’avoir enfin des produits de quelque importance. Ces premiĂšres plantations qu’il est si facile de visiter et d’examiner sont une preuve non Ă©quivoque des grands effets que l’on doit attendre de la culture des forĂȘts,.surtout lorsqu’on n’emploiera que des procĂ©dĂ©s Ă©conomiques. CHAPITRE IY. FORÊTS DU DÉPARTEMENT DE IA CÔTE-D’OR. Le dĂ©partement de la CĂŽte-d’Or possĂšde deux cent vingt-huit mille hectares de bois, qui occupent le quart de sa superficie. Dans aucun autre dĂ©partement le chiffre du nombre d’hectares ne s’élĂšve aussi haut. Il paraĂźt que depuis plusieurs siĂšcles le sol forestier de ce dĂ©partement n’a pas subi de grandes altĂ©rations. Quelques centaines d’hectares de montagnes ont Ă©tĂ© dĂ©nudĂ©es sur la fin du moyen-Ăąge, et avant la crĂ©ation des grandes usines Ă  fabriquer le fer, qui, en donnant de la valeur aux bois, ont contribuĂ© Ă  leur conservation. Ces forĂȘts sont amĂ©nagĂ©es en taillis, qui s’exploitent depuis l’ñge de dix-huit ans jusqu’à celui de trente ans. On y rĂ©serve des baliveaux anciens et modernes. Les quarts de rĂ©serve que l’ordonnance forestiĂšre avait destinĂ©s Ă  croĂźtre en massifs de haute futaie s’exploitent entre leur trentiĂšme et leur quarantiĂšme annĂ©e. L’usage a heureusement prĂ©valu sur la loi car des coupes plu?" tardives se seraient difficilement repeuplĂ©es si on les eĂ»t exploitĂ©es suivant la mĂ©thode ordinaire. Les bois de cette contrĂ©e se propagent par les souches, qui sont remplacĂ©es par des semis naturels lorsqu’elles meurent. En gĂ©nĂ©ral, ils sont parfaitement garnis. Le chĂȘne et le hĂȘtre dominaient, mais la propagation du charme tend Ă  les dĂ©truire. Le tilleul, l’érable et le plane sont rares. L’alisier et le sorbier sont fort communs dans les bois des montagnes. 308 !! â–ș On exploite annuellement neuf mille hectares environ, qui produisent une somme totale de 6 , 3 oo,ooo fr., ce qui fait un revenu moyen de 2/ francs par hectare. Trente-six hauts-fourneaux et un nombre proportionnĂ© de forges en consomment pour 3,160,000 francs, non compris les frais d’abattage des bois, ceux de carbonisation et de transport, qui sont rĂ©partis entre vingt mille ouvriers travaillant pendant une bonne partie de l’annĂ©e. La futaie surtaillis comprend quinze Ă  vingt arbres par hectare qui cubent ensemble six stĂšres, terme moyen, ce qui fait pour l’étendue totale un million trois cent soixante-huit mille stĂšres; on en coupe trente-sept mille stĂšres par an, qui produisent, Ă  raison de 3 o francs le stĂšre dans la forĂȘt, 1,110,000 francs. On exporte pour Lyon et le midi des charbons et des futaies en valeur de 5 oo,ooo francs par an. CHAPITRE Y. PLANTATIONS DE M. DE BUFFON DANS SES BOIS DE MONTBARD. L’intĂ©rĂȘt que doit inspirer une crĂ©ation de l’illustre Buffon nous a engagĂ© Ă  visiter les plantations dont nous allons parler. Son gĂ©nie lui en avait fait pressentir les rĂ©sultats, et il prĂ©parait la preuve subsistante qu’il est facile de faire croĂźtre des bois, mĂȘme dans de trĂšs-mauvais terrains. Il a plantĂ© quelques arbres avec de grands soins et de grandes dĂ©penses; mais depuis, ces mĂȘmes arbres en ont produit des milliers d’autres sans soins, sans frais, presque sans culture. 509 > Bois de la Grande-Chaume. Ce bois est situĂ© au nord de la ville de Montbard, sur un plateau Ă©levĂ©, oĂč il gĂšle dans toutes les saisons de l’annĂ©e, et qui est coupĂ© de petits vallons oucombes, qui s’élargissent en descendant jusqu’au vallon de l’Arman- çon. Le fond de ces combes est encore plus exposĂ© aux gelĂ©es que le sommet du plateau. M. de Buffon attribuait ce phĂ©nomĂšne au dĂ©faut de circulation des vents dans ces gorges resserrĂ©es, et c’est probablement d’aprĂšs cette observation qu’il voulait que l’on ne laissĂąt ni baliveaux ni arbres surtaillis dans les bois de cette plage. Les chĂȘnes y gĂšlent tous les ans. Us sont *tous lan- guissans, chĂ©tifs et rabougris. C’est sur le plateau que M. de Buffon fit faire une plantation de pins silvestres dont les plus gros ont aujourd’hui quatre pieds et demi de tour; presque toutes leurs tiges sont courbĂ©es par les vents qui balaient cette plaine. Cela vient de ce qu’ils sont trop clair-semĂ©s et qu’ils ne peuvent se soutenir mutuellement. Les plants produits par le semis naturel de ces arbres sont assez nombreux. Bois de Canot. Ce bois est situĂ© au nord-ouest du prĂ©cĂ©dent, dans un sol calcaire, pierreux, sec et froid. M. de Buffon y a fait exĂ©cuter une plantation situĂ©e au fond d’une combe. On y distingue six Ă©picias trĂšs- hauts et trĂšs-droits, dont les graines n’ont jusqu’à prĂ©sent produit aucun plant ; deux sapinettes et un beau sapin argentĂ© sont aussi sans postĂ©ritĂ©. Autour de ces arbres s’étend une plantation de pins silvestres dont les graines ont produit des plants qui sont rĂ©pandus au 20 fil 310 > loin, dans une surface d’environ douze hectares. Sans les dĂ©gĂąts du pĂąturage, ces plants garniraient dĂ©jĂ  le terrain Ă  la place des coudres, des charmes, et de tous les mauvais bois taillis qui y croissent presque inutilement. On remarque de distance Ă  autre de jolis boqueteaux Ă©pais formĂ©s de jeunes pins infiniment plus vigoureux et plus forts que les autres. Ils occupent de petits espaces oĂč l’on a piochĂ© pour chercher des truffes; ils doivent ainsi leur rapide croissance Ă  une espĂšce de culture. Mais voici un fait qui doit exciter toute l’attention des forestiers. Le cĂŽtç oriental de ce bois Ă©tait bordĂ© par un champ Ă©troit d’une terre pierreuse et aride; la culture en fut abandonnĂ©e, comme trop peu productive, il y a environ vingt-cinq ans; les graines de pins silvestres se sont rĂ©pandues sur ce champ dĂ©laissĂ©, et ont donnĂ© des plants qui ont prospĂ©rĂ© au point qu’il est garni uniquement de jeunes pins de dix-huit pieds de hauteur, de huit Ă  douze pouces de grosseur, espacĂ©s de deux pieds Ă  deux pieds et demi. La plantation la mieux faite dans un bon terrain ne serait ni mieux garnie, ni plus belle. Si on l’exploitait aujourd’hui, elle rendrait un volume de bois trois fois plus considĂ©rable qu’un taillis de chĂȘne et de charme du mĂȘme Ăąge qui croĂźtrait dans le mĂȘme lieu. CHAPITRE YI. DES BOIS CONNUS SOUS UE NOM DE TRONCHÉES DANS LE DÉPARTEMENT DE t’AIN. En Bresse, on nomme tronchĂ©es des chĂȘnes qui sont rĂ©pandus dans les pĂąturages, et dont la tige est coupĂ©e Ă  sept ou huit pieds de hauteur; on les Ă©lague comme les saules, ce qui permet au bĂ©tail de paĂźtre dans les intervalles sans ronger les rejets; le mĂȘme terrain produit de l’herbe et du bois. Cette association serait excellente si les pĂąturages Ă©taient amĂ©liorĂ©s et soignĂ©s, si les arbres Ă©taient bien Ă©laguĂ©s; mais les uns et les autres sont dans un Ă©tat pitoyable ; cependant ces plaines, oĂč vĂ©gĂštent si tristement des arbres dĂ©gradĂ©s, donneraient de belles rĂ©coltes en herbages ou en cĂ©rĂ©ales Ă  l’aide de quelques travaux dirigĂ©s avec intelligence. Les moyens les plus efficaces que l’administration puisse employer,pour encourager les amĂ©liorations dans ce pays, sont l’ouverture de routes et de chemins praticables, l’établissement de quelques usines ou manufactures qui augmenteraient la population et favoriseraient la demande et la crĂ©ation de produits agricoles. Un grand ouvrage qui doit prĂ©cĂ©der tout autre, c’est l’assainissement du climat; mais on ne l’exĂ©cutera qu’en dirigeant les ruisseaux et les eaux pluviales d’aprĂšs un systĂšme gĂ©nĂ©ral de dessĂšchement; qu’en ouvrant les forĂȘts par de larges percĂ©es, qui seraient dĂ©frichĂ©es et mises en culture; qu’en coupant d’aqueducs et en bordant de fossĂ©s les chemins vicinaux pour les rendre praticables partout et en tout temps. Ces travaux une fois exĂ©cutĂ©s, tous les perfectionne mens naĂźtraient Ă  leur suite. Les moyens de dĂ©tail pour dĂ©truire les bruyĂšres et les genĂȘts, pour obtenir de riches rĂ©coltes et de beaux bois, se trouveraient facilement. Tout ce qui contribue Ă  augmenter la richesse agricole et industrielle favorise l’économie forestiĂšre car un peuple laborieux et intelligent sait se procurer du chauffage et des bois de construction aux moindres frais possible. 4f 512 ĂŻ> L’usage d’élaguer et d’étĂȘter les chĂȘnes se retrouve dans les environs de Strasbourg ; mais on y apporte autant de soin que l’on y met de nĂ©gligence en Bresse. L’élagage donne du bois de chauffage, et le pĂąturage nourrit beaucoup de bestiaux. CHAPITRE VIL OBSERVATIONS SUR UES FORÊTS DU UANGUEDOC. Nous allons prĂ©senter comme un document prĂ©cieux pour l’histoire des forĂȘts l’extrait d’un ouvrage de M. de Froidour, Ă©crit sous Louis XIV. Cet habile forestier, l’un des rĂ©dacteurs de l’ordonnance de 1669, assure que dans plusieurs provinces on coupait les taillis Ă  l’ñge de deux, trois ou quatre ans, et que l’on n’avait que de trĂšs-mauvais baliveaux. Il avait visitĂ© des futaies oĂč l’on avait eu soin de couper pĂ©riodiquement tous les bois blancs; elles Ă©taient devenues ires-belles, et le rejet qui venait dessous avait tellement profitĂ© qu’on avait peine Ă  le reconnaĂźtre. Anciennement les coupes rĂ©glĂ©es Ă©taient inconnues; les rois ne faisaient couper des arbres que pour les nĂ©cessitĂ©s de leurs bĂątimens, et pour la dĂ©livrance des usages dont les forĂȘts Ă©taient chargĂ©es. Leur produit consistait principalement dans la glandĂ©e, le pĂąturage et la chasse; mais comme elles Ă©taient parvenues Ă  un tel Ă©tat de vieillesse qu’elles dĂ©pĂ©rissaient tous les jours, les ordonnances de i 5 44 , i5y3 et 1687 avaient rĂ©glĂ© la coupe des bois de haute futaie Ă  l’ñge de cent ans. C’est Ă  ces ordonnances, qui n’avaient probablement pour but 313 que de procurer de l’argent au trĂ©sor royal, que la France est redevable de la conservation de ses plus belles forĂȘts. La dĂ©livrance des arbres aux usagers perdait six fois autant de bois que l’on en usait. M. de Froidour dĂ©finit ainsi la vente par Ă©claircisse- mens ou expurgades Cette vente se fait lorsque le bois taillis a atteint l’ñge de dix Ă  dix-huit ans; on le coupe Ă  la rĂ©serve des principaux brins qui sont sur chaque souche; et lorsqu’il est arrivĂ© Ă  pareil Ăąge, on le recoupe de nouveau avec les baliveaux de la prĂ©cĂ©dente coupe, et on rĂ©serve encore le plus beau brin qui se trouve sur chaque souche parmi le jeune taillis. Cette vente, que M. de Froidour appelle un monstre en matiĂšre de forets, a Ă©tĂ© sur son avis proscrite par l’ordonnance de 1669. Elle se pratiquait communĂ©ment en Languedoc; onia retrouve encore dans un grand nombre de localitĂ©s; les dĂ©fauts qu’on lui reproche sont qu’elle ne produit jamais de gros arbres, puisqu’on coupe les baliveaux Ă  la seconde exploitation, et qu’ils Ă©touffent le taillis, attendu qu’ils ne sont espacĂ©s que de huit Ă  dix pieds. Tout cela est vrai si ces baliveaux ne fournissent que du bois de chauf- fage. Les forĂȘts Ă©taient rĂ©duites Ă  un tel Ă©tat de dĂ©gradation, suivant M. de Froidour, que dans les environs de Montauban, le pays le plus riche et le plus beau du royaume, oĂč il y avait plusieurs milliers d’arpens de forĂȘts en bon fonds, Ă  peine pouvait-on trouver du bois pour les instrumens aratoires. Dans la forĂȘt de Gresigne, oĂč l’on ne voituraitle bois qu avec des bĂȘtes de somme, les usagers, les voisins, les S 314 gfr maĂźtres de verrerie, coupaient les plus beaux arbres. Les bois de dĂ©lit gisans auraient suffi pour chauffer deux ans la ville de Toulouse. On coupait les arbres sur pied pour en donner les feuilles aux bestiaux; on incendiait les forĂȘts pour y renouveler les herbages. L’habile forestier que nous citons proposait, pour moyen de rĂ©tablissement, de vendre des coupes annuelles; c’est ce qu’il y avait de mieux Ă  faire car si l’on pouvait obtenir un prix quelque faible qu’il fĂ»t, l’on pouvait aussi imposer les conditions d’une bonne exploitation. Il cite une forĂȘt dans laquelle on n’avait jamais pu vendre de coupes; une autre Ă©tait uniquement consacrĂ©e au pĂąturage, il parle d’un bois qu’il faut rĂ©gler Ă  vingt-cinq ans, dans la crainte qu’en le laissant en haute futaie, on ne se lasse de n’en rien retirer. Dans quelques endroits, les arbres Ă©taient Ă©branchĂ©s irrĂ©guliĂšrement; dans d’autres, ils Ă©taient rĂ©duits en broussailles par les usagers, qui coupaient les taillis Ă  la faucille; on craignait qu’en restreignant leurs pĂąturages on ne les obligeĂąt de quitter le labourage de leurs terres, qui se faisait avec des boeufs. Ces forĂȘts Ă©taient peuplĂ©es de hĂȘtres, chĂȘnes, coudres, trembles, charmes et houx. Le bois s’y dĂ©bitait en charbon comme dans toutes les localitĂ©s oĂč les transports sont difficiles. On coupait les arbres Ă  trois ou quatre pieds de hauteur, comme cela se fait encore aujourd’hui en Pologne et en Russie; il fallait, suivant M. de Froi- dour, les couper Ă  six pouces de terre et au-dessous, ce qui n’était pas encore bien rigoureux. Il se plaint que l’on ne trouvait pas Ă  vendre les coupes; nous espĂ©rons, dit-il, que la garde sĂ©vĂšre que nous avons fait faire, et que l’on fera ci-aprĂšs des forĂȘts du s 315 > roi, rendant le bois plus rare, on en trouvera le dĂ©bit. On n’avait pas la force de faire exĂ©cuter lesrĂ©glemens, faute d’argent. Ces remarques sont un sujet de mĂ©ditation pour qui veut approfondir la science forestiĂšre. Il serait bien utile que dans chaque dĂ©partement on dressĂąt une statistique qui fit connaĂźtre les diffĂ©rences souvent frappantes dans la maniĂšre de gouverner les forĂȘts. On parviendrait ainsi Ă  se rendre compte d’une foule de faits dont, jusqu’à prĂ©sent, on n’a pas saisi la liaison ou l’opposition, pour les faire entrer dans un systĂšme complet d’économie forestiĂšre. SIXIEME PARTIE. DE L’ESTIMATION DES BOIS X T DE L’EXPLOITATION DES COUPES* c CHAPITRE PREMIER. ESTIMATION. Les usages auxquels on emploie les bois varient selon les localitĂ©s; ils changent avec les temps; ils sont soumis Ă  beaucoup d’autres influences. Ainsi, dans une annĂ©e oĂč les rĂ©coltes des vignobles sont trĂšs-abondantes, on destinera une grande quantitĂ© de chĂȘnes Ă  fabriquer des tonneaux; dans les annĂ©es au contraire oĂč les vignes sont stĂ©riles, les arbres sont dĂ©bitĂ©s en planches, ou mĂȘme en bĂ»ches pour le chauffage. Le degrĂ© de raretĂ© d’une espĂšce d’arbres en porte le prix au-dessus du prix moyen. Le hĂȘtre est infĂ©rieur au chĂȘne sous tous les rapports d’utilitĂ©; cependant il se vend aussi cher que ce dernier bois dans quelques localitĂ©s, oĂč celui-ci est trĂšs-commun, et le hĂȘtre trĂšs-rare. L’érable et les arbres fruitiers se vendent assez bien dans le voisinage des villes, oĂč ils sont employĂ©s Ă  faire des meubles; mais dans les campagnes, ils sont placĂ©s au dernier rang des bois d’oeuvre. Le peuplier, le tremble et le bouleau ont, comme bois de charpente, une valeur quadruple de celle qu’ils auraient comme bois de chauffage. Nous donnerons d’abord un tableau qui reprĂ©sentera la dĂ©gradation de la valeur du pied cube mĂ©trique de chĂȘne, pris pour unitĂ©. S 317 !?â–ș CIRCONFÉ- HAUTEUR YÀLEÜR EMPLOIS CLASSE. moyenne de la pied cube dont les bois sont des arbres. tige. mĂ©trique. susceptibles. pieds mĂ©triq. pieds mĂ©triq. fr. a. 1 9 40 4 \ 2 9 36 3 50 3 8 36 3 4 7 36 2 50 / Constructions maritimes. 5 6 32 2 25 { Constructions civiles. Ouvrages de fente, 6 6 30 2 / comme merrain, latte, 7 6 28 1 75 1 boissellerie. 8 5 1/2 30 1 C0 9 5 1/2 28 1 50 10 5 30 1 40 J 11 4 1/2 28 1 30 ] 12 4 27 1 20 13 3 1/2 25 1 10 1 t Charpente, sciage. 14 3 22 1 15 2 1/2 22 95 * 16 2 1/2 22 90 17 2 22 85 ] 18 1 1/2 21 75 Menue charpente et i r chauffage. 19 1 1/2 20 55 1 20 1 » 30 j 21 3/4 }> 20 > Chauffage et charbon. 22 1/2 » 15 1 Nous ne pousserons pas plus loin cette table; il suffit defairevoir que plus les dimensions du bois sont faibles, moins le pied cube est cher, et d’indiquer le ternie moyen de la progression dĂ©croissante. *t 318 Une observation essentielle Ă  faire est qu’un stĂšre de bois de chauffage composĂ© de petites bĂ»ches contient beaucoup de vides, et ne pĂšse guĂšre que moitiĂ© d’un stĂšre de grosses bĂ»ches. Pour apprĂ©cier le prix du bois de menu chauffage, il serait beaucoup plus exact de le peser que de le mesurer. . Futaie . Ce n’est qu’aprĂšs avoir procĂ©dĂ© au cubage de tous les arbres que l’on peut connaĂźtre leur vĂ©ritable valeur; on doit d’abord reconnaĂźtre Ă  quel usage ils sont propres, et s’assurer s’ils sont bien sains. On estime comme dubois de chauffage les arbres viciĂ©s en totalitĂ©; quant Ă  ceux qui ne sont que cariĂ©s dans une partie de leur tige, ceux qui n’ont qu’une gĂ©livure, ce qui n’empĂȘche pas qu’une portion ne soit propre aux ouvrages de fente, on en distingue la portion viciĂ©e de celle qui est saine, ou bien l’on prend un terme moyen. Lorsque la tige d’un chĂȘne est garnie de petites feuilles, on doit prĂ©sumer que le bois est rouge, mais on peut s’en assurer Ă  l’aide d’une tariĂšre, et l’on reconnaĂźt non-seulement si le bois est bon, mais s’il y a beaucoup d’aubier. En gĂ©nĂ©ral, on reconnaĂźt au premier aspect les dĂ©fectuositĂ©s des arbres une Ă©corce gĂątĂ©e, des branches cassĂ©es et des cicatrices, des chancres, des loupes, des bourrelets, des trous formĂ©s par des insectes ou par des oiseaux, un feuillage terne, sont des vices qui indiquent qu’il est temps d’abattre les arbres. Les gerçures longitudinales dans l’écorce indiquent une gĂ©livure intĂ©rieure. Pour apprĂ©cier la valeur du pied cube des arbres 4C 319 que l’on voudra Ă©valuer, il ne sera pas nĂ©cessaire de faire autant de classes qu’il y en a dans le tableau que nous venons de donner ; il sera facile de s’assurer par des recherches locales combien vaut, par exemple, un chĂȘne de 10 pouces d’équarrissage sur 2 5 pieds de longueur; on estimera plus cher le pied cube des arbres plus gros que celui-lĂ , et moins cher le pied cube des arbres plus petits. Si l’on peut connaĂźtre la valeur des plus gros arbres et celle des plus petits, il est facile de remplir l’évaluation des classes intermĂ©diaires, en se servant du tableau que nous venons de donner. On suppose que la grosseur est prise au milieu de la tige, et pour l’obtenir assez exactement, on la mesure Ă  4 pieds du sol, et l’on retranche Ăź pouce par pied de hauteur pour arriver au point que l’on juge former le milieu de la longueur de la tige. L’exactitude de l’estimation dĂ©pend du soin avec lequel on aura Ă©tabli les Ă©lĂ©mens du calcul, qui sont d’un cĂŽtĂ© le cubage, et de l’autre la valeur du pied cube de chaque espĂšce et de chaque classe de bois, valeur absolument locale et variable; mais on peut appliquer avec succĂšs les connaissances gĂ©nĂ©rales que l’on a acquises dans les lieux oĂč l’art de travailler le bois est perfectionnĂ© , pour en tirer parti dans les lieux oĂč cet art est encore imparfait. La valeur des bois de diffĂ©rentes espĂšces qui ne sont propres qu’au chauffage ou Ă  fabriquer du charbon est proportionnelle Ă  leur pesanteur spĂ©cifique; ainsi le prix d’un stĂšre de chĂȘne est Ă  celui d’un stĂšre de tremble iS comme 8 est Ă  5 ; ce rapport changerait si l’on brĂ»lait des bois parfaitement secs, et l’on y gagnerait pour tous les bois blancs. *" 520 > Mais cette valeur relative n’est plus la mĂȘme pour les bois de service; le hĂȘtre, qui est lourd, n Ă©tant pas prq- pre Ă  la charpente, se vend moins cher que le sapin, qui est plus lĂ©ger. Une poutre de sapin ou de peuplier, qui est placĂ©e Ă  l’abri et hors du contact d’un mur humide, dure presque aussi long-temps qu’une poutre de chĂȘne; mais le prix de ce dernier bois est toujours fort Ă©levĂ©, parce qu’il rĂ©siste aux injures de l’air, qu’il supporte de lourds fardeaux sans se rompre, et qu’il est propre Ă  une infinitĂ© d’usages. Lorsque nous parlons du pied cube, nous entendons le pied mĂ©trique. Il faut 2 pieds cubes 7 dixiĂšmes pour former un dĂ©cistĂšre. Le stĂšre contient 27 pieds cubes mĂ©triques. Nous Ă©valuerons toujours les bois en les supposant livrĂ©s dans la forĂȘt oĂč ils se vendent. Les prix que nous donnerons ne peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s que comme des quantitĂ©s variables selon les temps et les localitĂ©s. Nous proposons des exemples, et non des rĂšgles. La valeur d’une coupe se compose de la somme totale des produits qu’elle peut rendre, dĂ©duction faite des frais d’exploitation et fabrication. Il faut encore dĂ©duire le bĂ©nĂ©fice du marchand, qui doit s’élever du quart au tiers de la valeur de la coupe, parce qu’il reprĂ©sente, i.° l’intĂ©rĂȘt des fonds qu’il engage dans l’achat de la coupe et les frais d’exploitation, intĂ©rĂȘt calculĂ© d’aprĂšs les dĂ©lais qu’il faut donner aux acheteurs; 2. 0 le salaire d’un commis; 3 .° les pertes rĂ©sultant des mauvaises crĂ©ances; 4. 0 le profit ordinaire d’une entreprise industrielle. Bois de charpente . La soliditĂ© d’un prisme inscrit dans un cylindre est Ă  celle du cylindre comme 240 est Ă  377, mais la perte de l’écorce et de l’aubier rĂ©duit la soliditĂ© effective d’un arbre Ă©quarri Ă  moitiĂ© de celle du meme arbre en grume. Un chĂȘne de 12 pouces d’équarrissage sur 28 pieds de longueur se vend 2 fr. le pied cube. Un tel arbre est propre Ă  faire un tirant dans une charpente. Un baliveau dont le volume est d’un pied cube se vend 60 centimes. Les frais d’équarrissage se calculent Ă  peu prĂšs ainsi qu’il suit pour le chĂȘne De 5 Ă  10 pouces d Ă©quarrissage, 5 centimes le pied courant ; De 10 Ă  12 pouces, 7 centimes et demi le pied courant; De 13 Ă  i& pouces, 20 centimes le pied courant. Les bois courbes sont trĂšs-recherchĂ©s pour faire des roues d’usine, des cintres et des piĂšces de navire. On les Ă©value comme bois de premiĂšre classe, et mĂȘme plus cher lorsqu’ils sont trĂšs-rares. Ce motif doit engager Ă  en rĂ©server dans les coupes. Lorsque le pied cube de sapin vaut 1 fr.,le pied cube de chĂȘne vaut 1 fr. 5 o c. U faut 6 ou 7 ans pour dessĂ©cher les arbres qui ont plus de 4 pieds de tour. Pour conserver les bois, il faut qu’ils soient Ă©quarris ou au moins Ă©corcĂ©s presque immĂ©diatement aprĂšs l’abattage, qu’ils ne soient pas en contact avec le sol ni entre eux, et qu’ils soient placĂ©s dans un lieu trĂšs-aĂ©rĂ© et abritĂ© s’il est possible. r 322 g* Charronnage. Un timon de charrette en bois de chĂȘne de i3 pieds de longueur sur 16 Ă  17 pouces de tour, se vend 1 fr. 5 O centimes. Un essieu de charme vaut 2 f. Il doit avoir au milieu de sa longueur 5 pouces d’équarrissage brut. Il a un pied 2 dixiĂšmes cubes de soliditĂ©. Tous les autres bois de charronnage se vendent au pied cube. Branchages des futaies. Dans une futaie surtaillis, la tĂȘte d’un chĂȘne d’un mĂštre de tour rend environ 2 dĂ©cistĂšres de bois de chauffage. Celle d’un chĂȘne de 15 dĂ©cimĂštres de tour rend ordinairement 6 dĂ©cistĂšres. Celle d’un chĂȘne de 18 dĂ©cimĂštres rend i5 dĂ©cistĂšres. Celle d’un chĂȘne de deux mĂštres de tour rend 2 stĂšres, terme moyen. Dans une forĂȘt de sapins en haute futaie, on Ă©value les branchages Ă  deux stĂšres par arbre, si ces arbres ont de 4 Ă  8 pieds de tour. i Prix du transport des tiges d’arbres. Dans les pays coupĂ©s de routes et de chemins oĂč les voitures peuvent passer, le prix moyen du transport des gros bois est de 3 fr. par stĂšre et par lieue , mais ce prix diminue progressivement Ă  mesure de l’augmentation des distances. * 323 fr. Planches. Un stĂšre de bois de cbĂ©ne Ă©quarri rend ordinairement 3 oo pieds de planches qui valent, Ă  raison de 12 cent, le pied, 36 francs. Dans un bloc de quinze pieds de longueur sur un pied d’équarrissage, dont la soliditĂ© est d’un demi-stĂšre, on tirera 10 planches de 12 Ă  i 3 lignes d’épaisseur; ce qui fera i 5 o pieds de planches. Nous ne comprenons pas les dosses ou planches prises hors de l’équarrissage, mais cette partie n’est pas non plus comprise dans le cubage. On calcule que le stĂšre en grume rend 180 pieds de planches, y compris les dosses. Les frais de sciage, pour les scies Ă  la main, se calculent ainsi qu’il suit La façon pour le sciage du chĂȘne est de 4 5 fr. par 1000 pieds courans, ou de 4 Ă  5 centimes par pied de sciage assorti, savoir i /3 en chevrons, lambris et travots. 1/3 en planches. t /3 en plateaux de 2 pouces Ă  2 pouces et demi d’épaisseur. Le sciage des plateaux de 3 Ă  4 pouces d’épaisseur coĂ»te 10 centimes le pied courant. Le sciage du sapin coĂ»te 35 fr. par 1000 pieds courans, ou 3 centimes et demi par pied courant. Le sciage du peuplier ne coĂ»te que 3 centimes le pied courant. Les planches de sapin se fabriquent ordinairement dans des scieries mues par un cours d’eau, dont le travail est de moitiĂ© moins cher que celui des scies Ă  bras. Ces planches ont ordinairement 12 pieds de longueur, ÂŁ 524 V* Ăź pied de largeur et n lignes ou un pouce d’épaisseur. Elles se vendent, en sortant de la scierie, 12 fr. la douzaine. Les travots de sapin de 3 Ă  4 pouces d’équarrissage, sur 12 pieds de longueur, se vendent de mĂȘme 12 fr. la douzaine. MERRAIN. Dimensions du merrain de Bourgogne. NOMS DES PIÈCES. LONGUEUR. LARGEUR. EPAISSEUR. pouces. pouces. lignes. Fonds. 2 4 4 11 Douves. 35 4 11 On compte ordinairement 1 pouce pour l’épaisseur. Le millier marchand se compose de 2575 piĂšces, savoir, 858 piĂšces de fonds et 1717 douves. La façon coĂ»te de 60 Ă  70 fr. le millier. Le prix de transport du millier de merrain est de 4 fr. par lieue. Il faut observer que le merrain de feuillettes se vend entre la moitiĂ© et les 2/3 du prix du merrain de tonneau, et qu’il est composĂ© de 3750 piĂšces. Dans ce dernier, les piĂšces au-dessous de 4 pouces de largeur ne comptent que sur le pied de 3 piĂšces pour deux. . Il faut de i 5 Ă  20 stĂšres de bois en grume pour fabriquer un millier de merrain Ă  tonneaux, suivant que le chĂȘne se fend plus ou moins bien. Le prix en est trĂšs-variable,il s’élĂšve ou descend entre 45 o fr. et 750 fr. le millier. 325 B» Pour composer le millier de merrain dont nous avons donnĂ© les dimensions ci-dessus, il faut 858 piĂšces de fonds, qui cubent chacune 0,01904, ce qui fait en stĂšre 63 4 Et 1717 douves qui cubent chacune 0,02777, ce qui fait en 768 SoliditĂ© du millier 402 Ce calcul fait voir qu’il n’entre dans le merrain qu’un tiers de la soliditĂ© totale du bois façonnĂ©, et que les morceaux de rebut auxquels on donne une autre emploi, l’aubier, l’écorce et les copeaux, forment les deux autres tiers. Le bois des massifs de haute futaie se fend mieux ordinairement que celui des futaies surtaillis, mais ce dernier est plus sain. Lorsque les arbres d’un massif sont en partie gĂątĂ©s, il faut 25 stĂšres en grume pour fabriquer un millier de merrain, terme moyen. Le merrain de chĂątaignier ne vaut que les deux tiers du merrain de chĂȘne. On fabrique 96 tonneaux dans un millier de merrain composĂ© de 2575 piĂšces tonneau de 226 litres . Un millier de merrain Ă  feuillettes composĂ© de 3 5 00 piĂšces suffit pour fabriquer 85 jeuilleites de 11 3 litres chacune. Bois propre Ă  faire des meubles. Le noyer se dĂ©bite en plateaux de 3 pouces d’épaisseur. Les branches servent Ă  faire des sabots. Le pied cube d’une tige de noyer bien saine vaut 4 Ă  5 fir., et quelquefois davantage. 326 X On paie au mĂȘme prix le bois d’érable lorsque l’arbre est assez gros pour fabriquer des meubles, le bois de plane, sorbier et cormier propre Ă  faire des manches, des rabots et d’autres outils ou des instrumens. LATTES POUR LES COUVERTURES EN TUILES. Dimensions de la latle de chĂȘne. LONGUEUR. LARGEUR. ÉPAISSEUR. SOLIDITÉ. ponces. lignes. lignes. pouces. Petite latle. . 4 2 1 5 1/2 3 6/10 17 Grande latte. 48 16 3 17 Ce qui fait iod lattes au pied cube, ou 3 i 5 o lattes au stĂšre Ă©quarri. Le millier est composĂ© de 20 bottes de chacune 5 o lattes. Le prix moyen de la latte est de 16 fr. le millier pris dans la forĂȘt; la latte d’aubier ne vaut que les 3 cinquiĂšmes de ce prix. La façon coĂ»te 5 fr. le mille. Le prix du transport est de 5 fr. le mille pour 10 lieues. La latte de sapin pour les couvertures en tuile se vend 11 fr. le millier pris en forĂȘt. La façon est de 2 fr. Le produit net est donc de 9 fr. le mille. Les frais de transport sont de 4 &’‱ I e mille pour 10 lieues. Sabots. Une grosse de sabots de hĂȘtre assortie est composĂ©e de i 3 douzaines ou i 56 paires, dont 3 douzaines de paires de sabots d homme , 527 gfr 8 douzaines de paires de sabots de femme, 2 douzaines de paires de sabots d’enfant. Les blocs ont les dimensions suivantes LONGUEUR. CIRCOIÏFERBNCE Sabots d’homme. Sabots de femme Sabots d’enfant.. pouce. 12 pouces. 18 15 8 9 5 Le prix de la façon est de 20 fr. la grosse. Un ouvrier fait de 10 Ă  i 5 paires de sabots par jour. Quelques ouvriers fabriquent les sabots en partageant par moitiĂ©, si on leur fournit le bois Ă  l’atelier. Le prix de la grosse prise au lieu de la fabrication est de 36 fr. Il faut 1 stĂšre environ de bois en grume pour une grosse de sabots. Un bloc de x 3 pouces de diamĂštre fournit 5 sabots sur la hauteur moyenne d’un pied, ce qui fait 146 paires ou 1 grosse pour 4 dĂ©cistĂšres et demi ou 9 dĂ©cistĂšres en grume. Mais il y a beaucoup de bois de rebut, parce que les nƓuds gĂątent les sabots. Les meilleurs sabots se font en hĂȘtre, aune, bouleau, saule, peuplier et tremble. Taillis . Un taillis de 2 5 ans, composĂ© de chĂȘne, hĂȘtre, charme et bois blanc, peuplĂ© de baliveaux modernes, peut ren- dre par hectare Dans un excellent sol, 240 stĂšres de bois ; Dans un bon sol, 180 stĂšres; Dans un sol mĂ©diocre, 120 stĂšres; Dans un mauvais sol, 7 5 stĂšres. H? 328 Si les taillis s'exploitent Ă  un autre Ăąge, on peut calculer la diffĂ©rence d’aprĂšs notre table d’accroissement. Quand on connaĂźt le produit total, on le divise, d’aprĂšs les usages de la contrĂ©e, ou d’aprĂšs d’autres combinaisons, en bois de chauffage, en bois propre Ă  faire du charbon, en bois de fente pour les cercles, les Ă©chalas, et en beaucoup d’autres classes. Les bois de chauffage, et propres uniquement Ă  faire du charbon, sont moins chers que ceux qui servent aux usages que nous allons dĂ©tailler, ou Ă  d’autres semblables. Emplois divers des taillis. Les Ă©chalas, qui sont des brins de coudre, cornouiller, charme, Ă©pine, propres Ă  soutenir la vigne, se vendent Ă  raison de 5 o cent, le cent; il faut dĂ©duire 1 5 cent, pour la façon. La fascine, propre Ă  faire des parois dans les bĂątimens construits en bois et en terre, se vend x fr. 20 cent, le cent. Il faut en dĂ©duire 35 cent, pour la façon. Les petites perches de 5 pouces Ă  5 pouces et demi de tour, pour couvrir en chaume les bĂątimens, se vendent chacune 10 cent. Les perches de 9 pouces de tour, propres Ă  faire des chevrons dans les bĂątimens couverts en chaume, se vendent 20 cent, chacune. Les brins droits et flexibles servent Ă  faire des cercles de tonneau. On met 2 4 cercles dans une couronne, qui se vend ordinairement 1 fr. 5 o cent, ou 2 francs. On paie 5 cent, par douzaine de perches pour les couper, et 3 5 cent, au cerclier pour la façon. Les meilleurs cercles sont ceux de chĂątaignier, bouleau, coudre et cornouiller. 329 RI» Les Ă©chalas de 7 pieds de hauteur en chĂȘne pour les hautes vignes de la vallĂ©e du Rhin, se vendent 3 o francs le cent. Les piquets pour les haies mortes se vendent 5 fr. le cent. La façon est de 75 cent. Les Ă©chalas de chĂȘne fendu, pris dans la forĂȘt, se vendent de 1 fr. 5 0 cent, Ă  2 fr. le cent. La façon est de 40 cent, le cent. Le tremble sert aussi Ă  fabriquer de bons Ă©chalas de fente. On tire 2200 Ă©chalas de 4 pieds de longueur dans un moule de 64 pieds cubes, qui se vend pour cet usage moitiĂ© de plus qu’il ne se vendrait pour le chauffage, parce qu’il faut choisir les plus belles bĂ»ches. Un taillis de 18 Ă  20 ans bien peuplĂ© de chĂȘne rend environ 700 bottes d’écorce par hectare. La botte a 3 pieds 1/2 de longueur sur 3 pieds 1/2 de tour. Elle pĂšse environ 28 livres, ce qui fait i960 livres d’écorce environ 980 kilogrammes par hectare. Un double stĂšre de chĂȘne donne 9 Ă  10 bottes d’écorce. Le cent de bottes se vend cent francs. La façon est de 18 Ă  20 francs. Dans le Morvan, on donne aux bottes d’écorce G pieds 2 pouces de longueur sur 4 pieds 2 pouces de circonfĂ©rence. On les entoure de 4 liens. Chaque botte ou faix pĂšse 80 livres environ, selon qu’elle est plus ou moins serrĂ©e. T a façon de la botte est de 4 5 cent., et le prix moyen est de 3 francs. On peut employer pour le tan l’écorce des chĂȘnes de 3 Ă  4 pieds de tour, si l’on ĂŽte l’épiderme ; mais cette Ă©corce ne vaut que la moitiĂ© de celle du taillis. Dans le nord, l’écorce du bouleau, de l’orme et du *8 330 sapin, serve au mĂȘme usage moyennant la mĂȘme prĂ©caution. L’écorce des jeunes frĂȘnes et de quelques autres arbres, Ă©tant broyĂ©e, est une bonne nourriture pour le bĂ©tail. Bois de chauffage. Dans la forĂȘt de Fontainebleau, le stĂšre de grosses bĂ»ches de cliĂȘae ou de hĂȘtre vaut 1 4 fr. Le stĂšre de petit bois vaut 10 fr. Lebrigot, qui est composĂ© de mauvaises branches, de bois pourri ou gĂątĂ© par des piqĂ»res d’insectes, vaut 5 fr. le stĂšre. Dans le dĂ©partement du Haut-Rhin et dans le Jura, le stĂšre de bois de sapin destinĂ© au chauffage vaut 7 fr., tandis que le stĂšre de chĂȘne ou de hĂȘtre destinĂ© au mĂȘme usage vaut 10 fr. Dans les forĂȘts dont les dĂ©bouchĂ©s ne sont pas difficiles, le stĂšre de grosses bĂ»ches de chĂȘne ou de charme vaut 9 f., et le stĂšre de petites bĂ»ches vaut 5 fr. On fait des fagots et des bourrĂ©es avec du bois de toute grosseur, depuis 6 lignes jusqu’à 3 ou 4 pouces de tour. Ceux dans lesquels il entre de gros brins sont beaucoup plus chers que les autres. La façon du cent de fagots varie de Ăź fr. Ă  1 fr. 80 centimes. Un stĂšre de bois de chauffage de chĂątaignier ne vaut que les 2/3 d’un stĂšre de bois de chĂȘne. Chaux. Dans les contrĂ©es oĂč la pierre calcaire est abondante, on fabrique 200 tonneaux de chaux avec 7 Ă  8 milliers de fagots de ramilles. Le tonneau contient 2 hectolitres et tif 331 gt demi de chaux. Le chaufournier prend 7 5 cent, par tonneau pour son salaire. Le prix du tonneau de chaux pris au fourneau est de 2 fr. 7 5 cent. L’emploi de la chaux comme amendement dans les terres argileuses et granitiques procure les plus heureux rĂ©sultats. On pourrait en fabriquer beaucoup avec les Ă©pines et les brins traĂźnans qui se perdent dans les taillis. Frais de transport des bois taillis. Dans les mauvais chemins, accessibles cependant aux voitures, on donne 1 fr. 5 o cent, par lieue pour un stĂšre de bois de chauffage. Dans les chemins passables, on donne Ăźfr. 20 cent, par stĂšre. Charbon. Le poids du pied cube de charbon varie de 16 Ă  20 livres, ce qui fait 18 livres, terme moyen. Le stĂšre d’un bois taillis ĂągĂ© de 1 8 ans rend de 8 Ă  9 pieds cubes de charbon. Le stĂšre d’un bois ĂągĂ© de 18 Ă  3 o ans rend de 1 o Ă  11 pieds cubes de charbon. Un stĂšre de petit bois de chĂȘne renferme, dĂ©duction faiLe des vides, environ 16 pieds cubes de bois plein; et, le poids moyen du bois sec Ă©tant de 40 livres le pied cube, le stĂšre pĂšse 640 livres ; et comme il rend 10 pieds cubes de charbon, terme moyen, on a 180 livres de charbon pour G40 livres de bois sec, ou iS livres pour 64 pieds cubes. Il faut trois mois d’étĂ© pour dessĂ©cher le bois destinĂ© Ă  la carbonisation. C’est Ă  l'imperfection ordinaire de $ 332 U* ce dessĂšchement qu’on doit attribuer les faibles produits dont on a lieu de se plaindre frĂ©quemment lorsqu’on fait fabriquer du charbon. En Prusse, dans le Brandebourg, on fait du charbon pour les forges avec des souches et des racines d’arbres. On Ă©vite soigneusement de laisser la moindre parcelle de bois sec ou pourri dans les fourneaux Ă  charbon. Frais de carbonisation . Il en coĂ»te, pour mettre en charbon un doublestĂšre de bois, i.° La façon de couper le bois et de le mettre en cordes, qui est par double stĂšre de 1 fr. 10 c., ci 1 fr. 10 c. 2. 0 La façon de .dresser les fourneaux, et de les couvrir de feuilles et de terre. 20 3 . c Le salaire du charbonnier. 1 5 45 On paie en outre au charbonnier 1 fr. 5 o cent, pour chaque place neuve d’un fourneau. Nous porterons Ă  1 fr. 5 o cent, par double stĂšre les frais d’abattage et de carbonisation. Les petits fourneaux coĂ»tent un peu plus en proportion que les gros, mais ils sont cuits plus tĂŽt. Frais de transport. Les frais de transport du charbon par des voitures sont graduĂ©s ainsi qu’il suit A 3/4 de lieue, il en coĂ»te 90 cent, par stĂšre de charbon. A 1 lieue , il en coĂ»te 1 fr. 20 cent. A 1 lieue 1/2, il en coĂ»te 1 fr. 60 cent. A 2 lieues, il en coĂ»te 1 fr. 80 cent. Et par lieue, pour une distance de 2 Ă  7 lieues, il en coĂ»te 64 cent, par stĂšre de charbon, ou 16 cent, par tonneau. Dans les chemins trĂšs-difficiles, il faut ajouter un quart Ă  ces frais. Le. transport du charbon Ă  dos de chevaux ou de mulets coĂ»te 1 fi\ par lieue pour chaque stĂšre, ou 2 5 cent, par tonneau. Chaque cheval porte 10 pieds cubes de charbon dans un sac. Pi ‱ix du charbon. ^ Un double stĂšre de bois dur rendra 18 pieds cubes de charbon, ou 2 tonneaux 1/2 environ le tonneau d’un quart de stĂšre. Le prix du double stĂšre de bois sur pied est de 8 fr., fr. L’abattage et le dressage de ce double stĂšre coĂ»tent 1 franc 10 centimes, ci. . . . 1 10 c. Les frais de carbonisation, non compris l’abattage et le dressage des cordes, sont de 40 centimes, ci. 4° Le transport Ă  une distance moyenne de 5 lieues coĂ»te, pour 2 tonneaux 1/2, 2 fr., Les faux frais sont de 5 o centimes, ci... 5 o 00 Le prix du tonneau de charbon de bois dur qui forme un quart de stĂšre revient par consĂ©quent Ă  4 fr* 80 cent. Le charbon vaut, sur les ports de la SaĂŽne voisins des *$ 354 gth forĂȘts, 3 fr. 60 cent, le tonneau; ce charbon provient en partie de bois blanc. Rapports des valeurs. La pesanteur spĂ©cifique des charbons et leur valeur sont a peu prĂšs proportionnelles Ă  la pesanteur spĂ©cifique des bois verts avec lesquels ils sont fabriquĂ©s; mais il y a des variations relatives aux divers degrĂ©s de dessiccation auxquels les bois ont Ă©tĂ© soumis. Il est avantageux de sĂ©parer les bois blancs des bois dur9% parce que chacune de ces deux classes comporte diffĂ©rens degrĂ©s de dessĂšchement et de cuisson. ‱ Consommalion d’un haut fourneau et d’une forge. Pour fabriquer 1000 kilogrammes de fonte de fer, il faut de i 5 o Ă  200 pieds cubes de charbon, suivant le mode de construction du liaut-fourneau , suivant la qualitĂ© du minĂ©rai que l’on y emploie, et suivant la nature des charbons. Ceux qui proviennent de bois blanc rendent peu de produits dans ces usines. Le meilleur charbon pour fondre le minĂ©rai de fer est celui d’un taillis de chĂȘne ĂągĂ© de 20 Ă  35 ans. Supposons que la consommation soit de 175 pieds cubes de charbon par 1000 kilogrammes , ce qui est un terme moyen entre les quantitĂ©s que nous venons d’exprimer; ces 17 5 pieds cubes sont le produit de 20 stĂšres de bois ainsi pour fabriquer un million de kilogrammes de fonte, il faut 20,000 stĂšres de bois. Le minĂ©rai que l’on emploie dans les hauts-fourneaux de Bourgogne, Champagne et Franche-ComtĂ©, pĂšse de 100 Ă  i 3 o livres le pied cube lorsqu’il est bien lavĂ©. 335 Il faut i 35 o kilogrammes de fonte pour fabriquer iooo kilogrammes de fer dans une forge Ă  marteau. La quantitĂ© de charbon que l’on emploie Ă  cette fabrication est de 270 pieds cubes. Ainsi la fabrication d’un millier de kilogrammes de fer par les anciens procĂ©dĂ©s exige 5 o 6 pieds cubes de charbon, savoir 1 l.° Pour fabriquer les i 35 o kilogrammes de fonte destinĂ©s Ă  ĂȘtre convertis en fer, 236 pieds cubes en proportion de 175 pieds cubes pour 1000 kilogrammes, ci. 236 2. 0 Pour rĂ©duire ces i35o kilogrammes de fonte en fer, il faut 270 pieds cubes, Total . 5o6 Le charbon de bois dur sert Ă  fabriquer la fonte; le charbon de bois blanc sert Ă  forger le fer; mais ce dernier emploi sera de plus en plus restreint par la substitution de la houille au charbon de bois dans le travail de la rĂ©duction de la fonte en fer. Prix de la houille. Pour Ă©tablir des comparaisons entre l’emploi du bois, celui du charbon de bois et celui de la houille, nous allons donner ici quelques prix relatifs Ă  ce dernier combustible. Le transport de la houille dans des voitures coĂ»te 12 cent, par hectolitre et par lieue. L’hectolitre, qui pĂšse 90 kilogrammes, coĂ»te 1 f. 5 o c. sur la mine si ce charbon est de premiĂšre qualitĂ©. Le rebut coĂ»te 7 5 cent, l’hectolitre. Deux hectolitres de houille soumis Ă  une espĂšce de carbonisation rendent 3 hectolitres de coak. 356 Comparaison de la chaleur produite par diffĂ©rens combustibles . Des expĂ©riences de Lavoisier citĂ©es par M. de Rum- ford, et d’autres expĂ©riences plus rĂ©centes consignĂ©es dans la bibliothĂšque physico-Ă©conomique, nous apprennent, i.° Qu’il y a prĂšs de la moitiĂ© de la chaleur perdue par la rĂ©duction du bois en charbon ; 2. 0 Que le charbon de bois, la houille de premiĂšre c[ualitĂ©, et le coak, rendent, Ă  Ă©galitĂ© de poids, la mĂȘme quantitĂ© de chaleur ; 3.° Qu’il est avantageux de consommer de la houille au lieu de coke toutes les fois que cela est praticable sans inconvĂ©nient Ăź. Des souches et des racines. Les souches mortes, les souches des arbres rĂ©sineux, celles des arbres et arbrisseaux que l’on veut expulser d’une forĂȘt, donnent des produits qui ne sont point Ă  dĂ©daigner dans les lieux oĂč le bois n’est pas trĂšs-abondant et oĂč les frais d’extraction ne sont pas considĂ©rables ; elles fournissent un excellent chauffage, car leur pesanteur spĂ©cifique est plus forte que celle des tiges. Les forĂȘts rĂ©sineuses, les massifs de futaie,donnent beaucoup de souches; mais les arbres des futaies surtaillis ont de plus fortes racines que ceux des futaies en massifs. On peut fabriquer d’excellent charbon avec des souches, mais il est prĂ©fĂ©rable de les vendre pour I e chauffage, si les frais de transport ne sont pas trop coĂ»teux- i y oyez le TraitĂ© gĂ©nĂ©ral des eaux et forĂȘts de M. Baudrillard, au mot Chaleur. 557 ^ L’enlĂšvement des souches Ă  demi pourries prĂ©vient la propagation de beaucoup d’insectes et d’animaux nuisibles; en arrachant ces souches, on donne au sol une espĂšce de culture favorable aux semis naturels. On s’abstient de cet arrachement dans les pentes des montagnes. Des machines ont Ă©tĂ© inventĂ©es dans enlever les troncs, mais jusqu’ici elles ont eu peu d’utiliLĂ©. C’est le levier qui fournit le meilleur moyen et le plus facile. Si l’on arrache un taillis dans lequel se trouvent des futaies surtaillis, on aura par hectare 110 stĂšres de bois de souches et de racines, terme moyen. Dans les exploitations ordinaires des bois feuillus, on trouve par hectare environ 2 stĂšres de souches mortes. CHAPITRE II. MENUS PRODUITS DES FORÊTS. I. De la feuille des arbres. La feuille de la plupart des arbres est une nourriture excellente pour les bestiaux, et surtout pour les mou- tons. On la rĂ©colte en Bourgogne en exploitant les taillis ou en Ă©laguant les arbres, depuis la fin du mois de juillet jusqu’au commencement d’octobre. On assemble les rameaux ou menues branches en fagots de 18 pouces Ă  2 pieds de tour. On les place convenablement pour les faire sĂ©cher en plein air, et il suffit de 2 jours s’il y a du soleil, et de 4 jours si le ciel est fĂȘ 538 g$» couvert de nuages. Il faut avoir l’attention de ne pas laisser mouiller les fagots, s’il est possible; l’on Ă©vite,par cette prĂ©caution, que la feuille noircisse et s’altĂšre. Lorsqu’ils sont suffisamment sĂ©chĂ©s, on les place dans une grange ou dans un hangar, oĂč la feuille peut se conserver une annĂ©e entiĂšre. Un hectare de taillis rend au moins 2Ùoo fagots de feuillage, qui valent 40 fr. le mille tout façonnĂ©s et pris dans la coupe; il faut dĂ©duire 8 fr. par mille pour la façon; le produit en est par consĂ©quent de 32 fr. le mille, ce qui fait 80 fr. par hectare. La meilleure feuille est celle de frĂȘne, Ă©rable, tilleul, orme, platane, tremble, cormier. Les moutons prĂ©fĂšrent de beaucoup la feuille fraĂźche Ă  la feuille sĂšche, et celle- ci au meilleur foin. Les feuilles de chĂȘne, de charme, de saule, mĂ©langĂ©es, sont assez bonnes; mais les feuilles de hĂȘtre ne plaisent pas aux moutons, Ă  moins qu’on ne les cueille quand elles commencent Ă  jaunir. En Toscane, on donne la feuille des peupliers aux gĂ©nisses. Dans la Lombardie et le pays de Naples, on plante des arbres’ qui soutiennent la vigne, procurent du bois pour le chauffage et de la feuille pour les bestiaux. On la cueille au mois de septembre, et on la renferme dans des creux ou dans des tonneaux; on la couvre de branchages et de terre pour la prĂ©server du contact de l’air, et la conserver fraĂźche toute l’annĂ©e. On la place toujours dans un lieu sec. En Suisse, on fait sĂ©cher des feuilles de noisetier, d’orme, de bouleau et de saule, pour nourrir les bestiaux et les moutons pendant une grande partie de l’annĂ©e. RS 339 §a» Un des meilleurs moyens de tirer parti de la feuille des bois pour les moutons est de pratiquer depuis le mois de juin au mois d’octobre des nettoiemens dans les taillis. On peut enlever les feuilles aprĂšs leur chute dans les forets situĂ©es dans des terres fertiles ou des vallĂ©es , sans aucun risque de faire tort Ă  l’accroissement des arbres ; les aiguilles des pins, d es mĂ©lĂšses, et des autres arbres rĂ©sineux, sont un excellent engrais, parce qu’elles contiennent beaucoup d’oxigĂšne. Cet engrais devient un terreau trĂšs-Ă©pais et trĂšs-compacte dans une pĂ©riode assez courte. La mĂ©thode de culture combinĂ©e,proposĂ©e par M. Cotta, repose principalement sur cette propriĂ©tĂ© des plantes rĂ©sineuses. On a soin dans le Maine de ramasser les feuilles des arbres, et de les mĂ©langer avec la paille pour en faire de la litiĂšre et de l’engrais. Les feuilles et l’extrĂ©mitĂ© des branches servent .Ă  fabriquer de la potasse dans les lieux oĂč l’on n’en peut tirer parti autrement. II. De la chasse. La chasse est un exercice presque hĂ©roĂŻque dans la vie sauvage, et trĂšs-utile dans un pays nouvellement cultivĂ©. Parcourir des plaines sans bornes 3 s’enfoncer hardiment dans des forĂȘts presque impĂ©nĂ©trables ; traverser Ă  la nage des riviĂšres, des lacs3 endurer le froid et la faim 3 poursuivre des bĂȘtes fĂ©roces3 dĂ©truire les animaux venimeux; affronter des dangers de toute espĂšce, c’est assurĂ©ment une noble occupation. La chasse avait encore un but d’utilitĂ© dans le moyen 3. e TABLEAU. Tableau de la fabrication de la coupe. iA e colonne. , Noms et prĂ©noms des ouvriers. 2 . e idem. Moules de chĂȘne.—bois blanc.—branchages. 3. e idem. Bottes d’écorce. 4. idem. Bottes de fascines. 5. e idem. Cordes de taillis.—vendues.— carbonisĂ©es. 6. e idem. Perches Ă  lattes. 7 - e idem. Bottes de harts ou liens. 8. e idem. Cercles. — de cuves.— de tonneaux. g. e idem. Courbes pour les bateaux. io. e idem. Fagots. — de taillis. — de branches d’arbres. il. idem. StĂšres de copeaux. I2. e idem. Planches. — de chĂȘne. — de bois blanc. l3. e idem. Plateaux de hĂȘtre. i4. e idem. Lambris. — Membrure.—Merrain. l5. e idem. NumĂ©ros des arbres non dĂ©bitĂ©s. l6. e idem. Valeur des bois fabriquĂ©s. 4. e TABLEAU. Etat de la vente des moules de gros bois provenant du taillis. colonne. NumĂ©ros des moules. 2 .. e idem. Noms et demeures des acheteurs. 3. e idem. Prix de chaque moule. 4. c idem. Prix total de la vente. 5. e idem. Date des livraisons. * 6. e idem. Date des paiemens. 7 . e idem. Montant des paiemens. Il est facile de dresser un Ă©tat semblable pour chaque espece de produit. 5. TABLEAU. .Etat relatif au charbon. Ăź. re colonne. Noms des charbonniers. 2, e idem. Nombre des fourneaux. 4B 348 jfr. 3. e colonne. Nombre des cordes. 4. e idem. Produit par fourneau en tonneaux cubes. ou en pieds 5. e idem. Lieux des livraisons. 6 . e idem. Noms et demeures des acheteurs. 7 . idem. QuantitĂ© de charbon vendue, en pieds cubes. tonneaux ou 8 . e idem. Prix du tonneau. 9 . idem. Prix total. I 0 . e idem. Dates des paiemens. u. e idem. Montant des paiemens. , 6 . e TABLEAU. Tableau rĂ©capitulatif des ventes. Ce tableau est corrĂ©latif au Tableau n.° 3. La premiĂšre colonne contient les numĂ©ros des registres. La seconde sert Ă  inscrire les noms, prĂ©noms et domiciles des acheteurs ou consommateurs. Les autres colonnes contiennent le dĂ©tail de chaque espĂšce de bois ou de marchandise fabriquĂ©e. Il doit comprendre les bois qui ont Ă©tĂ© consommĂ©s par l’exploitant, le facteur et les ouvriers. On doit y comprendre aussi la perte et le dĂ©chet, de maniĂšre que le total des bois et marchandises corresponde exactement aux additions qui se trouvent au bas du tableau n.° 3. 7 -e TABLEAU. Etat des frais d’exploitation. i. re colonne. NumĂ©ros du registre des ouvriers. 2 ,. e idem. NumĂ©ros de la caisse. 3. e idem. Noms des ouvriers, charbonniers et voituriers. 4. e idem. EspĂšce des bois fabriquĂ©s ou transportĂ©s. 5. e idem. Charbons. 6 . idem. QuantitĂ© des bois et charbons. 7 . e idem. Prix pour chaque espĂšce. 8 . e idem. Prix total. 9 - e idem. Sommes payĂ©es aux ouvriers et voituriers. io. e idem. Sommes restant dues aux ouvriers et voituriers. 4g 349 S* OBSERVATIONS SUR UES DROITS D’USAGE, ET SUR LE PATURAGE EN PARTICULIER. Nous avons dit que la plus grande partie des forets ont Ă©tĂ© dĂ©truites par le pĂąturage ; nous avons dit aussi que le pĂąturage sagement rĂ©glĂ© Ă©tait utile a 1 accroissement des taillis. Il importe de fixer les idĂ©es sur ce point. Lorsque les bestiaux parcourent les bois en tout temps, leur passage n’est qu’une grande dĂ©vastation dans laquelle ni arbres ni buissons ne sont Ă©pargnĂ©s. C’est ce que l’on voit dans les PyrĂ©nĂ©es, les CĂ©vennes, et plus particuliĂšrement dans les dĂ©partemens de la DrĂŽme, des Hautes et Basses-Alpes, qui reçoivent les moutons transhumans des plaines d’Arles ; ces montagnes sont presque dĂ©garnies de forĂȘts; les lois sont impuissantes contre cet usage pernicieux, qui n’a subsistĂ© que parce que le pĂąturage rapportait plus que le bois. Beaucoup de bois, sans ĂȘtre dĂ©truits, souffrent du pĂąturage; on les reconnaĂźt au 'premier aspect Ă  l’inĂ©galitĂ© dans la hauteur des brins du taillis car ceux qui n’ont pas souffert de fa dent des bestiaux sont bien plus Ă©levĂ©s que les autres; Ă  la bifurcation des rameaux qui repoussent aprĂšs avoir Ă©tĂ© rongĂ©s; Ă  l’absence de jeunes plants, et Ă  d’autres signes non moins Ă©quivoques. La difficultĂ© de mettre un frein aux abus du parcours en a fait proscrire l’usage dans un grand nombre de forĂȘts; on a regardĂ© ce moyen de conservation comme le seul qui fĂ»t assurĂ©. Rien de mieux dans les taillis oĂč il ne croit point d’herbes; car les jeunes pousses dubois Ă©tant le seul aliment que puissent y trouver les bestiaux , ils ne les Ă©pargnent pas. Mais dans les forĂȘts dont le terrain se couvre d’herbes, le pĂąturage sagement rĂ©glĂ© dĂ©truit les ronces, les viornes et les Ă©pines; les animaux brisent ces arbrisseaux pour s’ouvrir un passage ; ils foulent sous leurs pieds une mousse compacte qui s’opposait Ă  la germination des graines forestiĂšres ; les jeunes plants, n’étant plus Ă©touffĂ©s au milieu des buissons se dĂ©veloppent avec plus ou moins de force. Les taillis nettoyĂ©s par le pĂąturage valent quelquefois moitiĂ© de plus que ceux oĂč il a Ă©tĂ© interdit. Plus le sol est fertile, plus la diffĂ©rence est considĂ©rable. Il en est de mĂȘme de la glandĂ©e; l’espĂšce de labour que les cochons donnent Ă  la terre fait germer une infinitĂ© de graines; mais dans une forĂȘt cultivĂ©e, on n’a pas besoin d’un tel secours. L’usage d’enlever le bois mort contribue aussi Ă  accĂ©lĂ©rer l’accroissement des taillis; l’extraction des brins trainans, des Ă©pines dĂ©pĂ©rissantes, et des branches qui se dessĂšchent, est une espĂšce d’élagage informe, favorable aux forĂȘts. Ces usages, ce parcours, produisent l’effet d’un nettoiement mal exĂ©cutĂ©. Combien le^ moyens que la culture forestiĂšre indique sont prĂ©fĂ©rables ! Au lieu de faire manger l’herbe par les bestiaux dans les taillis trĂšs-jeunes, il faut la couper ou l’arracher, et quelquefois la brĂ»ler. Au lieu du pĂąturage, qui dĂ©truit souvent les brins bien venans aussi bien que les mauvais, au lieu de l’enlĂšvement irrĂ©gulier du bois mort, il faut des cultures et des nettoiemens pĂ©riodiques. Quand on est forcĂ© d’abandonner des taillis au parcours, il est avantageux de les faire Ă©claircir aupara- 4g 351 > vant, parce que les bestiaux dĂ©vorent les jets qui repoussent aprĂšs l’abattage. Il est facile de clore les taillis pour y interdire l’entrĂ©e des bestiaux aprĂšs leur exploitation; il suffit de couper d’avance les brins du pourtour de la coupe Ă  la hauteur d’un mĂštre et demi, et de ployer les branches latĂ©rales. Il y a plus de cinq siĂšcles que l’on se plaint en France des abus qu’entraĂźne inĂ©vitablement l’exercice des droits d’usage; on avait nommĂ© un officier sous le nom Ae forestier s dont les fonctions se bornaient Ă  la conservation du gibier, et Ă  la dĂ©livrance du bois aux usagers. Ceux-ci augmentaient la culture agraire aux dĂ©pens de l’étendue des bois, malgrĂ© les forestiers, et cela Ă©tait trĂšs-heureux. Depuis long-temps on ne s’accommode ni de faire des demandes en dĂ©livrance de bois, qui rĂ©pugnent Ă  ceux qui ont des droits acquis, ni d’acquiescer toujours Ă  des demandes souvent exagĂ©rĂ©es, et l’on prĂ©fĂšre de sĂ©parer entiĂšrement les propriĂ©taires des usagers en cantonnant ceux-ci. Dans la plupart des Ă©tats de l’Europe, la lĂ©gislation n’a pas encore autorisĂ© les propriĂ©taires Ă  faire cantonner les usagers. Les Allemands laissent exercer paisiblement les usages , mais tout se passe dans un ordre parfait; la saison, le jour, le mode d’exercice, sont rĂ©glĂ©s d’avance ; des gardes et des militaires sont placĂ©s sur diffĂ©rens points de la forĂȘt et sur les routes pour veiller Ă  la stricte et mĂ©thodique exĂ©cution des rĂ©glemens. I] n’en est pas de mĂȘme en Angleterre, oĂč la confusion des droits est telle, qu’il est des forĂȘts dontle sol appartient Ă  la couronne, le taillis Ă  des particuliers, et le droit de parcours Ă  des communes, qui ont dĂ©truit et les taillis, et les futaies, et mĂȘme les souches. Il faut un acte spĂ©- 352 cial du parlement pour rĂ©gler entre les intĂ©ressĂ©s le partage de chaque forĂȘt grevĂ©e d’usages. Notre lĂ©gislation est beaucoup plus avancĂ©e sur ce point 1 . On peut conclure, i.° que le pĂąturage est toujours pernicieux pour les taillis dans les bois oĂč il n’y a point d’herbe ; 2.° qu’il est trĂšs-nuisible s’il n’est pas bien rĂ©glĂ© ; 3.° que les bonnes espĂšces de bois se dĂ©truiraient bientĂŽt dans les taillis, s’il n y avait ni parcours ni nettoiement -, 4. 0 que l’herbe qui pousse en abondance dans les jeunes taillis doit ĂȘtre utilisĂ©e. La valeur du pĂąturage excĂšde Ă  peine les frais de la garde des bestiaux dans la plupart de nos forĂȘts. Toutes les forĂȘts sont plus ou moins susceptibles d’amĂ©liorations ou de culture. Les repeu plĂ©nums, les nettoie mens, la formation d’une pĂ©piniĂšre, la substitution des bonnes espĂšces d’arbres aux mauvaises, la destruction des plantes nuisibles, sont partout d’une exĂ©cution faede, et le succĂšs de ces soins ne peut ĂȘtre douteux. Nous avons indiquĂ© les meilleures mĂ©thodes de culture, d’amĂ©nagement, de plantation j nous nous sommes Ă©tendus sur l’estimation des bois, parce qu’il importe de discerner les arbres qui donnent le plus de profit de ceux qui en donnent le moins. 2 Il ne nous reste plus qu’à Ă©noncer une maxime qui ressort de tout ce que nous 1 Sur les cantonnemens, on peut voir ce que j’ai dit dans mon manuel forestier et dans mon traitĂ© de l’amĂ©nagement des bois. 2 Pour connaĂźtre les diverses espĂšces d’arbres, on peut Ă©tudier l’excellent dictionnaire de M. lĂźaudrillarl. 353 avons dit dans cet ouvrage. Les forets les plus productives sont celles dont les arbres sont parfaitement appropriĂ©s au sol et au meilleur genre de dĂ©bit, qui sont composĂ©es de massifs formĂ©s chacun d’une seule espĂšce d’arbres ou de deux espĂšces analogues, dont les plants sont tous du mĂȘme Ăąge, de la mĂȘme force, et convenablement espacĂ©s. L’adoption de la culture forestiĂšre nous semble ĂȘtre une nĂ©cessitĂ©. EspĂ©rons quelle fera des progrĂšs, et qu’elle s’agrandira avec le temps. v 3o4 g* TABLEAUX. Tjdlejv de la valeur des coupes de bois et des Joncs de terres labourables } prĂ©s et vignes } pendant les cinq derniers siĂšcles. Nous avons calculĂ© la valeur relative des fonds de terres et des coupes des bois d’aprĂšs les documens que nous avons recueillis aux archives de Dijon. Nous rapporterons une partie des ventes qui ont servi de base Ă  nos calculs. Les prix, exprimĂ©s en monnaies dont la valeur a subi de grandes variations, doivent ĂȘtre rĂ©duits Ă  une mesure commune; nous prendrons d’abord, dans cette vue, la valeur du marc d’argent 245 grammes; mais ce mĂ©tal Ă©tant devenu, par l’effet de l’exploitation des mines d’AmĂ©rique, quatre fois plus commun qu’il n’était dans le i 5 . e siĂšcle, il faut prendre le poids d’une quantitĂ© dĂ©terminĂ©e de blĂ© pour terme de comparaison. Comme la production du blĂ© suit assez rĂ©guliĂšrement les progrĂšs de la population, et que la consommation en est d’un usage presque gĂ©nĂ©ral en France, c’est au prix moyen et commun de cette denrĂ©e que nous rapporterons les prix dont nous allons nous occuper. Nous citerons d’anciennes mesures dont nous allons faire connaĂźtre la valeur. L’étendue de l’ancien arpent est de 4 2 ares; mais depuis l’annĂ©e 1669, les bois ont Ă©tĂ© mesurĂ©s Ă  l’arpent de 5 i ares 7 centiares. Le journal de terre contient 3 4 ares 28 centiares. La S 535 gt soiture de prĂ© est de Ăźa mĂȘme Ă©tendue, qui est prĂ©cisĂ©ment Ă©gale Ă  celle de l’arpent de Paris. Le setier de blĂ© dont nous parlerons est l’ancien setier de Paris, qui pesait 240 livres 118 kilogrammes, et qui vaut aujourd’hui 3 o francs, terme moyen. ANNÉE 1291. Le setier de blĂ© valait Ă  cette Ă©poque 10 sous. Le marc d’argent Ă©tait Ă  2 livres 18 sous. Vente d’une grange et meix Ă  Maisey, et ses appartenances, du four de Til, ensemble de 5 o journaux de terres en i 3 piĂšces, Ă  Maisey, Til et LigniĂšres, 10 soi- tures de prĂ© auxdits finages, pour le prix de trois cents livres tournois. Cela faisait environ 600 setiers de blĂ©. Ces immeubles se vendraient aujourd’hui 3o,ooo francs environ, ou 1000 setiers de blĂ©. ANNÉE 1293. Vente au duc de Bourgogne de la tondue de 400 arpens des bois de Nesle, c’est Ă  savoir 3 oo arpens de bois de haute forĂȘt et 100 arpens de bois communs, Ă  20 ans de traite, pour le prix de 1600 livres tournois, Le prix de l’arpent Ă©tait de 4 livres. Il vaudrait aujourd’hui 1200 francs. Comme le setier de blĂ© valait 10 sous, uu arpent de bois coĂ»tait 8 setiers de blĂ©. En i83i, le setier de blĂ© vaut 3o fr. Il faudrait par conse- quent 4o setiers pour acheter ce qui ne coĂ»tait que 8 setiers en 1293 . ANNÉE 1310. Le prix du setier de blĂ© Ă©tait de i5 sous. Le marc d’argent Ă©tait Ă  3 livres 8 sous. Vente des villages de Chevigny-Saint-Sauveur et de 69 84 O co i 5 01 i 5 92 v'*.**' ‱ ‱‱ ~ '‱'. -‱.». »i j*-. s; _ .***» ....... /.‱.â–ș» i .r/,vV.?»^ÆrĂżjfSR'- 1 * i * ; " 4 ‱r CS Y**’ ’ O 4 w . * *~v * ; 5 i' ,\ * m i *. *, * '"' T*-;.’ * . fe 8 r '-‱ 5 ’ ‱ , j* Z%* . '* -' " A lr ,, ..J;r /! ? *-. K . t ‱?‱‱ A .' ‱ V \,K- $v - Sli» ' \ j’ *‱‱ , * v. ; *' .... 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DĂ©finition, traduction, prononciation, anagramme et synonyme sur le dictionnaire libre Wiktionnaire. Français[modifier le wikicode] Étymologie[modifier le wikicode] Du latin commodus convenable ». Adjectif [modifier le wikicode] Singulier Pluriel Masculinet fĂ©minin commode commodes \ commode \ masculin et fĂ©minin identiques Dont l’usage est utile et agrĂ©able. Maison commode. Un meuble commode. Vie commode, Vie agrĂ©able et tranquille. Mener une vie commode. Rendre la vie commode. En parlant des personnes, ĂȘtre d’une sociĂ©tĂ© douce et aisĂ©e, d’un bon commerce. Être commode Ă  vivre. Avoir l’humeur, un caractĂšre commode. Familier Il n'a pas l’air commode, celui-lĂ  ! Se dit d’une personne sĂ©vĂšre, exigeante, froide, qui semble difficile Ă  approcher ou avec laquelle on ne peut pas plaisanter. C’est un maĂźtre commode, fort commode, C’est un homme qui ne rudoie pas ses domestiques, qui ne les charge pas de trop de travail. Qui est trop indulgent, trop facile. Ainsi on dit d’un mari qui ferme les yeux sur la mauvaise conduite de sa femme et d’une femme qui donne trop de libertĂ© Ă  sa fille. C’est un mari commode C’est une mĂšre commode. Morale Qui est relĂąchĂ©. Avoir une dĂ©votion commode, une morale commode. Se dit aussi, familiĂšrement et ironiquement, pour signifier qu’on ne met pas assez de façons aux choses, qu’on cherche plus ce qui est aisĂ© que ce qui est convenable. RĂ©pondre par une simple dĂ©nĂ©gation, c’est commode. DĂ©rivĂ©s[modifier le wikicode] accommoder Antonymes[modifier le wikicode] incommode malcommode Traductions[modifier le wikicode] Pratique Afrikaans geskikt af Albanais adapt sq Allemand bequem de, gelegen de, gemĂ€chlich de Anglais convenient en, handy en Bas allemand kommod nds Catalan cĂČmode ca, oportĂș ca, cĂČmoda ca en valencien Espagnol cĂłmodo es, oportuno es, propicio es EspĂ©ranto oportuna eo FĂ©roĂŻen fĂœsiligur fo, tespiligur fo, makligur fo Finnois sopiva fi Gallo d’amain *, d’aman * Ido komoda io Italien comodo it, accomodante it Iu mien faangh mbienc * NĂ©erlandais doelmatig nl, gemakkelijk nl, geschikt nl, gepast nl, passend nl Occitan comĂČde oc Portugais cĂłmodo pt, propĂ­cio pt Same du Nord vuogas * Nom commun [modifier le wikicode] Singulier Pluriel commode commodes \ commode \ fĂ©minin Mobilier Nom donnĂ© Ă  certain type d'armoire. Une armoire commode. MobilierAbsolument Meuble Ă  hauteur d’appui, garni de tiroirs et servant particuliĂšrement Ă  ranger du linge et des habits. OĂč, avec gĂ©nie, du reste, avez-vous cachĂ© le bouquetier de faĂŻence qui sera pour votre chambre ? Je le cherche depuis quelques heures, dans la commode, le petit placard, l'office, en vain et le plateau Ă  thĂ© ? — StĂ©phane MallarmĂ©, Correspondance 1862-1871, Ă©ditĂ© par Bertrand Marchal, Gallimard, 1959, volume 9, page 163 Il regardait la coiffeuse, se dĂ©fiait du lit qu’il n’osait jamais contempler en face et s’approchait de la commode, non pour dĂ©couvrir des secrets, mais pour regarder au jour la physionomie des tiroirs qu’il ouvrait et voir, en quelque sorte, comment ils se portaient. — Jules Supervielle, Le voleur d’enfants, Gallimard, 1926, collection Folio, page 106 Ce nom de Trognon lui fit entrevoir quelque machination, il crut Ă  quelque vice de forme projetĂ© par avance, Ă  quelque infidĂ©litĂ© prĂ©mĂ©ditĂ©e par la Cibot, et il rĂ©solut de se servir de ce Trognon pour se faire dicter un testament olographe qu’il cachĂšterait et serrerait dans le tiroir de sa commode. — HonorĂ© de Balzac, Le Cousin Pons, 1847 Proverbes et phrases toutes faites[modifier le wikicode] et mon cul sur la commode Vocabulaire apparentĂ© par le sens[modifier le wikicode] semainier commode Ă  sept couloirs Traductions[modifier le wikicode] Meuble Allemand Kommode de fĂ©minin Anglais dresser en, chest of drawers en, États-Unis bureau en Arabe ŰźŰČŰ§Ù†Ű© Ù…Ù„Ű§ŰšŰł ar Bosniaque komoda bs fĂ©minin EspĂ©ranto komodo eo Finnois lipasto fi Ido komodo io Italien comĂČ it masculin Japonais 簞珄 ja tansu NĂ©erlandais ladekast nl, commode nl Polonais komoda pl fĂ©minin Portugais cĂŽmoda pt fĂ©minin Russe ĐșĐŸĐŒĐŸĐŽ ru komĂłd masculin Serbe ĐșĐŸĐŒĐŸĐŽĐ° sr komoda fĂ©minin Slovaque bieliznĂ­k sk masculin TchĂšque komoda cs fĂ©minin Prononciation[modifier le wikicode] La prononciation \ rime avec les mots qui finissent en \ɔd\. France Ă©couter une commode [yn » France Toulouse Ă©couter commode [Prononciation ?] » France Ă©couter commode [Prononciation ?] » Homophones[modifier le wikicode] Commode Voir aussi[modifier le wikicode] Commode meuble sur l’encyclopĂ©die WikipĂ©dia RĂ©fĂ©rences[modifier le wikicode] Tout ou partie de cet article a Ă©tĂ© extrait du Dictionnaire de l’AcadĂ©mie française, huitiĂšme Ă©dition, 1932-1935 commode, mais l’article a pu ĂȘtre modifiĂ© depuis. Anglais[modifier le wikicode] Étymologie[modifier le wikicode] EmpruntĂ© au français. Nom commun [modifier le wikicode] Singulier Pluriel commode\kəˈməʊd\ commodes\kəˈməʊdz\ commode \kəˈməʊd\ Mobilier Commode meuble. DĂ©finition manquante ou Ă  complĂ©ter. Ajouter Par euphĂ©misme Toilettes, appareil sanitaire recueillant les besoins naturels. Construction Par euphĂ©misme Toilettes, piĂšce destinĂ©e Ă  faire ses besoins. Pot de chambre. Synonymes[modifier le wikicode] Toilettes, piĂšce ou appareil sanitaire 3, 4 → voir toilet Pot de chambre 5 → voir chamber pot Voir aussi[modifier le wikicode] NĂ©erlandais[modifier le wikicode] Étymologie[modifier le wikicode] Étymologie manquante ou incomplĂšte. Si vous la connaissez, vous pouvez l’ajouter en cliquant ici. Nom commun [modifier le wikicode] commode \Prononciation ?\ Commode meuble. Synonymes[modifier le wikicode] ladenkast Prononciation[modifier le wikicode] Pays-Bas Ă©couter commode [Prononciation ?] »

Onen trouve Ă  7000 ,10000 ,et plus ,je parle bien de commode d'Ă©poque et pas de copies ,alors on ne sais plus ce que cela vaut ,sur Ebay il y'en a eu une Ă  14000€ ,invendu . Message 9 sur 39 derniĂšre rĂ©ponse. 0 Utiles RĂ©pondre. commode bordelaise acajou de cuba 18eme. severus9. Membre eBay (4 feedbacks) Objets en vente. Options. Marquer comme

Le jeu simple et addictif CodyCross est le genre de jeu oĂč tout le monde a tĂŽt ou tard besoin d’aide supplĂ©mentaire, car lorsque vous passez des niveaux simples, de nouveaux deviennent de plus en plus difficiles. Plus tĂŽt ou plus tard, vous aurez besoin d’aide pour rĂ©ussir ce jeu stimulant et notre site Web est lĂ  pour vous fournir des CodyCross Se dit d’un objet utile et commode rĂ©ponses et d’autres informations utiles comme des astuces, des solutions et des astuces. Ce jeu est fait par le dĂ©veloppeur Fanatee Inc, qui sauf CodyCross a aussi d’autres jeux merveilleux et dĂ©routants. Si vos niveaux diffĂšrent de ceux ici ou vont dans un ordre alĂ©atoire, utilisez la recherche par indices ci-dessous. CodyCross Transports Groupe 115 Grille 5PRATIQUE
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